Noms communs : Aubépine, Aubépin, Cenellier, Epine blanche
Nom latin : Crataegus monogyna, C. laevigata, C. oxyacantha
La santé, telle une plante, se cultive
Noms communs : Aubépine, Aubépin, Cenellier, Epine blanche
Nom latin : Crataegus monogyna, C. laevigata, C. oxyacantha
Extrait du « Traité Pratique et Raisonné des Plantes Médicinales Indigènes » de F.-J. CAZIN, 1868
Épine blanche, — blanche épine, — sable épine.
Rosacées. Fam. nat. — Icosandrie Diandrie. L.
Cet arbrisseau, très-commun, forme à lui seul plus des deux tiers des haies.
[Description. — Arbrisseau très-rameux et épineux. — Feuilles glabres, luisantes, plus ou moins profondément lobées. — Fleure blanches ou roses disposées en corymbes, d'une odeur très-agréable. — Etamines nombreuses insérées sur le calice. — Les fruits sont petits, ovoïdes, d'un beau rouge, couronnés et non entièrement recouverts par le calice, ils contiennent deux graines nommées nucules.
Parties usitées — Les fleurs, les fruits.]
Propriétés physiques et chimiques. — Les fleurs répandent une odeur pénétrante, analogue a celle de l'amande amère. On y a découvert par l'analyse la présence de la propylamine. Par la fermentation des fruits on peut obtenir une espèce d'alcool. Les feuilles, douceâtres, contiennent quelques principes mucilagineux.
[La propylamine ou propyliaque est une ammoniaque composée, qui peut être représentée par de l'ammoniaque ordinaire dans laquelle un équivalent d'hydrogène est remplacé par un équivalent du radical alcoolique de l'alcool propylique = C6H7, soit pour la propylamine Az {C8H7 H H}
On la trouve dans la saumure du hareng, dans les fruits du sorbus acuparia et dans la vulvaire. Nous y reviendrons en parlant de cette plante.]
(Les baies sont légèrement astringentes. Elles sont fréquemment mangées par les enfants et ont souvent amené chez eux des constipations opiniâtres.
On pourrait les employer dans les dysenteries, les diarrhées, etc.
La fleur, prise en infulsion, a, parait-il, une action élective sur la gorge et spécifique contre l'angine simple. Prise au début, ce serait une plante abortive de cette maladie) (1).
(1) Ducrest, in Abeille médicale, 1863, p. 179.
Comprendre les études : interventionnelles (partie 2) : (abonnez-vous au podcast ici)
Etudes interventionnelles : deuxième partie de notre discussion sur les différents types d'études scientifiques, et donc petit mode d'emploi pour l'herboriste qui aimerait comprendre comment on structure la recherche. Je vous redonne le contexte. Au fil de ma pratique, j'ai été amené à beaucoup… farfouiller dans les bases de données d'études scientifiques pour tout ce qui a attrait aux plantes médicinales. Savoir lire ces études, c'est une compétence importante. Mais c'est pas un travail facile. J'ai donc décidé de vous expliquer, dans mes propres termes, pourquoi on a différents types d'études, à quoi elles servent, leurs avantages et limitations.
Je vous ai présenté une pyramide des études, qui positionne les études observationnelles en bas, les études interventionnelles au milieu, et les revues méta-analyses tout en haut, le tout classé par niveau de preuve croissant. J'ai défini ces deux termes "observationnel" et "interventionnel". Donc tout ça, on l'a fait en partie 1, voir premier épisode si vous ne l'avez pas encore regardé.
Dans cet épisode, on continue notre exploration de la pyramide.
On va donc monter au niveau 4, et à cet étage, on parle d'études expérimentales ou interventionnelles. Expérimentales, car on va mettre en place une expérience en laboratoire. Interventionnelle, car on va intervenir dans la vie des gens, on ne va pas juste observer, il y aura contact entre une équipe organisatrice et des individus sélectionnés pour l'étude.
Par exemple, on fait prendre à un groupe un extrait de feuille d'olivier pendant une période donnée, que remarquerait-on sur les taux de cholestérols sanguins ?
Si l'étude est bien faite, on va pouvoir prouver qu'une hypothèse est vraie avec un niveau de confiance statistique. C'est donc une preuve statistique et pas une preuve absolue. Une expression que vous entendrez très souvent, c'est que "les résultats sont statistiquement significatifs". Quasiment tous les résultats d'études vont mentionner ce point. Mais ça veut dire quoi, exactement, le fait qu'un résultat soit "statistiquement significatif" ?
Et là, désolé les amis, mais on va devoir se manger un peu de statistiques. Ceux qui sont allergiques aux maths, bouchez-vous les oreilles. En revanche, c'est incontournable.
Tout démarre d'une hypothèse, est-ce que vous vous souvenez ? On en a parlé lors du premier épisode. Et je dirais plus précisément, de ce qu'on appelle "l'hypothèse nulle". Pour arriver à l'hypothèse nulle, il faut partir de l'hypothèse qu'on aimerait démontrer, par exemple : "la reine-des-prés, prise pendant 4 semaines sous la forme d'un extrait liquide, réduit la douleur associée à l'arthrose du genou".
Eh bien, on va démarrer de la position dans laquelle il n'y a aucune relation entre prise de reine-des-prés et ce type de douleur. Ça, c'est l'hypothèse nulle. On ne va pas supposer qu'il y a une relation ici, on va supposer qu'il n'y en n'a pas. C'est un peu comme la présomption d'innocence, ici on doit partir de la présomption qu'un lien n'existe pas. Vous comprenez la philosophie ?
Et en fait, on va essayer de rejeter cette hypothèse nulle d'une manière statistique. Et pour faire ceci, on va utiliser un calcul statistique qui s'appelle la "valeur-p". Et les chercheurs vont vous donner la valeur-p lorsqu'ils vous disent "statistiquement significatif", pour prouver leur point.
Une valeur-p de 0 voudrait dire que l'hypothèse nulle est impossible. Une valeur-p de 1 voudrait dire que l'hypothèse nulle est certaine. Ces deux valeurs-là sont nos extrêmes, et en pratique, on n'a jamais de certitudes sur quoi que ce soit. Donc on va avoir des valeurs situées entre 0 et 1.
Cette valeur-p, c'est la probabilité que l'effet observé n'est pas dû à l'intervention, mais qu'elle est aléatoire. Si on a une valeur-p très faible, comme 0,0001 par exemple, ça veut dire que la probabilité est très très faible que les résultats soient dus à la chance. Donc la probabilité que les résultats soient dus à l'intervention est très élevée. Je sais pas si vous arrivez à comprendre la philosophie de travail ici.
Dans les études médicales, un résultat est considéré comme statistiquement significatif si la valeur-p est inférieure à 5%, c'est-à-dire p < 0,05. D'ailleurs, pour ceux qui se rappellent un peu des cours de statistique, ça veut dire que l'intervalle de confiance est de 95%. Si la valeur-p est égale à 0,02 par exemple, on est bon, c'est inférieur à 0,05. Si la valeur-p est égale à 0,07, là, ce n'est pas significatif. Plus la valeur est petite, plus c'est significatif. Donc on veut voir une valeur la plus faible possible, idéalement.
Sinon, les résultats ne seront pas statistiquement significatifs, et l'hypothèse nulle devra être acceptée. Notre hypothèse ne tient pas la route.
Parfois dans l'étude, vous allez voir apparaitre l'intervalle de confiance. Par exemple, on va vous dire que (et là, j'invente), grâce à une plante prise pendant une certaine durée, le score de douleur a diminué de 1,17. Mais l'information complète, c'est 1,17 avec, entre parenthèse, l'intervalle de confiance à 95%, c'est-à-dire des valeurs situées entre 1,05 et 1,31. C'est une autre manière de vous donner l'information dans ces études.
Bon, ça peut paraitre un peu compliqué, mais retenez ceci. Dans les études, on ne peut valider une hypothèse que d'une manière statistique, et on veut une valeur-p inférieure à 0,05 pour prouver que les résultats sont statistiquement significatifs. Et on doit vous donner ces valeurs dans l'étude. Au plus la valeur-p est faible, au moins les résultats mesurés sont dus à des phénomènes aléatoires, donc au plus ce qu'on a observé est dû à l'intervention. Donc un lien de causalité. Mais attention, ça ne veut pas dire que c'est significatif d'un point de vue clinique, et ça on y reviendra.
Je vous rappelle aussi ce que je vous ai dit dans la partie 1. Tout peut être manipulé. Ici, vous pouvez avoir des génies des tableurs Excel et des maîtres des statistiques qui peuvent vous faire apparaitre des résultats dans des sous-groupes de données bien sélectionnés. Comme expliqué, je décide de mettre les manipulations de côté dans cette discussion sinon ça vient tout nous polluer.
Bon, on va laisser les statistiques derrière nous, et on va revenir à la structuration de notre étude interventionnelle. Dans ce type d'étude, pour bien faire les choses, il vous faut en général 2 groupes d'individus. Le premier groupe subira l'intervention, et l'autre groupe subira soit un placebo, soit un autre type de contrôle pour avoir un point de comparaison.
Pour pouvoir montrer une efficacité de telle ou telle intervention, il faut pouvoir comparer à un groupe qu'on appelle "groupe contrôle" ou "groupe témoin". Donc là, on vient juste de définir ce qu'est une "étude contrôlée". Vous vous souvenez des biais que j'avais présentés dans la partie 1 pour les études observationnelles ? Eh bien là, grâce au groupe contrôle, on va pouvoir enlever ces facteurs de confusion. Car ils seront les mêmes dans les 2 groupes.
Pour la petite histoire, l'une des premières études contrôlées a été faite sur des personnes soufrant de tuberculose. On voulait tester l'efficacité d'un antibiotique, la streptomycine. Mais voilà, on savait qu'une partie des tuberculeux guérissaient naturellement, sans aucune intervention. Mais on ne voulait pas attribuer ces guérisons naturelles à l'antibiotique bien évidemment, cela aurait biaisé les résultats en faveur de la streptomycine. Grâce à la réflexion de certains statisticiens, on a décidé de faire 2 groupes, un groupe prenant la streptomycine, un groupe ne prenant rien. Et au fil du temps, on a pu comparer la mortalité entre les deux groupes et voir l'amélioration relative que la molécule apporte. Ainsi naissait l'étude contrôlée. Vous voyez l'avantage ?
Si on veut calculer les résultats absolus d'une intervention, on teste contre placebo. Si on veut calculer les résultats relatifs par rapport à un traitement de référence, alors le groupe contrôle prendra le traitement considéré comme de référence, et on verra si l'intervention est plus efficace que le standard. Par exemple, comparer une nouvelle molécule a une molécule existante considérée comme le standard du moment.
Mais attendez, comment allez-vous choisir les personnes pour chaque groupe ? Comment le faire d'une manière totalement objective, sans être soumis à certains biais ? Car l'humain sera toujours, consciemment ou inconsciemment, biaisé de différentes manières lorsqu'il va faire son choix, lorsqu'il va dire "cette personne va dans le groupe témoin" et "cette personne va dans le groupe intervention".
On a donc ce qu'on appelle des "biais de sélection", et on peut avoir un biais de volontariat aussi, lorsqu'on fait appel à des volontaires. Par exemple, une étude de 1974 démontre que les fumeurs répondaient moins aux questionnaires envoyés par la poste que les non fumeurs. Si on avait fait une étude qui implique des questionnaires envoyés par la poste à un échantillon de personnes, on aurait eu, sans le savoir, une sous-représentation des fumeurs. Biais de volontariat (1).
Dans les études interventionnelles, on a deux types de designs possibles : l'étude non-randomisée, et l'étude randomisée.
Dans une étude non-randomisée, c'est l'humain qui décide qui va dans quel groupe.
Il y a, en général, une raison pour ce choix. Par exemple, on veut peut-être étudier l'efficacité d'un certain antibiotique pour un type de personne et un type d'infection. Il faut bien faire un choix ici, telle personne semble présenter les bons symptômes, donc le médecin responsable va choisir d'inclure cette personne dans le groupe expérimental.
Mais du coup, ça introduit un biais, c'est comme ça. Et c'est pour cette raison que ce type d'étude comporte des limitations, et ne sera pas considérée comme fiable aujourd'hui.
Dans l'étude randomisée, on sélectionne d'une manière aléatoire, le terme "randomisé" est un anglicisme. On utilise des outils informatiques pour faire ce travail. Et on enlève donc tout biais de sélection de la procédure. On fait un tirage au sort. On s'assure donc que le groupe intervention et le groupe contrôle sont plus ou moins similaires d'un point de vue santé, données socio-économiques, etc.
Vous vous souvenez au premier épisode, on parlé de toute une liste de biais qu'on retrouve dans une étude observationnelle. On avait parlé du biais du participant en bonne santé, du biais de performance dans lequel si vous m'observez, je vais faire mieux que d'habitude, etc. Eh bien avec le tirage au sort, on va se retrouver avec les mêmes biais dans les deux groupes, en moyenne. Et donc on va pouvoir éliminer ces biais.
Dernier point pour l'étude expérimentale, va-t-on faire du simple aveugle, double aveugle ou beaucoup plus rarement, triple aveugle.
Le but ici, c'est d'enlever des bais qui pourraient introduire un effet placebo ou nocebo, des termes dont je vous ai déjà parlé dans d'autres épisodes.
Imaginons la scène suivante. Je dois tester une formulation liquide à base de plantes. Dans le groupe placebo, on a un premier liquide qui est sans goût, sans odeur, sans couleur. De la flotte quoi. Dans le groupe expérimental, on a un liquide qui a un goût très amer et qui sent fort. A votre avis, ça introduit un biais ou pas ? Est-ce que ça va fausser les résultats ? Eh oui, bien sûr. On n'a pas aveuglé l'étude d'un point de vue des participants.
Imaginons un autre scène. La gentille personne en blouse blanche, employée par les organisateurs de l'étude (donc elle ne fait pas partie des deux groupes, elle fait partie de l'équipe admin) distribue des petites fioles à prendre. Elle sait exactement ce qu'il y a dans ces fioles, si c'est un placebo ou la substance active. Et pour certaines fioles, sans le faire exprès, elle fait une certaine gestuelle, comme si elle tenait quelque chose de précieux dans ses mains. Ou peut-être, elle va plus s'intéresser au groupe qui prend la substance active. En fait, elle va donner un signal aux participants, sans le savoir, sur le contenu de la fiole. Ça introduit un biais. On n'a pas aveuglé l'étude d'un point de vue des organisateurs.
Simple aveugle signifie que les participants ne savent pas ce qu'ils prennent, si c'est la substance active ou le placebo.
Double aveugle signifie que ni les participants, ni les organisateurs, ne savent ce qu'ils prennent ou ce qu'ils donnent.
Et triple aveugle veut dire que même les analystes des données, ceux qui vont faire les calculs statistiques, ne savent pas si le premier groupe ou le deuxième groupe a pris la substance active ou le placebo. Ceci est rarement mis en pratique.
Aujourd'hui, ce qui est considéré comme la référence, c'est l'étude randomisée en double aveugle contre placebo.
Globalement, aujourd'hui, on arrive à faire du double aveugle en élaborant un bon placebo. Lorsqu'on prend une substance en interne, il faut que le placebo ait la même apparence, même couleur, odeur, goût. Et surtout, il faut que des deux côtés, expérimentateur et participant, on ne puisse pas voir au travers des effets immédiats de la substance. Il faut que ce soit à s'y méprendre, sinon c'est pas un bon placebo.
Et il existe quelques situations pour lesquelles c'est compliqué de créer un placebo. Prenons l'exemple de la recherche actuelle sur les substances psychédéliques a des fins médicinales, disons la psilocybine extraite des champignons psilocybes. Les équipes ne savent pas quoi utiliser comme placebo. Pour l'instant, ils ont utilisé de la vitamine B3 qui, prise à forte dose, provoque des sensations de chaleur et fourmillement (2). Mais globalement, on est loin de l'effet d'une macro dose de psilocybine. Donc là, le problème, c'est pas de faire une gélule placebo qui ressemble à une gélule de psilocybine, ça c'est facile. C'est d'avoir des effets similaires dans les heures qui suivent. Et là, personne n'est dupe, on s'aperçoit vite de qui a pris la psilocybine bien dosée, on parle de modifications de l'état de conscience assez marquées.
Parlons de la randomisation en clusters. Nouveau terme pour vous, nouvel anglicisme, un cluster, c'est un groupe de participants. Là, on ne va pas randomiser au niveau du participant, mais au niveau d'un groupe d'appartenances. On peut être amené à faire ceci pour deux raisons.
La première, c'est le fait que l'intervention que l'on veut examiner s'applique au niveau d'un groupe, d'un centre, d'un praticien. Par exemple, on a une étude de 2006 qui évalue l'impact d'une formation donnée aux médecins généralistes pour améliorer la prise en charge du psoriasis (3). L'intervention s'applique donc au niveau du médecin, et on va randomiser au niveau du cabinet avec 165 cabinets pour 531 médecins. Bien que l'évaluation de l'intervention se faisait au niveau du patient. Donc là, d'un point de vue statistique, vous vous en doutez, il y a des petites choses à faire pour jongler entre individu et cluster.
La 2e raison, c'est le risque de contamination ou d'effet troupeaux entre le groupe contrôle et le groupe intervention. Imaginez que vous vouliez étudier l'impact de la consommation de tisanes de romarin sur les résultats de QCM de math dans un lycée. Il vous faut un groupe contrôle dans lequel rien ne change, et un groupe intervention dans lequel vous allez demander au lycéen de boire une tisane de romarin tous les jours à la cantine. Oui, je sais, idée farfelue, mais supposons. Vous randomisez 100 élèves dans la même école, 50 dans le groupe contrôle, 50 dans le groupe romarin. Cette étude est supposée durer 2 mois.
Mais au bout de quelques jours, les élèves du groupe contrôle regardent ceux du groupe intervention avec envie, en se disant "eh oh et moi, pourquoi j'y ai pas droit ? ben tiens, je vais me préparer mon propre thermos et je l'amène tous les jours avec moi". Contamination. Ou alors, largement plus probable, les élèves du groupe contrôle regardent le groupe intervention en disant "regarde-moi ces losers qui boivent leurs tisanes de mémé", et du coup certains élèves du groupe intervention ne vont plus boire la tisane par pression sociale. Contamination. Là, il faudra randomiser au niveau des lycées, et pas au niveau des élèves. Certains lycées distribueront les tisanes de romarin à tous leurs élèves, et d'autres continueront sans changement. Et on est d'accord, tester un pack de M&Ms sera largement plus simple que la tisane.
Parlons maintenant des études croisées, qu'on appelle aussi études "cross-over". Dans une étude interventionnelle classique, je vous rappelle qu'on avait un groupe intervention qui prendra la substance active, et un groupe contrôle qui prendra en général un placebo, les deux étant séparés.
Dans un plan d'étude croisée, toutes les personnes prendront les deux, la substance active et le placebo, mais pas en même temps. Le groupe A prendra la substance active, le groupe B prendra le placebo pendant une période. Puis on va inverser, parfois après une période de pause qu'on appelle "washout", pour que les personnes reviennent à un état "normal" avant de passer à la deuxième phase, dans laquelle le groupe A prendra cette fois le placebo et le groupe B prendra la substance active.
L'un des avantages majeurs, c'est de travailler avec un groupe de personnes plus petit, car chaque personne agira à la fois comme témoin de la substance active et comme témoin du placebo. Donc ça va coûter largement moins cher, et donc c'est un design que vous allez voir de temps à autre dans notre monde des études sur les plantes, car les gros budgets, nous on n'en a pas. Il y a un autre avantage, c'est moins de variabilité entre le groupe traitement et le groupe contrôle vu que ce sont les mêmes personnes. Je suis mon propre contrôle !
Bien sûr, il y a des inconvénients aussi, le fait que le traitement ne peut pas trop avoir d'inertie dans le temps sinon je ne peux pas constituer un bon contrôle après avoir pris le traitement. On ne doit pas avoir de conditionnement de l'individu qui aura peut-être appris des choses et changé son hygiène de vie pour la 2e phase, etc. Je ne vais pas m'attarder sur ces points, trop long, mais ils existent. Cela dit, c'est un design que vous verrez régulièrement pour les études sur les plantes.
Un autre point important au sujet des résultats, c'est de savoir si on parle d'améliorations relatives ou absolues. Et là, on est souvent manipulé sur ce point-là. Allez, un exemple. Imaginons qu'on ait une plante, ou un médicament, qui diminue la mortalité cardiovasculaire dans un échantillon. On va vous dire, et là j'invente, cette molécule diminue de 33% la mortalité. Waouh.
Regardons les chiffres. Dans le groupe placebo, on a eu 3 morts d'accident cardiovasculaire. Dans le groupe expérimental, on a eu 2 morts. OK, donc effectivement, réduction de 33%. Oui mais la taille de l'échantillon, c'était quoi ? Eh ben, c'était 1200 individus. OK, donc on est passé de 3/1200 à 2/1200, avec un gain de 1/1200, c'est-à-dire de 0,08%. C'est largement moins excitant ça. Eh oui, mais ça, c'est le pourcentage d'amélioration absolue. C'est bien de connaître les deux. Vous sentez le soufflet qui redescend un peu, là.
Encore une discussion qui en vaut le détour : est-ce que cette étude est significative d'un point de vue clinique, c'est-à-dire d'un point de vue pratique d'accompagnement d'individus dans le besoin. Cette étude, si elle a été publiée, elle sera significative statistiquement.
Je vais inventer un exemple. Imaginons qu'on étudie l'effet d'une plante sur la tension artérielle chez la personne hypertendue. On donne au groupe intervention un extrait sec très concentré, la prise se fait pendant 3 mois, puis on mesure les résultats. On voit qu'en moyenne, au départ, les individus du groupe intervention avaient une tension systolique moyenne de 14,7 et là, on est passé à 14,5, un résultat considéré comme statistiquement significatif dans cette étude qui avait employé un gros échantillon de personnes. OK, mais d'un point de vue clinique, passer 3 mois avec un produit concentré qui sera cher à fabriquer, et cher pour l'utilisateur, et gagner 0,2 de systolique, c'est pas super excitant. On a de meilleurs outils.
En revanche, on avancera simplement ce point "statistiquement significatif" comme si ça voulait dire "cliniquement significatif". Mais en fait non. Parfois, on peut observer des résultats qui sont très significatifs d'un point de vue clinique, pour s'apercevoir qu'on n'est pas arrivé à montrer que c'est statistiquement significatif, parce qu'on n'avait pas recruté assez de personnes. Et ça, c'est très frustrant. Ceci dit, ce qui est très commun, c'est plutôt l'inverse, c'est statistiquement significatif, mais c'est pas très excitant cliniquement.
Et je vais faire mon petit mea culpa au passage, c'est quelque chose que je n'ai pas assez fait dans le passé, j'ai été un peu trop rapide à brandir le terme "résultats significatifs" sans préciser cette évaluation de l'utilité clinique. Je m'engage à m'améliorer sur ce point-là.
Bon, vous avez maintenant un résumé de ce que sont les études interventionnelles, à un niveau assez élevé, croyez-le ou non. Parce que sous le capot, mes amis, il y a tout un monde de complexité dont je ne soupçonnais pas l'existence il y a quelques années. En parlerons-nous un jour ? Je ne sais pas, peut-être.
Ceci dit, on prend l'ascenseur… enfin plutôt les escaliers, c'est meilleur pour la santé… vers le dernier niveau, le 5 s'il vous plait.
Au niveau 5, nous avons les revues systématiques.
C'est un travail de collecte, d'évaluation critique et de synthèse des connaissances existantes sur un sujet donné. On va rechercher toutes les études existantes d'une manière exhaustive, en retenir certaines et pas d'autres basé sur des critères de qualité. Puis on va décrire tout ce que l'on sait, comment on pense que ça fonctionne, les recommandations pour la pratique, les inconnues et des recommandations pour la recherche future.
Donc, lorsque c'est bien fait, cela nous donne l'état de la science actuelle sur tel ou tel sujet. J'aime beaucoup ces papiers. Du moins lorsqu'ils sont bien faits. Le sujet peut-être précis, par exemple, l'utilité du gingembre chez l'enfant souffrant du mal des transports. Ou beaucoup plus large, par exemple, les thérapies complémentaires dans la gestion des états de fatigue.
Exemple, une revue systématique de 2008 sur l'aubépine dans les cas d'insuffisance cardiaque (4). La revue nous dit que dans la plupart des études sélectionnées, l'aubépine a été donnée en complémentarité des traitements conventionnels. On voit que la tolérance à l'exercice est augmentée. Amélioration de la consommation du muscle cardiaque en oxygène, amélioration de la fatigue et du sentiment de souffle court. Tout ceci statistiquement significatif. Je sais ce que vous allez me demander… non, je n'ai pas essayé de déterminer si c'était cliniquement significatif. Là, il faudrait que j'aille voir dans les résultats détaillés de l'étude, pas juste dans l'abstract (c'est-à-dire le résumé d'accès gratuit). Là je voulais juste vous donner un exemple de revue systématique.
En général, au minimum, ces papiers sont très éducatifs pour le lecteur. Comme je vous disais, c'est un état des lieux. Lorsque je tombe sur une revue systématique sur un sujet qui m'intéresse, je trouve que c'est riche en informations.
Allez, on finit par le dernier niveau. Tout en haut de la pyramide, à la pointe, on a la fameuse "méta-analyse".
C'est du travail statistique. On ne va pas monter une expérimentation, on ne va pas organiser une nouvelle étude interventionnelle ou observationnelle. Ici on va juste combiner les données existantes qui se concentrent sur le même phénomène, sur la même question.
Chaque étude va recevoir un poids, et le poids dépend de la taille de l'échantillon (donc du nombre de participants) et de la précision statistique. Et l'une des manières de présenter ça dans la méta-analyse, c'est ce qu'on appelle en anglais un "Forest Plot".
C'est une série de points, la taille du point représente la taille de l'échantillon. Et une barre autour du point qui représente l'intervalle de confiance. Voici un lien vers une description de ce que tout ceci signifie.
Une étude avec beaucoup de participants et une grande précision statistique pèsera plus lourd dans la méta-analyse que d'autres.
Donc on combine les différentes études avec différents poids et on va calculer un résultat final, c'est comme si on transformait cette somme d'étude en une seule étude. C'est un outil qui peut être assez puissant pour prendre des décisions de santé publique, car justement, on a une vue d'ensemble de l'efficacité de telle intervention, à tel dosage moyen, pour telle population. C'est pour ça que vous voyez la méta-analyse tout en haut de la pyramide.
Mais on le sait aujourd'hui, si on fait une méta-analyse basée sur des études et des données qui sont de mauvaise qualité, alors le résultat sera à l'image des études utilisées. Là encore les américains ont une expression : "Garbage in, garbage out". Si à l'entrée, on a des études poubelle, à la sortie, on aura une méta-analyse poubelle. Donc il va falloir que l'équipe fasse un travail vraiment très bon de sélection des études. Mais ce n'est pas forcément tout le temps le cas.
Parfois, on peut avoir une seule étude randomisée et contrôlée, donc au niveau 4, qui se trouve donc en dessous de la méta-analyse dans la pyramide, mais qui est de meilleure qualité et qui nous en dit plus qu'une méta-analyse sur le même sujet, qui est au-dessus car la méta-analyse aura dilué cette excellente étude dans tout un tas d'autres études de moins bonne qualité.
Donc vous l'avez compris, la pyramide nous fournit un guide pour le niveau de preuve, mais cela ne peut pas devenir une vérité absolue, il y a toujours une marge d'interprétation, d'erreurs. Le monde scientifique, dans tous ses meilleurs aspects, a fait de son mieux pour éliminer le plus de biais possibles. Mais il en restera toujours. Et on est jamais à l'abris de l'incompétence humaine. Et pour les confits d'intérêts, souvenez-vous, j'ai volontairement mis de côté pour garder une discussion la plus épurée possible.
Allez, je vous fais un petit résumé avant de vous laisser.
Au départ, on a une hypothèse qu'on aimerait tester. Cette hypothèse est souvent née d'observations. Une étude de cas, c'est une observation. Au fil du temps, on peut avoir des cas qui s'accumulent et on peut faire une série d'études de cas.
Mais à un moment donné, on va vouloir passer à un échantillon plus grand pour avoir quelque chose de statistiquement représentatif. Ici on a les études de cohortes, rétrospectives ou prospectives, longitudinales ou transversales. On est toujours dans l'observationnel. On tire des corrélations de grands nombres. C'est bien les corrélations, c'est intéressant, ça nous donne des pistes. Mais n'oublions pas les facteurs confondants qui viennent semer la pagaille. On en avait parlé dans la partie 1. On ne peut pas prouver la causalité.
A un moment donné, on voudra faire une étude interventionnelle, en général randomisée en double aveugle, qui pourra, on l'espère, démontrer un lien de causalité d'une manière significative d'un point de vue statistique, mais aussi, idéalement, d'un point de vue pratique et clinique.
Lorsqu'on a un certain nombre d'études qui s'accumulent au fil des années, des décennies, il serait bon d'avoir une revue systématique ou une ou plusieurs méta-analyses pour avoir une équipe qui vient nous faire un résumé de tout ce qu'on a, d'un point de vue qualitatif ou quantitatif et statistique.
Chaque niveau de la pyramide a son rôle à jouer. Il n'y a pas de bon niveau ou de mauvais niveau. Juste une bonne manière d'utiliser les conclusions, ou une mauvaise. Le piège principal, c'est d'induire une causalité lorsqu'il n'y en avait pas.
Je vais m'arrêter là. Je sais, ça fait beaucoup d'informations. Si le sujet vous intéresse, allez-y par phases. N'oubliez pas que l'apprentissage est un processus itératif. Il faut souvent en mettre plusieurs couches pour que le vernis prenne. Et dites-vous aussi que c'est un très vaste sujet et là, on a juste commencé à grattouiller la surface !
Sur ce, je vous dis à très bientôt pour un prochain épisode dans lequel on reviendra aux plantes, ne vous inquiétez pas.
(1) Seltzer CC, Bosse R, Garvey AJ. Mail survey response by smoking status. Am J Epidemiol. 1974 Dec;100(6):453-7. doi: 10.1093/oxfordjournals.aje.a112057. PMID: 4447109.
(2) Hovmand OR, Poulsen ED, Arnfred S, Storebø OJ. Risk of bias in randomized clinical trials on psychedelic medicine: A systematic review. J Psychopharmacol. 2023 Jul;37(7):649-659. doi: 10.1177/02698811231180276. Epub 2023 Jul 4. PMID: 37403379; PMCID: PMC10350724.
(3) Griffiths CE, Taylor H, Collins SI, Hobson JE, Collier PA, Chalmers RJ, Stewart EJ, Dey P. The impact of psoriasis guidelines on appropriateness of referral from primary to secondary care: a randomized controlled trial. Br J Dermatol. 2006 Aug;155(2):393-400. doi: 10.1111/j.1365-2133.2006.07354.x. PMID: 16882180.
(4) Pittler MH, Guo R, Ernst E. Hawthorn extract for treating chronic heart failure. Cochrane Database Syst Rev. 2008 Jan 23;(1):CD005312. doi: 10.1002/14651858.CD005312.pub2. PMID: 18254076.
Réglementation plantes médicinales 2023, 2e partie : (abonnez-vous au podcast ici)
Réglementation plantes médicinales 2023, 2e partie.
Bonjour ! Que se passe-t-il aujourd'hui dans le monde de l'herboristerie en France d'un point de vue juridique et réglementaire ? Est-ce qu'on avance ? Est-ce qu'on recule ? Est-ce qu'on stagne ? Est-ce qu'on est en train de se rouler les pouces ? Et pour répondre à ces questions, j'ai le plaisir d'accueillir deux personnes qui ont été très impliquées au travers de leur syndicat, de leur fédération, dans les différents dossiers qui nous intéressent. Audrey Benavent et Thierry Thevenin sont avec nous. Audrey est secrétaire générale et porte-parole du Syndicat Simples, qui regroupe des productrices et producteurs de plantes médicinales qui suivent un cahier des charges respectueux de la plante, de l'environnement, de l'humain. Et Thierry est président et porte-parole de la Fédération des Paysans Herboristes, la FPH, qui a pour but de promouvoir la reconnaissance de la profession de paysanne ou paysan herboriste et de lui permettre d'avoir les moyens d'exercer pleinement son métier.
Cette interview fait suite à une première partie dans laquelle je vous ai fait le tour d'horizon de la situation depuis 2018 et le démarrage du projet Labbé au Sénat. Si vous n'avez pas encore regardé cette première partie, je vous conseille de la regarder maintenant parce que ça va vous donner tout le contexte et surtout une idée de la complexité des dossiers desquels nous allons parler aujourd'hui.
Dans cette première partie je vous avais expliqué comment on démarrait ces différents projets, quelle était l'impulsion politique à l'origine de tout ça et aujourd'hui on va se concentrer sur les avancements de ces projets et puis aussi les perspectives futures. Alors j'aimerais qu'on aborde avec nos invités quatre points importants aujourd'hui.
J’aimerais qu’on aborde, avec nos invités, 4 points importants :
Audrey, Thierry, comment ça va aujourd'hui ?
Thierry : Très bien.
Audrey : Ça va, merci.
Vous êtes tous les deux installés là, avec un très beau fond de bouteilles et de flacons, j'aime beaucoup le décor. Vous avez vu, on n'a que des questions faciles aujourd'hui.
Thierry : c'est pas un décor !
Merci de nous rappeler, ce n'est pas un décor, c'est un vrai espace de travail, c'est un vrai atelier chez Thierry. Donc c'est parti, première question. J'avais donné mon point de vue sur le fait que ce colloque de 2019 nous avait vraiment rassemblés, qu'il a donné une énorme impulsion à la création de nouvelles associations, de nouveaux groupes de travail. Il n'y aura pas de proposition de loi à ce stade et il n'y a pas de parlementaires qui ont repris le dossier que portait Joël Labbé. Ça, on le sait aujourd'hui. Toi Thierry, qui a été si moteur dans toutes ces discussions, comment est-ce que tu vois la situation aujourd'hui ? Est-ce que tu es plutôt confiant ? Est-ce que tu es plutôt inquiet ? Quelle est l'ouverture vers les années qui arrivent ?
Thierry : Moi je suis toujours confiant. Je crois que ça fait partie de mon trait de caractère et je crois que c'est de quoi être confiant et en même temps je suis toujours vigilant et toujours aussi un peu impatient. Parce que je trouve que ce colloque par exemple, a permis de beaucoup avancer dans le rapprochement des individus. On va en reparler, mais ces groupes de travail dont tu parles sont beaucoup issus de cette journée-là, qui était elle-même l'aboutissement d'un travail. Mais je veux dire, ça se rapproche beaucoup au niveau des individus, entre les médecins, entre les pharmaciens, les producteurs, les écoles, les gens qui font la transmission. Toute cette chaîne, en fait, de métiers, de compétences se réunit, se parle, et a envie de travailler ensemble, et a envie de faire bouger des choses. Et puis, en même temps, l'impatience, c'est parce qu'on est toujours devant la même citadelle d'un système qui est sclérosé, qui est hors sol, qui se rend pas compte que la société, que le monde est en train de bouger, qui a la trouille, et qui essaie de tenir des vieux schémas qui sont un peu moyenâgeux, à mon avis, Donc voilà, c'est à la fois beaucoup de confiance parce qu'on sent bien que ça ne peut pas faire autrement et que ça bouge.
Mais c'est notre société, elle a toujours avancé comme ça. Les lois, c'est le reflet de ce qu'une société exprime. Et à un moment donné, quand une majorité ou même une forte minorité de gens se met à avoir une pratique, une façon de vivre, change les choses dans sa manière de vivre, les gouvernements, les lois, suivent. Mais c'est des suiveurs. Et bon, voilà, comme je suis pas quelqu'un de forcément toujours très patient, et ben, je me dis, mais… J'ai l'impression des fois que c'est… On avance, mais c'est un peu comme l'âne et la carotte, là. C'est une espèce d'image d'Epinal où, pour faire avancer l'âne, on lui met une carotte devant le nez, il avance et la carotte recule forcément en même temps qu'il avance. Et ben, voilà, c'est un peu le sentiment que j'ai, donc... Confiant, mais impatient.
D'accord. Et c'est vrai que l'une des carottes que tu as mentionnées plusieurs fois, que je pense que l'équipe politique a mentionné plusieurs fois aussi, c'était la possibilité de refaire vivre nos campagnes, le monde rural, parce que c'est vrai qu'on en parle beaucoup ces dernières années. Au travers de la plante médicinale, on pourrait redonner cette impulsion de refaire vivre ce monde rural. Est-ce qu'en soi, ça serait une motivation suffisante comme carotte pour faire avancer justement ces dossiers-là ?
Thierry : Il y a des choses concrètes et toutes bêtes. Moi, quand je me suis installé en limousin en 1990, j'étais seul. Bon, il y avait Jean Maison, le Comptoir d'Herboristerie, qui existait aussi depuis quelques années, qui lui faisait plutôt du négoce. Je vais peut-être pas lui faire plaisir, mais bon, quand même, globalement, majoritairement du négoce. On était deux, quoi. Aujourd'hui, on ne se connaît même pas tous, on ne connaît même pas tout le monde, tellement on est nombreux. Donc oui, les campagnes, et là encore, c'est pas une volonté des pouvoirs publics, c'est pas les aménageurs du territoire qui font ça, c'est la population. C'est les 100 000 personnes qui, chaque année, quittent la ville pour s'installer à la campagne. En ce moment, là où ça bouge, là où il y a de la créativité, de l'espoir, de la dynamique, de la joie et de la prospérité, c'est vers la campagne. Alors c'est des petites pousses. C'est moins impressionnant que des gros gratte-ciels ou que des grands nœuds d'autoroutes. Mais il y a une vitalité sociale et économique absolument incroyable dans les campagnes. L'herboristerie s'en est un des éléments, une des facettes. Comme il y a des paysans boulangers, comme il y a de la culture, il y a des théâtres, il y a des artistes. C'est bouillonnant le monde rural depuis une vingtaine d'années et chaque année davantage.
Merci Thierry, du coup on va maintenant parler du dossier des plantes libérées et en vente libre par des non-pharmaciens. Le but c'est d'ouvrir largement plus des 148 plantes du décret de 2008 parce qu'on a de nombreuses plantes qui sont inoffensives et qui pourraient être rajoutées à cette liste. Alors la FPH a monté un groupe de travail pour établir un dossier sur de nouvelles plantes. Est-ce que vous pourriez nous parler de ce travail ? C'est quoi ce groupe de travail ? Comment ça s'est monté ? Quelles sont les fonctions qui ont participé à ces discussions ? Ça dure depuis combien de temps ? Et quels sont les challenges que vous avez rencontrés dans ce travail ?
Audrey : Je pense que tu peux peut-être commencer.
Thierry : Oui, pour faire l'historique. En fait, c'est une vieille idée qui est très ancienne. La Pharmacopée avait été révisée en 2005. C'est là où les 148, finalement, c'est là l'origine de la vie des 148 plantes. Donc c'est une vieille idée. Ça fait longtemps qu'on réclame l'élargissement de la liste, donc maintenant c'est connu, depuis 20 ans, on ne comprend pas pourquoi le calendula ou plantain ou l'aubépine sont dans le monopole, donc c'est une vieille idée. Ça a vraiment pris corps ce groupe à la suite du travail de Joël Labbé qui a permis de rassembler ces acteurs, qu'en fait on se rend compte qu'en fait on a des intérêts communs et qu'on n'est pas plus incompétents les uns que les autres et qu'on n'a surtout pas forcément envie de se faire disparaître les uns les autres. C'est ça l'intérêt de la rencontre. Et donc on s'est réunis, c'est un groupe vraiment pluridisciplinaire, du monde de la pharmacognosie, donc des enseignants-chercheurs qui travaillent vraiment sur les substances médicinales et pharmaceutiques, des médecins de terrain, phytothérapeutes, des représentants des écoles, des gens qui font de l'enseignement autour de l'herboristerie, les producteurs, qui font de la vente directe, et qui donc, du fait qu'ils sont interpellés par leurs clients sur les usages des plantes, sont bien obligés de s'intéresser et de communiquer par rapport à ces usages-là. Voilà, tout un panel, en fait, toutes ces professions on s'est réunis, et on a essayé de voir, parmi la liste des plantes de la pharmacopée, lesquelles, à notre sens, devaient être libérées, parce qu'il n'y avait franchement pas de raison sanitaire, sécuritaire, il y avait seulement l'idéologie, parce qu'il y a quand même un problème d'idéologie du monopole qui existe dans cette histoire. Mais voilà, des plantes comme le plantain ou comme le bleuet, on ne comprend pas. Surtout qu'en plus on sait très bien qu'elles ne sont même pas vraiment disponibles dans le monde de la pharmacie. Donc on s'est réunis et chacun avec ses compétences, chacun avec ses arguments, on a monté tout un dossier. Donc pas loin d'une centaine d'espèces pour lesquelles on a proposé la sortie du monopole en argumentant, en épluchant la pharmaconutrition ou la pharmacovigilance, en épluchant les allégations qu'il peut y avoir, anciennes, modernes et tout à fait contemporaines. On a fait un travail d'évaluation de toutes ces plantes-là et ça, ça a pris à peu près trois ans de travail avec des réunions quasiment mensuelles, donc c'est un gros travail, avec chaque fois au moins une quinzaine, entre 15 et 20 personnes présentes Et tout ce travail-là est sur le bureau de l'ANSM depuis maintenant trois ans. Donc c'est sous forme de propositions étayées, avec des gens qui ont des parcours, des origines, des diplômes et des compétences tout à fait différentes. Mais c'est vraiment quelque chose de solide, c'est un travail solide. Le seul hic, ça paraît un détail, c'est rien, c'est que c'est jamais à l'ordre du jour. Alors à la décharge de l'ANSM, donc l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé, ils ont effectivement beaucoup de dossiers très lourds à gérer. Il y a eu la crise du Covid, il y a eu plein de choses. Ils sont certainement pas assez nombreux pour faire face à tout ce qu'on leur demande de faire. Et donc évidemment, nous, on est un peu sous la pile du dossier. Et ça fait trois ans qu'on essaie de faire remonter notre demande, quand même, qui représente un travail conséquent, citoyen, bénévole, tout ça a été fait en bénévolat, a été fait à la force du poignet. Nous on veut vraiment, il n'y a pas beaucoup de réunions, ça doit être deux réunions par an, mais on attend vraiment avec la plus grande impatience que ça soit enfin examiné à l'ordre du jour et bien sûr on espère que ça soit pris en compte positivement.
Audrey : Et après, ce qui était intéressant, c'était aussi de s'être basé sur la pratique des producteurs, à la fois des producteurs en vente directe, mais aussi des herboristeries de comptoir, de voir quelles étaient les plantes qui étaient encore dans le monopole pharmaceutique. Et donc, ça s'était basé sur l'étude de l'enquête qui avait été menée à la FPH sur un peu quelles plantes étaient vendues aujourd'hui par les producteurs, les paysans herboristes, pour arriver à travailler sur ces plantes-là. Donc on les a passées vraiment une par une avec le groupe de travail. Chacun en apportant sa petite pierre et sa manière de voir la plante au travers de son activité. Et c'est vrai que c'était quand même des moments riches d'échanges et constructifs.
Thierry : On ne voulait pas partir nulle part. L'idée, ce n'était pas un caprice de dire, moi, par exemple, Thierry Thévenin, je ne peux pas vendre de plantain et ça m'embête parce que j'aimerais bien faire un peu plus d'argent. Ce n'était pas ça. C'est partir de la réalité du terrain pour dire aujourd'hui, cette centaine de plantes là, elles sont largement consommées par la population. S'ils ne la trouvent pas à la pharmacie, ils n'ont pas le droit de trouver chez les producteurs. De toute façon, ils iront sur Internet quitte à le faire venir, je dis n'importe quoi, du Portugal ou du Maroc ou des Etats-Unis, de toute façon, c'est une réalité sociale. Les gens consomment ces plantes-là au quotidien. Donc l'idée, c'était vraiment de proposer une remise à niveau, un reset, quoi. Un peu comme on a fait dans la pharmacopée, refaire une réforme pour que ça corresponde à la réalité du terrain. Et c'est vrai que cette enquête, c'était un travail absolument formidable qui avait été fait et qui montre bien qu'il y a effectivement une consommation... Il y a une espèce de top 50, c'était comme... comme dans les tubes. On voit très bien quelles plantes aujourd'hui les Français consomment et on se rend compte que ce n'est pas en adéquation avec les listes telles qu'elles sont actuellement.
C'est ça. Et puis dans votre groupe de travail, vous aviez aussi tous les experts qui vont s'assurer que vraiment on connaît, on maîtrise toutes les contre-indications et qu'on place la barre vraiment très haut d'un point de vue protection de la santé publique parce qu'on sait que ça va être une des problématiques majeures lorsque les administrations vont revoir cette liste de plantes. Eux, ils vont être très conservateurs de ce point de vue-là. Et vous, de votre côté, je suppose que vous avez aussi essayé d'être très conservateur. Vous avez vu que tout ça allait arriver pour lister, bien sûr, toutes ces contre-indications, précautions à prendre, etc.
Évidemment qu'on fait ce métier-là, ce n'est pas pour envoyer les gens aux urgences ou les rendre malades. C'était le souci partagé par tout le groupe de travail, producteurs, pharmaciens, médecins ou enseignants, c'était de faire des propositions qui ne mettent pas la population en danger.
Audrey : Et pour certaines plantes qui, dans le groupe, pouvaient présenter des contre-indications éventuelles, on avait proposé aussi d'assortir la libération de la plante d'une mention éventuellement qui précise ses restrictions d'usage, ses limites. Et ça nous paraissait cohérent par rapport aux demandes des consommateurs et à la fois d'avoir des plantes de qualité disponibles sur le marché facilement et des plantes dont ils peuvent se servir en toute sécurité en assortissant d'une petite recommandation, une restriction d'usage pour bien préciser le contexte d'utilisation.
Oui, c'est ça. D'ailleurs, ça commence à faire le pont avec le dossier allégation dont nous allons parler très prochainement. Donc, à ce stade, vous, vous avez fait votre maximum d'investissement pour ce dossier là. Il a été remis aux autorités de santé. Moi, ça me paraît très frustrant de se dire maintenant, il a pénétré le grand flou. C'est à dire qu'on ne sait pas à quel moment il va être considéré, il va être revu. On n'a vraiment aucune visibilité là dedans.
Audrey : Non. Aujourd'hui, on n'a aucune réponse et aucun retour de la part de la ANSM par rapport à ce dossier. Et quand bien même Thierry a expliqué qu'on a conscience que ça reste aussi une poignée de personnes qui sont bien occupées sur plein d'autres sujets, on est impatient de pouvoir avoir, voir une avancée.
Thierry : tout ce qu'on peut faire, c'est ce qu'on est en train de faire là, c'est toc toc, toc toc.
Audrey : C'est de rappeler.
Thierry : Oh oh, on est là. On a travaillé.
On va donc attendre avec impatience et je pense qu'on peut passer du coup au dossier suivant qui est le dossier sur les sur les allégations. Alors est-ce que vous pourriez un petit peu nous aider à y voir plus clair dans ce dossier là et nous expliquer ce que vous êtes en train de faire à la FPH et ce qui va être fait on l'espère du côté de l'administration ?
Audrey : En effet, comme tu le dis, le dossier sur les allégations de santé et nutritionnelles, parce que ça va un peu ensemble, il a été défini dans un règlement qui est européen et qui est bien séparé de tout ce qui est démarche monopole pharmaceutique qu'il a et quelque chose de franco-français. Donc là, c'est vraiment un règlement européen qui a été mis en place en 2006 pour arriver à préciser le cadre d'utilisation des allégations de santé. Suite à ça, il y a eu un dépôt de plusieurs milliers de propositions d'allégations de santé pour certaines plantes, certaines parties de plantes, par les industriels de l'agroalimentaire, et au niveau européen ces allégations elles ont été examinées et il y en a plus de la moitié qui ont été refusées parce que les conditions pour accepter une allégation de santé reposaient uniquement sur des critères scientifiques donc études cliniques, randomisées, double aveugle, etc. Des choses dont on ne dispose pas pour la plupart des plantes puisque la plupart des données que l'on a sont issues de la tradition et la tradition n'est pas reconnue, n'est pas un critère retenu ou en tout cas pour valider les allégations de santé. Donc ça fait depuis, je vais pas dire de bêtises, mais 2011 ou 2012 que ces allégations qui ont été proposées par le monde industriel ont été mises en attente. Et depuis, on peut les utiliser, donc pas forcément que pour les compléments alimentaires, Donc n'importe quel denrée alimentaire peut bénéficier d'une allégation de santé, mais dans le cadre d'un peu de ce catalogue d'allégations de santé en attente. Et aujourd'hui, comme ça n'a pas évolué au niveau européen, la France, la DGCCRF, donc les fraudes au niveau français, ont essayé de reprendre le dossier en main parce qu'eux, on va dire un peu sur le marché, ils ont pu voir l'utilisation d'allégations de santé parfois un peu décalées, notamment dans le dans le monde de l'industrie agroalimentaire et ont voulu faire un peu du propre et pouvoir permettre à leurs contrôleurs de pouvoir aller contrôler sur le terrain sur la base d'un, on va dire un peu d'un référentiel. Et donc ils ont repris les allégations de santé en attente au niveau européen qui sont des allégations qui sont en anglais. Ils ont fait une traduction au travers d'un traducteur automatique. Et après, ils ont épluché ces traductions de manière à mettre en évidence tous les termes qui pouvaient être thérapeutiques, ou flous, ou qui pouvaient concerner de la cosmétique et pas du tout des aliments, ou bien qui étaient trop imprécis. Et ils ont produit du coup un tableau Excel qu'on peut trouver sur le site de la DGCCRF et qui recense toutes les allégations de santé en attente que l'on pourrait utiliser avec les conditions d'utilisation. Vous trouverez dans ce tableau des allégations qui sont surlignées en bleu quand les termes sont thérapeutiques, qui sont surlignées en violet quand ça concerne des allégations de santé. Et pour ces termes-là, on n'a pas le droit d'utiliser l'allégation telle quelle, on doit les reformuler. Donc le travail des producteurs, notamment au niveau de la Fédération des Paysans Herboristes, ça a été de fournir à la DGCCRF un peu un travail d'argumentaire pour pouvoir, sur certains termes qui, nous, nous paraissaient fondamentalement importants à conserver et qui étaient jugés par la DGCCRF comme thérapeutiques, par exemple, essayer de fournir un argumentaire pour avoir le droit d'utiliser ces termes. Donc ça, ça a été un gros morceau qui nous a occupés pratiquement deux ans et où on a réussi à gagner règles douloureuses, qui étaient des termes qu'on, en théorie, dans les allégations de santé, du point de vue de la DGCCRF, qui n'est pas spécialiste du sujet, mais qui avait besoin de se créer son outil pour pouvoir clarifier les choses sur ce sujet là, et bien a été considéré comme thérapeutique. Donc ça a été quand même un travail, je sais pas, de fourmis et puis avec parfois le sentiment de se dire, c'est ubuesque en fait d'avoir à négocier ce genre de termes. On n'a pas eu, par exemple, tout ce qui est rhume et tout, on n'a toujours pas le droit de l'utiliser, c'est considéré comme de la pathologie.
Thierry : voilà, c'était le syndrome Covid, à l'époque, la toux, c'était pas possible.
Audrey : c'était pas possible, donc ça, par exemple.
Thierry : c'était le mauvais moment. Peut-être qu'il n'y aurait pas eu cette crise sanitaire-là, peut-être qu'on aurait eu ça, mais là c'était impossible. Il y a beaucoup d'idéologies.
Audrey : Et en effet, aujourd'hui, on a le droit d'utiliser ces allégations de santé pour n'importe quel denrée alimentaire, que ce soit de la plante sèche, du complément alimentaire, mais aussi, je ne sais pas moi, un cake aux olives aromatisé au romarin, si on voulait. Mais avec des conditions d'utilisation qui ne sont quand même pas sympas et qui sont hyper contraignantes. Donc aujourd'hui, si je veux utiliser une allégation de santé sur un de mes produits, déjà, par exemple, sur une tisane, je dois remettre tout le tableau nutritionnel. Je ne sais pas si tu vois, c'est protéines, énergie, lipides, acides gras, sel. Sucre, etc.
Thierry : On sait très bien que dans une tisane, les lipides, le sel et les acides gras, il y en a des tonnes.
Audrey : Donc ça, c'est assez ubuesque.
Thierry : On fait un tableau en mettant zéro, zéro, zéro.
Audrey : et on doit rajouter une mention, un peu comme les compléments alimentaires, que le produit doit être utilisé dans le cadre d'une alimentation variée et équilibrée, une hygiène de vie saine. Si je veux utiliser ma... si je vends ma tisane en l'appelant Doux Rêve, par exemple, je dois... Doux rêve c'est trop imprécis, considéré comme trop imprécis par la DGCCRF, je dois ajouter une allégation spécifique qui est reliée à l'une des plantes de mon mélange. Par exemple, la mélisse favorise la détente du système nerveux, en restant toujours dans ce contexte un peu physiologique, en n'utilisant jamais de termes thérapeutiques, en ne précisant aucunement que ça peut prévenir, traiter ou guérir une maladie.
Donc là, insomnie par exemple, interdit.
Audrey : Ah, insomnie c'est interdit. Voilà, ça favorise le sommeil, c'est comme ça maintient une fonction physiologique normale de l'organisme. Et donc ça, c'est l'une des contraintes, c'est toutes ces mentions obligatoires qui se rajoutent pour pouvoir utiliser une allégation de santé. Et après, là où on est en train de se bagarrer, où pour l'instant on n'a aucune idée de comment on va être... comment on va être contrôlé, quelles exigences vont nous tomber sur le dos, ça va être sur la justification parce que je peux utiliser les allégations de santé du tableau mais il va falloir que je les justifie. Chaque opérateur est responsable de pouvoir justifier une allégation. Si je veux dire que la mélisse est digestible, il faut que j'arrive à avoir une pile d'ouvrage pour pouvoir justifier que la mélisse est digestive. Et ça, c'est des choses qui, pour l'instant, ne sont pas encore calées avec les DGCCRM. On est encore en discussion et on a participé encore récemment à des discussions avec les bureaux à Paris pour pouvoir avancer nos arguments et proposer notre liste d'ouvrages pour ne pas que les ouvrages se limitent à des sources hyper scientifiques, que sont les monographies au niveau européen ou au niveau français de la pharmacopée, par exemple, que des ouvrages comme des ouvrages de Pierre Lieutaghi puissent être source de justification des allégations de santé, par exemple. Et ensuite, l'autre sujet qui va être un peu épineux, c'est pour tout ce qui concerne les mélanges de plantes. La problématique par rapport au mélange, c'est que si j'ai un mélange menthe et verveine pour la digestion, la menthe bénéficie d'une allégation de santé, mais la verveine non, pas pour la digestion. Et du coup, là, ce qui est encore assez incertain, c'est comment la DGCCR va considérer ces mélanges. Est-ce qu'ils vont nous obliger à avoir une dose minimale pour pouvoir utiliser l'allégation et là du coup on se retrouve avec une usine à gaz et un gros pataquès pour pouvoir utiliser des allégations de santé qui sont somme toute parfois assez grotesques. Je veux bien citer mon allégation de santé, j'avais regardé un peu dans le tableau et du coup par exemple pour l'ortie on a des allégations qui sont de l'ordre de "aide à soutenir une vie cardiovasculaire consciente" ou bien pour l'épilogue "augmente la résistance physiologique de l'organisme en cas de conditions d'ambiance". Alors Quand on voit toutes les contraintes pour pouvoir utiliser des allégations de santé qui aujourd'hui sont plus ou moins compréhensibles par le consommateur et pertinentes sur le plan de ce qu'on connaît des vertus des plantes, c'est vrai qu'il y a de quoi se sentir parfois découragé, j'avoue. Donc nous, notre travail, c'est de continuer les discussions avec les autorités pour leur faire remonter un peu ces incohérences. et puis surtout leur faire comprendre que du point de vue de la sécurité du consommateur, on a besoin de pouvoir avoir des allégations qui sont précises et qui sont, on va dire, les plus compréhensibles possibles pour que les personnes puissent utiliser les produits de manière adéquate.
Thierry : en essayant de ne pas faire un nivellement par le bas, parce que des fois c'est la tentation pour simplifier les choses. Et là aujourd'hui, on a quand même une population, en tout cas une grande partie de la population, qui n'est pas celle des années 80, qui aujourd'hui consomme des plantes, connaît des plantes, cultive, suis régulièrement les informations sur Althea Provence, s'informe, lis. Donc on ne veut pas non plus que ce soit un truc vraiment ultra basique et une demande par le bas. Il faut quand même que ça corresponde aux pratiques sociales et que ça soit en adéquation avec ce qu'il se passe réellement sur le terrain.
Si j'ai bien compris, ce n'est pas parce qu'on a une allégation physiologique dans le tableau téléchargeable, ce n'est pas parce qu'elle est utilisable qu'on ne doit pas la justifier. Même si elle est là dans le tableau utilisable, il faudra quand même, s'il y a contrôle, pouvoir la justifier. Moi, je pensais que du coup, si c'était dans le tableau, c'était déjà préapprouvé, mais non.
Audrey : et si toi tu la justifies, Thierry doit la justifier aussi, et moi je dois la justifier aussi.
Thierry : c'est un gâchis d'énergie et de temps, mais phénoménal ! Il y a eu quand même énormément d'argent public qui a été mis pour que des gens passent des plombes à travailler sur ces listes en attente et proposer quelque chose, et bien ce n'est pas suffisant. Et si encore on pouvait partager nos justifications, ça va être chacun dans notre coin. Mais bon, c'est vrai dans un tas de segments de notre société. On doit justifier de tout, et ça frise le ridicule effectivement.
Mais vous, vous allez les mettre en commun au travers de, je ne sais pas si c'est au simple ou à la FPH, vous allez centraliser...
Thierry : C'est notre proposition.
Audrey : C'est la proposition qu'on fait, et là il y a un outil sur lequel on travaille depuis un peu plus d'un an, qui s'appelle la base de données qu'on a appelée BADASSE, base de données sur les allégations de santé simples et efficaces. Et badasse c'est le petit clin d'œil à la fois à la plante et aussi au côté de l'attention un peu, comment on peut dire, dur à cuire.
Thierry : la badasse je pense que toi qui es provençal tu sais ce que c'est, c'est le thym des parias, c'est le teint des fonds. Pour nous, cette base de données, c'est justement pour éviter les confusions, les mésusages et ne pas se tromper entre la badasse et le véritable thym. Il y a cette idée là derrière, c'est ce clin d'œil à ce que les plantes c'est bien, mais il faut quand même avoir un petit peu de transmission correcte pour ne pas être comme le parisien qui arrive dans la colline et qui ramasse une plante qui n'a rien à voir avec le thym.
Audrey : et puis c'est aussi surtout pour mutualiser et qu'on ne se retrouve pas tout seul à devoir justifier qu'en cas de contrôle on puisse avoir accès à des sources bibliographiques que tout le monde n'a pas dans sa bibliothèque et qui puissent faciliter le travail d'utilisation des allégations par les producteurs. Donc c'est un outil qui est fait par et pour les producteurs de plantes en vente directe et qui est en cours de finalisation avec des formations qui sont associées pour pouvoir comprendre un petit peu, c'est vraiment complexe ce sujet des allégations, et on adorerait que ça soit plus simple que ça, mais aujourd'hui ça ne l'est pas. Et donc il y a des formations qui sont proposées par Simples pour utiliser cet outil qui a été créé par la FPH. Donc je trouve que c'est un beau travail de synergie. Et du coup qui sera disponible courant début 2024.
Mais ça alors, l'outil a été soumis aux administrations pour leur dire voilà ce qu'on a, approuvez-le, donnez votre tampon ?
Thierry : c'est notre espoir.
Audrey : ils n'approuveront jamais parce qu'ils n'ont pas la possibilité de valider des outils qui sont proposés par les opérateurs mais en tout cas c'est l'idée de prendre un rendez-vous avec la DGCCRF pour leur montrer face à une problématique qui est quand même complexe et qui nous met dans une difficulté, nous les petits producteurs, voilà la démarche collective qu'on peut proposer pour pouvoir essayer de favoriser la mise en conformité parce que c'est pas… Ce n'est pas l'idée de faire en sorte que les producteurs déjouent la réglementation, c'est plutôt d'essayer de les aider à comprendre et d'utiliser au mieux. Et en même temps, ça ne nous exonère pas de continuer le combat parce que ces allégations, la plupart sont quand même assez ridicules, ne sont pas appropriées. Il en manque. L'allégation sur la digestion pour la verveine, ce serait quand même fondamental qu'on arrive pouvoir la revendiquer. Et ça, cette chose-là de revendication, elle ne se joue pas au niveau français, elle se joue au niveau européen. Et c'est là où il y a une autre difficulté qui s'ajoute, c'est qu'aujourd'hui, on arrive à se structurer et on essaye de travailler avec d'autres syndicats que sont, par exemple, le Synadiet, le syndicat des compléments alimentaires, ou le STEPI, le syndicat des thés et des infusions, pour pouvoir arriver à avoir un poids au niveau européen et essayer de, peut-être un jour, de proposer des nouvelles allégations pour des plantes qui n'en bénéficient pas aujourd'hui.
Thierry : finalement, si elle est franchement ridicule cette allégation, elle nous plaît bien, on essaye d'améliorer les conditions d'ambiance.
Je me gratte toujours la tête pour l'épilogue en train de me dire c'est quoi, c'est améliorer les conditions d'ambiance urinaire, c'est quoi l'idée, mais passons, fermons cette parenthèse. Donc là j'essaie toujours de comprendre votre position, c'est de dire les amis aux administrations, les amis à la DGCRF, on est dans une situation illisible pour nous, donc on prend les devants, on est en train de créer un outil avec nos propres fonds, voici ce que c'est, voici à quoi il ressemble, on partage une bonne conscience et qu'est-ce que vous en pensez ? C'est quand même d'obtenir un retour en moment et au fil du temps peut-être l'officialiser un petit peu plus et de leur dire aussi au secours pour les mélanges, au secours parce qu'on sait absolument pas comment appliquer vos lois.
Thierry : ça peut être contre-productif parce que si on reste très technocratique et sans bon sens on va être peut-être même obligé parfois pour être dans l'inégalité de surdoser une plante dans le mélange pour pouvoir utiliser l'allégation alors que c'est contre-productif pour le consommateur. Nous c'est des choses comme ça qu'on veut éviter.
Audrey : et après la base de données qu'on a construite, elle a bénéficié du soutien de France Agrimer donc on est content d'avoir chaque année le soutien de France Agrimer pour des projets comme ça où c'est quand même beaucoup de temps et d'énergie passé par les prestataires à qui on fait appel pour nous accompagner et on les remercie parce que sans ça on n'arriverait pas à faire ni ces enquêtes, ni ces bases de données ou autres guides qui nous permettent à nous de pouvoir mutualiser un peu les infos et faciliter le métier.
Thierry : Il y a plein de raisons d'espérer.
En tout cas bravo pour votre patience et votre persévérance parce que ce sont des dossiers qui sont d'une très grande complexité et qui sont timés au rythme de ce qui se fait en fait dans les gouvernements, les administrations. Nous on n'a pas l'habitude parce que souvent on travaille pour nous-mêmes et puis il faut que ça bouge vite mais là c'est juste une autre échelle de temps donc il faut s'adapter à ça. Bon bah du coup dernier volet de notre discussion alors on en arrive à ce fameux dossier métier : on avait vu au travers de la mission d'information qu'officialiser les métiers de l'herboristerie au travers de formations diplômantes allait être très compliqué. Chaque filière métier s'est orientée vers des modèles plus flexibles aujourd'hui. La FPH a choisi la voie du référentiel métier qui est géré par France Compétences. Ce n'est pas un diplôme, ça ne donne pas de droits. Mais c'est pourtant une étape importante dans la reconnaissance du métier de paysan, paysanne herboriste. Expliquez-nous ce que c'est ce référentiel métier. Pourquoi chercher à l'obtenir ? Quelles écoles vont le délivrer ? Et puis si moi je fais une de ces écoles et que j'obtiens ce certificat, d'accord, ça m'amène où en fait ?
Thierry : Donc un titre professionnel c'est quelque chose qui est construit, qui est certifié par une profession.
Thierry, quels centres de formation vont délivrer ce titre ?
Thierry : il y en a deux. C'est comme toujours, dès qu'il y a une nouveauté, il y a les startups et les requins qui sautent dessus. Quelques jours après la publication sur le site de France Compétences, Il y a des entreprises que l'on ne va pas citer parce qu'elles sont bien connues pour l'investissement du monde associatif et comment elles squattent les nouvelles idées, qui se manifestent auprès des producteurs, qui proposent des compagnonnages, paysans herboristes et tout ça. Tout ça, ça n'a rien à voir avec le titre. Les deux seuls centres de formation qui ont aujourd'hui passé des partenariats avec la FPH, pour pouvoir délivrer le titre soit sous forme de VAE ou dès l'année prochaine sous forme de formation. C'est deux CFPPA. C'est le CFPPA de Nyons dans la Drôme et le CFPPA de Montmorot dans le Jura. Donc les deux centres de formation historique qui ont un recul de dizaines d'années de formation sur les planques médicinales, en qui on a confiance et qui seront capables de faire un travail de qualité.
Audrey : et on pourra ouvrir aussi à d'autres organismes de formation plus tard, mais pour l'instant c'est énormément de boulot de mettre en place ces circuits de formation et la validation, la certification par la Fédération des Paysans Herboristes qui est propriétaire du titre.
Donc c'est vous qui validez, vous validez une école.
Audrey : c'est la Fédération des Paysan herboristes qui va valider les titres de chacun des candidats qui va se présenter à la formation.
Thierry : c'est ça l'intérêt d'un titre, c'est vraiment la profession qui maîtrise la qualité de l'enseignement, la nature de l'enseignement et la certification, on protège un peu notre métier. C'est vraiment très intéressant et certainement qu'à un moment donné, ça va faire peut-être un petit peu comme ce qui se passe au Canada où il y aura une forme d'accréditation. Parce que paysan herboriste, c'est pas un mot qui est brochetable, il faut pas les mots, moi je suis contre l'appropriation des mots, donc bien sûr plein de gens vont s'emparer du terme, mais ce type professionnel, peut-être il y aura, je sais pas encore, mais accrédité par la FPH, quelque chose dans ce genre-là, pour que le consommateur sache que ces gens-là, ils ont vraiment suivi une formation sérieuse et ils ont une vraie compétence telle que France Compétence l'a reconnue.
D'accord, donc on répète, décembre 2023, seulement deux CFPPA délivrent ce titre, le CFPPA de Nyons et le CFPPA de Montmoreau. Si l'école ne fait pas partie de ces deux-là, elle ne peut pas délivrer ce titre.
Thierry : Non, exactement.
Audrey : Pour l'instant.
Thierry : l'Etat supervise en disant, ok, cette profession-là, c'est des gens sérieux, qui ne représentent pas de danger pour la population. L'Etat reconnaît leur existence et reconnaît leurs compétences. C'est une forme de reconnaissance. Mais c'est ça qui est intéressant, c'est que ça a été voulu, construit, par la profession. En l'occurrence, on est vraiment dans le domaine de l'agriculture. Mais c'est quand même une avancée, parce que jusqu'à présent l'agriculture, et c'est encore largement le cas dans les syndicats dominants ou ministères, l'agriculture en France est d'abord des producteurs de matières premières, qui vont fournir l'industrie agroalimentaire, ou l'industrie des cosmétiques, ou l'industrie des boissons, je ne sais pas quoi. Mais c'est quand même, je pense, une des premières fois où France Compétences, donc les autorités, reconnaissent un métier, on est bien sûr une profession agricole, ce n'est pas une nouvelle profession de santé, on n'est pas des herboristes, on est des paysans herboristes. Mais donc, partent directement du sol, parce que c'est un métier agricole, soit de la cuisine sauvage, soit du jardinage à grande échelle, de la culture généralement artisanale, il n'y a pas de mécanisation agricole, par exemple, de choses comme ça. Mais jusqu'à la vente directe, et ça reconnaît aussi, et c'était une des préconisations du rapport sénatorial de 2018, c'est pour ça que je pense que ce rapport a eu beaucoup d'influence pour que France Compétences nous reconnaisse, ça a été une des premières renaissances officieuses des pouvoirs publics, c'est de prendre en compte le fait qu'il y a des savoirs traditionnels et des savoir-faire qui doivent être transmis au public, qu'on peut, pour les petits maux du quotidien, c'est ce que le Sénat avait employé comme terme, c'est les mots qu'ils avaient employés, qu'on puisse faire référence à des conseils, à l'information, qu'on puisse donner de l'information au public, pour éviter les mésusages, les accidents, et faire le meilleur usage possible d'un produit. Et ça c'est un peu nouveau, c'est presque... c'est un peu une forme de nouveauté, c'est une avancée quand même. Parce que le monde agricole aujourd'hui c'est toi tu produis, et c'est bon. Après nous on s'occupe de vendre, voire on s'occupe de transformer. Toi t'es producteur, point. On va t'aider d'ailleurs pour ça, il y aura des subventions. Nous on se trouvait vraiment comme un peu des gens qui n'existent pas vraiment, et avoir une grande difficulté à trouver une place et une case. parce qu'on est une des filières très dynamique, c'est sûr, il y a beaucoup d'installations, il y a une force dynamique, mais c'est une filière où justement il n'y a pas de subventions, il n'y a pas d'aide à la production, on n'est pas aidé, il n'y a pas de système PAC, donc on était un petit peu des enfants terribles et difficiles à caser, donc ça peut faire peur, il y a des gens qui se disent que ça fait peur dans la filière, ils se disent que maintenant qu'on est dans une case qui dit case dit aussi mur, cadre, Mais c'est aussi quand même une manière d'exister, de se sécuriser. Et je pense que plus longtemps on existera, plus longtemps on va démontrer que c'est pas forcément un drame pour la population, qu'il n'y a pas de catastrophes humanitaires, qu'on va pas faire disparaître la moitié de la population. Moi je pense que c'est aussi une manière d'entrer dans le paysage, de dire, oh on est là, on existe, la France a besoin de nous, la France nous aime, et on l'aime aussi. C'est quelque chose comme ça.
Waouh ! Génial ! Génial ! Je pense, sauf si tu veux nous rajouter un petit quelque chose Audrey, je pense que ce sont de très jolis mots peut-être pour clore notre discussion aujourd'hui. En tout cas, moi je voulais vous remercier tous les deux, je voulais aussi remercier vos syndicats, vos fédérations, parce qu'en fait ce que vous faites depuis plusieurs années maintenant, vous nous ouvrez des portes. Et nous, on représente d'autres professions, donc on n'est pas nécessairement directement concerné. Mais en fait, si on l'est quand même, parce que des bonnes plantes, on en a besoin pour faire nos métiers. C'est un peu la fondation de toute la pratique des métiers de l'herboristerie. Et puis surtout, comme je disais, vous nous ouvrez des portes et je pense qu'un jour on va profiter de cette ouverture pour venir apporter nous aussi nos petites graines dans nos métiers respectifs. Et puis pour ceux qui nous écoutent, c'est pour ça que c'est tellement important de soutenir ces syndicats et ces fédérations. Donc on va continuer à vous aider du mieux possible. Merci.
Audrey : Merci beaucoup.
Thierry : Merci Christophe. A bientôt.
A bientôt.
Réglementation plantes médicinales 2023 : (abonnez-vous au podcast ici)
Bonjour.
Que se passe-t-il aujourd'hui, en France, dans notre petit monde de l'herboristerie, d'un point de vue réglementaire ? Est-ce que les choses bougent ? La réponse est oui.
Je m'apprête à interviewer 2 personnes qui vont nous aider à faire le point sur les différents dossiers en lien avec les plantes médicinales et l'herboristerie. Ces deux personnes représentent des syndicats et fédérations qui ont été moteurs ces dernières années, qui ont fait un énorme travail pour faire avancer les choses. Les avancées se situent plutôt autour des métiers de la production et de la vente de plantes. Pour l'instant, les autres métiers sont en attente, car... une étape à la fois. Mon métier de praticien, par exemple, ne sera pas inclus dans ces 2 parties de la discussion, on en reparlera peut-être une autre fois.
Mes 2 invités sont Audrey Benavent (interview - site) et Thierry Thévenin (interview - site). Audrey est secrétaire générale et porte-parole du Syndicat SIMPLE, un syndicat qui regroupe des productrices et producteurs de plantes médicinales. Thierry est président et porte-parole de la Fédération des Paysan-ne-s-Herboristes, la FPH, une fédération qui a pour but de promouvoir la reconnaissance de la profession de paysan.ne herboriste.
Avant d'interviewer ces deux personnes, je voulais vous faire un résumé des discussions politiques et réglementaires de ces dernières années, telles que j'ai pu les comprendre. Autant vous dire que ce n'est pas chose facile, car je n'ai pas été autant impliqué que des personnes comme Thierry. D'un autre côté, je pense que c'est peut-être aussi un avantage d'avoir été à la périphérie et d'essayer de vous donner une vision la plus simple possible. Et vous allez voir, on a des dossiers qui sont parfois un peu incompréhensibles vu de l'extérieur.
Si vous avez l'intention de travailler dans le monde des plantes, je pense que vous allez apprécier cette discussion. Si vous n'avez pas l'intention d'en faire une activité professionnelle, mais que vous nous soutenez, s'il vous plait, restez avec nous, j'espère que vous allez écouter jusqu'au bout, pour comprendre le système dans lequel on essaie de faire notre travail.
Avant de démarrer, sachez que je ne suis pas un juriste. Et je ne suis certainement pas un politicien. On va parler de dossiers juridiques, je vais vous donner pas mal d’informations, mais s'il vous plait, allez toujours valider avec un juriste compétent en la matière, ne prenez pas ce que je dis au pied de la lettre.
Allez, vous êtes prêts à venir vous griller quelques neurones avec moi ?
On va démarrer avec l'historique des discussions politiques à partir de 2018. Je ne vais pas remonter plus loin, ça serait trop compliqué.
Tout démarre avec un contact entre un producteur, militant et représentant de notre cause, Thierry Thévenin, avec un sénateur, et pas n'importe quel sénateur. On parle de celui qui est à l'origine de l'interdiction des désherbants, d'abord dans la sphère privée, puis ensuite dans les collectivités territoriales, les communes et les établissements publics. La "loi Labbé" est bien connue aujourd'hui. Le sénateur, c'est Joël Labbé. Thierry demande au sénateur s'il veut bien porter le dossier et la cause de l'herboristerie. Labbé accepte le projet, qu'il considérera comme significatif de son 2e mandat.
Et on ne peut pas parler de Joël Labbé sans parler de Fanny Duperray, sa collaboratrice parlementaire, qui a fait un travail titanesque de coordination et de participation dans les différents groupes de travail.
Ceci nous mène à la mission d'information au Sénat qui débute en avril 2018. Elle est intitulée "Mission d'information sur le développement de l'herboristerie et des plantes médicinales, des filières et métiers d'avenir". Alors… quelques explications… quand un parlementaire veut porter un projet compliqué et en faire, peut-être un jour, des propositions de loi, il démarre parfois avec une mission d'information pour exposer la situation. Pour dire "voilà Messieurs Dames, ne pensez-vous pas qu'on a une problématique à résoudre ?"
Une mission d'information, ce n'est pas rien, ça consomme du temps et des ressources du Sénat, donc un sénateur ne va pas proposer une mission comme ça à la légère. Il faut que le projet soit considéré comme important.
L'idée de la mission d'information, c'était de faire ressortir les opportunités et les défis de la filière, les complexités, les incohérences, les frustrations des différents acteurs, la possibilité de faire revivre des métiers disparus. Cette commission a été très instructive, on en a beaucoup parlé dans nos cercles. Plus de 200 auditions au total (certaines n’ont pas été enregistrées, donc officiellement, on parle de 36 auditions, mais en pratique il y en a eu beaucoup plus), une centaine d’acteurs sollicités avec des producteurs, cueilleurs, gérants d'herboristerie, pharmaciens, médecins, universitaires, chercheurs, industriels. Des auditions, des tables rondes, des visioconférences et de deux déplacements en région. Ces échanges ont permis de mettre à jour des situations parfois un peu ubuesque, il faut le dire, au sujet de la pratique de nos métiers.
Quelques mois plus tard, fin septembre 2018, le Sénat produit un rapport qui vient boucler la mission d'information. Ce rapport contient 39 propositions, organisées par thématiques. Je vous mets le lien vers le rapport sur mon site, c'est un rapport très instructif. D'ailleurs, je vais vous mettre tout un tas de liens intéressants dans l'article associé à cet épisode.
Le rapport est signé à l'unanimité par tous les membres de la commission. C'est fort comme message. La seule proposition qui n’a pas fait consensus, c'est celle concernant la reconnaissance des métiers de l'herboristerie qui nécessiterait des formations reconnues par l'État et encadrées formellement. La commission a dû faire face à des réticences des représentants de certaines professions de la santé qui ont vu ici un risque pour la santé publique. Donc sur ce point-là, les recommandations ont été de "poursuivre les réflexions".
Arrive ensuite le colloque du 24 mai 2019 intitulé "Les métiers de l'herboristerie : état des lieux et perspectives" et organisé par Joël Labbé, au Sénat. Ce rendez-vous n’impliquait pas toute une équipe parlementaire comme la mission d'information. Joël Labbé était d'ailleurs le seul parlementaire qui s'est exprimé dans le colloque.
Le but du colloque, c'était de continuer l'élan de la mission d'information, de remettre tous ces sujets sur la table en faisant venir des représentants de chaque filière métiers, de montrer ce qui se faisait ailleurs dans d'autres pays. De continuer de parler de la problématique dans les médias.
On y a d'ailleurs entendu le témoignage d'Audrey, qui va être avec nous dans la 2ᵉ partie de cette discussion, témoignage qui était assez marquant et qui disait, en gros, "je suis jeune productrice, voici mon casse-tête quotidien pour répondre à toutes ces réglementations". Et pour la cosmétique particulièrement, le fait qu'on lui demande autant de paperasse que ce qu'on demanderait à une grosse entreprise comme L'Oréal.
Ce colloque a été clé, essentiel, fédérateur de toutes les forces vives de nos métiers en France. Il a fait que tous les gens ont été à fond dans les différents dossiers. On s'est tous un peu découverts ou redécouverts. On a eu envie de collaborer. Et quand je dis "on", ce n'est pas moi personnellement, car je n'y étais pas. Mais juste après le colloque, j'ai décidé de sortir de mon trou pour m'impliquer un peu plus.
La guilde des praticiens en herboristerie d’ailleurs, dont je fais partie aujourd'hui (j'en suis un des membres fondateur), n'existerait pas si on n'avait pas eu ce colloque. On a pu créer un dialogue apaisé entre les différentes fédérations, syndicats, associations. Peut-être même qu'un jour, on pourra évoluer vers une confédération qui chapeaute tous nos groupes et nos associations qui, bien qu’elles communiquent aujourd’hui, restent aussi un peu dispersées dans leurs objectifs… bon, ce qui est normal aussi.
Un petit coucou aussi, au passage, à une nouvelle association qui est en cours de création, "l'Association des Herboristeries de France" et qui a pour but de rassembler autour du métier de la vente et du conseil de plantes en boutique. Donc notre paysage commence à ressembler à quelque chose de cohérent ! La FPH pour les paysans-herboristes, l'association des herboristeries de France pour les boutiques, la guilde des praticiens pour le conseil et accompagnement individualisé. Désolé, j’en oublie, mais le message, c'est qu’on avance...
Retour au projet politique.
À l'heure actuelle, on sait qu'il ne sortira aucune proposition de loi de tout cet effort, pour différentes raisons, en particulier le fait que le mandat de Joël Labbé est terminé. On ne sait pas si ce dossier sera repris un jour par un autre parlementaire. De toute manière, si on recherche des nouvelles lois, on est juste au début du chemin, car on le sait bien, de toutes les propositions de lois qui viennent de l'assemblée ou du Sénat, très peu aboutissent. L'essentiel des lois qui aboutissent vient du gouvernement, qui a toutes les cartes en main pour faire passer des lois.
Ceci dit, nous avons les 39 propositions... et certaines ne nécessitent pas de nouvelles lois pour avancer. Donc autant vous dire que les différents groupes de travail n'ont pas chômé. Les propositions qui ont le plus avancé, ce sont celles qui sont en lien avec la production et la vente de plantes. On va parler de 3 avancées significatives avec Thierry et Audrey.
Je vais vous donner un petit résumé des 3 dossiers d'abord.
Premier dossier, les plantes libérées du monopole pharmaceutique.
Vous avez peut-être entendu qu'en France, 148 plantes, inscrites à la pharmacopée française, ont été libérées du monopole pharmaceutique et peuvent être vendues par des non-pharmaciens. Cette loi, ou du moins ce décret, date de 2008. Ces 148 plantes peuvent être vendues sous forme vrac, avec des possibilités très limitées de faire des allégations dessus. Ces deux points sont importants.
Vrac, ça veut dire un sachet de feuilles d'ortie ou de racines de bardane, non transformé. Donc vraiment une forme qui nous est chère dans nos valeurs d'herboristerie traditionnelle. Et encore, faut bien lire la loi, car les parties de plantes autorisées sont mentionnées aussi, par exemple, pour l'aubépine, en théorie, on peut vendre les fruits et pas les feuilles et les fleurs.
Ensuite, concernant les allégations, ça veut dire que je peux vous vendre mon sac de feuilles d'ortie, mais si vous me demandez à quoi ça sert, je dois utiliser des « réponses types » approuvées par les lois, et vous répondre, par exemple, que... L’ortie « Soutient l'utilisation de l'énergie corporelle ». Ça veut dire quoi ? J'en sais rien, ne me demandez pas. Mais on peut faire cette allégation. Ou encore, qu’elle « Aide à soutenir une vie cardiovasculaire consciente »... le sens de tout ceci, c'est "lost in translation", perdu au moment de la traduction de l'anglais au français. Autrement dit, si je vous vends la plante, je ne peux pas répondre clairement à vos questions : débrouillez-vous. Je ne peux pas indiquer toutes les propriétés librement. En particulier, si elles font référence à la prévention, le traitement ou la guérison d’une pathologie. Ça, c'est réservé à la profession médicale.
En pratique, est-ce que ceci est suivi et respecté à la lettre ? Comment font les vendeurs de plantes sur les marchés ou dans les boutiques ? Eh bien, ils font au mieux pour exercer leur métier, je n'en dirai pas plus.
Sachez que le décret précédent, qui datait de 1979, ne permettait de vendre que 34 plantes parmi lesquelles seulement 5 pouvaient être mélangées entre elles. Ce n'est plus le cas, le décret de 2008 n'aborde pas les mélanges, donc les mélanges ne sont plus interdits. Alors oui, pour faire des mélanges qui sont homogènes, bien formulés, avec des plantes qui ne se contredisent pas en action, c'est tout un art bien évidemment. Mais les mélanges sont autorisés.
Une précision importante, histoire d'en rajouter une couche : si une plante n'est pas dans cette liste des 148, mais qu'elle figure dans le livre Bleu du Conseil de l’Europe des “substances aromatisantes", alors, elle pourrait, en principe, être libre à la vente comme plante alimentaire. Ceci dit, le livre bleu n’a aucune valeur juridique, il n’offre pas la sécurité de pouvoir vendre des plantes en dehors des 148. Et puis le fameux livre bleu n'est plus réédité aujourd'hui, donc difficile à trouver, mais le syndicat Simples a mis la liste sur leur site. Je vous mettrai la référence dans mon article. Là encore, on nage dans le flou artistique.
Maintenant, accrochez-vous bien. Si vous vendez les plantes sous forme de complément alimentaire, c'est-à-dire gélules, ou ampoules, ou extrait liquide avec compte-gouttes, ou autre forme prédosée, le terme "prédosé" est important ici, donc le packaging et les recommandations sur la boite sont importants, alors vous pouvez vendre plus de 1000 plantes ! Vous m'avez bien entendu, plus de 1000.
Est-ce que vous pouvez vendre une magnifique échinacée, cultivée localement, forme vrac, 100 g des racines ? Non, ce n'est pas dans les 148 acceptées dans le décret de 2008. Et elle n'est pas non plus classée comme "aromatisante" dans le livre Bleu. Est-ce que vous pouvez vendre de l'échinacée forme gélules des racines et prédosée, avec des recommandations de dosages inscrites sur la boite ? Oui, c'est dans la liste des espèces végétales acceptées dans l’arrêté « Plantes » de 2014 pour renter dans la fabrication des compléments alimentaires.
La question que vous vous posez probablement, à ce stade : c’est quoi cette histoire tordue ?
Eh bien historiquement, ça s'est fait comme ça, avec 2 lois qui viennent de 2 directions différentes. Le décret des 148 plantes vient d’une réforme du Code de la santé publique de 2008. Cet élargissement s’est fait sous pression des lobbys de l’industrie de l’agro-alimentaire qui voulaient sortir du monopole pharmaceutique des plantes alimentaires comme le thym, le laurier, la menthe, etc. C’est une étape importante vers la fin du monopole pharmaceutique absolu. Jusqu’en 1941, ce monopole était partagé avec les herboristes certifiés. Pas diplômés, je précise, car en 1803, c'est un certificat qui est créé, sous la tutelle des facultés de pharmacies, pas un diplôme.
Bref. Ces herboristes pouvaient vendre toutes les plantes indigènes et acclimatées, à l’exception des plantes toxiques et stupéfiantes. Lorsque le certificat est supprimé en 1941, seulement 5 plantes restent en vente libre, ceci pour l’industrie du café et des limonadiers : tilleul, camomille, menthe, verveine et fleur d’oranger, et ce, jusqu’en 1979 où on obtient 34 plantes, puis le décret de 2008 ou on en obtient 148.
Laissez-moi maintenant vous parler de l’arrêté plantes de 2014, qui a listé au départ 541 plantes et permet aujourd’hui d'en vendre plus de 1000 sous forme de complément alimentaire. Cet arrêté a pour origine la loi compléments alimentaires de la Communauté européenne. Les forces vives derrière ce règlement, ce sont les sociétés qui vendent des compléments alimentaires - gélules et autres formes transformées. Donc ici, on a différents acteurs, un texte réglementaire différent qui arrive d'une direction différente, l'Europe, et qui fait qu'aujourd'hui, on se retrouve avec cette situation bizarre. Echinacée vrac, pas OK. Echinacée gélules ou teinture, OK.
En pratique, les petits producteurs et transformateurs doivent aussi se baser sur cet arrêté compléments alimentaires, et ont l’obligation d’utiliser ce statut (avec toutes les contraintes que ça engendre), pour la forme extrait hydro-alcoolique, qu'on appelle aussi teinture ou alcoolature. Pareil pour les gélules.
Donc plantes en vrac, c’est la loi 148 plantes. Plantes en teinture ou gélules ou autre type prépackagé et prédosé, c’est l’arrêté plantes de 2014.
Et juste pour votre information, sachez qu'on a des règles et des procédures encore différentes pour les produits à base de plantes vendus comme cosmétique (par exemple, un macérat huileux de fleurs de souci avec quelques gouttes d'huiles essentielles de lavande vraie). On a de beaux dossiers à monter et à soumettre pour ce petit pot fait d’une manière artisanale.
Et pour les huiles essentielles, alors là, c'est encore autre chose en fonction du positionnement du produit, est-ce qu'on est dans l'alimentaire, ou dans le cosmétique, ou dans le vétérinaire ou autre ? Donc la même huile essentielle, de camomille romaine par exemple, en fonction de ce qu'on inscrit sur la boite et des allégations qu'on veut faire, ça peut partir d'un côté ou de l'autre.
La tête vous tourne ? Bienvenue au club.
Mais revenons à notre dossier 148 plantes si vous le voulez bien. Parce que là, on est un peu parti dans des tangentes, mais je voulais vous montrer la complexité du système. On a un groupe de travail sur le sujet à la FPH. Car on a beaucoup d'autres plantes qui ne présentent pas de risques d'emploi. Le but de ce dossier, c'est de réexaminer cette liste et de l'augmenter avec de nouvelles plantes, pour que les producteurs, cueilleurs et boutiques aient plus de libertés.
Le groupe de travail est pluridisciplinaire, il a fait ses recommandations de nouvelles plantes à inclure dans la liste, ceci a été soumis à l’ANSM il y a 3 ans déjà. Audrey et Thierry vont nous faire le point sur ce dossier pour voir où on en est des discussions aujourd'hui, et vers quoi on pourrait tendre dans le futur.
Ensuite, dans les 39 propositions, certaines concernaient la possibilité de faire des allégations de santé lors de la vente de plantes, par des non-professionnels de la santé. Ces allégations pourraient figurer sur le sachet ou la boite, ou être données à l'oral lors d'une discussion avec l'acheteur potentiel, sur un marché ou en boutique. Donc la possibilité de vous vendre de l'ortie, et vous dire à quoi elle sert vraiment, sans jouer au médecin ou au pharmacien, sans entrainer de risque sur la santé publique.
Globalement, tout le monde s'accorde à dire qu'il faut donner aux vendeurs la possibilité d'accompagner l'acheteur du mieux possible sur l'utilisation du produit, sinon on ne rend service à personne. Il faut que ces allégations soient fondées sur la reconnaissance de leur usage traditionnel tout en intégrant les avancées des connaissances scientifiques. Il faut sortir de ce blocage et de cette hypocrisie, car on le sait, l'information sera échangée entre vendeur et acheteur de toute manière. Ça se fait aujourd'hui, mais ça se fait dans la crainte, l'incertitude de se faire attraper, ce n'est pas sain du tout.
Avant le travail qu'Audrey et Thierry vont vous présenter, la situation était complexe. En fait, la seule source d'allégation qu'on avait, c'était un registre Européen, créé en 2008 et qui accompagnait la loi sur les compléments alimentaires autorisés, avec une liste d'allégations qui est toujours "en attente". En fait, lorsque le registre a été créé au niveau de l'Europe, de très nombreux pays, de très nombreuses sociétés de compléments alimentaires ont soumis des tas de demandes d'allégations, avec les justifications. Près de la moitié ont été refusées faute de justificatif « scientifiques », c’est-à-dire avec des essais cliniques. Pas de place pour la tradition ici. Et si vous pensez que les autres, celles qui n’ont pas été refusées, ont été acceptées, détrompez-vous. Elles ont été marquées "en attente" et n'ont jamais été vraiment examinées. Ceci dit, c'est tout ce qu'on a aujourd'hui, et c'est l'une des sources officielles d'information, bizarrement. Même en France, les administrations de contrôle utilisent cette liste "en attente" lors des contrôles sur les produits.
Grâce à la contribution de la FPH et au travail de l’administration, et on parle ici de la DGCCRF, nous avons maintenant un registre d'allégation français, traduit (parfois un peu bizarrement), mais plus accessible, téléchargeable sous forme de tableur. Le lien se trouve sur mon site. Audrey et Thierry vont nous expliquer comment on va pouvoir utiliser cette liste d'une manière plus claire, s'il y aura un manuel d'utilisation, et les perspectives de l'enrichir d'une manière ou d'une autre.
Dernier dossier, celui sur la reconnaissance métier de Paysan-Herboriste avec tout le travail de la FPH.
On a vu que le rapport de 2018 n'a pas pu s'accorder sur la renaissance de métiers reconnus de l'herboristerie. Donc faute de diplômes et de formations reconnues par l'État, les différentes filières métiers et certaines écoles ont décidé de soumettre des référentiels métiers à France Compétence, sachant qu'un référentiel métier, ce n'est pas un diplôme, cela ne donne aucun droit, mais ça représente un premier pas vers une officialisation.
Ici, on fera le point avec Audrey et Thierry sur le fait que les paysans-herboristes ont obtenu acceptation de leur référentiel métier. C'est une grande nouvelle, on verra pourquoi. Je pense que Thierry nous dira pourquoi c'est une avancée stratégique. On parlera des écoles qui comptent mettre en place ce référentiel métier, le fait que l'école doit travailler avec la FPH. On ne peut pas s'improviser centre de formation paysan-herboriste. Là, on a une fédération métier qui est en train de placer la barre pour le métier.
C'est un modèle qu'on est en train d'adopter dans plusieurs associations, parce qu'on est convaincu que les plus grands défenseurs de la qualité d'un métier, ce sont souvent les gens qui l'exercent, avec passion, avec fierté. Certains diront que ce n'est pas un système parfait, mais donnez-moi un système parfait aujourd'hui, vous en connaissez ?
Avant de vous quitter, je vous rappelle que je vous ai mis plein de liens intéressants sur mon site, plein de bonnes lectures pour les longues soirées d'hiver. Et je termine cette discussion en vous disant que si vous voulez avoir une excellente vue du ciel des enjeux, de l’historique, des opportunités de l'herboristerie, je vous recommande vivement le livre de Thierry « Plaidoyer pour l'herboristerie ». Là encore, s’il y a quelqu’un qui a suivi l’évolution de toutes les discussions ces dernières décennies, c’est bien lui.
Et d'ailleurs, on va le retrouver très prochainement dans la 2e partie de cette discussion, avec Audrey Benavent, chez Thierry, à Mérinchal dans la Creuse, avec en fond ces étagères remplies de flacons et de bocaux que j'adore voir quand j'interviewe Thierry. J'espère que vous serez des nôtres ! À très bientôt !
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