Sarriette des montagnes : tonique et stimulante

Sarriette des montages : anti-infectieux, tonique et aphrodisiaque : (abonnez-vous au podcast ici)

Bonjour,

Je vais vous parler de ce que chez nous, on appelle le pèbre d’aï. Le poivre d’âne. La sarriette.

Il existe 2 espèces communes de sarriettes : la sarriette des jardins (Satureja hortensis), qui est une annuelle. Et la sarriette des montagnes (Satureja montana), qui pousse dans le sauvage chez moi, c’est un sous-arbrisseau comme le thym.

Basé sur les ouvrages classiques, les deux ont des propriétés interchangeables. C’est possible. Moi, c’est surtout la sauvage dont je vais vous parler, c’est celle que je connais bien.

Avant de démarrer, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Dans cet épisode, on va parfois parler de conditions qui sont de nature médicale et qui nécessitent donc une visite chez votre médecin pour un accompagnement approprié.

Et deuxième point, vous nous demandez souvent comment vous pouvez nous soutenir pour tout ce contenu gratuit qu’AltheaProvence met à votre disposition depuis 2010 et qui représente des milliers d’heures de travail pour moi et toute l’équipe. Voici un lien avec les explications , avec toute notre gratitude.

sarriette des montagnes (Satureja montana)
Sarriette des montagnes (Satureja montana)

Sarriette des montagnes : un peu de botanique

On commence avec un peu de botanique. La Sarriette des montagnes est une plante vivace de la famille des lamiacées, qui pousse dans les terrains calcaires et rocailleux du sud-est de la France. Si vous regardez la carte de répartition, vous verrez une énorme tache dans la région Provençale, donc forte présence.

C’est un sous-arbrisseau qui fait, comme on dit, « un peu de bois », c’est-à-dire qui peut faire des branches un peu dures, un peu ligneuses, qui contiennent pas mal de tanins. Nous on va plutôt les enlever, sinon ça donne un goût un peu trop rêche et astringent à nos préparations, on va plutôt garder les branches les plus tendres.

Les feuilles sont opposées sur la tige, elles sont allongées et pointues au sommet, un peu piquantes, en particulier lorsque la feuille est sèche. De couleur vert sombre, coriaces et luisantes. Les fleurs sont petites, à corolle bilabiée blanche ou parfois légèrement rosée, réunies en grappes terminales allongées, entremêlées de feuilles.

Si vous l’introduisez au jardin, elle est de culture très facile. C’est une plante rustique, qui pousse dans les terrains pauvres et qui drainent, qui ne demande quasiment pas d’eau. Si vous voyez où elle pousse dans la nature autour de chez moi, vous comprendrez vite.

On va la récolter idéalement en début de floraison, on taille le petit buisson au sécateur en respectant la forme buissonnante, on ne va pas tailler trop bas pour ne pas trop affaiblir la plante. On taille les petites branches entières et on va les faire sécher à plat, ça sèche relativement vite. Ensuite, on peut garder ces petites branchettes sèches, avec les feuilles, dans des sacs en papier kraft, ça se conserve assez longtemps, de 1 à 2 ans, sans trop perdre de son parfum.


Constituants

D’un point de vue des constituants, comme vous l’aurez remarqué, on a une belle richesse aromatique. On a quelque chose d’assez costaud ici, on est dans les phénols, principalement du carvacrol en grande partie, mais aussi du thymol. On est dans l’antiinfectieux ici, on est dans le tonique aussi, tonique général, tonique de l’immunité.

Nous avons pas mal de monoterpènes qui apportent un effet stimulant, un petit effet antalgique : gamma-terpinène et paracymène principalement.

Dans le non-aromatique, nous avons des acides phénoliques : acide rosmarinique, acide chlorogénique, acide caféique.

Nous avons des flavonoïdes : lutéoline, apigénine, rutine, quercétine.

Ces deux dernières catégories lui donnent un très beau profil antioxydant.

Parlons maintenant des propriétés…


Sarriette des montagnes : anti-infectieuse

La Sarriette des montagnes a des propriétés anti-infectieuses à large spectre : antibactérien, antiviral, antifongique, associé à un effet stimulant de l’immunité.

Donc c’est assez puissant, et pour vous aider à la positionner par rapport à d’autres plantes, on va la mettre, grossièrement, avec le thym et l’origan. Bien évidemment, on a une plante différente, avec des constituants différents. Mais globalement, si vous arrivez à voir comment positionner les deux autres, vous pouvez utiliser la Sarriette des montagnes d’une manière similaire. C’est-à-dire :

  • Dans les infections hivernales : tout type d’infection, du simple rhume à la bronchite en passant par la grippe ou autre bestiole que je ne nommerai pas sous peine de me faire repérer par les algorithmes. Comme anti-infectieux générique, pour aider le système immunitaire à faire son travail, mais aussi pour apporter, au travers des constituants comme le carvacrol et thymol, un effet antibactérien, antiviral et antifongique direct.
  • Dans les infections urinaires : en ce qui me concerne, je conseille très souvent le thym car il est plus commun dans les boutiques, dans la nature ou dans les jardins, ou le serpolet. Mais je pourrais aussi conseiller la Sarriette des montagnes à la place du thym. Et je peux vous dire que c’est efficace pour une infection urinaire si on sait l’utiliser aux bonnes doses et aux bonnes fréquences. Et attention au risque de pyélonéphrite, on ne fait pas n’importe quoi dans ces situations, on appelle son médecin dès qu’on a un doute, et on veut voir des améliorations rapides, sinon ce n’est pas bon signe.
  • Dans les infections entériques : donc digestives, en particulier celles qui trainent. Peut-être après un voyage dans certains pays, on a choppé la tourista, on revient à la maison et y a toujours un fond de troubles digestifs. Bien sûr, allez consulter un médecin. Mais un accompagnement avec des plantes aromatiques avec ces chémotypes type phénols vont faire du ménage. Et attention je ne parle pas d’huiles essentielles ici mais bel et bien des formes traditionnelles comme l’infusion, combiné à d’autres comme la feuille de noyer.

Désinfectant externe

Si je suis en nature, que je randonne, que je me blesse, que je recherche une plante désinfectante dans ma région, je n’hésite pas à ramasser de la Sarriette des montagnes. C’est puissant. Je prépare une infusion concentrée, je mets un petit bouquet de branchettes avec les feuilles dans un peu d’eau dans mon kit réchaud, je fais l’infusion, j’enlève la plante, puis je vais laver ma plaie avec cette préparation, plusieurs fois si nécessaire, et je vais garder ce qu’il me reste dans une bouteille, pour les heures qui viennent peut-être, en attendant de passer dans une pharmacie.

On va noter ce que nous dit Cazin dans son ouvrage classique de 1868 : l’infusion très concentrée a réussi contre la gale, avec chez une jeune fille la guérison au bout de 8 jours avec des applications faites matin et soir. Donc fonctionne aussi sur certaines infections parasitaires.

Digestive

La Sarriette des montagnes est l’une de ces plantes qui sont digestives par excellence. On les prend sur la digestion, souvent en petite quantité, une petite tasse d’infusion un peu concentrée, et la plante va faciliter le processus digestif lorsque celui-ci est un peu difficile.

S’il y a crampes, on va profiter de son effet antispasmodique. S’il y a ballonnements et gaz, on va profiter du fait qu’elle diminue la quantité de gaz produite par fermentation.

On dit qu’elle stimule les sécrétions digestives, pas autant qu’une amère, mais elle a cet effet de relance si le feu digestif est un peu faible. Donc on pourrait la faire en cure aussi chez la personne qui a une déficience digestive constitutionnelle.

Elle a des propriétés anti-diarrhéiques.

On peut l’utiliser dans les cas de candidose intestinale.

Du coup, elle sait faire énormément de choses d’un point de vue digestif, on pourrait dire que c’est un peu un couteau Suisse digestif.

Sarriette des montagnes

Tonique

La Sarriette des montagnes est un tonique dans notre tradition. Ça veut dire qu’on l’utilisait dans les périodes de faiblesses et d’asthénie. Peut-être suite à une convalescence. Vous allez retrouver, dans cette catégorie, les toniques amers ainsi que les aromatiques un peu chaudes, un peu circulatoires comme le thym, le romarin, la sauge, l’origan et la sarriette.

Ce sont des plantes qui laissent une sensation de chaleur, de mouvement, qui remettent en circulation, qui relancent les processus, la digestion comme on l’a vu, mais pas que, il y a probablement une action plus profonde qui touche nos fonctions d’une manière plus générale.

De ce fait, on peut les prendre en cure lors des périodes de fatigue, de manque de vitalité. On ne s’attendra pas à un effet excitant, ce n’est pas de la caféine. C’est plus subtil que ça, ça se déroule sur plusieurs semaines, en prenant soin de soi, de son alimentation, du repos et de la récupération. C’est une notion qu’on a vraiment perdue de vue aujourd’hui car on veut des trucs qui dépotent, qui agissent vite et qui nous remettent sur pied pour qu’on aille bosser sans trop perdre de jours.

En tout cas, cette notion de tonique des fonctions vitales, faut qu’on y revienne, ça va nous être très utile dans les années qui arrivent. Ce qui nous amène au point suivant…

Aphrodisiaque

Bon, cette partie-là, je suis sûr que vous l’attendez. On m’a posé cette question tellement de fois. « Est-ce que c’est vrai que ta sarriette, elle est aphrodisiaque », avec un clin d’œil, petit coup de coude, vous voyez le style. Alors, dans la tradition, oui, on va en reparler.

Et puis on a pris une étude (1) et on l’a complètement sortie de son contexte. Je vous parle d’abord de l’étude, vous allez voir, ça illustre le fait qu’on ne peut pas faire une bibliographie à l’arrache. Étude de 2009, faite par une équipe Iranienne. On donne de la sarriette à des rats pendant 45 jours. Ensuite, on les lâche avec des femelles et on constate une amélioration de la vigueur à l’accouplement, de la fertilité, augmentation de la testostérone, du poids des testicules, etc. Patientez encore un peu avant d’aller acheter les stocks de sarriette à l’herboristerie du coin.

D’abord, l’étude a été réalisée sur Satureja khuzestanica, une sarriette locale en Iran. Elle semble avoir un chémotype assez similaire basé sur le carvacrol. En revanche, c’est une espèce différente avec un profil chimique différent. Mais OK, supposons qu’elle ressemble beaucoup à la Sarriette des montagnes.

On a donné l’huile essentielle pure à ces rats. Et la quantité qui semble la plus efficace, c’est 225 mg par kg de poids. OK, je sors ma calculette. D’abord je multiplie par 70 pour voir ce que ça ferait sur un humain de 70 kg. Ça nous fait quasiment 16 g. Et là, ceux qui connaissent un peu les huiles essentielles commencent à sentir un truc qui dérape. Prenons environ 35 mg pour une goutte. Ça nous amène à 450 gouttes d’une huile essentielle très riche en carvacrol, c’est du délire. Voilà pour cette étude, désolé, mais on ne convaincra personne avec ce genre de données.

Une autre étude (2) est un petit peu plus crédible, sur l’éjaculation précoce. Faite par une équipe Italienne cette fois, toujours effectuée sur des rats. On a fabriqué une teinture de Sarriette des montagnes avec de l’alcool à 60°, sur plante sèche, ratio 1:5 comme expliqué sur mon site pour la fabrication des teintures. Ensuite on fait évaporer et on récupère l’extrait sec. On a donné aux animaux entre 5 et 50 mg/kg pendant 8 jours. Les dosages les plus faibles n’ont pas fonctionné. Seuls les dosages de 25 ou 50 mg/kg ont fonctionné, avec augmentation de la durée entre l’intromission et l’éjaculation.

Seuls les rats traités ont pu atteindre une 4e éjaculation en 30 minutes, les autres ont abandonné après la 3e. On note aussi une augmentation de la testostérone. D’un point de vue dosage, si on ramène à un adulte de 70 kg, on est dans les 3,5 g d’un extrait sec, ce qui est beaucoup, mais plus raisonnable que les dosages d’huile essentielle, et on pourrait se dire que si on fait une cure plus longue, sur 2 ou 3 semaines, on pourrait peut-être diminuer à 1 g d’extrait sec, mais c’est même pas sûr, beaucoup de spéculations de ma part ici.

Cela dit, OK, y a un truc dans les études, y a un truc avec des dosages élevés, sur la vigueur sexuelle, la fertilité, la capacité à maintenir une érection, la capacité à remonter une testostérone peut être un peu trop basse.

Du coup, vu que les études sont uniquement faites sur animaux avec de forts dosages, que nous dit la tradition ?

Je n’ai rien trouvé dans mes ouvrages de Leclerc. Une vague mention chez Fournier et Cazin. Chez Valnet, on voit l’indication « asthénie sexuelle » en italique, ce qui signifie que chez lui, c’est une indication importante.

Donc il y a quelque chose là aussi à retenir. Il est possible que la propriété circulatoire et vasorelaxante du carvacrol ait une action ici, dans une zone très vascularisée et qui est souvent affectée par l’athérosclérose chez l’homme vieillissant.


Sarriette des montagnes : préparations et dosages

Parlons des préparations et dosages.

Pour la teinture, si on voulait une macération qui fait une bonne extraction de la partie aromatique, du carvacrol en particulier qui est hydrophobe, on utiliserait un alcool à 55 à 60° si on en trouve, teinture au 1:5 sur plante sèche comme expliqué sur mon site.

Pour les dosages, si on a une condition infectieuse, on va probablement rester dans la 30’aine de gouttes de teinture par prise, rajouté dans une tisane peut-être, donc pour une infection urinaire, ça pourrait être teinture de sarriette dans tisane de bruyère par exemple. A répéter régulièrement pendant la journée, sur une période relativement courte de quelques jours, tout dépend la situation.

Pour l’infusion, on voit chez Valnet 5 g par tasse, donc on est dans les 20 g par litre, c’est déjà très bien. On parle de dosages assez élevés ici pour faire bouger les choses relativement vite. Vous avez aussi un dosage un peu plus classique, une petite cuillère à soupe par tasse. Si vous avez accès à la plante fraiche, vous pouvez aussi faire une infusion de plante fraiche, vous dosez au goût, pour que ce soit bien aromatique tout en restant buvable. Là encore, si condition infectieuse, on parle de plusieurs tasses par jour, pas juste deux (une le matin et une le soir).

Et puis n’hésitez pas à mélanger avec d’autres plantes pour introduire plus d’actions. Par exemple si on était sur une infection hivernale avec une toux grasse, peut-être combiner avec de l’hysope et du lierre terrestre.


Sarriette des montagnes : précautions

En ce qui concerne les précautions : je vous rappelle que l’on parle de la plante entière ici et pas de son huile essentielle.

Bon, on est dans la plante aromatique à la fois culinaire et médicinale. Donc pas de contrindication aux doses usuelles. On ne va pas faire des cures trop longues, à des dosages trop élevés, sous peine qu’elle devienne un peu trop irritante.

Voilà, c’est tout pour la sarriette. Mettez-en un peu sur votre fromage de chèvre, dans vos fèves et vos haricots en grains, déjà. Et puis si vous voulez m’accompagner dans l’aventure de l’herboristerie traditionnelle, c’est dans la tasse que ça se passe !


 

Références

(1) Haeri S, Minaie B, Amin G, Nikfar S, Khorasani R, Esmaily H, Salehnia A, Abdollahi M. Effect of Satureja khuzestanica essential oil on male rat fertility. Fitoterapia. 2006 Dec;77(7-8):495-9. doi: 10.1016/j.fitote.2006.05.025. Epub 2006 Jul 6. PMID: 16889906.

(2) Zavatti M, Zanoli P, Benelli A, Rivasi M, Baraldi C, Baraldi M. Experimental study on Satureja montana as a treatment for premature ejaculation. J Ethnopharmacol. 2011 Jan 27;133(2):629-33. doi: 10.1016/j.jep.2010.10.058. Epub 2010 Oct 30. PMID: 21040774.

Facebook
Twitter
YouTube
Pinterest
Instagram
Licence Creative Commons
Cette page ainsi que tout le contenu de ce site (vidéos incluses) est mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.
Partager

7 réponses

  1. Bonjour, avez-vous des indications spécifiques ou des contre-indications pour une utilisation de la sarriette des montagnes sous la forme d’hydrolat ? Merci beaucoup pour votre réponse et pour votre beau travail.

  2. MERCI pour cet exposé très pédagogique !… J’ai beaucoup apprécié tous les détails bénéfiques et mises en garde… Je me souviens très bien de votre présentation initiale de 2009 à la suite de laquelle je m’étais procuré des plants de Sariette commune, de Sariette des Montagnes ainsi que de Marjolaine qui depuis ont proliféré et forment des couvre sols splendides… Lors des coupes annuelles si des trous apparaissent et que les tiges inférieures sont sèches, il suffit de rajouter une poignée de terre sur ces tiges qui se régénèrent rapidement…:-)

  3. Bonjour Christophe,
    Comme d’habitude super explications et détails dur cette fameuse sarriette des montagnes… enfin chez moi dans le Poitou j’en manque un peu beaucoup… je me contente de la sarriette commune. Et la planche sur les millepertuis très instructive . Merci encore à bientôt

  4. Bonjour, ce qu’on m’avait dit, c’est que la sarriette est aphrodisiaque lorsqu’elle cueillie en fleurs.

    1. Bonjour Petigny
      je n’ai pas cette information , avez-vous des sources qui viendraient confirmer vos dires ?

  5. Coucou Christophe ! C’est étonnant que tu n’aies pas parlé de l’éthymologie : Satureja Montana, traduit textuellement par … »le Satyre des montagnes » 😀 ….y’a pas de fumée sans feu, hem hem.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Avant de poster, merci de lire les instructions ici

Découvrir plus
Mentions légales - Conditions Générales de Vente - Conditions Générales d'Utilisation

Abonnez-vous à la lettre d’information gratuite de Christophe afin de garder ou retrouver la santé grâce aux plantes. En vous abonnant, vous recevrez le livret gratuit « Les 6 plantes pour les petits bobos de tous les jours ».