INTRODUCTION
Les gens tombent malades. Et lorsqu’ils arrivent à la vingtaine, ils commencent à tomber malades d’une manière prévisible. La physiologie et les approches constitutionnelles décrites dans ce livre ont pour but d’offrir un moyen de comprendre et d’évaluer la personne qui souffre de déséquilibre ou qui est malade, et de renforcer son métabolisme afin de SOUTENIR d’autres thérapies destinées à soulager les maux principaux.
Vous pouvez les rendre plus fort en utilisant les plantes toniques sélectionnées avec soin, des plantes qui soutiennent leurs faiblesses héritées ou acquises et diminuent les effets du stress et leurs déséquilibres de fluides. Les plantes toniques ne sont pas faites pour traiter directement un désordre. Elles donnent plutôt de la force à la personne en fonction de sa nature. Les archétypes de constitution décrits dans ce livre sont construits pour vous permettre d’évaluer comment cette personne en particulier s’est adaptée aux facteurs héréditaires ou de vie qui lui sont spécifiques, et quelles adaptations sont devenues excessives pour leur santé. Les plantes peuvent être utilisées pour renforcer la PERSONNE qui est malade, mais ne sont pas nécessairement adaptées pour agir directement et spécifiquement sur leur maladie.
Pour définir la fonction et le rôle de chaque organe, je décris ce qu’un organe fait dans les circonstances idéales, ce qu’il fait lorsqu’il est inhibé par le stress ou parce qu’il est faible d’une manière innée, et enfin ce qu’il fait lorsqu’il fonctionne en excès. Lorsqu’il est surstimulé ou lorsque la personne stressée dépend trop de cet organe d’une manière innée, l’organe doit beaucoup encaisser.
Une prémisse de base du stress est la suivante : lorsqu’une tendance de faiblesse chronique a pris racine, tout stress va empirer ce déséquilibre. L’homéostasie signifie être en équilibre, localement et globalement dans son corps. Ceci est accompli en contrôlant notre environnement interne et externe au travers des nerfs, des hormones, du transport des fluides, un modèle énergétique qui s’autorégule. Nous perdons cet état d’homéostasie seulement lorsque nous mourrons.
Redisons les choses d’une manière un peu différente. Nous avons tous une quantité fixe d’énergie à dépenser chaque jour… disons que nous avons $100 d’énergie. Si faire fonctionner notre corps coûte $45 d’énergie vitale (ou de chi, ou de transport de sang) par jour, nous pouvons disposer de $55. Nous pouvons passer $30 au travail, $10 dans nos relations, $5 gâchés dans nos agitations en regardant le journal de 20 heures, $5 dans une brève dispute avec notre bien aimé(e), et s’endormir sans avoir dépensé plus que nos réserves. Le vendredi soir, il se peut que nous nous lâchions sur le bourbon, ce qui nous coûte $15 en énergie vitale. Nous avons dépassé les limites, nous nous réveillons le samedi matin avec un mal de tête d’enfer et des réflexes paresseux. Nous maintenons notre homéostasie ce jour-là en nous déplaçant lentement et d’une manière méthodique, mais avec une grande fragilité. Nous avons maintenu notre équilibre métabolique en étant à moitié malade le jour d’après, et donc en dépensant moins d’énergie vitale, permettant au foie d’avoir un peu d’excédent afin d’effectuer son nettoyage. Si nous souffrons d’ostéoarthrite par contre, il se peut que le samedi soit un mauvais jour… notre maladie chronique basculant dans une condition aiguë, favorisée par le stress homéostatique.
Si nous avions renforcé notre système afin de pouvoir dépenser moins chaque jour (disons $30 au lieu de $45 pour maintenir un état stable), nous n’aurions probablement pas eu de crise aiguë… ou peut-être nous n’aurions pas eu la gueule de bois… ou peut-être nous n’aurions même pas succombé au démon de l’alcool.
Une séparation, un déménagement, une perte d’emploi, un décès dans la famille, un contrôle des impôts, toutes ces situations impliquent des dépenses. Rajoutées à la vie de tous les jours, elles peuvent contribuer aux maladies chroniques. Je n’ai pas de plante à offrir pour une séparation, mais les méthodes pour renforcer la constitution expliquées dans ce livre vont définitivement diminuer le coût de la vie, une approche essentielle pour soutenir le traitement des maladies chroniques.
Le traitement des maladies chroniques présente deux problèmes principaux.
Premièrement, il y a l’énigme de la “lune de miel”. L’arthrite répond au traitement direct pendant une certaine période, puis revient de plus belle, la thérapie n’étant plus efficace. Vous pouvez essayer une autre approche, qui va elle aussi s’épuiser. Souvent, aucune de ces approches ne marchera à nouveau. Si vous êtes docteur, vous grimacez et vous augmentez graduellement les doses ainsi que le potentiel iatrogénique des médicaments. Si vous êtes un herbaliste ou un acupuncteur, vous grimacez car, une par une, vos meilleures thérapies s’épuisent.
Deuxièmement, il y a tout simplement la nature des maladies chroniques. Elles commencent comme un désordre fonctionnel (le thermostat est déréglé, les choses commencent à se déséquilibrer d’une manière subtile mais pas irréversible). Après des épisodes aigus à répétition, le problème peut devenir organique (les choses se cassent, cicatrisent en laissant des marques, etc.) L’avantage de soutenir votre thérapie avec une méthodologie constitutionnelle est de s’assurer que votre mécanique de base marche plus longtemps. La personne est en meilleure santé, les épisodes aigus sont moins rapprochés (il n’y a pas aussi souvent de surdépense d’énergie vitale) et les désordres fonctionnels sont moins susceptibles de devenir des désordres organiques, car le corps a plus de temps pour se réparer entre les épisodes.
L’objectif de la Médecine Traditionnelle Chinoise et de la Médecine Ayurvédique est la même : rendre la personne plus forte, et ENSUITE traiter ses problèmes. Évidemment, ces méthodes fonctionnent. Elles détectent les déséquilibres, suggèrent des thérapies qui permettent une meilleure homéostasie, et elles aident la personne directement. Ces thérapies apprécient et approuvent notre utilisation des plantes et de la nutrition, mais elles nous disent régulièrement et avec emphase “Très bien, bon travail, mais VOUS N’AVEZ PAS DE TONIQUE… comment pouvez-vous prendre sérieusement soin de vous quand vous n’avez aucune philosophie… ces plantes sont à peine plus douces que les médicaments du médecin.” (NDT : le concept du “tonique” est essentiel en MTC ou en Ayurvédique – un tonique adapté à la personne renforce son état général, lui donnant plus de force pour régler n’importe quelle pathologie. Ce concept existe très peu voire pas du tout en herbalisme de l’ouest, et il est introduit ici par Moore dans cet ouvrage).
La méthodologie décrite ici est un effort (et un effort valable) pour fournir plusieurs paramètres pour évaluer les forces et faiblesses d’un individu. Un groupe de plantes toniques est présenté pour atténuer les faiblesses et (parfois) “refroidir” les excès, avec des tables décrivant les effets des plantes majeures sur chaque système d’organe afin d’éviter une synergie indésirable.
Et comme ce livre se concentre sur les PLANTES, tous les toniques que je recommande sont listés dans la Materia Medica (NDT : Materia Medica que j’ai traduit et mis en ligne). Vous pouvez ainsi évaluer leur qualité, les préparer vous-même si vous le désirez, connaître la fourchette de dosage, et les contre-indications qui peuvent s’appliquer.
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Katia dit
Hello ! Merci mille fois pour ce travail de titan ! Je me suis toujours demandée si les tempéraments en excès ou en manque étaient attirés par des plantes qui leur ressemblent, qui exacerbent ce déséquilibre...? Un tempérament chaud et sec attiré par des plantes chaudes et asséchantes... un peu comme les personnes intolérantes au gluten, par exemple, irrémédiablement attirées par le pain (libération d'endorphines, si j'avais bien tout saisi)
sabine dit
bonjour Katia
voici la réponse de Christophe :
" Les deux, c'est ça qui est terrible ! 🙂
Nous sommes parfois attirés par ce qui exacerbe nos excès, parfois par ce qui les calme.
Mon exemple, étant très "pita" et explosif : je suis très attiré par les épices. Et pourtant ce n'est pas vraiment bon pour ma constitution.
Je suis aussi très attiré par les amers qui me font beaucoup de bien ("feu du fois montant, etc"), qui me "rafraichissent" en quelque sorte.
Donc les deux, à nous de distinguer en apprenant à nous écouter - distinguer ce qui est plutôt addiction ou plutôt attirance nécessaire pour rééquilibrer notre situation.
katia dit
Grand merci ! OUI, j'ai les mêmes affinités épicé/amer (Pità+++). Difficile parfois de trouver la frontière addiction/attirance.
sabine dit
Merci Christophe pour ces précieuses indications , je remets mon sac à dos et reprends mon cheminement sur cette voie !
sabine dit
bonjour Christophe
je suis en pleine méditation au sujet des maladies dites chroniques!
j'essaie de reformuler selon ce que je crois avoir compris :
- une maladie chronique serait la conséquence d'un affaiblissement constitutionnel (déficience ou excès ) ?
-et si l'on s'attaque à cette maladie chronique (c'est à dire supprimer les symptômes) , on pourra éventuellement y trouver une amélioration ponctuelle (cette lune de miel qui emmielle traitreusement ) mais au final pas de règlement dans le temps ?
- qu'il vaut mieux aller à la racine c'est à dire comprendre la constitution de la personne et essayer de voir si déficience ou excès , et essayer de comprendre pourquoi, comment cela a déraillé ? et ensuite partir en quête d'une alimentation adaptée et de plantes accompagnatrices ? mais quand même essayer d'atténuer les symptômes (car la souffrance peut rendre hermétique à tout effort de cheminement )?
Suis-je sur la bonne voie ou bien me fourvoie-je ?
j'en reviens à l'exemple de mon amie et de ses problèmes de dos (becs de perroquets, toutes les vertèbres avec des nodules, des trucs qui coincent le nerf sciatique....) ;
dans ce cas est ce que c'est considéré comme maladie chronique (car il y a des pics ) ou comme handicape (puisque les toubibs disent qu'il n'y a pas grand chose à faire ) ?
si handicape , est ce qu'on aborde cette problématique en se concentrant seulement sur le fait de diminuer la douleur ,
- est ce que le fait de connaitre sa constitution peut orienter dans le choix du traitement et du coup aider à améliorer (là pour moi c'est encore très flou )
(j'ai encore trois milliards de questions mais promis pas toutes à la fois les questions poserai !)
Christophe BERNARD dit
C'est un très bon résumé de l'approche herbaliste et naturopathique. Car nous ne sommes pas docteurs, nous ne sommes pas formés pour aborder les pathologies d'une manière frontale. La valeur au long terme se situe donc dans l'analyse constitutionnelle effectivement (le "terrain"). Et lorsque l'on a essayé pas mal de choses, qu'aucun résultat n'apparaît, ou que l'on a du mal à trouver quoi que ce soit qui cloche dans le terrain, on aide la personne du mieux possible avec l'expression aiguë du problème. Dans le cas d'une inflammation au niveau des articulations, les anti-inflammatoires ou dépuratifs à affinité articulaire, comme vous l'avez bien préconisé, de type filipendula, scrophularia, curcuma, zingiber, EPA/DHA, etc.
La lecture du terrain peut grandement aider dans la constitution des recommandations. Certains diront par exemple que lorsque problème chronique dégénératif, rien ne vaut le régime crudivore. Je dis ceci : si la personne à une constitution digestive fragile avec tendance à l'inflammation, nous allons provoquer plus de mal que de bien. Ce type de personne, par exemple, peut très mal digérer les EPA/DHA de type poisson des mers froides, et donc trouvera plus de confort avec les infusions, etc.