École d'herboristerie en ligne
École d'herboristerie
en ligne
Althea Provence
Apprenez à utiliser et conseiller les plantes
Pourquoi faire nos programmes?
Derniers articles
Bonjour,
Aujourd’hui, j’aimerais vous parler d’un sujet dont on ne parle quasiment jamais, mais qui semble affecter pas mal de monde, c’est l’hypotension. On parle beaucoup d’hypertension bien sûr, car c’est une situation qui affecte un pourcentage significatif de la population. Et puis c’est un risque significatif sur la santé cardiovasculaire, donc on voit pourquoi il faut en parler.
Mais pour l’hypotension, en général c’est ignoré, car la médecine classique n’a pas vraiment de solution. À moins de vous coller ce produit connu qui est, en gros, de la caféine avec de la vitamine C. Du coup, je vous propose qu’on passe en revue cette condition, qu’on essaie d’éplucher les causes possibles et que l’on discute des solutions naturelles potentielles.
Avant de commencer, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité, et toujours accessible gratuitement.
Autre point, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription ou autre acte médical.
Description du problème
Allez, on parle d’hypotension. Tout d’abord, la description médicale du problème dans son état pathologique. Je vais faire rapide, car je ne pense pas avoir beaucoup de valeur à apporter ici. Mais c’est toujours utile de comprendre le problème en question.
L’hypotension, c’est une tension artérielle trop basse pour le bien-être de la personne, trop basse pour un bon fonctionnement corporel. Avoir une bonne tension artérielle, c’est nécessaire pour que le sang, l’oxygène, les nutriments, nous parviennent dans toutes les parties du corps, en particulier la tête et le cerveau, qui est la partie la plus haute du corps lorsqu’on est debout, donc la plus complexe à atteindre à cause de la gravité.
Du coup, avoir une tension trop basse, ça vient avec des risques. Le symptôme dont on parle le plus, ce sont des vertiges avec risque de chute ou pire, ça peut aller jusqu’aux évanouissements. Bien sûr, si la tension continuait à baisser au-delà de ce point, on atteint vraiment un point très pathologique avec des organes qui ne peuvent plus fonctionner.
Mais on ne va pas parler de ce type de manifestation. On ne va pas parler des hypotensions qui créent des évanouissements ou des états de choc. Ça, on le réserve à la profession médicale.
Contexte
On va parler d’une situation un peu entre les deux. J’aimerais vous donner le contexte et pourquoi je vous en parle aujourd’hui. Le contexte, c’est qu’on m’a parfois demandé un petit coup de pouce lorsqu’on est venu me consulter. Ce n’est jamais la demande principale. Mais c’est une situation qu’on mentionne en passant. Du style, j’ai toujours été comme ça, j’en ai parlé à mon médecin, mais il n’y a rien à faire, est-ce que vous avez un conseil qui pourrait m’aider.
Moi qui ai vécu sur le continent nord-américain, je me souviens des cardiologues qui étaient super content de voir des tensions systoliques autour des 9 ou 9,5. On vous félicite, littéralement, car vous n’avez pas les risques classiques associés à l’hypertension, qui est l’un des problèmes les plus redoutés des cardiologues probablement.
Le problème, c’est que chez certaines personnes, cette hypotension peut avoir un impact négatif sur la qualité de vie.
- Il y a souvent une hypotension orthostatique. C’est-à-dire que si vous voulez levez trop vite de la position couchée ou même assise, waouh… ça tangue, on a la tête qui tourne. Lors de ces changements de position, il y a une activation très rapide du système nerveux sympathique, qui entraine une vasoconstriction périphérique et une augmentation de la fréquence et de la contraction du muscle cardiaque pour soutenir ce changement de position et envoyer le sang vers le haut. Mais pas assez soutenu lorsqu’un a une tension déjà faible.
- Autre point, il y a souvent une sécheresse globale de la peau et des muqueuses. Une petite tension, chez certaines personnes, s’accompagne d’un manque de liquide pour irriguer tous les tissus. Il n’y a pas assez d’eau dans les tuyaux si vous voulez. Les reins éliminent trop d’eau, en quelque sorte. On voudrait que les reins en retiennent un peu plus pour mieux fonctionner globalement.
Et là, attention, je fais bien la distinction entre la personne qui a une petite tension et qui a toujours très bien vécu avec. Donc pas de problème. Et la personne qui trouve que ça affecte d’une manière négative sa qualité de vie. Si ça affecte la qualité de vie, on voit comment on peut aider.
Causes
Alors… Les causes possibles, difficile à dire. On a l’impression que certaines personnes sont faites comme ça, sont nées comme ça.
Il peut y avoir des causes médicamenteuses ou pathologiques. Parfois, c’est un diurétique mal dosé. Ou une situation pathologique avec trouble cardiaque. A voir avec le médecin.
Ici, on va plutôt réfléchir lorsqu’il n’y a pas de cause médicamenteuse ou pathologique, et que le médecin a dit : c’est comme ça, vous êtes faite comme ça, on n’y peut pas grand-chose.
Il faut réfléchir d’une manière systémique. Il y a plusieurs systèmes impliqués dans la régulation de la tension :
- Le système nerveux qui pilote, globalement, le cœur et la constriction artérielle. On parle de fonction « neurovasculaire » ici car il y a les deux composants, neuro et vasculaire.
- Le système circulatoire artériel avec le cœur, qui pompe activement les liquides vers les extrémités.
- Le système circulatoire veineux, qui ramène tous ces liquides vers le cœur.
- Le système rénal avec ici des reins qui ne retiennent pas assez de sodium et donc d’eau, sachant qu’au niveau des reins, c’est une régulation plus lente que le système cardiovasculaire.
Et vous allez voir que les suggestions de remèdes que je vais vous donner agissent en général sur plusieurs de ces systèmes.
Faut-il boire plus d’eau ?
Petite parenthèse : je ne suis pas convaincu que le conseil habituel de boire plus d’eau soit réellement efficace. Sauf si vraiment la personne ne boit pas assez pendant la journée. Mais si elle boit déjà régulièrement, boire plus n’aura pas vraiment d’impact, les reins vont juste évacuer le surplus et continuer d’évacuer un peu trop pour les besoins en liquide. C’est une petite faiblesse constitutionnelle. On est probablement nés comme ça.
J’ai observé que saler un peu plus l’alimentation semble avoir un effet globalement positif sur la personne qui souffre d’hypotension. D’ailleurs, elle aura souvent ce réflexe. Lorsqu’elle se sent particulièrement faible de ce point de vue-là, elle sera attirée par les aliments salés. Normal, c’est un réflexe du corps qui sait qu’une tension trop basse pourrait être due à un manque de sodium. Alors oui, c’est vrai qu’on fait la guerre au sel aujourd’hui, car tous les plats préparés sont très salés. Mais si on prépare tout maison et qu’on fait une utilisation raisonnable de sel, saler un peu plus pourrait être bénéfiques à ces personnes, tant qu’elles consomment une alimentation riche en potassium, que l’on trouve abondamment dans les fruits et légumes.
Attention aux tisanes très diurétiques : reine des prés, ortie, prêle et compagnie. Une infusion de temps à autre, très bien. Mais de fortes quantités, pour se reminéraliser par exemple avec 1L d’infusion d’ortie bien dosée, ça peut assécher une personne déjà sèche, et aggraver ce ressenti d’hypotension. Et ça, j’ai déjà vu plusieurs fois en situation réelle. Ce n’est pas juste théorique et spéculatif.
Hypotension et plantes médicinales
On va parler maintenant de solutions possibles dans le monde des plantes. Je ne vais pas faire une revue de chaque plante, son utilisation, ses préparations, dosages, précautions, etc. Trop long. Je vous renvoie vers mes fiches de plantes pour plus de détails. C’est important de faire ce travail, de faire toutes les recherches qui vont avec.
Dans la suite de cette discussion, j’aimerais vous faire réfléchir plutôt que de vous donner des solutions toutes mâchées. Car votre hypotension est probablement différente de celle de votre voisin. Ce qui va faire qu’un programme fonctionne mieux qu’un autre, c’est sa correspondance avec les faiblesses de terrain de la personne. Vous me suivez ?
Donc je vais essayer de vous donner des indices pour voir si telle ou telle catégorie de plantes pourrait vous aider en fonction de qui vous êtes. Pour mieux comprendre vos forces et faiblesses de terrain, votre constitution et tempérament, je vous rappelle que vous avez ma formation Piliers du bien-être et Bilan.
Et puis on fera aussi un petit exemple de programme à la fin de cet épisode, mais c’est vraiment pour illustrer mes propos plus que pour vous donner une formule toute prête. Lorsque les stratégies sont précuites à l’avance, ça fonctionne très moyennement.
Réglisse et hypotension
La première plante, ça va peut-être vous étonner, c’est la réglisse. Elle agit au niveau des reins en provoquant une rétention de sodium et une fuite de potassium. Et vu que l’eau suit le sel, on va retenir plus d’eau dans le système. Du coup, attention de ne pas augmenter trop la consommation de sel avec la réglisse, et de consommer une bonne quantité de potassium au travers de fruits et légumes.
Elle est particulièrement indiquée chez la personne qui a ce sentiment de peau sèche et muqueuse sèche avec une tension faible.
Le seul herboriste que je connaisse et qui a positionné la réglisse pour l’hypotension, c’est Michael Moore aux États-Unis. Et c’est lui qui m’a donné l’idée et qui a fait que plus tard, c’est une plante que j’ai souvent conseillée dans ce contexte bien précis. Contrairement à ce qu’on pourrait penser (vu qu’on la met dans pas mal de confiseries), ce n’est pas la plante la plus simple à manipuler. Mais voyons comment rester dans une zone relativement sécuritaire pour que vous puissiez tester.
On pourrait partir de plusieurs points, de l’expérience en particulier. Mais là, je vais partir d’une étude de 2024, faite sur 28 participants (Af Geijerstam, 2024), qui montre une augmentation de la pression systolique d’un peu plus de 0,3 avec des pastilles de réglisse standardisées pour fournir 100 mg d’acide glycyrrhizique par jour pendant 2 semaines. Alors, 0,3 de systolique en plus, pour 2 semaines de prise, c’est déjà notable.
Bruneton, notre expert en phytochimie, nous dit que le rhizome sec, c’est-à-dire le fameux bâton de réglisse, contient de 3 à 5% d’acide glycyrrhizique « ou plus » (Bruneton, 2016). Bon, le « ou plus » est un peu problématique. J’ai regardé certaines études que je vous mettrai en référence dans l’article associé à cet épisode, et j’ai trouvé entre 3 et 4 % dans une étude (Hennell, 2008), j’ai trouvé entre 1,36 et 3,4 % dans une autre étude (Eyed, 2014).
Du coup, prenons dans les 3% du poids sec pour avoir une idée. Pour obtenir 100 mg d’acide glycyrrhizique par jour, il faudrait consommer dans les 3,3 g de réglisse par jour en supposant qu’on extraie la totalité de cet acide dans notre préparation, ce qui est assez ambitieux. Le docteur Eric Lorrain recommande de ne pas dépasser les 125 mg/jour (Lorrain, 2024). Donc on reste dans les marges qui semblent sécuritaires pour la plupart des personnes souffrant d’hypotension.
Je vais m’arrêter là avec la réglisse sous peine de vous embrouiller. Pour cette discussion grand public, je vais simplement vous proposer de l’intégrer à un mélange à tisanes et de faire une cure qui ne dépasse pas 6 semaines, là encore conseil du docteur Eric Lorrain. Si on vise autour des 3 g de réglisse en poudre, ça nous fait une cuillère à café par jour. On intègrera ça plus tard lorsqu’on parle d’un mélange à tisanes. On pourrait faire plus. Mais on va rester prudent.
Faiblesse du retour veineux
La seconde catégorie de plantes dont je voudrais vous parler, ce sont les toniques du retour veineux et lymphatique. Et je pense que ça ne va pas vous surprendre.
Si la personne qui souffre d’hypotension a aussi une faiblesse du retour veineux, type insuffisance veineuse, rétentions d’eau dans les parties basses du corps, certaines douleurs dans les mollets lorsqu’il fait chaud ou lorsqu’elle est restée longtemps debout (et après être passé voir un médecin bien sûr pour un diagnostic précis), alors les plantes de type noisetier, vigne rouge, aigremoine, marronnier d’inde, fragon petit houx (et d’autres) seront bénéfiques.
C’est un axe important du travail, à ne pas négliger. Les plantes du retour veineux sont relativement efficaces avec un effet bénéfique qui peut arriver dès les premiers jours de prise. En revanche, en général, c’est un travail sur le long terme, avec des cures régulières au fil des années. Là encore, je me répète, mais s’il y a insuffisance veineuse.
Hypotension associée à une fatigue qui dure
Si on a un passage de fatigue et faiblesse qui dure et qui accentue l’hypotension, on va penser aux plantes adaptogènes les plus toniques et qui sont parfois contrindiquées dans les cas d’hypertension. Elles deviennent tout à coup plutôt indiquées ici. Le ginseng rouge est probablement le plus stimulant, le ginseng blanc en choix numéro 2, l’éleuthérocoque en choix numéro 3 (du moins basé sur mon expérience). En s’assurant que ces plantes, en particulier le ginseng, ne deviennent pas trop stimulantes et perturbatrice du sommeil. On voit parfois ceci chez la personne qui n’avait pas forcément un état de fatigue qui justifie l’utilisation de ces plantes.
Pour des alternatives plus locales aux adaptogènes (qui sont en général des plantes importées aujourd’hui, avec quelques exceptions), je vous renvoie à mes 2 épisodes sur les plantes adaptogènes revisitées (on vous mettra les liens dans l’article : partie 1 – partie 2). On pourra aussi penser à d’autres outils comme la gemmothérapie de cassis et de chêne pédonculé pour cette situation.
Plantes riches en caféine ou équivalent
Autre catégorie : les plantes contenant de la caféine peuvent être bénéfiques pour certaines personnes, car elles agissent au niveau nerveux et cardiaque, en tant que tonique cardiovasculaire. On pensera aux différents thés, au maté, au guarana, à la noix de kola. Et bien sûr au café, qui peut devenir remède dans certaines situations.
En général, vous saurez si cette catégorie vous correspond car vous avez déjà utilisé ce remède qu’est le café ou le thé dans le passé lorsque vous vous sentiez particulièrement relâchée, hypotendue et ça vous a relancé pour quelques heures. Et si vous arrivez à faire la différence entre cet effet bénéfique et une dépendance totale à la caféine qui n’a rien à voir avec votre tension faible. Ce n’est pas forcément facile à voir. Mais c’est un bon axe de la réflexion.
Toniques aromatiques circulatoires
Ensuite, nous avons les plantes toniques, aromatiques et circulatoires de la famille des lamiacées, que j’appelle les « aromatiques du sud ». Je pense ici au thym, au romarin, à la sarriette, à la sauge qui font toutes trois de bons mélanges à tisanes. Valnet parlait en particulier du thym et de la sauge pour l’hypotension.
Au passage, Valnet parlait aussi du chardon-marie, qu’il positionnait comme plante à action globale sur la partie cardiaque et rénale lorsque hypotension.
Composer en fonction de la personne
Du coup, ça nous fait pas mal de catégories. Et idéalement, il faudrait vous approprier cette réflexion pour voir dans sur quel axe vous voulez insister tout particulièrement. Et n’oubliez pas que le processus est toujours très itératif, on n’a rarement le bon programme dès le premier coup.
Cela dit, essayons de composer un petit mélange à tisanes pour une personne qui se plaindrait d’une petite tension, elle n’est pas sous médicaments, elle a consulté un médecin qui lui a dit que tout va bien, qui traverse une période de fatigue et qui a une petite faiblesse du retour veineux.
Par tasse, on pourrait faire :
- Réglisse : 1/2 cuillère à café de la poudre
- Romarin : une bonne pincée des feuilles
- Maté : une cuillère à café des feuilles finement coupées ou des feuilles en poudre
- Noisetier : une pincée des feuilles coupées finement
On pourrait faire 2 tasses par jour pendant 3 ou 4 semaines et voir si ça aide.
En fonction de l’état de fatigue, on va peut-être rajouter une teinture ou des gélules de ginseng. Ou une gemmo de cassis et de chêne, en cure de plusieurs semaines.
Voilà, je vais m’arrêter là. Avec un petit mot d’encouragement pour vous dire que dans mon expérience, avec un peu de patience, on arrive à améliorer la situation avec les plantes. Merci pour votre écoute, et à très vite pour un nouvel épisode.
Hypotension : références
Af Geijerstam P, Joelsson A, Rådholm K, Nyström FH. A low dose of daily licorice intake affects renin, aldosterone, and home blood pressure in a randomized crossover trial. Am J Clin Nutr. 2024 Mar;119(3):682-691. doi: 10.1016/j.ajcnut.2024.01.011. Epub 2024 Jan 20. PMID: 38246526.
Hennell, J., Lee, S., Khoo, C., Gray, M., & Bensoussan, A. (2008). The determination of glycyrrhizic acid in Glycyrrhiza uralensis Fisch. ex DC. (Zhi Gan Cao) root and the dried aqueous extract by LC-DAD.. Journal of pharmaceutical and biomedical analysis, 47 3, 494-500 . https://doi.org/10.1016/j.jpba.2008.01.037.
Eyed, Ohamad, hmadi, Osseini, ohammad, Azem, Ouri, Asrin, Arhadi, Oghaddam, Eza, Midbaigi (2014). Changes in Glycyrrhizin Content of Iranian licorice ( Glycyrrhiza glabra L . ) Affected by Different Root Diameter and Ecological Conditions.
Lorrain, E. (2024b). Grand manuel de phytothérapie.
Bruneton, J. (2016). Pharmacognosie : Phytochimie, plantes médicinales.
Voici une petite recette de tisane de ronces fermentées.
- Cueillez les feuilles de ronces (choisissez les plus belles et attention aux épines !)
- Étalez-les sur un drap et laissez sécher à l’ombre.
- Une fois les feuilles séchées, hachez-les grossièrement et imbibez-les d’eau, essorez-les puis roulez-les dans un linge humide et laissez-les fermenter pendant 3 jours. Les feuilles brunissent, c’est tout à fait normal.
- Séparez le tout, étalez bien vos feuilles de ronces et les faites de nouveau sécher.
Voilà, vos feuilles sont sèches et prêtes pour préparer ce qui ressemble à un thé noir, sans caféine, mais avec un petit goût de thé noir et un petit parfum fruité caractéristique.
Bernard Bertrand, dans son livre « Pour l’amour d’une ronce », nous donne une alternative avec un goût nettement plus satisfaisant :
- 2 parts de feuilles de ronces
- 1 part de feuilles de framboisier
Origine de la tisane de ronces fermentées
Mais quelle est l’origine de cette recette qui aujourd’hui a le vent en poupe ? Car côté scientifique, pas d’étude à nous mettre sous la dent, et pas d’information non plus côté tradition, alors une recette « Miss terre » ?
Bernard Bertrand nous propose une piste : une recette publiée dans le journal munichois Hell und Gewurz Pflanzen en 1918. Cette recette était vendue sous le non de Ersatztee, recette élaborée pour tenter de minimiser la pénurie (entre autres) de café et de thé liée à l’embargo de la 1ʳᵉ guerre mondiale, imposé par les puissances alliées.
Il fallait, je cite Bernard Bertrand, obtenir 3 choses, le principe excitant, l’arôme et le goût (…) et c’est avec les feuilles de framboisiers, de Ronce et de Fraisiers qu’ils obtinrent les meilleurs résultats, un mélange de torréfaction et de fermentation bien contrôlées.
Et souvent, qui dit recette dit voyage, évolution, transformation. Celle des feuilles de ronce fermentées n’échappe pas à cette règle. Conçue et élaborée dans une période historique sombre, s’inspirant de méthodes traditionnelles venues de loin (comme la Chine pour la fabrication du thé) et pétrie par l’imagination et la créativité des populations, elle continue sa route, se frayant petit à petit un chemin dans l’univers de la cuisine sauvage et de celles et ceux à la recherche d’une consommation locale et autonome.
Certes, notre tisane de roces fermentées n’a pas encore ses lettres de noblesse côté scientifique. Lais il est logique de penser que, comme pour d’autres plantes (par exemple, les feuilles de thé) le processus de fermentation/oxydation modifie la composition chimique. Les polyphénols se transforment en composés plus complexes, influençant la saveur, l’arôme et les propriétés antioxydantes. On peut donc raisonnablement envisager que ces transformations agissent aussi sur nos feuilles de ronce fermentées, tant sur le plan gustatif que pour leurs bienfaits thérapeutiques.
Fermentation ou oxydation ?
Pour être juste : l’utilisation du mot « fermenté » n’est pas vraiment le terme correct, il faudrait plutôt dire : oxydation enzymatique contrôlée ! En effet, les feuilles sont hachées et humidifiées, ce qui active les enzymes naturelles présentes dans les feuilles. Ces enzymes, en présence d’oxygène, déclenchent des réactions chimiques qui modifient la composition des polyphénols, responsables du goût et des propriétés du produit final.
Ce processus est similaire à celui utilisé pour produire le thé noir ou le thé oolong à partir des feuilles de Camellia sinensis. Tandis qu’une fermentation au sens strict implique l’action de micro-organismes (bactéries, levures, moisissures) qui consomment des sucres et produisent des sous-produits (comme l’acide lactique ou l’alcool), comme pour le thé Pu-erh (Fermentation Microbienne), ce thé est unique car il subit une véritable fermentation microbienne après un séchage initial. Les micro-organismes décomposent les constituants des feuilles, créant des saveurs complexes et une texture souvent plus douce.
Dans notre recette, aucun micro-organisme spécifique n’est introduit ni favorisé, ce qui rend improbable une fermentation significative. Elle ressemble plutôt à la recette du thé noir. Le champ des possibles est ouvert et nos feuilles de ronce n’ont pas dit leur dernier mot !
Bonne dégustation de votre tisane de ronces fermentées !
Références
BERTRAND Bernard, Pour l’amour d’une ronce, Ed. de Terran, avril 2008
Bonjour,
Une année qui s’achève bientôt ! On a été très actifs et très occupés à Altheaprovence pour vous préparer de nouveaux épisodes, de nouveaux programmes de formation au sein de l’école. Vous avez peut-être vu qu’on a lancé une nouvelle version du site internet, car la version précédente commençait à être un peu vieillotte. Donc pas mal de travail en cette fin d’année.
Et là, eh bien je voulais faire un épisode un peu plus léger aujourd’hui, commencer à passer en mode parasympathique (si vous voyez ce que je veux dire), repos et relaxation. Et l’idée du jour m’est venue d’une amie, qui m’a demandé : « vous offrez quoi, à Noël, vous, les herbos ? ».
Du coup, c’est ce que je vous propose, un épisode un peu plus relax dans lequel je vais vous parler d’idées de cadeaux en lien avec l’herboristerie. Vous allez voir, on va faire simple : des mélanges à tisanes (et au passage j’espère vous apprendre 2 ou 3 petites choses au sujet des mélanges), quelques livres qui m’ont marqué ces derniers mois, et un peu de vrac avec quelques petites friandises qui croustillent. Je ne vous en dis pas plus.
Avant de commencer, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015 sur l’herboristerie et l’utilisation des plantes pour maintenir équilibre et bien-être. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité, et toujours accessible gratuitement.
Autre point, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé.
Mélanges à tisane
On va commencer par quelques mélanges à tisanes qu’il est bon d’offrir dans cette période de l’année. Je ne vais pas vous faire une liste de producteurs ou de boutiques qui vendent ces types de mélanges.
C’est un choix que j’ai fait dans la partie « grand public » de mes activités. Vu le trafic sur ma chaîne et sur mon site, je ne veux pas, aujourd’hui, mettre en valeur une boutique plutôt qu’une autre, ça me met dans des positions délicates par rapport à tous les gens que je connais et que j’apprécie dans notre milieu.
Dans les formations de l’école Altheaprovence, on a pris la position inverse, c’est-à-dire qu’on vous a fait un annuaire des producteurs et des boutiques de vos régions, car vous nous l’avez demandé et à a bien vu que pour construire votre pratique, au début, c’est une forte valeur ajoutée. On a une liste que l’on maintient depuis 2015, des différents fournisseurs de matériel, de plantes, de graines, etc. Mais ici, aujourd’hui, désolé, aucun fournisseur ne sera donné.
1. Mélange digestion et foie
Le premier mélange qu’il est bon d’offrir dans cette période concerne, comme vous pouvez vous en douter, la digestion.
L’approche classique consiste à donner un petit coup de pouce lorsqu’on a trop mangé. Globalement, si je simplifie, on met dans le mélange des plantes antispasmodiques et carminatives. Donc qui calment les crampes et les ballonnements.
Mais là, on va essayer de trouver un mélange d’action un peu plus large, qui peut se prendre pendant plusieurs jours autour de la période des fêtes, qui est plus englobant et qui inclut une action sur tout l’axe hépatobiliaire.
Donc voici les propriétés des plantes qu’il serait bon de retrouver dans ces mélanges. Si vous voulez acheter un mélange sans vous prendre la tête et sans regarder l’étiquette, c’est très bien, vous faites confiance à votre gentil producteur ou vendeur. Mais vu qu’on est là pour apprendre, j’aimerais disséquer tout ceci avec vous. Si vous comprenez les propriétés, vous pouvez ensuite faire vos propres mélanges ou regarder les étiquettes avec un œil un peu plus aiguisé. Et vous dire « cette tisane, oui, celle-là, il manque un truc ».
- Antispasmodique : c’est la base du soulagement digestif. Si on a des petites crampes, car on a trop mangé, les antispasmodiques vont détendre un peu les muscles lisses qui ont trop travaillé.
- Exemple : achillée millefeuille, acore odorant, angélique, menthe poivrée, sauge officinale, basilic, thym citronné, etc.
- Carminatif : si on a des stagnations avec ballonnements et production de gaz, ces plantes vont calmer les ballonnements. C’est plutôt appréciable lorsqu’on est en famille et qu’on ne se permet pas un échappement « libre »…
- Anti-nauséeux : eh oui, si on a un fond de nausée à cause des abus. Parfois, le lendemain, on se sent un peu vaseux.
- Exemple : gingembre, menthe poivrée, écorces d’orange, de mandarine ou de citron.
- Adoucissant digestif : c’est un peu moins important, mais ça peut être bénéfique si on a des petits reflux gastriques, ou si vous êtes une personne qui a vite une petite diarrhée dès qu’elle force un peu sur le fromage ou sur la buche à la crème de marron.
- Exemple : camomille matricaire, mauve, plantain, tilleul (inflorescences), cassissier (feuille)
- Cholérétique et cholagogue : ce sont nos plantes du foie, qui lui permettent de faire une meilleure production et excrétion de bile, ceci afin de mieux digérer tout ce qui est gras, de faciliter un transit tendance constipation, d’aider le foie à évacuer. Attention, certaines de ces plantes sont très amères, donc si c’est le cas, on les utilise avec modération. Mais cette catégorie est importante.
- Exemples : romarin, menthe poivrée, feuille d’artichaut, fumeterre, achillée millefeuille, camomille romaine, etc.
Donc voilà, si je devais composer mon mélange parfait, j’essaierais de piocher dans ces 5 catégories. Mais attendez, ce n’est fini. Ceux qui vous préparent des mélanges ont d’autres petits devoirs à faire…
Homogénéité du mélange
Si je mélange ces plantes à l’avance et que je les vends, il faut que mon mélange soit « homogène », avec des parties de plantes de taille et de poids à peu près semblables. Sinon, si je fais un mélange avec des fleurs de mauve, très grosses et légères, et des graines d’anis, très petites et compactes, une fois que j’ai malmené mon sec quelques fois, car je l’ai sorti du tiroir, ouvert, j’ai plongé la cuillère dedans, puis je l’ai rangé… A force de le secouer, les graines se retrouvent au fond du sac et les fleurs sur le dessus.
Ce n’est plus un mélange homogène, ce sont des couches de plantes unitaires au sein du même sachet. Et quand je vais piocher sur le dessus avec ma cuillère, je n’aurai plus la diversité recherchée. Donc ça, c’est la première complexité pour une boutique.
Efficacité, goût, apparence
Ensuite, il faut que le mélange soit efficace tout en ayant bon goût. Eh oui, et puis là, c’est pour un cadeau. Si j’offre un truc dégueulasse, je doute qu’on m’invite la prochaine fois. Et en pratique, ce n’est pas si facile que ça. Il faut en faire beaucoup, en goûter beaucoup, et garder les meilleurs. C’est comme ça qu’on se fait la main.
L’apparence est importante aussi. Il faut que ce soit un bal des couleurs à la fois dans le sachet et dans la théière. Je vais laisser ce point de côté, car sinon ça va trop compliquer. Mais c’est pour cela que vous verrez des pétales de bleuet, de souci, de monarde, pour apporter de la couleur et de la beauté dans les mélanges.
Mon mélange digestion et foie
Du coup, si je devais faire un mélange très simple, efficace, avec un goût relativement agréable, avec des plantes que j’ai au jardin ou près de chez moi, voici ce que je mettrais :
- Menthe poivrée (ou tout autre type de menthe, on peut jouer avec les goûts ici – menthe ananas, menthe chocolat, menthe pomme, menthe bergamotte, etc.) : antispasmodique, carminative, antinauséeuse.
- Romarin : antispasmodique, cholérétique et cholagogue, donc ma plante du foie. La menthe poivrée, d’ailleurs, a aussi cette propriété.
- Basilic : pour les gaz et pour son petit goût agréable, attention que les feuilles ne soient pas trop vieilles sinon ça goûte plus rien.
- Camomille romaine (un peu) : car j’ai envie d’une touche d’amertume, pour mon foie.
- Mauve sylvestre (un peu) : car c’est beau et ça apporte la douceur des mucilages.
Et c’est déjà pas mal. Si vous êtes curieux de voir les proportions que j’ai associées à chaque plante, c’est sur mon site. Est-ce que le mélange est homogène ? Oui, à peu prés, je pense. Est-ce qu’il aura bon goût ? Oui, parfait pour moi. Est-ce qu’il sera beau ? Je pense, il y aura du vert, du blanc, du mauve… Et on mettra 1 cuillère à soupe du mélange pour 1 tasse d’infusion.
Pour 100 g de mélange :
- 30 g : Menthe poivrée
- 30 g : Romarin
- 20 g : Basilic
- 10 g : Camomille romaine
- 10 g : Mauve sylvestre
2. Mélange de Noël
Le 2ᵉ mélange que j’aime bien offrir, c’est ce que j’appelle le « mélange de Noël ». C’est un mélange doux et épicé, pour quand on a froid, pour quand on est en bonne compagnie et qu’on a juste envie de partager ce moment autour d’une bonne tasse.
Vous aurez des versions avec des thés noirs, des thés verts. Vous aurez des versions avec des plantes de chez nous, je pense qu’il serait intéressant de tester avec des feuilles de ronce fermentées par exemple (processus et recette ici).
Le but, c’est de créer un goût fruité et épicé. Pour les épices, certains essaient de créer avec du purement local. Moi, j’ai du mal à me passer de mes épices, je dois vous l’avouer. Vous pouvez faire confiance à votre boutique pour composer le bon équilibre des goûts.
Cela dit, j’aimerais aussi vous inciter à expérimenter avec des choses toutes simples :
- Moi, je prends une base de thé noir, car je trouve que son goût est assez robuste et il peut bien tolérer les goûts typés, forts, épicés qu’on va lui associer. Le thé vert à un peu plus de mal. Si vous voulez tester quelque chose de plus local, vous pouvez faire fermenter des feuilles de ronces, ce n’est pas très compliqué à faire.
- Ensuite, je vais jouer avec les épices. Les classiques : la cannelle de Ceylan (pas la cannelle casse), la cardamome, le gingembre, les clous de girofle, la noix de muscade.
- Ensuite, les agrumes. J’adore les écorces d’agrumes. Vous les récupérez sur des agrumes bio, vous découpez juste la partie externe aromatique, pas la partie blanche. Vous coupez finement, vous faites sécher et vous les intégrez ensuite. Vous aurez du plus doux, comme l’orange douce (qui est l’orange de consommation), au plus amer comme l’écorce d’orange amère qui provient du bigaradier. La mandarine est super intéressante aussi, je trouve.
- Ensuite, du fruité : des petits morceaux de pomme séchée (je trouve que ça donne un goût délicieux), des raisins secs, des petits morceaux de figue séchée. Pas trop, faut trouver le bon équilibre.
- Parfois, on rajoute un petit goût anisé avec l’anis vert ou la badiane. Pour du plus local, on a l’agastache anisée. Pas trop non plus, et ça dépend des goûts. Moi, je préfère m’en passer pour mon mélange de Noël.
- J’ai vu des tisanes de Noël avec des feuilles de frêne, avec des feuilles de murier. Ça rajoute un petit goût particulier.
- J’aime beaucoup le parfum floral des pétales de rose que l’on retrouve dans certains mélanges. Pas beaucoup non plus, faut pas que ça prenne trop le dessus.
Donc ici, on est beaucoup moins centré sur les propriétés, beaucoup plus sur les saveurs, bien que, je vous dirais que nombreuses de ces plantes auront un effet stimulant, circulatoire, digestif, immunostimulant qui sera intéressant pendant cette période.
Et vraiment, l’idée c’est tout les ingrédients en modération, une petite touche de chaque catégorie par-dessus une bonne base de thé noir, type Assam ou Ceylan, et de venir ensuite parfumer avec parcimonie.
Si je devais démarrer avec des proportions, je dirais :
- 70 % thé noir en poids
- 20 % fruits secs (agrumes inclus)
- et 10 % épices
Je pars de là, je goûte et j’ajuste. Et si vous voulez une suggestion détaillée pour 100 g, voir mon site, mais je vous préviens, ça fait un moment que je me la suis notée sur un morceau de papier et je ne l’ai pas encore testée… Et puis j’aime quand c’est bien épicé, donc vous êtes prévenus !
- Thé noir Ceylan : 70 g
- Fruits secs : 20 g
- Écorces d’orange douce : 10 g
- Petits cubes de pomme séchée : 5 g
- Petits cubes de figue séchée : 5 g
- Épices : 10 g
- Cannelle de Ceylan écorce, concassée grossièrement : 5 g
- Gingembre, rhizomes séchés coupés finement : 2 g
- Cardamome écrasée : 2 g
- Clous de girofle : 1 g
Livres à offrir
Allez, on passe maintenant à 3 livres qui vont faire de sympathiques cadeaux. Les deux premiers sont un peu plus ludiques, une lecture facile et légère, on va dire. Ils feront de très bons livres pour laisser sur la table du salon.
Le premier, c’est le livre de Boris Presseq sur les arbres, et qui s’appelle « Arbres« , tout simplement. On m’a offert ce livre dans le courant de l’été et j’ai pris beaucoup de plaisir à le lire. Boris est botaniste au Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse. Un gars passionné et ça se sent. Le livre explique ce qu’est un arbre, son anatomie, son milieu de vie. On y trouve des petites pépites comme la lecture de la litière d’une forêt pour connaître les arbres qui poussent dedans. C’est joli, rempli de photos, de dessins, de couleur. Un prix très abordable, donc un chouette petit cadeau.
Le deuxième, c’est une bande dessinée qui s’appelle « L’Homme qui aimait les plantes » de Stéphane Piatzszek. Je ne suis pas du tout bande dessinée, je lis plutôt des livres. Mais cette bande dessinée, elle est un peu particulière. Elle décrit la vie de Jacques Fleurentin, qui est enthnopharmacologue et qui a parcouru différents pays du monde pour aller documenter les plantes utilisées par certains peuples. Il a dirigé le laboratoire de recherche de Jean-Marie Pelt à l’Université de Metz. Il a étudié sous Jean-Marie Pelt, respect. Il a écrit ce magnifique livre « Plantes des dieux, des démons et des hommes« . Qui n’est plus disponible apparemment, c’est fort dommage.
Et j’ai eu la chance de le rencontrer et d’échanger avec lui pendant plusieurs jours lors d’une fête des plantes en Normandie (et un grand merci au passage au collectif PAM-PAM qui organisait cette fête avec une énergie incroyable). Je vais vous dire : c’est tellement rare de rencontrer des gens reconnus dans leur domaine, avec des connaissances et une expérience hors norme, et qui ont cette simplicité et cette humilité. Moi, ça me touche à chaque fois.
Donc, j’irai interviewer Jacques en 2025. En attendant, c’est de la BD dont je voulais vous parler. Elle retrace son parcours, ses aventures dans différents pays. Donc laissez-vous transporter au travers de ce voyage.
Le 3e est pour celles et ceux qui s’intéressent de près au sujet du cancer, ou qui sont praticiens. C’est le livre de Jean-Loup Mouysset « Oncologie intégrative – Du cancer vers la santé« . Un personnage remarquable qui est en train de chambouler toute l’oncologie intégrative. J’ai assisté à plusieurs de ses séminaires, soit au centre Ressource à Aix-en-Provence, soit en ligne, et il a à la fois une connaissance et une humilité assez exceptionnelle. Il n’hésite pas à prendre certaines suppositions qu’on avait faites jusque-là et les retourner comme une crêpe.
J’ai bien l’intention d’aller l’interviewer en 2025. J’aimerais aussi vous faire une revue complète du livre. En attendant, ce livre deviendra, je pense, une référence. Plus de 600 pages de contenu. Très bien investi si vous voulez pousser la réflexion sur le cancer, son traitement et sa rémission.
D’autres idées de cadeaux
Vous avez bien sûr plein d’autres choix de cadeaux.
Je ne sais pas si vous avez déjà goûté des feuilles de menthe poivrée ou de verveine citronnée cristallisées dans du sucre. C’est vendu dans des petites boites, ça croustille, ça garde le goût de la plante (c’est assez bluffant). Et oui, c’est très sucré, on est d’accord, c’est pour juste en prendre une petite pendant les fêtes et avoir cette explosion de goût en bouche… Promis, juste une petite…
Certains font des cartes à jouer avec de belles images de plantes, d’autres font des cartes postales. Si vous utilisez un agenda papier, vous trouverez des versions illustrées avec des plantes médicinales. On m’a récemment offert un magnifique marque page fait avec des feuilles et des fleurs… Donc les possibilités sont nombreuses. Mais bon, fallait bien faire un choix pour cet épisode !
Allez je vous laisse, passez du bon temps avec les gens que vous aimez et qui vous aiment. C’est le plus important. Et surtout, merci d’être là !
Aujourd’hui, on parle de toux grasse et d’infections des bronches. Et j’aimerais que l’on parte de la supposition suivante : on n’a plus rien dans le placard d’herboristerie. Que dalle. Le thym, y a plus qu’un fond de sachet. L’hysope ne sent plus rien. Le lierre terrestre, n’en parlons pas.
Bref, c’est la dèche, et pourtant, la toux grasse est belle et bien là et elle nous a pris un peu par surprise. Que faire dans cette situation ? Vous allez voir qu’on n’est absolument pas au dépourvu avec des préparations simples, rapides et efficaces. Oui, les trois, c’est possible. Et avec des ingrédients que l’on a, en général, à la maison.
Avant de commencer, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. Et nous sommes vraiment heureux de vous accueillir, c’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité, et toujours accessible gratuitement.
Autre point, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription ou autre acte médical. En particulier dans cet épisode dans lequel je vais vous parler d’infection des bronches…
Infection des bronches
Que se passe-t-il lorsqu’on attrape une bronchite ?
Supposons que le point de départ soit une infection virale, ce qui est la situation classique. Le virus pénètre dans les voies respiratoires par inhalation, il s’attache aux cellules des bronches grâce à des molécules à sa surface, des sortes de piquants qui viennent se fixer sur les cellules cibles. Il va pouvoir ainsi pénétrer les cellules des bronches et les infecter.
Les cellules infectées vont libérer des signaux d’alarme qui vont appeler les globules blancs (neutrophiles et macrophages en particulier) qui vont venir détruire le pathogène et nettoyer la zone. La zone est enflammée, les muqueuses sont rouges et gonflées, perméables, il y a exsudation de liquides, ce qui permet aux cellules immunitaires de venir baigner la zone pour faire leur travail.
Nos poumons vont aussi augmenter la production de mucus grâce à des cellules spécialisées.
Rôle du mucus
Il faut savoir qu’on produit continuellement du mucus dans les bronches, c’est ce qui permet de piéger les poussières et autres débris gênants et de les remonter à la surface pour qu’on puisse les éliminer.
Et là, il y a un truc fabuleux à observer si vous trouvez une vidéo, c’est le fait que tout le système bronchique est recouvert de minuscules poils qui vont osciller, par vague, pour remonter le mucus, centimètre par centimètre, dans la trachée, dans le larynx.
Ensuite, on va éliminer ce mucus soit par la voie digestive, car on va avaler le mucus (eh oui, pas très ragoutant, mais c’est comme ça que ça marche), soit parfois en le crachant (pas très ragoutant non plus, on est d’accord, mais là encore, c’est l’une des deux voies d’expulsion).
Ce mucus est absolument essentiel dans la résolution d’une infection des bronches avec toux grasse. Il va permettre aux cellules immunitaires de circuler, il va piéger les pathogènes, piéger les débris et nous permettre de les évacuer. L’immunité fonctionne à tour de bras, elle déverse ses déchets, donc il faut une évacuation rapide et efficace.
On a des récepteurs de la toux dans la trachée et dans les bronches qui vont être stimulés lorsque le mucus s’accumule, et ça va déclencher le réflexe de toux, qui va accélérer l’évacuation naturelle. En d’autres termes, les petits cils ne remontent pas le mucus assez vite pour la quantité produite, donc la toux va venir mettre un coup de pied dans tout ça et provoquer un mouvement énergique vers la sortie.
Point important de la stratégie toux grasse
Alors, à ce stade, j’aimerais qu’on prenne notre temps, car on va parler d’un point de stratégie qui est absolument clé.
Je ne sais pas si vous vous souvenez l’épisode que je vous ai fait sur les infections hivernales, la fièvre et les plantes diaphorétiques. Je vous ai dit que les médecins, à l’époque où ils utilisaient encore les plantes, insistaient fortement sur les plantes diaphorétiques et sudorifiques, et pas sur les plantes qui pourraient bloquer la fièvre, sauf exception. Je vous ai expliqué que les plantes diaphorétiques accompagnent une fièvre dans le sens de la guérison. On ne bloque pas, au contraire, on « graisse les rouages » des processus physiologiques naturels.
Eh bien là, on va faire un peu pareil. Pour les toux grasses, il va falloir accompagner ce mouvement remontant. De la profondeur vers la surface. De l’intérieur vers l’extérieur. Si vous ne retenez qu’une chose de cet épisode, retenez ceci : en cas d’infection des bronches, il faut avoir cette obsession de garder le mucus bien fluide et favoriser l’expectoration.
Dès que le mucus s’épaissit et que l’on peine à le faire sortir, on rentre dans une phase délicate. Le risque, c’est que le processus naturel de guérison soit entravé. Les petits cils peuvent se retrouver endommagés par l’inflammation. Notons au passage que ces cils sont déjà bien abîmés chez le fumeur. Parfois, le mucus n’est plus assez liquide pour être expectoré d’une manière efficace, il est gluant, il colle aux cils. Parfois, la personne est tellement fatiguée de tousser qu’elle n’a plus assez de tonus musculaire pour permettre la toux, qui nécessite la contraction de certains muscles.
S’hydrater, boire des tisanes
Que faire pour éviter cela ?
Déjà, il faut bien s’hydrater car l’eau est nécessaire pour garder le mucus bien fluide.
Ensuite, deux propriétés absolument clés des plantes : mucolytiques et expectorants. Et si on ne me donnait qu’un seul choix dans les propriétés des plantes, pour une toux grasse, eh bien ça va probablement vous surprendre. Mais je mets de côté les plantes anti-infectieuses, anti-virales, anti-bactériennes. Je mets de côté les plantes qui stimulent l’immunité. Je garde seulement les mucolytiques et expectorantes.
Et rien qu’avec ça, je m’assure que l’infection des bronches a un début, un milieu et une fin. Qu’elle ne traine pas. Qu’il n’y a pas de rechute. Qu’il n’y a pas de chronicité.
Bien évidemment, si vous me donnez le choix, je vais aussi sortir mes anti-infectieuses. Je vais sortir mes stimulantes immunitaires. J’aurai peut-être un mélange à infusion, peut-être des teintures de type propolis, échinacée… peut-être un sirop de type marrube, lierre terrestre, etc. Peut-être une friction aux huiles essentielles, peut-être des inhalations humides.
Mais si je ne devais choisir qu’un seul outil, je formule un mélange de plantes mucolytiques et expectorantes, bien dosées, à la bonne fréquence, sous forme d’infusion pour que la personne boive, avec des plantes bien aromatiques et résineuses comme le thym, l’hysope, le myrte, l’eucalyptus, le bourgeon de sapin et compagnie. La clé ici, c’est bien dosé, avec la bonne fréquence. Ce n’est pas juste une pincée de plantes par tasse, 2 tasses par jour.
Mais bien sûr, ceci est une situation tout à fait hypothétique, car je ne suis pas médecin, donc vous le savez, si vous avez une infection de type bronchite, allez consulter votre médecin avant toute chose.
Mucolytiques en cuisine
Mais retour au challenge initial que je me suis imposé. Dans le placard d’herboristerie, y a plus rien ! Donc on va aller fouiller dans les placards de la cuisine, et on va rechercher des aliments qui contiennent des constituants soufrés, des constituants qui augmentent les sécrétions, qui augmentent la fluidité du mucus et qui favorisent l’expectoration. Exactement ce que l’on recherche. Mucolytiques et expectorants.
Je vous propose 3 préparations qui ont fait leurs preuves dans notre tradition et dans de nombreuses familles :
- Le sirop d’oignon (le plus doux, c’est l’oignon blanc, mais si vous n’avez que du jaune ou du rouge, ça va le faire aussi, ça sera juste un peu plus fort)
- Le sirop de radis noir
- Le sirop de navet
La préparation, c’est toujours la même. On coupe finement le légume en question. Ensuite, dans un plat, on met une couche du légume frais, une couche de sucre, on répète 2 ou 3 fois, tout dépend de la taille du récipient, de la quantité que vous voulez produire. Et vous allez voir, dans les minutes qui suivent, vous allez commencer à voir apparaitre un liquide, un sirop, constitué du jus du légume que le sucre est venu tirer. C’est super rapide, quasi immédiat. Et vous pouvez commencer à prendre ce liquide à la cuillère à soupe.
Vous verrez aussi que l’effet mucolytique et expectorant est relativement rapide. Et ça, c’est appréciable. La prise est à répéter plusieurs fois dans la journée si nécessaire, pour s’assurer que ce mucus soit éliminé d’une manière efficace.
Vous avez peut-être vu que je n’ai pas mis l’ail dans la liste. Effectivement, on pourrait le rajouter, mais ça donne un sirop extrêmement fort, qui brûle si on le prend pur, et qui peut donner une forte nausée tellement il est puissant et irritant. On peut le diluer dans une quantité d’eau, c’est possible. Cela dit, restez avec l’oignon, le radis noir et le navet, ça fonctionne sans récurer les boyaux.
Rajout de teintures pour une toux grasse
Je mentionne au passage que vous pouvez rajouter des teintures dans votre sirop. En phytothérapie américaine, là où j’ai fait mes premiers pas en herboristerie, c’est assez classique de rajouter de 10 à 20% de teintures dans un sirop.
Donc, si j’avais une teinture de serpolet par exemple, je pourrais récupérer mon sirop d’oignon, le mettre dans une petite bouteille, mettre 20% de teinture de serpolet en volume (on peut faire à l’œil, ça représente 1/5 de la bouteille).
Puis on garde au réfrigérateur (on en fait une quantité juste pour quelques jours, car il n’y aura pas assez d’alcool dans les 20% de teinture rajoutée pour assurer une conservation hors du frigo), et ça va rajouter une force indéniable au sirop.
Le sucre : grand débat
Alors, à chaque fois que je vous fais un épisode dans lequel j’ose mentionner le sucre, en général, je me prends une volée de commentaire, style « comment oses-tu » et « tu ne crois pas qu’on a assez de sucre dans notre vie » et « tu devrais savoir qu’il y a plein de troubles métaboliques dans la population », etc. Oui, je sais, je vous rappelle que je suis aussi praticien, donc des bilans sanguins avec des glycémies en vrac, j’en ai vu passer ces dernières années.
Si je vous parle du sucre, c’est pour trois raisons :
- En général, on a du sucre en cuisine. Moi, j’ai toujours du miel aussi. Pareil pour vous, si vous écoutez cette chaîne, je suis convaincu que vous avez du miel. Mais le voisin qui vient me demander conseil, ou une personne que je suis et qui me passe un coup de fil la veille d’un jour férié, ou le tonton Robert qui a du mal à marcher, ces gens-là n’auront peut-être pas de miel, et pas la possibilité d’aller en acheter, mais ils auront du sucre. Donc là, j’ai un aspect pratique et immédiat.
- Le sucre a une excellente capacité à tirer le jus frais du légume en question. Donc là, j’ai un aspect efficacité.
- Pour moi, le ratio bénéfices sur risques est largement positif lorsqu’on est en panne de plantes, pour une prise sur le court terme. Et pensez toujours : quelle est l’alternative si je n’ai plus rien dans mes placards ?
Cela dit, si vous préférez faire avec du miel, vous pouvez. Personnellement, je trouve que le miel tire le jus d’une manière moins efficace, mais ça sera un peu plus « sain » globalement. Vous êtes grands, je vous laisse décider.
Résumé toux grasse
Donc, faisons un petit résumé. Ces aliments riches en constituants soufrés, que l’on a tous dans nos cuisines, nous permettent de garder le mucus fluide, de l’expectorer et d’accompagner une toux grasse et infectieuse dans le sens de la guérison. Un sirop maison de ces aliments, pris régulièrement dans la journée, peut grandement nous dépanner, peut-être parce qu’on est à court de plantes. En parallèle, cela nous donne un peu de temps pour refaire des provisions et d’aller consulter le médecin si nécessaire, ne laissez pas trop trainer une toux grasse non plus, attention au risque de rechute.
Il y a d’autres catégories de plantes qui peuvent s’avérer très utiles ici, celles riches en résines, celles riches en substances aromatiques, un peu de plantes riches en mucilages aussi pour équilibrer le mélange et apporter un effet adoucissant… si vous voulez aller plus loin dans la compréhension fine de ce type d’accompagnement, toujours dans la prudence, je vous rappelle que ma formation Immunité, infections respiratoires et ORL vous fournit des heures d’enseignement sur le sujet.
C’est tout pour cet épisode. J’espère que vous n’aurez pas besoin de préparer un sirop de navet, mais si c’est le cas, vous saurez comment le préparer, et surtout que ces préparations ont été validées par la tradition. Si le grand docteur Valnet nous disait, au sujet du navet, « boisson pectorale dans les affections pulmonaires, excellent pour les malades d’une manière générale », je peux vous dire que ce n’est pas pour rien.
Merci d’avoir été à l’écoute et à très bientôt !
Bonjour,
Nous sommes à la mi-novembre, et comme chaque année, on commence à se poser des questions sur les infections hivernales. Du style, comment les accompagner au mieux. On parle beaucoup de l’immunité ces dernières années, c’est normal. Nos défenses immunitaires, lorsqu’elles sont fortes, vont faire en sorte que le pathogène n’ait pas l’opportunité de s’installer et de provoquer une infection.
Si une infection s’installe, on a vite fait de penser aux plantes qu’on appelle « anti-infectieuses », c’est-à-dire qui nous aident à combattre l’infection d’une manière directe.
Mais il y a une catégorie de plantes que les médecins portaient en très grande estime dans le passé. À une époque où l’on passait du temps au chevet du malade, où on observait avec attention, où on prenait le pouls, on touchait la personne pour voir si elle était chaude et fiévreuse, si sa peau était humide…
Je fais une petite parenthèse, je ne sais pas si vous avez connu cette époque. Moi je suis un gamin des années 70, et on avait un médecin de famille qui venait à la maison lorsqu’on était malade. Il avait un certain âge, et il était toujours très rassurant, et quand il posait ses mains sur mon front, et qu’il me disait « tout va bien aller, petit », j’étais à moitié guéri ! Oui, je suis un peu nostalgique de cette époque où l’on prenait le temps.
Mais retour à nos plantes. Il y a cette catégorie bien particulière qui est complètement tombée dans les oubliettes, dans les douves profondes de l’herboristerie… Et elles sont particulièrement intéressantes parce qu’elles sont toutes simples, locales, d’une grande utilité et surtout, elles accompagnent tous les processus physiologiques dans le bon sens, sans rien supprimer, sans rien bloquer.
Si vous n’avez pas encore deviné de quelle catégorie de plantes je vais vous parler, je vais vous laisser mariner encore quelques minutes.
Avant de commencer, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. Et nous sommes vraiment heureux de vous accueillir, c’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité, et toujours accessible gratuitement. On vous mettra le lien vers tous les programmes sous cet épisode.
Autre point, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription ou autre acte médical. En particulier dans cet épisode dans lequel je vais vous parler de fièvre…
Effets diaphorétiques et sudorifiques
Alors, la propriété dont je voudrais vous parler, c’est l’effet diaphorétique. Un terme qui est souvent confondu avec le terme sudorifique.
Donc on va essayer de faire la distinction entre les deux en regardant tout simplement la définition.
- Diaphorétique : qui facilite la transpiration
- Sudorifique : qui provoque la transpiration
C’est pas pareil… Prenons deux exemples.
L’une des plantes diaphorétiques les plus connues, c’est la fleur de sureau. Si vous buvez une infusion de fleurs de sureau et que tout va bien, c’est une journée fraiche d’automne, vous n’avez pas de fièvre, vous buvez l’infusion et vous regardez ce qu’il se passe au niveau de votre peau. Vous n’allez pas voir grand-chose. À la limite, si on regardait au microscope, peut-être qu’on verrait une légère humidification de la peau. Mais on ne va pas se mettre à transpirer.
Par contre, si je suis fiévreux, ces plantes vont faciliter la transpiration à ce moment-là. Et l’effet sera notable. Plus la fièvre est élevée et plus les plantes diaphorétiques stimulent cette transpiration qui fait partie du processus de guérison. Mais si on ne transpire pas, elles ne vont pas faire grand-chose. Ça, c’est l’effet diaphorétique.
Maintenant, je me prépare une infusion de gingembre frais. Je vais bien la charger, comme je l’aime, car j’adore tout ce qui est un peu fort et épicé. Aux doses que j’utilise, dans les minutes qui suivent l’ingestion de mon infusion, même si je ne suis pas malade et qu’il fait une journée fraiche, je vais me mettre à transpirer. Ca chauffe. Donc ces plantes déclenchent véritablement une transpiration.
Et ça, ça peut être vraiment intéressant dans certaines situations. Dans les vieux ouvrages, on voit que le médecin était très attentif à l’apparence et au ressenti du malade, au pouls du malade aussi, à la couleur, l’humidité de sa peau. Si le malade était fébrile, agité, rouge et chaud au toucher, mais qu’il ne transpirait pas, au bout d’un moment, le médecin n’aimait pas ça du tout. On voulait voir le malade qui commence à transpirer, à évacuer la chaleur. Ça, c’était bon signe. Ça allait dans la bonne direction, dans la direction de la redescente en température et de la guérison. À ce moment-là, on utilisait parfois des plantes sudorifiques pour débloquer les choses.
C’est bon ? Vous me suivez jusque-là ? Je répète.
- Diaphorétique : on facilite l’évacuation de l’eau au niveau de la peau, on facilite la transpiration, mais on ne la provoque pas vraiment.
- Sudorifique : on provoque la transpiration.
Les herboristes américains ont deux termes un peu différents des nôtres, que j’aime beaucoup. Ils parlent de « diaphorétiques relaxants », qui relaxent les pores de la peau, qui les ouvrent un peu plus pour faciliter la sécrétion de sueur. Et « diaphorétique stimulant », qui eux, sont plus énergétiques, plus chauds, circulatoires, et qui provoquent la transpiration. Leur diaphorétiques stimulants, ce sont nos sudorifiques.
J’espère que je ne vous ai pas perdu avec ces définitions. C’est bon ?
Pause : rôle de la sueur dans le processus de fièvre
D’ailleurs, à ce stade, faisons une petite pause. Pourquoi on parle de transpiration ? C’est quoi le lien avec la fièvre, c’est quoi l’effet bénéfique de la sudation ?
Petit rappel du processus de fièvre. Notre système immunitaire détecte un pathogène qui commence à se répliquer à notre insu, à l’intérieur de notre corps. Les globules blancs font de leur mieux pour gober, pour phagocyter cet intrus. Au passage libèrent des substances inflammatoires pour alerter tout le système et provoquer la montée en température. On dit que ces substances sont « pyrogènes ». Parfois le pathogène lui-même, en se répliquant ou en étant détruit par les leucocytes, libèrent des toxines qui seront, elles aussi, pyrogènes.
On a un thermostat au niveau de l’hypothalamus qui détecte ces substances, et qui va faire monter la température en fonction de la quantité de ces substances. Eh oui, plus on a de substances inflammatoires et d’endotoxines qui circulent, plus le cerveau va se dire qu’il y a un truc qui ne tourne pas rond. Donc on monte le thermostat.
On va ressentir une sensation de froid, on va se blottir sous les couvertures. Il y aura une vasoconstriction à la périphérie du corps, c’est-à-dire qu’on va contracter toutes les petites artérioles proches de la peau pour ramener le sang vers l’intérieur et minimiser les pertes de chaleur. On va générer plus de chaleur au niveau cellulaire, le métabolisme augmente.
Lorsque la température corporelle est plus élevée :
- Les pathogènes ont du mal à se développer ;
- Les globules blancs sont plus mobiles ;
- Les globules blancs prolifèrent plus rapidement ;
- Et ils sont plus efficaces à phagocyter, à absorber les intrus.
Ensuite, lorsque notre corps décide que le plus gros de l’infection est sous contrôle, on va commencer à évacuer toute cette chaleur en trop pour que la température redescende, et la transpiration est très importante dans cette phase de retour à la normale.
Donc la fièvre fait intégralement partie du processus de guérison. Et la sudation fait intégralement partie du processus de redescente de la température corporelle dans la fièvre.
Plantes sudorifiques, diaphorétiques et fièvre
C’est pour cela que les médecins, de tous temps, se sont intéressés aux plantes sudorifiques et diaphorétiques, pour faciliter de bons échanges de chaleur pour la régulation thermique lors d’une fièvre.
Lorsqu’on avait une personne qui grelottait sous ses couvertures, on lui préparait des infusions de plantes réchauffantes. On utilisait volontiers des plantes aromatiques comme le thym, le romarin, la sauge. On utilisait volontiers les épices dans certains pays et certaines traditions.
Les épices sont vraiment intéressantes, car elles sont sudorifiques. Dans la tradition américaine, les médecins du courant Physiomédicaliste utilisaient souvent le piment lorsque le malade avait du mal à percer cette fièvre, à aller jusqu’au point où il commence à bien transpirer, à évacuer. Moi j’aime beaucoup rajouter une pincée de piment, pas beaucoup, attention, faut tester d’abord, dans une infusion de thym dans cette phase de montée en température, lorsqu’on grelotte.
Le gingembre est excellent aussi, frais, mélangé à du thym ou de l’origan, en infusion chaude. Avec une rondelle de citron. Super agréable.
À un moment donné, on a percé cette fièvre. La transpiration arrive, abondante. On se découvre. On a chaud. A ce moment-là, on passait aux plantes diaphorétiques. Des plantes qui allaient gentiment faciliter l’évacuation de l’eau, sans pour autant trop stimuler la circulation et apporter ce ressenti très chaud dont on a besoin lors de la montée en température. Là on est en phase de descente. On passait à la fleur de sureau, à la menthe poivrée, aux inflorescences de tilleul. Pas besoin de faire compliqué. Avec ces trois, vous faites d’excellents mélanges.
En herboristerie américaine, on aimait beaucoup le mélange fleurs de sureau et menthe poivrée. On est dans le « diaphorétique relaxant » ici, si j’utilise les termes américains des années 1800. On relaxe les pores de la peau. On facilite l’évacuation sans stimuler comme avec du piment ou du gingembre.
Comment est-ce que l’on prend ces plantes ? En infusion, tout simplement. Le fameux phytothérapeute et médecin allemand Rudolf Weiss, dont je vous parle souvent, nous dit qu’une simple infusion de fleurs de tilleul avec des fleurs de sureau fera l’affaire. Une tasse, plusieurs fois par jour, et que l’on va boire régulièrement par gorgées, tout au long de la journée. C’est la fréquence qui compte ici.
Weiss nous cite une étude de l’époque faite à l’université de Chicago avec 55 enfants qui ont des symptômes grippaux. Certains sont traités avec du repos et une simple infusion de tilleul, d’autres avec antibiotiques, d’autres avec aspirine et antibiotiques. Les auteurs furent surpris de constater que les enfants qui ont seulement pris l’infusion de tilleul avec du repos s’en sortent plus rapidement et avec moins de complications que les autres ! Weiss conclut en disant que cette étude corrobore parfaitement sa propre expérience.
Ensuite, si tout s’est bien déroulé, la fièvre redescend, et on passe à la phase suivante, qui, lorsque l’infection avait été carabinée, était la phase de convalescence. Je mets ça au passé, car on a un peu zappé cette phase aujourd’hui. Faut très vite retourner au travail, très vite être productif, très vite graisser les rouages de la société de consommation. C’est ainsi.
Dommage, une bonne convalescence, c’est ce qui permet d’éviter une rechute et de renforcer l’immunité.
Diaphorétiques : et le grog dans tout ça ?
A ce stade, vous allez peut-être me dire… mais attend, et le grog dans tout ça ? Eh oui, le grog ! Y a bien quelqu’un chez vous, qui vous a proposé un grog, non ?
Weiss nous dit la chose suivante : « De l’eau chaude, du sucre, du rhum ou du brandy provoqueront une bonne transpiration ». Parfois, on rajoute des épices, du jus de citron. C’est plutôt sympathique comme breuvage. Mais clairement, faut pas en abuser.
Cela dit, l’alcool a un effet vasodilatateur, ce qui va favoriser une meilleure transpiration s’il y a fièvre. Bien évidemment, nous, on va plutôt privilégier les plantes diaphorétiques sous forme d’infusion. Mais je voulais tout de même mentionner le grog, car je sais que certains d’entre vous vont me laisser un commentaire sur le sujet. On referme cette parenthèse…
Ne pas bloquer la fièvre
Notez que nulle part, absolument nulle part ici, j’ai mentionné le terme « fébrifuge », qui force la fièvre à diminuer. Qui bloque le processus de fièvre.
Ça, c’est quelque chose de relativement moderne. On commence à le voir avec l’arrivée de l’aspirine au travers de la société Bayer au début des années 1900, en France on aura « l’aspirine des Usines du Rhône ». Et ainsi commence un très long cycle de suppression des fièvres.
Ce fameux acide acétylsalicylique, vous le savez peut-être, est tiré des dérivés salicylés de la reine-des-prés, du saule, et on utilisait parfois ces plantes dans les fortes fièvres, c’est vrai. On essayait de juguler une forte fièvre. Mais la plupart du temps, on accompagnait plutôt la fièvre, on savait qu’il ne fallait pas la bloquer.
J’ai trouvé des vieux ouvrages dans lesquels le médecin insistait fortement sur le fait que les plantes diaphorétiques jouaient un rôle absolument essentiel, crucial dans la résolution de la fièvre et des infections. Vous voyez, aujourd’hui, dans le monde des plantes, on parle d’immunostimulant, d’antibactérien, d’antiviral, de modulateur de l’inflammation.
OK, très bien.
Mais les termes diaphorétiques et sudorifiques, qui les emploie encore ? Et surtout, qui sait utiliser ces plantes lors d’une fièvre ? Eh oui, on a perdu cette finesse de l’accompagnement. Et donc, ne pas sachant, on va bloquer plutôt que de soutenir.
Cela dit, toute stratégie a sa place. Toute molécule a sa place, aspirine et compagnie. A voir avec votre médecin. Bien sûr qu’il y a un moment où ces molécules sont utiles. Bien sûr qu’il y a des moments où votre médecin décidera qu’il faut intervenir, car la fièvre est trop forte, ou trop incommodante. Mais saurait-on, aujourd’hui, en faire une utilisation raisonnée, alors qu’on a des stratégies qui apparaissent peut-être un peu vieillottes, mais qui sont naturelles, sécuritaires et ont prouvé leur efficacité ?
Si ce cher Rudolf Weiss, remarquable praticien en son temps (et ce n’est pas si vieux que ça, on parle des années 1960), nous dit : « Les traitements qui provoquent la transpiration ont toujours été efficaces pour les infections aiguës », ce n’est peut-être pas pour rien, non ?
Cette stratégie est-elle toujours efficace aujourd’hui ? Oui, elle peut l’être, comme parfois, le terrain de la personne est tellement délabré, on traine de telles fatigues, de telles déficiences immunitaires, que ces simples stratégies ne sont parfois pas suffisantes. Il faut alors démarrer une discussion sur le plus long terme au sujet de comment remettre en place tous les grands piliers de la santé.
C’est pas facile du tout. Et nous, praticiens, on est souvent confrontés à ce genre de situations. C’est pour ça qu’il faut s’inspirer de la tradition. Mais il faut surtout savoir mettre en pratique, tester, dans la prudence, mais valider cette grande salade d’information, pour qu’on puisse, à notre tour, écrire une nouvelle page de l’herboristerie.
Ça va peut-être sonner un peu prétentieux ce que je suis en train de dire, au sujet d’une nouvelle page, mais franchement, si c’est pour répéter, régurgiter des trucs à moitié digérés, je pense qu’on peut plier nos livres, nos cahiers, nos notes et aller acheter la prochaine boite de paracétamol.
Je vous laisse réfléchir à tout ça… Et si vous voulez aller plus loin dans l’accompagnement de l’immunité et des petites infections hivernales, dans la prudence, n’oubliez pas que j’ai une formation dédiée à ce sujet !
Merci d’être là, et à très bientôt !
Aujourd’hui, j’aimerais vous parler d’une petite plante médicinale toute discrète que vous allez trouver dans les régions montagneuses : Alpes, Massif-Central, Pyrénées principalement. On l’appelle « casse-lunettes », elle est très connue pour tous les soins des yeux, mais on verra qu’elle peut aussi dépanner pour d’autres indications. Je vous présente l’euphraise.
Avant de commencer, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. Et nous sommes vraiment heureux de vous accueillir, c’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité, et toujours accessible gratuitement. On vous mettra le lien vers tous les programmes sous cet épisode.
Autre point, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription ou autre acte médical.
Un peu de botanique
On commence par un peu de botanique. L’euphraise officinale (Euphrasia officinalis), c’est une petite plante annuelle de la famille des orobanchacées. Avant elle était classée dans les scrophulariacées, mais on a décidé de la déménager avec la classification phylogénétique. Les orobanchacées, c’est une famille qui comprend notamment les orobanches, et donc ça va nous donner une petite indication sur la manière dont l’euphraise va se nourrir.
En fait, c’est une plante hémiparasite, principalement des poacées (pas uniquement, mais on va simplifier), c’est-à-dire de tout un tas d’herbes que vous allez trouver dans les prairies comme les pâturins, les fétuques, les avoines sauvages, etc.
Hémiparasite, ça veut dire que la plante sait faire de la photosynthèse par elle-même, mais elle va aller pomper certaines choses dans d’autres plantes : de l’eau et des minéraux. Pour comprendre comment l’euphraise fonctionne, il faut regarder le système racinaire. On voit une racine principale, d’où naissent des racines secondaires qui vont développer de très nombreux petits suçoirs. Ces suçoirs viennent perforer les racines de l’hôte, donc des graminées, pour venir pomper les liquides et se servir.
C’est pour cela que vous allez trouver l’euphraise principalement dans les prairies de montagne. Donc ne la cherchez pas dans la forêt mais dans l’herbe, sous vos pieds, parfois au bord du chemin de randonnée, et regardez les cartes de répartition pour voir si elle pousse dans votre coin.
État de la ressource sauvage
D’ailleurs, on va évoquer l’état de la ressource sauvage, un sujet qui devient de plus en plus d’actualité. Pour ce faire, j’ai contacté mes amis de l’AFC, l’Association Française des professionnels de la Cueillette de plantes sauvages, qui font un travail remarquable pour recenser les espèces et nous aider à mieux gérer les espaces de cueillette en France. Voici ce qu’ils m’ont dit.
On a repéré l’Euphraise officinale dans les plantes à surveiller : niveau 2 sur 4 de tension, sachant que le niveau 1 est le plus tendu (donc c’est pas comme du pissenlit ou du plantain, la petite euphraise commence à ressentir des tensions). On ne l’a pas encore sérieusement travaillé sous forme de livret technique à l’AFC, mais voici les infos qui me sont remontées du terrain :
- Il y a de la demande et il n’est pas facile de trouver des sites de cueillette, qui sont une espèce de prairie naturelle dont les milieux sont en régression ;
- La plante est sensible à la sécheresse et on a connu quelques années bien sèches avant 2024 ;
- La détermination peut être difficile et donc risque de confusion avec des espèces rares (et là je pense que l’AFC parle des autres euphraises qui sont plus menacées que l’officinale… un peu de spéculation de ma part).
Elle n’est pas règlementée, mais indiquée par l’UICN (L’Union Internationale pour la Conservation de la Nature) en état de vulnérabilité dans le Nord de la France et quasi menacée en Bourgogne et Champagne-Ardenne.
Et pour finir, je vous mets aussi le lien vers les informations de l’INPN (l’Inventaire National du Patrimoine Naturel) sur le statut de la plante. Toutes les infos sur mon site.
Donc le message ici, c’est qu’aujourd’hui, on s’intéresse à ce genre d’informations. C’est important. Et que l’euphraise est en état de tension en fonction du lieu. Donc renseignez-vous avant de ramasser.
L’euphraise au jardin
Vous m’avez parfois demandé comment introduire l’euphraise au jardin. J’ai testé pour vous à partir de graines. Et je n’y suis jamais arrivé. On m’avait dit de semer sur un morceau de prairie, chose que j’ai faite. J’avais prélevé un carré d’herbe d’un champ en friche avec pas mal de poacées, je l’ai amené dans ma serre, et j’ai semé des graines d’un fournisseur de confiance dessus. Et rien n’est sorti.
Je pense que le plus simple serait probablement de prélever un carré dans lequel l’euphraise pousse déjà, histoire de sélectionner les bonnes plantes hôtes, et transplanter ce carré au jardin et voir si l’euphraise y persiste année après année.
Mais je n’en sais pas plus, désolé, j’ai vite abandonné mes expérimentations sur la culture de cette plante qui me semblait compliquée.
Constituants de la plante
Je vous propose un petit coup d’œil sur les constituants de la plante :
- Elle contient de nombreux irridoïdes qui sont analgésiques, anti-inflammatoires, antispasmodiques (aucuboside, euphroside, catalpol, etc.)
- Des flavonoïdes qui sont très antioxydants, antiinflammatoires, protecteurs vasculaires (quercétine, apigénine, etc.)
- Des acides phénols qui sont, eux aussi, antioxydants et antiinflammatoires (acide chlorogénique, acide caféique, acide férulique, etc.)
- Et des tanins, la plante en contient une bonne quantité et nous laisse ce goût astringent en bouche.
Donc ça va nous donner une bonne base de réflexion qui viendra confirmer les propriétés et indications de la plante.
Notions d’énergétique
Mais d’abord, j’aimerais vous donner quelques notions d’énergétique de la plante. Je vous renvoie au modèle simplifié d’énergétique que j’utilise et que j’ai moi-même appris lorsque j’étais sur le continent nord américain. Le lien est à la fin de cet article.
L’euphraise est d’énergétique rafraichissante et asséchante.
Rafraichissante, car elle agit sur les tissus enflammés, rouges, irrités à cause des allergies ou d’infections virales ou bactériennes. Elle calme l’inflammation des muqueuses du système respiratoire supérieur comme nous allons le voir.
Asséchante de par sa richesse en tanins, qui viennent freiner les exsudations, les hypersécrétions des muqueuses, les décharges allergiques ou purulentes. Et donc tonique des muqueuses aussi, qui renforce leur intégrité, leur barrière face aux agressions extérieures.
Donc pour simplifier, l’état des tissus associé est un état rouge, chaud, engorgé, boursoufflé avec sécrétions abondantes. Et vous allez voir que l’on va retrouver tous ces points dans les indications traditionnelles.
Propriétés et indications
Inflammation oculaire
OK, on passe donc aux propriétés et indications de l’euphraise. La première propriété à retenir, c’est sa capacité à calmer toute inflammation oculaire, qu’elle soit de nature allergique ou infectieuse.
Pour la partie infectieuse, on est vraiment dans les conjonctivites, les orgelets, les blépharites. À appliquer plusieurs fois par jour, vraiment ne pas hésiter. Lorsque la condition est aiguë, si on veut que les choses bougent, il faut faire des applications régulièrement dans la journée, toutes les heures ou toutes les deux heures si nécessaire.
Pour la partie allergique, je pense que vous voyez de quoi je parle, ces périodes où on a les yeux qui grattent et parfois ça devient insupportable, la muqueuse de l’œil est rouge, mais ce n’est pas infectieux, et ça peut durer des jours et des jours. On est donc dans une situation un peu moins aiguë, mais qui reste bien inflammatoire, qui dure un peu plus longtemps. Donc là on va plutôt partir sur une application 2 à 3 fois par jour idéalement, mais on peut faire plus si nécessaire pour soulager.
On est ici dans l’application locale d’une plante pour laquelle nous n’avons pas de précautions d’emploi connue, donc on ne va pas trop hésiter si on en ressent le besoin. On parlera des formes et préparations dans quelques minutes.
Congestions nasales
Une propriété largement moins connue, c’est le fait qu’elle décongestionne pour toute la sphère nasale. La congestion, c’est cette sensation de pression dans les fosses nasales que l’on peut avoir lorsqu’on a une rhinite par exemple. C’est enflammé, ça coule, on a l’impression que la tête a doublé de volume.
L’euphraise peut aider à décongestionner ces fosses nasales, à dégonfler un peu les tissus. C’est pour ça que Valnet l’indique dans le coryza ou « rhume de cerveau ». Et là faut vraiment s’imaginer la tête comme un ballon et le sentiment de pression dans la tête, avec des yeux à demi fermés.
Le médecin éclectique américain Harvey Felter, au début des années 1900, nous dit la chose suivante (j’ai traduit et simplifié les termes parfois un peu techniques et complexes) :
« C’est un remède admirable pour les inflammations catarrhales aiguës des muqueuses nasales et oculaires, avec sécrétions abondantes, chaleur, douleur, sensation de brûlure et éternuements. C’est un outil fiable pour les coryzas aigus et les ophtalmies avec larmoiements abondants. »
Donc chez Felter, qui avait une expérience remarquable des plantes, l’euphraise serait plus indiquée lorsque c’est chaud, enflammé, avec sécrétions abondantes, vraiment il faut s’imaginer que ça coule et que ça pleure de tous les côtés, donc on parle à la fois de la fosse nasale et des yeux. Donc là on est plutôt dans l’infectieux. Cela dit, à son époque, il y avait largement moins de conditions allergiques.
Un autre médecin, le docteur Fernie, qui est cité dans le célèbre ouvrage de Maud Grieve qui date de 1931. Le médecin dit que « Les rhumes de cerveau et autres attaques de froid à la tête peuvent être stabilisées grâce à une infusion d’euphraise prise toutes les 2 heures ». Vous notez, là encore, la fréquence de prise pour une problématique aiguë.
Serait-ce efficace dans les cas de sinusites ? Felter nous dit que oui, à la fois pour prévenir les sinusites chez la personne à risque, mais aussi pour soulager dans le stade débutant de la sinusite aigue et frontale. Donc vous avez vu ? C’est précis tout ça. Ce sont ce qu’on appelle des « indications spécifiques ». Felter partage sa longue expérience ici, dans laquelle il a probablement observé que dans les stades débutants, on peut soulager la sinusite, mais il faut agir dès le début sans attendre.
Et pour les conditions allergiques ? Felter explique que l’euphraise peut aussi rendre service dans le rhume des foins, tant qu’il remplit les conditions décrites précédemment, c’est-à-dire écoulements abondants, douleur, sensation de brûlure, etc. Et au passage, on note ce terme qui était utilisé dans le passé : « catarrhe » qui désigne une inflammation des muqueuses provoquant des sécrétions excessives.
Congestions de l’oreille interne
Bien. On va agrandir encore un peu la zone d’action de l’euphraise et parler de l’oreille. C’est un décongestionnant de l’oreille moyenne et des trompes d’Eustache. Est-ce que vous savez dans quelles situations ces zones sont congestionnées et enflammées, à quel moment ça fait pression et ça fait mal ? Eh oui, dans les cas d’otite moyenne aigüe.
Donc c’est une plante que l’on peut utiliser pour tenter de soulager cette pression et ces douleurs dans les otites moyennes, en prises rapprochées, car comme je vous l’ai expliqué, lorsqu’on est dans une condition aiguë, on va faire des prises rapprochées. Et aussi consulter un médecin bien évidemment.
Je vous cite à nouveau le docteur Felter qui nous dit : « l’euphraise est également efficace lorsque les catarrhes aigus s’étendent aux oreilles au travers des trompes d’Eustache, et sont accompagnées de douleurs d’oreille, mal de tête, éternuements et toux« .
Fatigue oculaire et vue qui baisse
L’euphraise est reconnue pour son côté apaisant dans la fatigue oculaire. Une application le soir, après une journée de travail, une journée où on a été exposé aux polluants des villes et des voitures, ça amène de la fraicheur et un côté tonique pour la muqueuse de l’œil.
On en parle aussi pour la vue qui baisse. D’où le nom « casse-lunette ». On m’a rapporté des cas de personnes qui l’ont utilisée pour améliorer leur vue. Je n’ai pas assez d’informations ni d’expérience avec cette indication pour vous la donner avec assurance. Je ne sais pas, je suis intrigué. Si l’euphraise a amélioré votre vue qui baisse, n’hésitez pas à nous dire en commentaire dans l’article associé à cet épisode sur le site Altheaprovence.
Biodisponibilité de l’aucubine
Au passage, j’aimerais partager une information en lien avec ce qu’on appelle la pharmacocinétique. Ça a l’air bien compliqué comme terme, mais je vais essayer de vous expliquer d’une manière simple. Ça consiste à comprendre comment la plante va se comporter à l’intérieur de nous, depuis son entrée jusqu’à sa sortie. Donc c’est l’évolution en fonction du temps de son absorption, sa biodisponibilité, sa distribution, son métabolisme, et son excrétion.
Alors bien sûr, la plante contient des centaines de constituants. Et ça, on ne sait pas l’étudier. C’est trop compliqué. Donc on regarde souvent l’un des composants actifs, celui qui semble le plus intéressant. Et là, pour l’euphraise, on a beaucoup regardé l’aucubine, qui est un des irridoïdes. On pense qu’il est responsable, en partie, de cet effet décongestionnant des muqueuses respiratoires. Et d’ailleurs, cette aucubine, on la retrouve aussi dans le plantain. Le plantain a donc des propriétés décongestionnantes similaires.
L’aucubine est absorbée sous forme d’hétéroside. C’est-à-dire qu’il y a un sucre (je simplifie un peu), attaché à la molécule active. Et c’est la flore intestinale qui va détacher le sucre et libérer ce qu’on appelle la génine ou l’aglycone, c’est-à-dire la partie active. Il faut donc une bonne quantité de bonnes bactéries qui vont pouvoir faire cette transformation.
Pourquoi certaines plantes fonctionnent chez certaines personnes et pas chez d’autres ? Aujourd’hui, ça reste un peu un mystère. Mais, vous voyez que là, on pourrait avoir l’une des explications. Lorsque les constituants actifs sont sous forme d’hétérosides : il faut une bonne flore intestinale, riche et active, pour casser et libérer la molécule active.
Et donc prenez soin de votre flore pour profiter des bienfaits des plantes !
Préparations
En ce qui concerne les formes et les dosages de l’euphraise.
Du côté anglophone, on conseille de l’utiliser fraiche, et on dit qu’elle perd vite au séchage. Donc en ce qui me concerne, j’ai souvent utilisé la teinture de la plante fraiche. Cela dit, on la trouve souvent sous forme sèche en herboristerie. Idéalement, il faudrait qu’elle ait été très récemment séchée. Mais c’est parfois compliqué d’avoir l’information, ou de s’assurer de sa fraicheur.
J’ai souvent eu de mauvaises surprises en commandant dans certaines herboristerie. On m’a envoyé des sachets avec une herbe grise, coupée en de minuscules morceaux, et qui ne ressemblait à rien. Donc mon conseil serait d’utiliser une teinture de plante fraiche préparée par des petits producteurs et cueilleurs, plutôt que de commander un « sac de paille ».
Pour la teinture de plante fraiche, lorsque prise en interne,
- Chez Mills & Bone, typique de l’école britannique et australienne, on voit de 7,5 à 15 ml par jour, c’est-à-dire de 1½ à 3 cuillères à café par jour. Je vous rappelle que les dosages anglo-saxons sont souvent largement plus élevés que les nôtres ;
- Chez Valnet, 50 gouttes, 3 à 5 fois par jour.
Pour l’infusion de plante sèche, prise en interne :
- Chez Mills & Bone, 6 à 12 g de plante sèche par jour, en infusion
- Chez Valnet, 1 cuillère à dessert par tasse d’eau, infuser 10 minutes, 3 tasses par jour entre les repas
En externe, on peut préparer une infusion comme le suggère Valnet, avec 1 poignée de plante par litre d’eau (pas très précis, je sais), idéalement plante fraiche, sinon plante sèche, bouillir 10 minutes, en lavages oculaires dans les conjonctivites et blépharites, et en lavage du nez dans le coryza. Toujours utiliser des instruments stériles dans ces situations.
Du côté anglo-saxon, on trouve 1 cuillère à café bien remplie de plante sèche pour une demi tasse d’eau bouillante, on laisse infuser 10 minutes. On passe au filtre à café pour qu’il ne reste aucun résidu de la plante, on laisse refroidir et on place 2 ou 3 gouttes dans chaque œil. Je vous rappelle aussi que dans ma formation sur les Allergies respiratoires, je vous explique comment fabriquer un collyre très rapidement à partir de liquide physiologique et quelques gouttes de teinture. C’est prêt en 10 secondes.
Le docteur Fernie, précédemment mentionné par Maud Grieve, donne la lotion suivante : 30 gouttes de teinture de plante fraîche dans un verre d’hydrolat de rose, à appliquer sur l’œil (œil fermé en général), plusieurs fois par jour. Intéressant comme préparation.
Et je termine par une petite formulation du docteur Valnet. D’abord, on mélange les 3 plantes suivantes :
- 50 g d’euphraise
- 25 g de bleuet, on en avait parlé dans un épisode précédent
- 25 g de plantain, eh oui, on en a parlé pour l’aucubine
On mélange bien, on prend 1 cuillère à soupe de ce mélange pour 100 g d’eau bouillante. On laisse infuser 1/2 heure. Et on applique en bain d’yeux.
Je vais vous mettre le lien vers une vieille vidéo que je vous avais faite sur le bain d’œil. C’est l’une de mes premières vidéos, ayez pitié. C’est un peu pathétique, j’ai dû faire 50 coupes, la lumière n’allait pas, il faisait super chaud et je transpirais comme un cochon. D’ailleurs, j’avais mis des carrés de texte à chaque fois que je soulève mes bras pour cacher la transpiration. Bref, à ce stade, je vous mets le lien… faut bien en rire un peu.
Précautions
En ce qui concerne les précautions d’emploi, je n’ai rien dans mes ouvrages de référence. Pour une application locale, a priori pas de problème.
Pour une prise en interne, on retiendra qu’elle est riche en tanins, et donc :
- A éviter si constipation ;
- A prendre loin des médicaments et autres compléments alimentaires car les tanins peuvent influencer nos capacités d’absorption.
C’est terminé pour l’euphraise. J’espère que vous aurez l’occasion de la croiser en nature, et j’espère que vous aurez votre loupe botanique dans le sac à dos, car elle est peut-être toute petite, mais elle est tellement jolie. Faites attention de ne pas trop marcher dessus.
A très vite pour un prochain épisode !
Références
Grieve, M., & Leyel, C. F. (1931). A modern herbal : the medicinal, culinary, cosmetic and economic properties, cultivation and folklore of herbs, grasses, fungi, shrubs and trees with all their modern scientific uses. Dans Dover Publications eBooks.
Harvey Wickes Felter, M.D., The Eclectic Materia Medica, Pharmacology and Therapeutics, 1922
Valnet, J. (2001). La phytothérapie (Éd. Livre de poche).
eBook - Grand manuel pour fabriquer ses remèdes naturels - Edition 2024
Nous soutenir
Pour nous aider à maintenir la gratuité de toutes les informations que nous mettons à votre disposition depuis 2010, voici comment vous pouvez contribuer à notre projet.
Qui sommes-nous ?
Aujourd’hui, AltheaProvence, c’est Christophe, Sabine, Aude, Émilie et Marie. Nous sommes là pour vous accompagner dans votre découverte des plantes médicinales.