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Bonjour,

De temps à autre, je vais vous parler de plantes invasives qui nous fournissent un potentiel médicinal. Pourquoi est-ce que ce sujet m’intéresse autant ? La plante est très présente, pas de menace sur la ressource, elle a un potentiel médicinal, donc que demander de plus !

Aujourd’hui, je voulais vous parler de l’inule odorante. C’est une plante qui adore les climats chauds et secs, qui se développe sur terrain pauvre, donc logiquement, elle va commencer à se plaire de plus en plus chez nous et monter de plus en plus au nord. On la trouve déjà un peu partout en France et elle est classée comme invasive dans certains départements.

J’ai passé énormément de temps à rechercher les indications traditionnelles de cette plante et je suis hélas resté un peu sur ma faim. Comme vous le savez, ce qui m’intéresse surtout, ce sont les formes simples et traditionnelles comme les infusions, les teintures, les cataplasmes, toutes ces choses que l’on peut fabriquer à la maison. Et là, pour l’inule, au-delà des formes distillées, je n’ai pas trouvé grand-chose.

Je vais tout de même vous livrer ce que j’ai découvert, car j’aimerais vous en faire profiter. Et au passage, j’aimerais vous lancer cet appel : si vous avez des informations utiles sur les formes non distillées (infusions, teintures, cataplasmes, etc), et si vous vivez dans un pays qui utilise l’inule odorante, ou qui l’a utilisé dans le passé, vous pouvez me laisser un commentaire dans l’article associé à cet épisode sur le site Altheaprovence.

Alors, je vais être un peu difficile, dans le sens où j’aimerais tous les détails. Si vous me dites « on l’utilisait pour les rhumatismes », c’est bien, mais c’est aussi un peu vague. On l’utilisait comment, sous quelle forme, comment faisait-on la préparation, quelles quantités, etc. Et bien sûr, si vous avez connaissance d’ouvrages ou d’études ethnobotaniques sur le sujet, n’hésitez pas à m’en faire part.

Bien, ceci était dit, on est prêt pour notre discussion. Avant toute chose, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription médicale.


Un peu de botanique

Allez, un peu de botanique pour se mettre en jambe. L’inule odorante, c’est une plante annuelle de la famille des astéracées. Son nom binomial, c’est Dittrichia graveolens, mais avant, on la connaissait sous le nom d’Inula graveolens.

C’est une plante dressée, très rameuse, glanduleuse, avec des glandes qui sont remplies de substances aromatiques. L’odeur est assez forte. La plante fait de petits capitules floraux, très nombreux avec des fleurs jaunes.

On va la trouver dans les lieux incultes, en France, un peu partout dans le Midi, l’ouest, le centre jusqu’à Paris, en Corse. On la trouve dans les pays à climat chaud et sec. Espagne, Italie, Turquie. Elle se développe sur terrain sec et aride.

Dittrichia graveolens, boutons floraux


Classée comme invasive

Il faut savoir qu’elle est classée comme invasive dans certains pays. Cette caractéristique a été observée en Australie où elle est considérée comme nuisible, en Californie aussi, en Afrique du Sud, au Chili (1), et probablement dans d’autres zones du globe qui subissent le réchauffement d’une manière forte. On voit que la plante se dirige vers le nord. En Europe, on en trouve au Royaume-Uni, en Hollande, en Pologne.

Si vous avez lu certains ouvrages comme celui de Thierry Thévenin « Les Plantes du Chaos« , vous avez vu que les plantes invasives ne sont finalement que des plantes qui viennent recoloniser des terres que nous avons abimées, pour progressivement les ramener vers l’état de forêt, vers un état de santé en fait. Et vu qu’elles deviennent très abondantes dans certaines régions, elles constituent aussi une ressource locale pour la santé humaine.

C’est un concept qui avait été aussi largement abordé par l’herboriste américain Stephen Buhner qui nous dit la chose suivante : « Il faut que l’on comprenne que la Nature ne fait pas d’erreurs. Il faut que l’on comprenne que des processus qu’aucun scientifique ne comprend sont en train de se dérouler à petite et à grande échelle. On voit les plantes invasives arriver dans de nouveaux écosystèmes, on doit se demander, avec humilité : que font-elles ? Quel est leur objectif ? »

Toujours beaucoup de sagesse dans les mots de Buhner…

Plusieurs facteurs contribuent à la nature invasive de l’inule odorante :

  • D’abord des graines qui se disséminent très efficacement (1) et elles ont un taux de germination très élevé, jusqu’à 90%.
  • Elle a une grande capacité à coloniser les habitats perturbés comme le bord des routes, les terrains vagues, les carrières.
  • Elle arrive à pousser sur des terrains intoxiqués aux métaux lourds (7), ce qui veut probablement dire qu’elle va en emmagasiner une partie de ces métaux. Du coup ramasser sur terrain non pollué est primordial comme vous pouvez vous en douter
  • Elle a une activité phytotoxique (2), c’est-à-dire qu’elle peut réduire le développement d’autres plantules tout autour d’elle. Des études montrent que si on incorpore de la poudre d’inule odorante dans le sol, les autres espèces deviennent plus petites. Pareil si on arrose avec une infusion de la plante. C’est l’acide ilicique de la plante qui aurait cet effet.
  • Les brouteurs ne l’aiment pas beaucoup. Déjà, elle a un goût et une odeur puissante, mais surtout, elle cause des réactions inflammatoires intestinales chez ces animaux (3).

Donc voilà, un petit cocktail de propriété qui fait qu’elle se développe particulièrement bien dans certains endroits. Du coup, quelles sont ses propriétés et utilisations possibles ?


Propriétés « classiques » de l’inule odorante

On va démarrer notre réflexion avec la texture et l’odeur de la plante. C’est une plante collante au toucher, poisseuse, avec une forte odeur. D’ailleurs, on l’appelle parfois « inule poisseuse ». En anglais « stinkwort », l’herbe qui pue.

L’odeur est résineuse et plutôt camphrée, en lien avec sa forte teneur en camphène, un monoterpène. Parmi les constituants principaux de l’huile essentielle, on retrouve également du bornéol, un alcool monoterpénique, et l’acétate de bornyle, un ester monoterpénique. Ces composés vont donner à la plante des notes résineuses, boisées et camphrées caractéristiques.

Déjà, intuitivement, on va se rapprocher de certaines propriétés des résineux. Et effectivement, ça va nous orienter sur la première propriété de la plante, qui est une propriété que l’on trouve dans de nombreux résineux, les arbres comme le pin (ou le sapin, épicéa) ou des plantes comme le myrte (dont je vous ai déjà parlé dans des épisodes précédents).

Mucolytique et expectorante

L’inule odorante est mucolytique et expectorante, comme les résineux. Elle est donc utilisée lorsqu’il y a une toux grasse, afin de favoriser une bonne évacuation des déchets pulmonaires qui pourraient provenir d’une infection. Donc on parle ici de bronchite ou autre type d’infection qui affecte tout l’arbre respiratoire.

On pourrait l’utiliser lorsqu’il y a toux grasse chronique, le matin chez les personnes qui souffrent de BPCO (Bronchopneumopathie chronique obstructive), ou lorsqu’on est pris par les allergies et que les poumons font remonter pas mal de mucus.

Antitussif

Et en même temps, on va trouver un aspect antispasmodique qui vient réguler le réflexe de toux lorsque la toux épuise la personne. Cette propriété nous rappelle un peu celle du coquelicot ou du thym. Ce ne sont pas des plantes qui bloquent le réflexe de toux bien évidemment, on ne veut pas de blocage, la toux est là pour une raison.

Mais parfois, elle devient contreproductive, soit lorsqu’on a une toux sèche, une toux d’irritation sans production de mucus, qu’on a du mal à contrôler tellement ça pique sans cesse. Soit lorsqu’elle se déroule par quintes qui finissent par épuiser la personne et l’empêcher de dormir. C’est dans ce contexte-là, en général, que l’on fait appel à ces plantes. En consultant un médecin en premier lieu, bien sûr.

Antibactérien, antifongique

L’inule odorante a des propriétés antibactérienne et antifongique, là encore très typique des plantes collantes et riches en terpènes. Ceci vient rajouter une force supplémentaire lorsqu’on l’utilise dans le cas des toux grasses de la bronchite vu qu’on a aussi un aspect antiinfectieux. Ou pour toute infection respiratoire classique de l’hiver – rhinite, sinusite, laryngite, etc.

On peut l’appliquer sur une plaie (sous forme d’infusion de la plante). On pourrait l’appliquer sur les boutons de l’acné, vu qu’il y a une composante infectieuse à réguler.

Répare les plaies et soulage les hémorroïdes

Nous avons une utilisation traditionnelle en Italie (12), par les Tabarquins qui habitent en Sardaigne (les Tabarquins sont gens natifs de l’île de Tabarka, située au nord-ouest de la Tunisie), et qui utilisaient une infusion des feuilles en compresse pour réparer les plaies, donc une action qu’on appellerait « vulnéraire » dans le monde des plantes.

On utilisait aussi l’infusion des feuilles en compresse ou un cataplasme des feuilles pour les problèmes d’hémorroïdes.


Propriétés « spéculatives » de l’inule odorante

Ensuite, je vous propose qu’on regarde ce que les études nous disent sur la plante et qu’on spécule un peu sur son potentiel. Ce que je veux dire par là, c’est qu’on a des études in vitro, quelques études sur animaux, et très peu d’études sur humains pour les propriétés qui vont suivre. Donc il faut prendre l’information avec prudence vu qu’il est toujours très compliqué d’extrapoler des résultats depuis le tube à essai jusqu’à des situations bien réelles qui nous affectent.

Effet antiprolifératif

Tout d’abord, nous avons un effet antiprolifératif. C’est-à-dire qui bloque la prolifération cellulaire, et ce terme est en général utilisé dans le contexte de tumeurs. Donc, on note un effet anticancer de la plante.

Ceci a été démontré in vitro pour certains types de cellules du cancer du sein (5). On voit que la plante provoque l’apoptose des cellules cancéreuse, c’est-à-dire la mort cellulaire programmée, dans le contexte de cellules dans lesquelles la mort programmée ne fonctionne plus, justement.

Anti-diarrhéique

Nous avons une étude qui montre l’effet anti-diarrhéique de l’inule odorante, qui inhibe d’une manière assez remarquable une diarrhée provoquée par l’huile de ricin (10). L’inhibition est comparable au lopéramide, l’un des antidiarrhéiques les plus connus dans le monde du médicament (et que vous connaissez peut-être sous le nom d’Imodium).

Antioxydant et antiinflammatoire

Nous avons des données assez solides sur son effet antioxydant (11), antiinflammatoire (10) et analgésique (10). La plante est riche en composés phénoliques, flavonoïdes, sesquiterpènes. Ce cocktail pourrait nous aider à combattre l’agression des radicaux libres, l’inflammation, la douleur. Des paramètres communs à de nombreuses maladies chroniques dégénératives.


Formes et quantités

En ce qui concerne les formes et les quantités, on va utiliser des formes préparées à partir des parties aériennes fleuries ou juste des fleurs, ou en dernier choix juste des feuilles, fraiches ou sèches. Vu la teneur en substances aromatiques, c’est probablement une plante qui donnera plus d’elle-même sous forme fraiche. Mais vu l’aspect résineux et collant, elle devrait rester relativement stable au séchage aussi.

  • Je n’ai trouvé aucune mention des dosages sous forme d’infusion. Et je n’ai pas d’information sur sa consommation en interne en fait. Je pense que l’information existe dans les ouvrages traditionnels de certains pays, mais je n’ai rien trouvé. D’où mon appel à l’action en tout début de cet épisode.
  • En externe, on pourrait appliquer l’infusion ou la teinture diluée sur des infections bactériennes ou fongiques de peau ou muqueuses. On pourrait l’utiliser pour les plaies et les hémorroïdes comme on l’a vu.
  • On pourrait aussi faire une inhalation humide en plongeant la plante sèche dans de l’eau bouillante et en respirant progressivement les substances aromatiques, la technique de la serviette sur la tête au-dessus d’un grand bol, pour les problématiques touchant les bronches.
  • Les formes distillées sont largement plus connues, donc vous verrez dans le commerce l’hydrolat et l’huile essentielle d’inule odorante. L’huile essentielle est chère, il faut beaucoup de plantes pour produire 1 litre, entre 800 et 1200 kg.
    • L’huile essentielle est très forte en goût et odeur, on va en général l’utiliser en faible quantité, souvent mélangée avec d’autres huiles essentielles, et sur une courte durée. En application cutanée et pas en prise interne. Ce n’est pas l’huile essentielle la plus simple à utiliser, donc si vous démarrez juste avec les huiles essentielles, apprenez à utiliser d’autres plantes. Et elle peut être allergisante, donc toujours tester sur une petite zone d’abord. Pas chez la femme enceinte ou allaitante, pas chez le jeune enfant.
    • L’hydrolat est plus doux, il peut être pris par voie interne avec les mêmes propriétés dont on a parlé, souvent en mélange avec d’autres. Si on avait un problème de toux grasse par exemple, on pourrait le combiner avec un hydrolat de pin sylvestre et de myrte, pourquoi pas.

A noter, les formes extraites à l’eau ou l’alcool, donc les tisanes ou teintures, contiennent un panel de constituants largement plus riche que l’huile essentielle qui est une forme très concentrée de certains constituants.

Dans la teinture des feuilles, on va trouver de l’acide cholorogénique, acide caféique, acide salicylique, hespéridine, rutine, etc (9). On ne trouve pas ces constituants dans l’huile essentielle, et dans l’hydrolat, peut-être à l’état de trace, mais rien de significatif.


Précautions pour l’inule odorante

En ce qui concerne les précautions :

  • On a vu que l’huile essentielle était puissante, utilisée diluée, en mélange avec d’autres, par voie externe, sur une courte durée.
  • La plante entière peut provoquer des allergies de contact (6), probablement à cause des lactones sesquiterpéniques, qui sont souvent responsables de ces réactions dans la famille des astéracées. Donc on teste sur une petite partie du corps si on voulait faire des applications locales d’une forme ou d’une autre.
  • Elle peut provoquer des irritations digestives, on l’a vu chez le mouton (8) et c’est probablement applicable à l’humain aussi.

Et je vais finir par ce qu’on appelle le « choc à l’inule ». C’est une réaction qui peut arriver avec l’inule odorante. Je vais vous résumer ce que j’ai pu lire. C’est basé sur des observations empiriques pour l’huile essentielle, je pense, et j’ai bien du mal à sourcer l’information.

Le « choc à l’inule », ce n’est pas vraiment un choc au sens médical du terme, donc ce n’est pas une condition grave qui met la vie de la personne en danger. Mais c’est un effet rapide et très intense. C’est une réaction du système respiratoire avec une action expectorante très marquée. Beaucoup de toux, évacuations de mucus, sensation de brûlure, de gorge irritée, d’hypersalivation, suivi d’un soulagement. Donc ceci est vu comme bénéfique, un peu comme une « crise de guérison », mais ça peut être très désagréable.

Je vais vous donner une citation tirée de l’ouvrage « l’aromathérapie exactement » de Franchomme et Pénoël, au sujet de l’huile essentielle :

« Possible crise d’élimination (bénéfique et souhaitable) durant le traitement des infections respiratoires chroniques connues sous le nom de « choc à l’inule » »

Comme dit précédemment, plante puissante, à explorer d’une manière graduelle et lorsqu’on a déjà une certaine expérience des plantes médicinales. La forme hydrolat est probablement la forme la plus simple et la moins problématique à utiliser. Et pour les autres formes, si vous avez des infos, je suis preneur.

Voilà pour l’inule, si elle devient invasive chez nous, il sera intéressant de la découvrir et de voir ce qu’elle pourrait faire pour nous.

Merci pour votre écoute et à très bientôt.

Retours et partage de nos lecteurs

Merci à Ester
Bonjour,
J’ai trouvé quelques informations dans « Plantas medicinales. El Discórides renovado » , de Pío Font i Quer, sur Inula graveolens (synonyme de Dittrichia graveolens). La seule vertu qu’il lui attribue est d’être une plante sudorifique. L’infusion décrite est la suivante : « Faire chauffer 0,25 litre d’eau dans une casserole bien nettoyée et lorsqu’elle arrive à ébullition, ajouter une poignée de sommités d’olivardilla [inula graveolens], retirer immédiatement du feu, couvrir et laisser refroidir un peu. Le patient doit prendre cette infusion très chaude, et lorsqu’il est déjà au lit, bien emmitouflé en hiver


Références Inule odorante

(1) Ponticelli M, Lela L, Russo D, Faraone I, Sinisgalli C, Mustapha MB, Esposito G, Jannet HB, Costantino V, Milella L. Dittrichia graveolens (L.) Greuter, a Rapidly Spreading Invasive Plant: Chemistry and Bioactivity. Molecules. 2022 Jan 28;27(3):895. doi: 10.3390/molecules27030895. PMID: 35164160; PMCID: PMC8840657.

(2) Abu Irmaileh BE, Al-Aboudi AM, Abu Zarga MH, Awwadi F, Haddad SF. Selective phytotoxic activity of 2,3,11β,13-tetrahydroaromaticin and ilicic acid isolated from Inula graveolens. Nat Prod Res. 2015;29(10):893-8. doi: 10.1080/14786419.2014.955489. Epub 2014 Sep 5. PMID: 25190268.

(3) Philbey AW, Morton AG. Pyogranulomatous enteritis in sheep due to penetrating seed heads of Dittrichia graveolens. Aust Vet J. 2000 Dec;78(12):858-60. doi: 10.1111/j.1751-0813.2000.tb10511.x. PMID: 11194477.

(4) Mazandarani M, Ghafourian M, Khormali A. Ethnopharmacology, Antibacterial and Antioxidant Activity of Dittrichia Graveolens (L.) W. Greuter. Which Has Been Used as Remedies Antirheumatic, Anti-Inflammation and Anti-infection against Leishmaniasis in the Traditional Medicine of Gorgan, Iran. Crescent J Med & Biol Sci 2014; 1(4): 125-9.

(5) Kasabri, Violet & Afifi, Fatma & Abu-Dahab, Rana & MASHALLAH, SUNDOS. (2018). Mitigating efficacy of Inula graveolens (L.) Desf. (Asteraceae) in breast adenocarcinoma MCF7 and T47D proliferation: In vitro mechanistic studies of a selected ethnomedicinal plant from Jordan. Romanian Biotechnological Letters. 1. 1-9. 10.1111/rbl.10715.

(6) Haw-Yueh Thong; Miki Yokota; Dean Kardassakis; Howard I. Maibach. (2008). Allergic contact dermatitis from Dittrichia graveolens (L.) Greuter (stinkwort). , 58(1), 51–53. doi:10.1111/j.1600-0536.2007.01154.x

(7) Del Río M, Font R, Almela C, Vélez D, Montoro R, De Haro Bailón A. Heavy metals and arsenic uptake by wild vegetation in the Guadiamar river area after the toxic spill of the Aznalcóllar mine. J Biotechnol. 2002 Sep 11;98(1):125-37. doi: 10.1016/s0168-1656(02)00091-3. PMID: 12126811.

(8) Philbey AW, Morton AG. Pyogranulomatous enteritis in sheep due to penetrating seed heads of Dittrichia graveolens. Aust Vet J. 2000 Dec;78(12):858-60. doi: 10.1111/j.1751-0813.2000.tb10511.x. PMID: 11194477.

(9) Erenler, R., Atalar, M. N., Yıldız, İ., Geçer, E. N., et al. (2023). Quantitative analysis of bioactive compounds by LC-MS/MS from Inula graveolens. Bütünleyici Ve Anadolu Tıbbı Dergisi, 4(3), 3-10. https://doi.org/10.53445/batd.1278048

(10) Al-Fartosy, Adnan. (2013). Some pharmacological studies on the methanolic extract of Inula graveolense L.. Journal of Biomedical Science and Engineering. 06. 1040-1049. 10.4236/jbise.2013.611130.

(11) Sellem, Imen & Chakchouk-Mtibaa, Ahlem & Slim, Smaoui & Mellouli, Lotfi. (2021). Total Polyphenol, Flavonoid, and Proanthocyanidin Contents and Biological Activities of Inula Graveolens Collected from Chebba (Tunisia) Salt Marsh. Journal of Herbs Spices & Medicinal Plants. 27. 10.1080/10496475.2021.1947928.

(12) Maxia, Andrea & Lancioni, Maria & Balia, Alessandra & Alborghetti, Raffaella & Pieroni, Andrea & Loi, Maria. (2008). Medical ethnobotany of the Tabarkins, a Northern Italian (Ligurian) minority in south-western Sardinia. Genetic Resources and Crop Evolution. 55. 911-924. 10.1007/s10722-007-9296-4.

Aujourd’hui, j’aimerais vous parler du grenadier et de la grenade. C’est un arbre que l’on cultive dans ma région du sud-est de la France. Comme vous, je connaissais bien le fruit au goût acidulé. Mais je n’avais jamais trop recherché ses propriétés médicinales, jusqu’à ce que des personnes que j’accompagne dans mon activité de praticien en herboristerie me fassent part de bons retours pour différentes conditions.

C’est à ce moment-là que je me suis mis à faire des recherches. Et là, surprise, j’ai vu qu’on avait une masse d’information et d’études sur la grenade. Donc, pour simplifier la discussion, j’ai décidé de vous faire 2 épisodes. Le premier, celui d’aujourd’hui, sera consacré à l’arbre, son origine, ses constituants principaux et ses propriétés traditionnelles.

Le second épisode se concentrera sur la bibliographie scientifique récente, et vous verrez que que c’est un fruit très prometteur pour la prévention de nombreuses maladies de civilisations. C’est donc un gros défrichage qu’on va faire ensemble, j’espère que vous allez découvrir ou redécouvrir un fruit qui regorge de bienfaits pour la santé.

Avant de démarrer, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription médicale.


Botanique du grenadier

On démarre, comme d’habitude, avec un peu de botanique. Le grenadier (Punica granatum) est un arbrisseau de la famille des Lythracées. C’est une famille botanique qui contient à la fois de petites plantes et des arbres.

Parmi les arbres, nous avons le henné (Lawsonia inermis) que vous connaissez peut-être pour la coloration des cheveux ou les peintures sur la peau dans certaines traditions. Parmi les plantes non ligneuses, nous avons la salicaire (Lythrum salicaria) qui pousse à proximité des cours d’eau, plante médicinale riche en tanins que j’avais abordée dans un épisode précédent.

Le grenadier, lui, est cultivé dans les zones à climat méditerranéen. Il apprécie le soleil, on est vraiment dans la zone de l’olivier et de l’amandier. Il est originaire de l’Asie occidentale, on le retrouve à l’état sauvage sur tout le littoral de la mer Caspienne. Il s’est propagé (avec la migration des peuples et le commerce) dans toute l’Asie Orientale, en Asie Mineure, puis dans les pays Méditerranéen. Pierre Lieutaghi explique qu’avec la figue et le raisin, la grenade est probablement l’une des premières conquêtes du cultivateur néolithique dans ces régions.

Il fait de magnifiques fleurs rouges au mois de juin-juillet. Le fruit est assez tardif et peut rester sur l’arbre jusqu’à l’hiver.

Il a besoin d’un sol qui draine bien pour éviter les rétentions d’eau autour des racines. Il tolère les terrains calcaires et pauvres de chez moi.

C’est un arbre résistant à la sécheresse une fois bien établi (après 2-3 ans). Mais pour une production de fruits de bonne taille, bien juteux, avec une belle teneur en sucre (vous savez, ceux qui éclatent tellement ils sont riches), alors un arrosage régulier sera apprécié pendant la période de floraison et de fructification.

Côté entretien, c’est un arbre qui a peu de prédateurs, qui nécessite peu de main d’œuvre, avec une taille tous les 2 à 3 ans pour stimuler la production.

Ce qui est super intéressant, c’est que la grenade est un fruit zéro déchet. On peut consommer la chair, l’écorce est médicinale comme on va le voir. Et avec les graines, on fait une huile très appréciée pour la cosmétique.

Grenadier avec ses fruits

 


Histoire du grenadier et de la grenade

Je vous propose de passer en revue les utilisations traditionnelles de la grenade, qui ne datent pas d’hier !

On en trouve dans les tombes égyptiennes qui datent de 2500 avant J.-C. Les Phéniciens, qui étaient de grands explorateurs, sont probablement responsables de sa culture en Afrique du Nord. Les civilisations Arabes vont l’introduire en Espagne au début du VIIIe siècle. Si on a une ville qui s’appelle Granada ce n’est pas pour rien.

Vu que c’est un arbre qui a été cultivé très tôt dans l’histoire de l’humanité, on va retrouver des utilisations médicinales très anciennes.

La première utilisation notable, c’est en tant que vermifuge et ténifuge (c’est-à-dire contre le tenia), aussi bien chez l’homme que chez l’animal. Ce point est mentionné dans le Papyrus Ebers, qui date d’environ 1500 av. J.-C. Il est mentionné dans les écrits de Dioscoride, dans son fameux De Materia Medica (au premier siècle avant J.-C.).

C’est l’écorce de la racine qui a cette propriété. Mais attention, l’écorce de la racine ou du tronc a aussi une toxicité, à cause de ses alcaloïdes pipéridiniques. C’est pour cette raison qu’elle est efficace pour tuer les vers. On ne l’utilise plus aujourd’hui pour ne pas risquer des accidents graves.

Comme nous le verrons dans la partie constituants, toutes les parties de l’arbre contiennent une belle quantité de tanins. Cet effet astringent sera utilisé à bon escient tout au long des siècles.

Dioscoride en parle pour resserrer les gencives relâchées. Les médecins arabes l’utilisaient contre les hémorroïdes, dans les hémorragies. Le suc du fruit était utilisé pour le mal de gorge. On est vraiment ici dans l’indication des tanins, pour resserrer les tissus par contact.

Pour les diarrhées, on mettait le fruit entier dans un pot en terre et on le desséchait au four, puis on le réduisait en poudre pour l’administrer. Donc là, on bénéficie de la totalité du fruit, graines et écorce inclus.

La grenade est utilisée en Médecine Traditionnelle Chinoise, en médecine traditionnelle Uyghur, Tibétaine, Mongole (1), pour arrêter les saignements, les écoulements, les diarrhées excessives. Vous voyez le thème récurrent ici, c’est une plante d’énergétique asséchante. Elle assèche en freinant les pertes de fluides dues à des inflammations ou à des dommages infligés aux tissus.

L’écorce du fruit, qui portait le nom de malicorium dans l’ancien temps, était utilisée pour tanner les cuirs, c’est pour vous dire comme elle est riche en tanins. Les fleurs, que l’on appelait balaustium, avaient aussi un pouvoir astringent élevé et elles étaient utilisées en tisane.

On reviendra dans quelques minutes sur les utilisations, et je vous donnerai mon opinion sur comment transposer tout ceci aux petits maux d’aujourd’hui.

une grenade entière et un morceau de grenade avec les grains visibles

 


Culture du grenadier

En ce qui concerne les pays producteurs de grenade, je vais vous donner des chiffres fournis par le Syndicat France Grenade, qui a pour mission de promouvoir la grenade française. Aujourd’hui, la plus grosse partie de la culture pour la consommation se fait en Iran et en Inde. Ce sont les deux pays en tête de liste, et ils consomment quasiment toute leur production. Donc peu d’exportation de la part de ces pays.

Ensuite viennent la Turquie, Israël et l’Espagne, qui sont les pays exportateurs principaux.

Culture en France

Pour la culture française, ma région (la Provence) ainsi que mon département (le Vaucluse) se prête bien à la culture du grenadier. On trouve les premières références de culture à partir de l’époque de Louis XIV.

La culture en vergers commerciaux se développe depuis une dizaine d’années, et elle est considérée comme culture de diversification pour les viticulteurs et les arboriculteurs qui recherchent des cultures résilientes face au réchauffement climatique. On estime près de 500 hectares plantés en PACA, Occitanie et Nouvelle Aquitaine et environ 80% de la production en bio vu le peu de maladies et de prédateurs. Là encore, des chiffres du Syndicat France Grenade.

belles grenades sur branches

 


Constituants du grenadier

Allez, on va maintenant parler des constituants des différentes parties du fruit. Car la connaissance des constituants va nous aider à comprendre les indications traditionnelles, et elles feront le pont vers la seconde partie de la discussion, dans un prochain épisode, qui se concentrera sur ce que nous disent les études.

Écorce de la racine et du tronc

En ce qui concerne l’écorce de la racine et du tronc, comme on l’a vu, elle contient des alcaloïdes pipéridiniques comme la pelletierine, qui a été nommée en l’honneur de Pierre-Joseph Pelletier, un pionnier de la chimie des plantes et de la pharmacognosie avec son collègue Caventou. On doit à ces deux géants de la chimie des plantes l’isolation d’alcaloïdes tels que la quinine, la strychnine, la caféine.

Les alcaloïdes de l’écorce ou du tronc sont responsables de l’effet anti-vers plats du grenadier. Ils sont aussi responsables de la toxicité sur humain.

L’écorce contient également des tanins hydrolysables en quantité, des phénols, des flavonoïdes, des stérols. Donc on a d’autres propriétés intéressantes, mais l’application reste très limitée et même, aujourd’hui, fortement déconseillée pour ne pas créer d’accidents.

Feuilles

Parlons des feuilles. Elles contiennent des tanins et des flavones de type apigénine, lutéoline et ses dérivés. Ces flavones lui donnent des propriétés antiinflammatoires, antioxydantes, neuroprotectrices, antivirales, anticancer (voir wikiphyto).

Les feuilles contiennent aussi beaucoup de minéraux comme le calcium, potassium, fer. Dans les jeunes feuilles, les taux de potassium sont élevés, alors que dans les feuilles plus vieilles, on trouve plus de calcium et de fer (2).

Écorce du fruit

L’écorce du fruit est très riche en tanin. Et pour être précis, c’est le mésocarpe qui en contient le plus, c’est-à-dire la partie blanche sous la peau colorée. Elle en contiendrait jusqu’à 26% en poids sec d’après certaines études (3), ce qui est énorme dans le monde des plantes.

L’écorce contient principalement de l’acide gallique et de l’acide ellagique (qui sont des tanins). Mais elle renferme également de l’acide coumarique, des dérivés de flavones responsables de la coloration jaune, des anthocyanes responsables de la couleur rouge. Ce qui rend l’écorce antiinflammatoire, antioxydante, antiseptique.

En ce qui concerne les alcaloïdes toxiques, j’ai trouvé une étude qui explique que l’on peut en trouver dans l’écorce du fruit (4). Mais cela dépend du test utilisé. Probablement pas en quantité significative, mais on note une présence. Dur de savoir ce qu’il faut faire avec cette information. Grâce aux études récentes, on voit que l’écorce du fruit présente une toxicité faible à négligeable aux doses recommandées aujourd’hui, mais ça, on en parlera dans le prochain épisode.

Fleurs

En ce qui concerne les fleurs, elles contiennent les mêmes composés que l’on trouve dans l’écorce du fruit, comme l’acide gallique, l’acide ellagique (5). On a aussi de l’acide ursolique (5), un triterpène qui a de nombreuses propriétés : antiinflammatoires, anticancer, neuroprotecteur. Des flavonoïdes responsables de son effet antioxydant et anti-inflammatoire.

Fruits

En ce qui concerne les fruits, nous avons de la vitamine C (et je n’ai pas trouvé d’études pour vous donner des quantités exactes), pas mal de tanins (je pense que vous avez noté que le jus laisse un effet astringent en bouche), des anthocyanes, des flavonoïdes, des acides phénols. Donc un très bon cocktail antioxydant.

Nous avons du sucre bien sûr, de l’acide citrique et malique qui, avec l’acide ascorbique (donc la vitamine C), lui donnent son petit goût acidulé.

gros plan sur grains de grenade

 


Propriétés et indications dérivées de la tradition

Venons-en aux applications pratiques. Car si on a parlé de toutes ces informations, c’est pour voir ce qu’on peut en faire dans la vie de tous les jours.


D’ailleurs, une petite pause pour vous rappeler qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur l’herboristerie pratique et appliquée aux problématiques d’aujourd’hui. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, basé sur l’expérience et la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité comme aujourd’hui, et toujours accessible gratuitement.


Retour à la grenade. On va supposer qu’on ne connait rien de la littérature scientifique à son sujet. Car ça, on se le réserve pour la 2ᵉ partie de cette discussion. Supposons également que l’on n’a pas toutes les analyses des constituants et qu’on se fie uniquement au goût et à la sensation en bouche.

Déjà, on a ce goût astringent qui dénote une forte présence de tanins. Si on devait donner une gradation du niveau d’astringence en fonction des parties utilisées, sous forme d’infusion, la feuille est la plus astringente, suivie de l’écorce du fruit, suivi de la fleur, suivie du jus des fruits. Je vous mettrai les valeurs dans un tableau sur mon site (6).

Partie du grenadier Teneur en tanins (hydrolysables) en mg/g de poids sec, extraction aqueuse (infusion)
Jus du fruit 32,86
Fleur 57,04
Écorce du fruit 62,71
Feuille 64,40

 

Force d’astringence (richesse en tanins) décroissante

Feuille ➤ Écorce du fruit ➤ Fleur ➤ Jus des fruits

On choisirait donc la partie de l’arbre en fonction de l’effet astringent que l’on veut appliquer. Et on va laisser l’écorce de côté bien évidemment à cause du risque de toxicité.

On va l’utiliser pour tanner notre peau et nos muqueuses. C’est-à-dire pour toute situation dans laquelle peau ou muqueuse ont perdu leur intégrité, sont flasques, boursoufflées, avec micro-saignements et liquide qui suinte à cause d’une forte inflammation. Désolé pour l’image, mais il faut vraiment arriver à visualiser les situations qui bénéficient des tanins.

On ne parle pas de petite inflammation, de petite irritation. On parle de grosses inflammations avec suintement, avec perte de tonicité des tissus que l’on veut « resserrer ». Des situations médicales bien évidemment, mais il fut une époque où la profession médicale utilisait les tanins pour ce genre de situations.

Le docteur Valnet en est la preuve. Valnet conseille la grenade pour les écoulements féminins, que l’on parle de leucorrhées (c’est-à-dire écoulement de glaires à cause d’une infection par exemple) ou de ménorragies ou métrorragies, c’est-à-dire règles trop abondantes ou saignements en dehors des règles. Valnet n’indique que les métrorragies. Je ne sais pas pourquoi, probablement au travers de ces observations. Car logiquement, la plante devrait fonctionner tout aussi bien pour les ménorragies.

Je n’ai pas d’expérience avec le grenadier dans ces situations, donc je ne pourrais pas trop vous dire la forme et quantité à utiliser. Mais peut-être qu’un simple jus du fruit ferait l’affaire. Peut-être qu’une décoction de l’écorce du fruit fonctionnerait encore mieux. Peut-être utiliser des feuilles dans un mélange à infusion avec d’autres plantes comme le lamier blanc, la ronce, la salicaire, l’alchémille. Lorsque vous avez ces plantes très astringentes, mieux vaut ne pas les utiliser seules et composer un mélange qui passera toujours mieux.

Même type de mélange pour calmer une diarrhée.

On peut utiliser la grenade pour calmer un mal de gorge, un peu comme on utiliserait une infusion de feuilles de ronce. Plus la gorge et les amygdales sont boursouflées et suintantes, plus on choisirait des parties astringentes de la plante, feuille ou écorce du fruit. Simplement en gargarisme ici. Après avoir consulté un médecin bien évidemment.

Pour les gingivites, on peut utiliser une décoction de l’écorce des fruits ou une infusion des feuilles. En bain de bouche, et on peut faire une préparation un peu concentrée vu qu’on va recracher le liquide.

On utilisait l’écorce du fruit dans la « pommade de la comtesse », qui était une pommade astringente probablement destinée à l’usage sur les peaux matures qui ont besoin d’être un peu retendues. La pommade figurait à la pharmacopée de Madrid dans les années 1800. Donc aujourd’hui, on pourrait peut-être combiner l’effet astringent de l’écorce du fruit, avec la richesse de l’huile des graines, pour préparer une crème raffermissante, pourquoi pas.

Si on avait juste de la poudre d’écorce de grenades à disposition et qu’on avait une plaie qui a du mal à cicatriser, l’aspect astringent et antibactérien me parait très intéressant. L’idée serait d’avoir une poudre tamisée très finement et saupoudrée sur une zone abimée pour l’aider à cicatriser. Bien sûr, pas si la blessure est trop profonde, ne se substitue pas à un soin médical, etc.

Le jus est agréable à boire, avec un aspect sucré, acidulé, rafraichissant. Il était considéré comme fortifiant pendant les périodes de fatigue ou convalescence. Comme on l’a vu, il est riche en vitamines et minéraux, donc ça semble logique pour venir combler les carences. Un verre par jour, coupé avec de l’eau si nécessaire.


Effet ténifuge du grenadier

Je vais terminer cet épisode en vous donnant la recette traditionnelle pour éliminer un ténia. C’est une préparation qui a une toxicité donc aujourd’hui, on ne va pas jouer avec ça vu qu’on a des solutions moins toxiques. Mais je voulais vous donner l’information, c’est toujours intéressant de voir ce que faisaient les générations précédentes. Et puis bon, on ne sait jamais, un jour, ça nous servira peut-être.

Pour la recette, on va remonter à un certain Laboulbène, repris dans plusieurs ouvrages comme ceux de Valnet et de Lieutaghi. Laboulbène était un médecin et parasitologue français, connu au XIXe siècle pour ses travaux.

Préparation écorce de grenadier : 

On va faire macérer pendant 24 heures 60 g d’écorce de racine de grenadier dans 2 verres d’eau. Bouillir pour réduire à un verre. Boire le matin, en 3 fois, à 15 minutes d’intervalle. Préparation très amère que l’on peut aromatiser à la menthe et sucrer. Peut provoquer la nausée. Et même une forte nausée d’après ce que j’ai pu lire.

Une heure et demie plus tard, prendre une tisane purgative préparée avec une cuillère à soupe de séné et une cuillère à soupe de bourdaine par tasse. Donc là, on prend un laxatif un peu explosif.

Et ça, vous voyez, pour tout ce qui est vers intestinaux et autres parasites, dans les ouvrages anciens, vous verrez toujours la même stratégie en deux temps. D’abord, on donne la substance qui tue le parasite, que ce soit des graines de courge ou largement plus toxique, grenadier ou fougère mâle (je me répète, mais attention, on ne joue pas avec ces plantes). Ensuite, on prend une préparation très laxative pour provoquer une forte diarrhée et expulser le parasite, séné, bourdaine, huile de ricin ou autre.

petite grenade qui se forme après la floraison

 


Et la grenadine dans tout ça ?

Je ne pourrais pas vous laisser partir sans répondre à la question qui vous brûle la langue : « Et la grenadine dans tout ça ? ».

Je vais vous citer Pierre Lieutaghi :

« En Espagne, on préparait la vraie grenadine en mélangeant 4 parties de jus de grenade avec 7 parties de sucre dans un bocal que l’on remue doucement plusieurs fois par jour jusqu’à dissolution du sucre. On peut chauffer légèrement ce sirop pour le clarifier, et le passer au papier-filtre. Étendu d’eau glacée, gazeuse ou « plate », il donne, en été, une boisson délicieuse et très rafraichissante. La « grenadine » des cafetiers n’est évidemment qu’un vulgaire sirop de sucre teinté par un colorant artificiel, dont on a la fâcheuse tendance à abreuver les enfants qui préféreraient sans doute des jus de fruits véritables. »

Merci, monsieur Lieutaghi. Et merci à vous d’être resté jusqu’à la fin. On se retrouve très prochainement pour la seconde partie de cette discussion sur le grenadier et la grenade.


Références grenadier et grenades

(1) Li H, Ruan J, Huang J, Yang D, Yu H, Wu Y, Zhang Y, Wang T. Pomegranate (Punica granatum L.) and Its Rich Ellagitannins as Potential Inhibitors in Ulcerative Colitis. Int J Mol Sci. 2023 Dec 16;24(24):17538. doi: 10.3390/ijms242417538. PMID: 38139367; PMCID: PMC10744232.

(2) Moga, M.A.; Dimienescu, O.G.; Bălan, A.; Dima, L.; Toma, S.I.; Bîgiu, N.F.; Blidaru, A. Pharmacological and Therapeutic Properties of Punica granatum Phytochemicals: Possible Roles in Breast Cancer. Molecules 202126, 1054. https://doi.org/10.3390/molecules26041054

(3) Fischer, Ulrike A., Ariane V. Jaksch, Reinhold Carle and Dietmar Kammerer. “Influence of origin source, different fruit tissue and juice extraction methods on anthocyanin, phenolic acid, hydrolysable tannin and isolariciresinol contents of pomegranate (Punica granatum L.) fruits and juices.” European Food Research and Technology 237 (2013): 209-221.

(4) Alexis Vidal; Adyary Fallarero; Blanca R Peña; Maria E Medina; Bienvenido Gra; Felicia Rivera; Yamilet Gutierrez; Pia M Vuorela. (2003). Studies on the toxicity of Punica granatum L. (Punicaceae) whole fruit extracts. , 89(2-3), 0–300. doi:10.1016/j.jep.2003.09.001

(5) Laurindo LF, Barbalho SM, Marquess AR, Grecco AIS, Goulart RA, Tofano RJ, Bishayee A. Pomegranate (Punica granatum L.) and Metabolic Syndrome Risk Factors and Outcomes: A Systematic Review of Clinical Studies. Nutrients. 2022 Apr 16;14(8):1665. doi: 10.3390/nu14081665. PMID: 35458227; PMCID: PMC9032502.

(6) Elfalleh, Walid. (2012). Total phenolic contents and antioxidant activities of pomegranate peel, seed, leaf and flower. Journal of Medicinal Plants Research. 6. 10.5897/JMPR11.995.

Bonjour et bienvenue pour ce 5ᵉ questions/réponses sur les plantes médicinales et l’herboristerie.

Cette fois, je vais essayer de faire des questions et réponses un peu plus rapides à traiter, histoire de parcourir une liste un peu plus longue que d’habitude. Ces questions proviennent des forums de l’école Altheaprovence. Et j’ai essayé de sélectionner un panel assez large, depuis le jardinage des médicinales en passant par la fabrication de produits et en allant jusqu’à la pratique du conseil.

Avant de démarrer, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription médicale.


Remède de secours infections virales ou bactériennes

Question : comment préparer un remède de secours pour les infections virales ou bactériennes lorsqu’on n’a pas un très grand choix à la maison ?

Idéalement, on choisirait des plantes qui soutiennent l’immunité et qui ont aussi une action antibactérienne et antivirale directe.

Ensuite tout dépend de la localisation de l’infection, dans le sens où si c’est une infection des bronches par exemple, on va rajouter un 3ᵉ axe pour garder le mucus fluide et l’expectorer efficacement. Je vous renvoie vers l’épisode que je vous ai fait sur le sujet de la toux grasse, on vous mettra le lien dans l’article associé à cette discussion sur le site.

Le thym, que l’on trouve dans de nombreuses cuisines, remplit ces 3 catégories – stimule l’immunité, détruit directement les pathogènes et agit comme mucolytique et expectorant. Si on simplifie à l’extrême, on part avec des lamiacées du sud, très aromatiques, et riches en phénols, type thym, origan, sarriette pour fournir la base du mélange à infusion, et ensuite, on rajoute d’autres en fonction des objectifs. Notez que je ne parle pas de l’utilisation d’huile essentielle ici, mais bien de la plante entière. Et notez aussi que la qualité de ces plantes aromatiques est primordiale.

Si j’ai des fleurs de sureau pour l’immunité, je le rajoute. Je rajoute aussi des épices que j’ai en cuisine, type gingembre, un peu de clous de girofle, un peu de cannelle de Ceylan, pour faire un mélange qui soit buvable (pas trop fort non plus) mais qui commence à faire un bon nettoyage. Ces épices sont souvent immunostimulantes et antiinfectieuses.

Voilà pour un remède de secours avec des plantes simples qu’on pourrait avoir chez soi, dans les placards. Et n’oubliez pas que c’est la fréquence de prise qui va faire toute la différence, ce n’est pas juste une tasse tous les matins si on a un problème infectieux.

branches de thym


Mauvaise réaction à l’éleuthérocoque

Question : j’ai récemment fait une cure d’un extrait concentré d’éleuthérocoque, car je sortais d’une grippe qui m’a épuisée. Ça m’a fait du bien pendant le premier mois, maintenant, j’ai l’impression que je dors moins bien. Est-ce l’éleuthérocoque ? Quelle est la durée max de prise avant d’avoir un effet trop excitant ?

Alors, on ne peut jamais être sûr que c’est la plante ici, car il peut y avoir d’autres facteurs. Mais en gros, oui, les plantes adaptogènes comme l’éleuthérocoque, la rhodiole, le ginseng, peuvent devenir excitantes si on en prend trop en quantité, si on en prend trop longtemps alors qu’on n’en a plus besoin, ou si on n’en avait pas besoin dès le départ.

Lorsqu’on traverse une période d’épuisement, ces plantes sont indiquées, et on les prend en général aussi longtemps que nécessaire pour remonter la pente. Parfois, on les prend pendant plusieurs mois. Donc ici, il y avait épuisement post-infection, le choix me parait logique.

Par contre, il faut s’écouter. Et ça, on ne sait plus faire aujourd’hui. Au moment où on se sent mieux, que la vitalité est revenue en grande partie, on peut arrêter. Chez vous, ça sera peut-être au bout de 6 semaines, chez moi au bout de 3 mois. Cela va dépendre de la situation, de la personne, de son niveau de stress et de fatigue.

Donc apprendre à s’écouter. Si le sommeil commence à être perturbé, si on commence à sentir des signes d’hyperexcitabilité, c’est signe qu’il faut arrêter. La plante a fait son travail. Faut passer à autre chose.

éleuthérocoque


Différents types d’échinacée

Question : quelle est la différence entre les différentes espèces d’échinacée en termes d’efficacité immunitaire ?

Alors, une réponse simple consiste à dire qu’elles se valent toutes. Clairement, une fois qu’on a goûté à la racine de ces différentes espèces d’échinacées, en termes d’effet en bouche, et donc indirectement de richesse en constituants (car il faut réapprendre à se fier à nos sens), il y a des différences.

Globalement, elles sont toutes actives. Et on utilise principalement la racine. Et là, on a peut-être deux siècles et demi d’utilisation en herboristerie américaine, de comparaisons, et de conclusion que rien ne vaut la racine.

Une réponse un peu plus précise au sujet des différentes espèces, c’est que d’après l’expérience des médecins américains des années 1800, Echinacea angustifolia était la plus active, de loin. Par contre, c’est l’une des plus complexes à cultiver, je trouve. Chez moi, elle reste relativement petite, et j’ai du mal à la garder d’une année sur l’autre, alors que les deux autres que j’ai testées, E. purpurea et E. pallida, sont solides et très résistantes à la sécheresse et aux maladies.

Cela dit, mon jardin est en Provence, si vous habitez dans une région plus froide que la mienne, il est possible qu’Angustifolia se plaise chez vous. A tester. Notez qu’il y en a d’autres que je n’ai pas planté au jardin comme Echinacea tennesseensis (qui fait des fleurs jaunes magnifiques) ou Echinacea paradoxa. Donc encore beaucoup de choses à explorer.

Fleur d'échinacée


Combiner gattilier et alchémille

Question : peut-on combiner le gattilier avec l’alchémille pour un effet synergique sur le SPM ?

Petit rappel, les deux plantes sont connues pour stimuler la production de progestérone en soutenant le développement du corps jaune.

Dans mon expérience, le gattilier est largement plus actif que l’alchémille. Il peut s’avérer très utile en période de syndrome prémenstruel ou en péri ménopause lorsque les cycles deviennent très erratiques. On l’utilise aussi pour les hyperandrogénies, hyperprolactinémies. Mais je trouve que ce n’est pas une plante si facile que ça à utiliser. J’ai vu des femmes qui avaient des cycles très perturbés à cause d’un mauvais dosage de gattilier, en général trop dosé pour la sensibilité de la personne. Donc, elle a un peu cette double-face.

Si vous n’avez pas d’expérience avec ces plantes, démarrez avec l’alchémille, elle aura globalement un effet tonique sur toute la sphère utérine. On peut la combiner avec d’autres comme l’achillée millefeuille, la feuille de framboisier et d’autres toniques du cycle…

Et si on n’a pas assez de résultats sur un SPM, on peut ensuite passer au gattilier, ou rajouter du gattilier pour jouer sur des synergies de constituants effectivement.

Gattilier


Aubépine : différence fleurs, feuilles et baies

Question : aubépine, quelle est la différence entre l’effet des fleurs, des feuilles et des fruits ?

Les fleurs et les feuilles ont une action cardiotonique, elles régulent la fonction cardiaque, ont un effet vasorelaxant aussi, c’est-à-dire qu’elles créent une relaxation des artères qui est bénéfique lorsqu’on souffre d’hypertension. Je vous renvoie à mon épisode sur l’aubépine pour plus d’informations.

Les fruits, qu’on appelle aussi cenelles, sont très riches en antioxydants. Ce sont les pigments rouges des cenelles, des flavonoïdes, qui auront une action antiinflammatoire et protectrice des artères, bloquant l’oxydation du LDL et d’autres phénomènes qui sont à l’origine du développement de la plaque artérielle. Elles améliorent aussi la lipidémie sanguine et les dérèglements métaboliques.

Donc plutôt un effet plutôt actif et protecteur au long terme, je dirais, alors que les fleurs et feuilles ont une action plus rapide et directe sur la fonction cardiovasculaire. Ceci dit, je suis prêt à être contredit sur ce point-là, car on pourrait, je pense, utiliser la poudre des cenelles à une certaine dose pour obtenir des effets thérapeutiques rapides et directs, mais je n’ai pas l’expérience avec cette forme. Donc je ne peux pas vous dire.

Notons au passage que les cenelles sont utilisées en médecine chinoise pour tout ce qui est stagnation digestive lorsqu’on mange un repas un peu trop riche. Les praticiens de MTC me pardonnerons pour cette grossière simplification, je l’espère.

Fleurs et cenelles d'aubépine


Synergie ginkgo et bacopa

Question : ginkgo biloba, existe-t-il une synergie avec d’autres plantes nootropique comme le Bacopa monnieri ?

Je vous définis rapidement le terme nootropique : qui stimule les capacités cognitives.

Alors oui, il y a de bonnes combinaisons à faire. Ginkgo, bacopa, romarin, centella asiatica et d’autres. Franchement, on ne sait pas trop comment ces plantes fonctionnent exactement. On sait qu’elles ont un effet anti-inflammatoire sur l’environnement cérébral, sachant que l’inflammation met vraiment la pagaille dans le système nerveux central. Elles permettent aux cellules cérébrales un meilleur captage de l’oxygène. Elles protègent contre le stress oxydatif qui abime les cellules.

On a des flavonoïdes, des saponosides, des triterpènes, diterpènes, sesquiterpènes… C’est tout un bal de constituants et chaque plante aura son profil différent. Alors effectivement, on pourrait les combiner, par exemple, avec des gélules de feuilles de bacopa en poudre (plante que je cultive depuis plus de 10 ans) et de ginkgo par exemple. Ou une poudre de feuilles de centella asiatica (que je cultive aussi depuis longtemps) avec une infusion de romarin.

C’est possible. Et tout va dépendre de la situation et des objectifs, et de quelle carence des capacités cognitives on a besoin de combler. Rien de miraculeux bien évidemment, mais on peut obtenir un coup de pouce appréciable.

ginkgo biloba, feuille


A ce stade, j’en profite pour vous rappeler qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, basé sur l’expérience et la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité comme aujourd’hui, et toujours accessible gratuitement.


Solvants pour la camomille matricaire

Question : camomille matricaire, quels solvants sont les plus adaptés pour extraire les flavonoïdes et les coumarines de la plante ?

Alors, je ne sais pas s’il faut faire une fixation sur les flavonoïdes et les coumarines. C’est bien de connaitre les constituants des plantes, mais si on se perd trop dans la technicité du constituant, on peut parfois passer à côté d’une vision plus englobante.

Pour moi (et c’est très personnel, on a tous une manière différente d’enseigner l’herboristerie), prendre du recul, c’est voir quelle forme me fournira une évaluation organoleptique qui me rappelle la plante fraiche. Dit dans des termes plus simples, je veux que mon extraction (quelle qu’elle soit) sente la matricaire fraîche, ait le goût de la matricaire fraîche.

Les deux solvants classiques et efficaces sont l’eau et l’alcool. L’eau, ça veut dire une infusion. On va bien couvrir la tasse pour ne pas perdre les constituants volatils. L’alcool, ça veut dire une teinture. Sur plante fraiche, beaucoup mieux. Cela dit, on trouve aujourd’hui, des petits producteurs en circuit court, qui fournissent une excellente matricaire sèche. Dans le passé, j’ai eu de mauvaises surprises avec les matricaires sèches des circuits longs, qui parfois arrivent en miette, à moitié grises, il n’y a plus rien dedans.

Ce n’est plus le cas aujourd’hui, on a le choix d’acheter de la matricaire cultivée localement chez nos paysans-herboristes. Donc retour à ta question, quels solvants les plus adaptés pour extraire le totum de la matricaire ? L’eau et l’alcool.

Camomille, fleurs


Plantain et porosité intestinale

Question ; le plantain peut-il aider à réparer la muqueuse intestinale lorsque porosité et inflammation ?

Oui, j’ai de bons retours au sujet du plantain (qu’il soit lancéolé, majeur, corne de cerf ou autre) dans ce contexte précis. Et là, je vais vous donner une petite préparation à essayer. Vous réduisez la feuille de plantain en poudre, si vous y arrivez. Faut qu’elle soit vraiment bien sèche, ce n’est pas facile avec un moulin à café, mais on y arrive. Faut utiliser une petite passoire à infusions bien fine pour tamiser. J’en ai vu en poudre dans certaines herboristeries, il me semble.

Ensuite, on mélange avec une poudre de curcuma, disons moitié moitié. Parfois, j’ai vu des produits avec de la L-glutamine dedans, qui est l’un des grands classiques de l’hyperperméabilité intestinale. On prend une cuillère à café de cette poudre plantain-curcuma dans un peu d’eau entre les repas. Je répète, mais faut que ce soit tamisé bien finement, sinon ça ne sera pas très agréable à boire.

On pourrait rajouter aussi un peu de poudre de réglisse si pas de contrindications, pour son effet très anti-inflammatoire de la muqueuse intestinale.

plantain lancéolé


Cueillette de l’avoine sauvage

Question : j’ai le projet de cultiver cette année de l’avoine dans le but de la préparer en plante sèche pour la tisane. Je souhaiterais des informations sur le stade de cueillette : les jeunes pousses vertes sont préconisées, est-ce bien le bon stade de récolte ?

Alors, moi, j’ai appris à utiliser la plante à la manière herboristerie américaine. On utilise 2 parties de la plante, et ça, je vous en avais déjà parlé dans mon épisode sur l’avoine. D’abord, la sommité qui a commencé à faire le fruit et qui est au stade laiteux. C’est-à-dire qu’on presse ces petits épis. Si rien ne sort, c’est trop tôt. Si on sent que c’est dur, c’est trop tard. À un moment, on va presser et un liquide blanc laiteux va sortir. Et là, on ramasse et on en fait une teinture de plante fraiche comme expliqué dans l’épisode sur l’avoine.

Ensuite, toute la partie aérienne : feuilles, tiges, les fleurs si la plante est en fleurs, les fruits s’ils sont développés. On coupe relativement bas sur la plante, et ensuite, au sécateur, on va couper en morceaux puis faire sécher et garder dans des sacs.

On va préparer des infusions de ces morceaux, tout simplement. L’infusion est une très bonne manière d’aller chercher les minéraux de la plante. Ça fait des infusions reminéralisantes. On parle souvent de l’ortie, qui est la star des reminéralisantes, mais l’avoine est super intéressante aussi, et tellement abondante un peu partout.

Moi, j’ai appris à ramasser à un stade relativement avancé, la plante est toujours verte, mais elle a fait ses sommités fleuries, voire, elle est montée en graines. Probablement parce que si on coupe trop tôt, on ne pourra pas profiter des fruits laiteux dont je vous ai parlé. Mais si on ne s’intéresse pas aux fruits laiteux et à l’alcoolature à l’américaine, on pourrait récolter la partie aérienne juste avant floraison pour maximiser la teneur en constituants.

Et puis comme d’habitude, l’herboristerie pratique, c’est aussi de ramasser au besoin, même si ce n’est pas le stade optimal. De toute manière, quel que soit le stade, vous aurez toujours une grande richesse en minéraux.

Avoine sauvage


Combien planter pour une famille de 5 ?

Question : je me mets tardivement au jardinage. J’ai trouvé une dame sur Leboncoin qui m’a vendue pas mal de plantes médicinales dans des godets. Mais je n’ai qu’un plant de chaque Combien en faut-il pour une famille de 5 ? Faut-il faire des rangées d’une même espèce ou planter au gré des envies ?

Tout dépend de tes objectifs, de la fréquence des prises, des formes utilisées. Tu ne sauras rien de tout cela avant de démarrer et de faire une première année au jardin. Donc n’essaie pas trop d’analyser le truc. Tu te fixes max 5 à 10 espèces, et max 5 pieds par espèce, et tu te lances.

Au fil de la saison, tu apprendras à connaître ces plantes, comment les utiliser pour ta famille. Et au fil des années, tu vas ajuster. Moi, il m’a fallu bien 4 ou 5 ans pour arriver à me dire de quoi j’avais vraiment besoin pour mes objectifs familiaux.

Tu plantes en fonction des besoins d’ensoleillement de la plante, mais mélange les espèces, au gré de tes envies. Là encore, au fil des années, on crée des zones d’ombres, des zones ensoleillées, des zones où on arrose plus ou moins. Et chaque vivace finira par trouver sa place, se ressemer là où elle a envie. Chaque annuelle se ressèmera aux endroits les plus propices. Observe. Regarde où se développent les plants les plus forts. Prend ton temps.

Voilà à quoi cela peut ressembler chez moi… après quasiment 10 ans d’expérimentation

quelque plante du jardin


Évaporation de l’alcool pour le MHIA

Dernière question : pour le macérat huileux par intermédiaire alcoolique, faut-il systématiquement faire un bain-marie pour évaporer l’alcool. 

Alors, pour rappel, le macérat huileux par intermédiaire alcoolique consiste à utiliser un alcool à 96° de consommation (compliqué à trouver en France, je sais, et on ne parle pas d’alcool dénaturé ici) pour légèrement imbiber la plante sèche. On laisse reposer 1 h et on verse l’huile végétale par-dessus. L’alcool a commencé son travail très efficace d’extraction. Et l’huile vient récupérer tout ça. Il y a un transfert qui se fait de l’alcool vers l’huile. Ca donne des macérats huileux d’une concentration exceptionnelle.

Mais il y a de l’alcool dans l’huile. Donc faut le faire évaporer. Dans mes formations, je vous ai donné différentes manières de procéder, depuis le blender pour brasser le macérat, l’aérer et permettre à l’alcool de s’évaporer. Le bain-marie.

Et puis, au fil des années, je laisse tout simplement à température ambiante et ça va s’évaporer tout seul. L’alcool à 96° surnage l’huile, il est plus léger que l’huile. Il reste en surface et va faire comme une tâche sur votre macérat huileux si vous le regardez à la lumière.

Vous le mettez dans un saladier, vous couvrez avec un tissu pour éviter la poussière, et vous verrez que jour après jour, la tâche d’alcool diminue en taille, car l’alcool à très fort titrage s’évapore tout seul. Tout simplement.

macération

Voilà pour ce 5ᵉ questions réponses, j’ai essayé de faire un format un peu plus court et rapide, de couvrir un peu plus de questions que d’habitude. J’espère que ça vous a plu.

Merci d’être là. A très bientôt pour un prochain épisode !

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Bonjour, aujourd’hui je vous parle de la cataire, une plante aromatique que j’adore, que j’ai apprise à bien connaître à mes débuts lorsque je vivais sur le continent nord américain, car elle occupe une grande place en herboristerie américaine. C’est une lamiacée vivace très aromatique, avec une odeur caractéristique et très prenante que j’aurais bien du mal à vous décrire ici.

Certains trouvent l’odeur désagréable. Certains parlent d’une odeur entre la menthe pouliot et la menthe poivrée. On retrouve effectivement certains parfums mentholés, mais il y a d’autres constituants aromatiques qui la rendent assez originale.

Elle est super facile à cultiver au jardin, certains chats en sont complètement dingues, on reparle de tout ça en détail dans une petite minute.

Mais avant de commencer, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité, comme celui-ci, et toujours accessible gratuitement.

Je vous rappelle aussi que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription médicale.


Un peu de botanique

On démarre avec un peu de botanique. La cataire (Nepeta cataria) est une lamiacée vivace très facile à cultiver au jardin, on l’appelle aussi herbe aux chats, menthe aux chats, chataire.

À ma connaissance, vous ne la trouverez pas vraiment dans la nature en France sauf si elle s’est échappée des jardins ici et là. Donc c’est vraiment une plante des jardins. Aux États-Unis, elle est devenue envahissante dans certains états mais pas chez nous.

Au jardin, elle est très simple à cultiver. Par contre, attention de prendre vos précautions. La plante semble avoir un effet aphrodisiaque sur les chats. Pas tous les chats, mais certains en sont dingues, et j’ai pu tester pour vous dans mon jardin. Certains chats s’y roulent dedans, la bave à la gueule, et ils ont l’air complètement drogués, ou du moins très amoureux de la plante.

Un de mes chats mangeait les feuilles et s’occupait de me rabattre mes plants en pots, parfois d’une manière un peu extrême. Je retrouvais souvent des poils un peu partout dans mes plants de cataire.

Donc un conseil : assurez-vous de pouvoir protéger vos plants. Sinon ils seront écrasés, grignotés, donc peut-être mettre un grillage ou autre protection, du moins si vous voulez faire une récolte « propre ».

Les constituants responsables de cet effet sont probablement le népétalactone, un irridoïde, ainsi que l’actinidine, que l’on retrouve aussi dans la racine de valériane, qui rend certains chats fous d’excitations aussi.


Constituants :

  • Huiles volatiles (carvacrol, nérol, géraniol, pulégone, thymol, citral, citronellol, beta-caryophyllène, limonène, etc);
  • Tanins ;
  • Flavonoïdes ;
  • Composants amers de type irridoïdes (nepetalactone) ;
  • Actinidine (un dérivé de la pyridine).

Qu’est-ce que la cataire ?

La cataire appartient à la famille des menthes (Lamiaceae), elle présente donc les caractéristiques suivantes :

  • Une tige carrée ;
  • Des feuilles opposées sur la tige. Les feuilles sont bien dentées et relativement poilues lorsqu’on les observe de près. Voir photo ci-dessous ;
  • Des fleurs à deux lèvres (bilabiées) donnant naissance à 4 graines (tétrakène, 4 akènes).
Cataire (Nepeta cataria)
Tige carrée, feuilles opposées

Les feuilles sont pétiolées et de forme triangulaire, fortement dentées et affichant un aspect poilu et grisâtre en dessous. Voir photo suivante.

Feuille velue de chataire
Feuille velue en dessous et de couleur grise-blanchâtre

Les fleurs sont petites et blanches, avec des petits points rouges. Les fleurs tubulaires comportent 2 lèvres, la lèvre inférieure étant plus grande que la supérieure. Voir photo suivante. Notez les deux feuilles opposées juste en dessous du groupement floral.

Cataire (Nepeta cataria)

Voici une tige fleurie complète. La plante fleurit abondamment de juin à septembre.

Cataire (Nepeta cataria)
Cataire au jardin

Ci-dessous, mon cher et défunt Pastis, chat borgne d’une gentillesse infinie qui nous a quitté bien trop tôt… Ici attendant probablement mon départ afin de tenter une approche amoureuse sur une magnifique cataire.

Mon chat près de son herbe à chat :-)

Cueillette et séchage

En ce qui concerne la cueillette, ce sont les sommités fleuries que l’on utilise, idéalement. D’un point de vue pratique, je trouve que la feuille est tout à fait utilisable avant ou après la floraison.

En tant que lamiacée aromatique, la cataire tolère mal le séchage. Elle n’est pas aussi fragile que la mélisse, elle arrivera à garder une partie de son parfum pendant quelques mois. Mais au-delà, elle va rapidement perdre de ses propriétés.


Propriétés de la cataire

Je vous propose maintenant de parler des propriétés médicinales de la plante.

Cataire et troubles digestifs

Et on démarre avec les troubles digestifs. La cataire est l’une des meilleures plantes pour calmer les spasmes des muscles lisses du système digestif.

Tout comme les muscles squelettiques, les muscles lisses de l’estomac ou de l’intestin peuvent rentrer dans des états de crampe. Les muscles ont trop travaillé à cause d’un repas trop copieux ou trop riche. Et si un muscle travaille trop, vous savez comment ça finit : on a des crampes ! Parfois, la digestion est tellement déficiente, que même un repas « normal » finit par causer des crampes, car les muscles doivent compenser un manque de sécrétions enzymatiques.

La cataire est antispasmodique, elle relâche ces muscles hypertendus, tout en stimulant la sécrétion de sucs gastriques grâce à sa petite amertume. Ce n’est pas une grande amère, mais elle va faire une petite relance. Et là, je peux vous dire que c’est l’une de mes infusions digestives préférées. Personnellement, j’adore ce goût aromatique tellement particulier. J’adore la combiner avec de la menthe poivrée, avec des graines de fenouil aussi.

Elle est particulièrement efficace pour les maux de ventre des enfants. Une tisane apporte souvent un soulagement rapide. Un macérât huileux de cataire appliqué sur le bas du ventre peut aussi agir de manière externe.

En herboristerie américaine, elle est souvent recommandée pour les coliques des enfants, lorsque l’enfant plie les jambes vers l’abdomen, ou « pédale » d’une manière énergique à cause de la douleur. William Cook(3), médecin Américain des années 1800, nous explique que la cataire est tellement efficace qu’à l’époque, les mères l’emploient dans de trop grandes quantités, ce qui peut créer l’effet inverse : des douleurs provoquées par la quantité de liquide ingérée.

Je la trouve particulièrement efficace lorsque les problèmes de digestion sont causés par le stress passager ou chronique. Ce qui nous amène au point suivant…

Cataire et troubles nerveux

On connait aujourd’hui le lien étroit qui existe entre équilibre et bien-être intestinal, et équilibre nerveux. Dans le passé, on pensait que le signal se déroulait dans une seule direction : du système nerveux central vers le système digestif. Aujourd’hui, on sait que la communication va dans les deux sens, et que lorsque l’intestin va mal, le système nerveux peut ressentir des états de stress, anxiété, dépression.

Il semble que la cataire agisse sur ces deux systèmes à la fois pour les apaiser. On trouve donc des indications pour calmer les personnes stressées, anxieuses, hyperactives, chez l’adulte comme chez l’enfant.

On pourrait faire de beaux mélanges à infusion, très doux, pour calmer les énervés et les hyperactifs, avec de la cataire, de la camomille matricaire, du tilleul, de la lavande. On couvre bien pendant le processus d’infusion, et puis on respire avant de boire. On se fait une petite séance d’aromathérapie juste au-dessus de la tasse.

Reminéralisation

Autre propriété très peu connue pour la cataire, c’est une excellente plante minéralisante. Si je prends 30 grammes de cataire, j’obtiens (Bergner, 1997) :

  • 205 mg de Calcium
  • 69 mg de Magnésium
  • 783 mg de Potassium
  • 4,6 mg de Fer

Si vous comparez à l’ortie, notre reine des minéralisantes, on voit que la cataire contient 1/5 du Calcium de l’ortie, donc beaucoup mois mais pas mal tout de même. 1/4 du Magnésium. Mais elle contient plus de Potassium (34% de plus) et 3 fois plus de fer ! Et pourtant, lorsqu’on manque de fer, on a l’habitude de conseiller l’ortie.

C’est peut-être pour ça que Cazin, dans son ouvrage phare de 1868, la recommande pour la chlorose, qui désignait à l’époque une forme d’anémie ferriprive (c’est-à-dire une anémie due à une carence en fer).

Je pense qu’il y a une action duale ici : (1) apport de minéraux grandement biodisponibles et (2) amélioration des fonctions digestives afin de faciliter une meilleure assimilation.

Et pourquoi pas faire un mélange cataire et ortie pour assurer un apport le plus large possible de tous les minéraux.

Aménorrhée et Dysménorrhée

Passons au point suivant. La cataire peut rentrer dans la composition de mélanges antispasmodiques pour soulager les dysménorrhées, c’est-à-dire les règles douloureuses. On pourra faire des mélanges avec la camomille matricaire, l’achillée millefeuille, le basilic par exemple, pour rester dans les aromatiques.

On préparera une infusion bien chaude (tout en restant buvable bien évidemment), on mettra une bonne cuillère à soupe de ce mélange, voir un peu plus en fonction des constitutions.

Effet diaphorétique de la cataire

L’indication suivante est très importante à comprendre, c’est l’utilisation de la cataire pour l’accompagnement des fièvres. Bien sûr, on est ici dans le médical, donc consultez un médecin si vous êtes dans le doute. Pour une situation bénigne, je vous ai fait un épisode sur l’importance des plantes diaphorétiques dans le processus de guérison d’une infection avec fiègre. Je ne sais pas si vous vous rappelez, on vous remettra le lien dans l’article associé à cet épisode.

La fièvre est un processus naturel et nécessaire pour combattre les pathogènes. Si notre système décide de faire monter la température, ce n’est pas pour rien. Et pour bien réguler ce processus, notre corps utilise plusieurs mécanismes de production ou d’évacuation de chaleur.

La peau, au travers de la transpiration, est l’un des organes principaux d’évacuation de la chaleur. Mais les pores de la peau doivent bien s’ouvrir pour faciliter ce processus. La cataire est un excellent diaphorétique : elle facilite l’ouverture des pores de la peau pour une transpiration abondante et efficace.

L’infusion de cataire est une très bonne plante d’accompagnement des fièvres pour les petits comme pour les grands. On peut le combiner à la fleur de sureau et à la menthe poivrée, faire 1/3 de chaque. Ça va faire une infusion très agréable à boire, et qui va voir un peu l’effet d’ouvrir les fenêtres lorsqu’on a trop chaud, qu’on a percé la fièvre et que maintenant, on a besoin de redescendre en température.

Nausées et vomissements

Comme toutes les menthes ou autres lamiacées aromatiques et agréables à boire (comme le calament), la cataire peut soulager les nausées.

Par contre, en ce qui me concerne, je choisis bien plus volontiers la menthe poivrée ou la mélisse, plus agréable à boire, plus légère en goût, avant de passer à la cataire qui a un goût assez prononcé et désagréable pour certains. Moi j’aime bien le goût, mais j’ai déjà vu des grimaces qui m’ont fait dire que ce n’est pas pour tout le monde.

Indications diverses de la cataire

On termine par quelques indications diverses :

  • Traditionnellement, la plante a été utilisée pour les maux de têtes et migraines d’origine nerveuse. Personnellement, je la conseille volontiers pour les migraines d’origine digestives, du style lorsque vous vous sentez lourd, trop mangé, trop gras et vous savez que c’est un déclencheur pour vous.
  • Lieutaghi(4) nous rappelle que c’est une expectorante voisine du marrube (Marrubium vulgare) en efficacité, et peut être utilisé dans les catarrhes pulmonaires chroniques, la toux spasmodique et la coqueluche (ce dernier confirmé par William Cooke(3)).
  • Et pour finir, elle semble assez efficace pour repousser les moustiques et autres insectes.

Précautions pour la cataire

Les précautions d’emploi :

  • Vu son action sur les muscles de l’utérus, il vaut mieux l’éviter pendant la grossesse ;
  • Matthew Wood(1) recommande de ne pas l’utiliser de manière continue avec les enfants, elle entrainerait un effet quasi-narcotique au long terme d’après lui.

Formes et quantités

En ce qui concerne les formes et les quantités, je trouve que les meilleurs résultats sont obtenus en employant l’infusion de feuilles fraîches, ou la teinture de feuilles fraîches. Ceci est en particulier vrai pour les propriétés calmantes de la plante. Si la plante est sèche, j’estime qu’il manque une dimension aromatique importante, c’est un peu dommage.

Pour les dosages :

  • Teinture des feuilles ou sommités fleuries fraîches idéalement : 20 à 60 gouttes une à plusieurs fois par jour selon la personne et la condition ;
  • Infusion des feuilles ou sommités fleuries fraîches ou récemment séchées : infusion au besoin. Toujours bien couvrir le récipient pour ne pas perdre les constituants volatils. Cooke(3) recommande de faire bouillir l’eau puis la laisser refroidir avant de verser sur la plante, sous peine de détruire les composants aromatiques et de ne le laisser que les composants amers.

Références

Bergner, « The mineral content of herbal decoctions« , Medical Herbalism 07-31-97 9(2): 6-8

(1) Wood, Matthew, « The Earthwise Herbal: A Complete Guide to Old World Medicinal Plants » , 2008.

(2) Moore, Michael, « Specific Indications for Herbs in General Use », 3ème édition

(3) Cooke, William, « The Physiomedical Dispensatory », 1869

(4) Lieutaghi, Pierre, « Le Livre des Bonnes Herbes » , 3ème édition révisée, 1996

Bonjour, bienvenue dans ce 8ᵉ épisode de ma série « brève des herbes », une série dans laquelle je passe en revue des études scientifiques sur les plantes, études qui ont attiré mon attention ces derniers temps.

Je vous rappelle l’état d’esprit de ces revues. Je ne cherche pas de grandes vérités, mais plutôt de nouvelles idées, de nouvelles stratégies, de nouvelles directions pour notre pratique, que ce soit une pratique des familles ou professionnelle. Idées que nous pourrions par la suite valider dans notre pratique, justement.

Dans cet épisode, je vous propose 2 études. Une sur l’aronia et une sur le géranium du cap. De ces deux plantes, j’ai la chance d’avoir cultivé et utilisé le géranium du cap. On en reparle dans une minute.

Mais avant, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité, et toujours accessible gratuitement.

Je vous rappelle aussi que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription médicale.


Aronia : protecteur des grandes maladies ?

Allez, c’est parti pour nos deux études. La première (1) concerne le fruit de l’aronia noir (Aronia melanocarpa). C’est en fait une revue d’études qui date de 2022 et qui fait le tour des propriétés de ce fruit.

Je connaissais déjà l’aronia, mais lorsque je suis tombé sur cette étude, je me suis dit qu’il présentait un potentiel vraiment intéressant pour notre santé, note longévité. Et par longévité, je n’entends pas de vivre plus longtemps nécessairement, mais de vivre mieux dans le temps qu’il nous reste et de profiter de la vie jusqu’au bout.

Mais avant de vous parler du potentiel, j’aimerais vous parler de la plante, l’arbuste pour être plus précis.

Aronia en tant qu’arbuste décoratif

Il provient d’Amérique du Nord, c’est un excellent arbuste d’ornement au jardin. Il est solide, rustique. Il appartient à la famille des rosacées. Il a l’air d’être productif en ce qui concerne les fruits, qui sont les parties qui nous intéressent. En revanche, il aime les sols frais et pauvres en calcaire, du coup je n’essaie même pas chez moi en Provence, je pense que c’est grillé d’avance vu que, au contraire, j’ai un sol aride et riche en calcaire.

Mais pour de nombreuses régions de France, ça parait tout à fait jouable, et ça a l’air d’être un bel arbuste qui permet de mettre en place des haies fructifères et médicinales.

fleurs d'aronia

Propriétés de l’aronia

Mais revenons à la revue. Le fruit d’aronia est très riche en substances antioxydantes et protectrices, des pigments que l’on appelle des anthocyanes, qui sont responsables de la couleur du fruit. Les chercheurs mettent en valeur les propriétés suivantes :

  • Antidiabétiques, avec des effets bénéfiques sur les états de résistance à l’insuline accompagnés d’hyperinsulinémie, un état assez caractéristique du syndrome métabolique et du diabète de type 2. Dans les études, on voit une baisse de la glycémie, de l’insulinémie, une meilleure sensibilité cellulaire à l’insuline, donc on va dans la bonne direction pour contrer cette maladie de civilisation. Bien évidemment, les deux piliers principaux de la stratégie resteront les réformes alimentaires et l’activité physique. Mais l’accompagnement avec les plantes est une aide tout à fait efficace.
  • Anti tumeur, une propriété principalement démontrée sur des lignées de cellules cancéreuses, donc des études plutôt faites in vitro, aucune étude faite sur humains à ma connaissance et c’est toujours compliqué d’extrapoler car il faut que les constituants atteignent les zones en question. Mais globalement, de bonnes indications qu’il peut réduire la prolifération cellulaire, et on va le positionner surtout en prévention.
  • Protecteur cardiovasculaire avec un effet bénéfique sur la lipidémie sanguine – triglycérides, LDL et cholestérol total. On note aussi une diminution de la pression artérielle.
  • Protecteur neurologique : protège contre la destruction des neurones, contre les effets de la plaque beta-amyloïde de la maladie d’Alzheimer.

Donc, je ne sais pas si vous voyez, mais globalement, on a quelque chose de puissamment protecteur contre les maladies des civilisations industrialisées : cancers, maladies neurodégénératives, maladies cardiaques, maladies métaboliques. Les quatre grands groupes qui font peur.

Ça fait réfléchir. On voit le potentiel. Oui, je sais, de nombreuses études dans cette revue ont été faites in vitro ou sur animaux. On a tout de même quelques études sur humains. Trop peu. C’est toujours notre problème dans le monde des plantes. Trop peu d’études pour être pris au sérieux. Pas assez d’investissements de nos autorités de santé pour mettre les plantes médicinales en valeur.

Un remède au jardin ?

Je vous laisse réfléchir à tout ça. En ce qui me concerne, j’estime que les données sont fiables. Pour les quantités consommées, on parle souvent de 200 ml de jus des fruits frais par jour, donc ça fait un bon verre.

Lorsqu’on étudie l’extrait sec (2), il est parfois standardisé en anthocyanes, et si mes calculs sont bons, on parle d’un équivalent en fruits secs qui varierait entre la pincée et la poignée par jour (3). Je vous mets toutes les références en fin d’article si vous voulez les consulter.

Du coup, ne pourrait-on pas planter cet arbuste au jardin ? En consommer ses fruits régulièrement ? Les conserver, peut-être à l’état sec pour avoir une provision toute l’année, encore faudrait-il voir l’impact sur la dégradation des anthocyanes ici, mais je pense que si on ne réduit pas le fruit en poudre, qu’on le garde entier à l’abri de la lumière, on devrait pouvoir conserver le plus gros des propriétés jusqu’à la prochaine récolte.

Voilà pour l’aronia. J’espère avoir réveillé le jardinier curieux en vous !

Baies d'aronia


Géranium umcka et sinusite aigüe bactérienne

La seconde étude (4) concerne une petite plante dont je voulais vous parler. Je ne pense pas que vous la connaissiez. Moi, ça fait une bonne douzaine d’années que je l’ai au jardin, en pots pour être exact vu qu’elle ne survivrait pas l’hiver.

C’est un petit géranium qu’on appelle « géranium umcka » ou « umckaloabo » ou encore « géranium du cap ». Pelargonium sidoides. Il est originaire d’Afrique du Sud. On utilise ses racines, et j’avais appris son utilisation lorsque je vivais en Amérique du Nord.

La racine est positionnée comme puissante antiinfectieuse et immunostimulante. De telle manière que dans certains pays comme l’Allemagne, on en fait des préparations  très populaires en pharmacie ou en boutique de produit naturel, sous forme de comprimés ou de sirops ou autre.

Est-ce écoresponsable ? Non. Je m’inquiète pour l’état de la ressource en Afrique du Sud, c’est probablement similaire à la situation pour l’harpagophytum.

Au jardin, chez moi en Provence, je n’ai pas eu trop de mal à faire germer les graines que l’on m’avait confiées. Par contre, la plante pousse très lentement, elle craint le froid, j’ai réussi à en garder 4 pots que je rentre chaque hiver. Et pendant l’hiver, à l’intérieur, elles me font un peu la gueule. Elles repartent ensuite au printemps lorsque je les ramène en plein soleil.

Feuilles de géranium du cap

Mais revenons à l’étude. Elle a été faite sur des malades souffrant de sinusite aigüe bactérienne. Je ne sais pas si vous vous êtes déjà tapé une sinusite aiguë virale, déjà, ça calme. Mais les versions bactériennes, c’est un degré au-dessus d’un point de vue durée, douleurs et symptômes.

La solution classique ici, vu qu’on est dans le bactérien, c’est bien évidemment l’antibiotique. La question que les chercheurs se sont posés, c’est la suivante : est-ce qu’une préparation à base de géranium du Cap pourrait accélérer la guérison, et si oui, quelle est son efficacité comparée à un antibiotique.

On a donc pris 50 patients adultes souffrant de sinusite bactérienne aiguë. On les a divisés en 2 groupes, un groupe recevant 3 fois 20 mg d’un extrait de géranium du Cap par jour, et un groupe prenant 3 fois 500 mg d’amoxicilline par jour. Le tout pendant 10 jours. L’étude est ce qu’on appelle « open label », c’est-à-dire que les chercheurs et les patients savent ce qu’ils prennent, on n’est pas dans le double aveugle, et ça sera la critique principale de l’étude (rappelez-vous la série spéciale que je vous ai faite sur les études interventionnelles dans laquelle je vous explique tout ceci, je vous remettrai le lien dans l’article associé à cet épisode).

Résultats :

  • Tous symptômes confondus, l’extrait de géranium du Cap apporte de meilleurs résultats que l’antibiotique à partir du jour 7 de traitement. Donc il faut quelques jours pour qu’il agisse.
  • En particulier, le géranium est plus efficace que l’antibiotique pour réduire l’obstruction nasale, la sensation de douleur et de pression au visage, pour améliorer l’odorat, pour réduire l’œdème ainsi que les sécrétions purulentes.
  • A noter, le fait que le géranium diminue la présence de 3 souches bactériennes : Streptococcus pneumoniae, Haemophilus influenzae et Moraxella catarrhalis. L’amoxicilline n’en réduit que deux.
Tiré de : Perić A, Gaćeša D, Barać A, Sotirović J, Perić AV. Herbal Drug EPs 7630 versus Amoxicillin in Patients with Uncomplicated Acute Bacterial Rhinosinusitis: A Randomized, Open-Label Study. Ann Otol Rhinol Laryngol. 2020 Oct;129(10):969-976.

Pourquoi cette étude est-elle intéressante ?

Vous avez sans aucun doute entendu parler de la problématique de la résistance bactérienne aux antibiotiques. Les laboratoires pharmaceutiques n’investissent plus dans la recherche sur les nouvelles molécules aujourd’hui. Car le retour sur investissement est trop mauvais. Pas assez de revenus potentiels (5).

Donc on a intérêt à se bouger les fesses pour trouver de nouvelles approches. On a vu, au fil des études, que les plantes et les molécules naturelles sont parfois redoutablement efficaces contre les bactéries, y compris celles qui sont résistantes aux antibiotiques médicamenteux. On a une synergie de constituant qui vient attaquer ces bactéries d’une manière large et diversifiée, et les bactéries ont beaucoup plus de mal à faire fonctionner leurs mécanismes de contournement, comme les pompe à efflux, l’inactivation enzymatique, etc.

Et on ne parle même pas que l’un remplace l’autre. La puissance du modèle, c’est que si on doit faire face à une grande vague catastrophique de résistance, l’un vienne complémenter l’autre. La plante vient empêcher que la bactérie mette en route tous ces mécanismes de blocage et évacuation de la molécule d’antibiotique, pour qu’enfin elle puisse agir avec toute sa puissance.

Donc quelles sont les plantes que l’on pourrait ressortir en cas d’urgence, en cas de crise sanitaire ? En ce qui me concerne, je rajoute le géranium du cap à ma liste. Et puis si j’arrive à le cultiver en pot chez moi, je pense qu’on doit arriver à le faire pousser ailleurs.

Voilà, c’est tout pour aujourd’hui. Merci de vous intéresser à ces sujets de recherche. Comme je vous le dis souvent, pour pouvoir progresser dans le monde des plantes, il faut savoir combiner science, tradition et expérimentation.

A très bientôt pour un nouvel épisode !

géranium du cap fleur


Références

(1) Ren Y, Frank T, Meyer G, Lei J, Grebenc JR, Slaughter R, Gao YG, Kinghorn AD. Potential Benefits of Black Chokeberry (Aronia melanocarpa) Fruits and Their Constituents in Improving Human Health. Molecules. 2022 Nov 13;27(22):7823. doi: 10.3390/molecules27227823. PMID: 36431924; PMCID: PMC9696386.

(2) Ahles S, Stevens YR, Joris PJ, Vauzour D, Adam J, de Groot E, Plat J. The Effect of Long-Term Aroniamelanocarpa Extract Supplementation on Cognitive Performance, Mood, and Vascular Function: A Randomized Controlled Trial in Healthy, Middle-Aged Individuals. Nutrients. 2020 Aug 17;12(8):2475. doi: 10.3390/nu12082475. PMID: 32824483; PMCID: PMC7468716.

NOTE : l’étude ci-dessus ⬆︎ est financée par un laboratoire, j’en suis conscient. Je l’ai simplement utilisée pour avoir une idée du dosage en extrait sec employé dans certaines études.

(3) Taheri, R., Connolly, B., Brand, M., & Bolling, B. (2013). Underutilized chokeberry (Aronia melanocarpa, Aronia arbutifolia, Aronia prunifolia) accessions are rich sources of anthocyanins, flavonoids, hydroxycinnamic acids, and proanthocyanidins.. Journal of agricultural and food chemistry, 61 36, 8581-8 . https://doi.org/10.1021/jf402449q.

(4) Perić A, Gaćeša D, Barać A, Sotirović J, Perić AV. Herbal Drug EPs 7630 versus Amoxicillin in Patients with Uncomplicated Acute Bacterial Rhinosinusitis: A Randomized, Open-Label Study. Ann Otol Rhinol Laryngol. 2020 Oct;129(10):969-976. doi: 10.1177/0003489420918266. Epub 2020 May 26. PMID: 32456442.

(5) Fernandes, P., & Martens, E. (2017). Antibiotics in late clinical development. Biochemical Pharmacology, 133, 152–163. https://doi.org/10.1016/j.bcp.2016.09.025.

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