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Bonjour et bienvenue pour ce 5ᵉ questions/réponses sur les plantes médicinales et l’herboristerie.
Cette fois, je vais essayer de faire des questions et réponses un peu plus rapides à traiter, histoire de parcourir une liste un peu plus longue que d’habitude. Ces questions proviennent des forums de l’école Altheaprovence. Et j’ai essayé de sélectionner un panel assez large, depuis le jardinage des médicinales en passant par la fabrication de produits et en allant jusqu’à la pratique du conseil.
Avant de démarrer, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription médicale.
Remède de secours infections virales ou bactériennes
Question : comment préparer un remède de secours pour les infections virales ou bactériennes lorsqu’on n’a pas un très grand choix à la maison ?
Idéalement, on choisirait des plantes qui soutiennent l’immunité et qui ont aussi une action antibactérienne et antivirale directe.
Ensuite tout dépend de la localisation de l’infection, dans le sens où si c’est une infection des bronches par exemple, on va rajouter un 3ᵉ axe pour garder le mucus fluide et l’expectorer efficacement. Je vous renvoie vers l’épisode que je vous ai fait sur le sujet de la toux grasse, on vous mettra le lien dans l’article associé à cette discussion sur le site.
Le thym, que l’on trouve dans de nombreuses cuisines, remplit ces 3 catégories – stimule l’immunité, détruit directement les pathogènes et agit comme mucolytique et expectorant. Si on simplifie à l’extrême, on part avec des lamiacées du sud, très aromatiques, et riches en phénols, type thym, origan, sarriette pour fournir la base du mélange à infusion, et ensuite, on rajoute d’autres en fonction des objectifs. Notez que je ne parle pas de l’utilisation d’huile essentielle ici, mais bien de la plante entière. Et notez aussi que la qualité de ces plantes aromatiques est primordiale.
Si j’ai des fleurs de sureau pour l’immunité, je le rajoute. Je rajoute aussi des épices que j’ai en cuisine, type gingembre, un peu de clous de girofle, un peu de cannelle de Ceylan, pour faire un mélange qui soit buvable (pas trop fort non plus) mais qui commence à faire un bon nettoyage. Ces épices sont souvent immunostimulantes et antiinfectieuses.
Voilà pour un remède de secours avec des plantes simples qu’on pourrait avoir chez soi, dans les placards. Et n’oubliez pas que c’est la fréquence de prise qui va faire toute la différence, ce n’est pas juste une tasse tous les matins si on a un problème infectieux.
Mauvaise réaction à l’éleuthérocoque
Question : j’ai récemment fait une cure d’un extrait concentré d’éleuthérocoque, car je sortais d’une grippe qui m’a épuisée. Ça m’a fait du bien pendant le premier mois, maintenant, j’ai l’impression que je dors moins bien. Est-ce l’éleuthérocoque ? Quelle est la durée max de prise avant d’avoir un effet trop excitant ?
Alors, on ne peut jamais être sûr que c’est la plante ici, car il peut y avoir d’autres facteurs. Mais en gros, oui, les plantes adaptogènes comme l’éleuthérocoque, la rhodiole, le ginseng, peuvent devenir excitantes si on en prend trop en quantité, si on en prend trop longtemps alors qu’on n’en a plus besoin, ou si on n’en avait pas besoin dès le départ.
Lorsqu’on traverse une période d’épuisement, ces plantes sont indiquées, et on les prend en général aussi longtemps que nécessaire pour remonter la pente. Parfois, on les prend pendant plusieurs mois. Donc ici, il y avait épuisement post-infection, le choix me parait logique.
Par contre, il faut s’écouter. Et ça, on ne sait plus faire aujourd’hui. Au moment où on se sent mieux, que la vitalité est revenue en grande partie, on peut arrêter. Chez vous, ça sera peut-être au bout de 6 semaines, chez moi au bout de 3 mois. Cela va dépendre de la situation, de la personne, de son niveau de stress et de fatigue.
Donc apprendre à s’écouter. Si le sommeil commence à être perturbé, si on commence à sentir des signes d’hyperexcitabilité, c’est signe qu’il faut arrêter. La plante a fait son travail. Faut passer à autre chose.
Différents types d’échinacée
Question : quelle est la différence entre les différentes espèces d’échinacée en termes d’efficacité immunitaire ?
Alors, une réponse simple consiste à dire qu’elles se valent toutes. Clairement, une fois qu’on a goûté à la racine de ces différentes espèces d’échinacées, en termes d’effet en bouche, et donc indirectement de richesse en constituants (car il faut réapprendre à se fier à nos sens), il y a des différences.
Globalement, elles sont toutes actives. Et on utilise principalement la racine. Et là, on a peut-être deux siècles et demi d’utilisation en herboristerie américaine, de comparaisons, et de conclusion que rien ne vaut la racine.
Une réponse un peu plus précise au sujet des différentes espèces, c’est que d’après l’expérience des médecins américains des années 1800, Echinacea angustifolia était la plus active, de loin. Par contre, c’est l’une des plus complexes à cultiver, je trouve. Chez moi, elle reste relativement petite, et j’ai du mal à la garder d’une année sur l’autre, alors que les deux autres que j’ai testées, E. purpurea et E. pallida, sont solides et très résistantes à la sécheresse et aux maladies.
Cela dit, mon jardin est en Provence, si vous habitez dans une région plus froide que la mienne, il est possible qu’Angustifolia se plaise chez vous. A tester. Notez qu’il y en a d’autres que je n’ai pas planté au jardin comme Echinacea tennesseensis (qui fait des fleurs jaunes magnifiques) ou Echinacea paradoxa. Donc encore beaucoup de choses à explorer.
Combiner gattilier et alchémille
Question : peut-on combiner le gattilier avec l’alchémille pour un effet synergique sur le SPM ?
Petit rappel, les deux plantes sont connues pour stimuler la production de progestérone en soutenant le développement du corps jaune.
Dans mon expérience, le gattilier est largement plus actif que l’alchémille. Il peut s’avérer très utile en période de syndrome prémenstruel ou en péri ménopause lorsque les cycles deviennent très erratiques. On l’utilise aussi pour les hyperandrogénies, hyperprolactinémies. Mais je trouve que ce n’est pas une plante si facile que ça à utiliser. J’ai vu des femmes qui avaient des cycles très perturbés à cause d’un mauvais dosage de gattilier, en général trop dosé pour la sensibilité de la personne. Donc, elle a un peu cette double-face.
Si vous n’avez pas d’expérience avec ces plantes, démarrez avec l’alchémille, elle aura globalement un effet tonique sur toute la sphère utérine. On peut la combiner avec d’autres comme l’achillée millefeuille, la feuille de framboisier et d’autres toniques du cycle…
Et si on n’a pas assez de résultats sur un SPM, on peut ensuite passer au gattilier, ou rajouter du gattilier pour jouer sur des synergies de constituants effectivement.
Aubépine : différence fleurs, feuilles et baies
Question : aubépine, quelle est la différence entre l’effet des fleurs, des feuilles et des fruits ?
Les fleurs et les feuilles ont une action cardiotonique, elles régulent la fonction cardiaque, ont un effet vasorelaxant aussi, c’est-à-dire qu’elles créent une relaxation des artères qui est bénéfique lorsqu’on souffre d’hypertension. Je vous renvoie à mon épisode sur l’aubépine pour plus d’informations.
Les fruits, qu’on appelle aussi cenelles, sont très riches en antioxydants. Ce sont les pigments rouges des cenelles, des flavonoïdes, qui auront une action antiinflammatoire et protectrice des artères, bloquant l’oxydation du LDL et d’autres phénomènes qui sont à l’origine du développement de la plaque artérielle. Elles améliorent aussi la lipidémie sanguine et les dérèglements métaboliques.
Donc plutôt un effet plutôt actif et protecteur au long terme, je dirais, alors que les fleurs et feuilles ont une action plus rapide et directe sur la fonction cardiovasculaire. Ceci dit, je suis prêt à être contredit sur ce point-là, car on pourrait, je pense, utiliser la poudre des cenelles à une certaine dose pour obtenir des effets thérapeutiques rapides et directs, mais je n’ai pas l’expérience avec cette forme. Donc je ne peux pas vous dire.
Notons au passage que les cenelles sont utilisées en médecine chinoise pour tout ce qui est stagnation digestive lorsqu’on mange un repas un peu trop riche. Les praticiens de MTC me pardonnerons pour cette grossière simplification, je l’espère.
Synergie ginkgo et bacopa
Question : ginkgo biloba, existe-t-il une synergie avec d’autres plantes nootropique comme le Bacopa monnieri ?
Je vous définis rapidement le terme nootropique : qui stimule les capacités cognitives.
Alors oui, il y a de bonnes combinaisons à faire. Ginkgo, bacopa, romarin, centella asiatica et d’autres. Franchement, on ne sait pas trop comment ces plantes fonctionnent exactement. On sait qu’elles ont un effet anti-inflammatoire sur l’environnement cérébral, sachant que l’inflammation met vraiment la pagaille dans le système nerveux central. Elles permettent aux cellules cérébrales un meilleur captage de l’oxygène. Elles protègent contre le stress oxydatif qui abime les cellules.
On a des flavonoïdes, des saponosides, des triterpènes, diterpènes, sesquiterpènes… C’est tout un bal de constituants et chaque plante aura son profil différent. Alors effectivement, on pourrait les combiner, par exemple, avec des gélules de feuilles de bacopa en poudre (plante que je cultive depuis plus de 10 ans) et de ginkgo par exemple. Ou une poudre de feuilles de centella asiatica (que je cultive aussi depuis longtemps) avec une infusion de romarin.
C’est possible. Et tout va dépendre de la situation et des objectifs, et de quelle carence des capacités cognitives on a besoin de combler. Rien de miraculeux bien évidemment, mais on peut obtenir un coup de pouce appréciable.
A ce stade, j’en profite pour vous rappeler qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, basé sur l’expérience et la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité comme aujourd’hui, et toujours accessible gratuitement.
Solvants pour la camomille matricaire
Question : camomille matricaire, quels solvants sont les plus adaptés pour extraire les flavonoïdes et les coumarines de la plante ?
Alors, je ne sais pas s’il faut faire une fixation sur les flavonoïdes et les coumarines. C’est bien de connaitre les constituants des plantes, mais si on se perd trop dans la technicité du constituant, on peut parfois passer à côté d’une vision plus englobante.
Pour moi (et c’est très personnel, on a tous une manière différente d’enseigner l’herboristerie), prendre du recul, c’est voir quelle forme me fournira une évaluation organoleptique qui me rappelle la plante fraiche. Dit dans des termes plus simples, je veux que mon extraction (quelle qu’elle soit) sente la matricaire fraîche, ait le goût de la matricaire fraîche.
Les deux solvants classiques et efficaces sont l’eau et l’alcool. L’eau, ça veut dire une infusion. On va bien couvrir la tasse pour ne pas perdre les constituants volatils. L’alcool, ça veut dire une teinture. Sur plante fraiche, beaucoup mieux. Cela dit, on trouve aujourd’hui, des petits producteurs en circuit court, qui fournissent une excellente matricaire sèche. Dans le passé, j’ai eu de mauvaises surprises avec les matricaires sèches des circuits longs, qui parfois arrivent en miette, à moitié grises, il n’y a plus rien dedans.
Ce n’est plus le cas aujourd’hui, on a le choix d’acheter de la matricaire cultivée localement chez nos paysans-herboristes. Donc retour à ta question, quels solvants les plus adaptés pour extraire le totum de la matricaire ? L’eau et l’alcool.
Plantain et porosité intestinale
Question ; le plantain peut-il aider à réparer la muqueuse intestinale lorsque porosité et inflammation ?
Oui, j’ai de bons retours au sujet du plantain (qu’il soit lancéolé, majeur, corne de cerf ou autre) dans ce contexte précis. Et là, je vais vous donner une petite préparation à essayer. Vous réduisez la feuille de plantain en poudre, si vous y arrivez. Faut qu’elle soit vraiment bien sèche, ce n’est pas facile avec un moulin à café, mais on y arrive. Faut utiliser une petite passoire à infusions bien fine pour tamiser. J’en ai vu en poudre dans certaines herboristeries, il me semble.
Ensuite, on mélange avec une poudre de curcuma, disons moitié moitié. Parfois, j’ai vu des produits avec de la L-glutamine dedans, qui est l’un des grands classiques de l’hyperperméabilité intestinale. On prend une cuillère à café de cette poudre plantain-curcuma dans un peu d’eau entre les repas. Je répète, mais faut que ce soit tamisé bien finement, sinon ça ne sera pas très agréable à boire.
On pourrait rajouter aussi un peu de poudre de réglisse si pas de contrindications, pour son effet très anti-inflammatoire de la muqueuse intestinale.
Cueillette de l’avoine sauvage
Question : j’ai le projet de cultiver cette année de l’avoine dans le but de la préparer en plante sèche pour la tisane. Je souhaiterais des informations sur le stade de cueillette : les jeunes pousses vertes sont préconisées, est-ce bien le bon stade de récolte ?
Alors, moi, j’ai appris à utiliser la plante à la manière herboristerie américaine. On utilise 2 parties de la plante, et ça, je vous en avais déjà parlé dans mon épisode sur l’avoine. D’abord, la sommité qui a commencé à faire le fruit et qui est au stade laiteux. C’est-à-dire qu’on presse ces petits épis. Si rien ne sort, c’est trop tôt. Si on sent que c’est dur, c’est trop tard. À un moment, on va presser et un liquide blanc laiteux va sortir. Et là, on ramasse et on en fait une teinture de plante fraiche comme expliqué dans l’épisode sur l’avoine.
Ensuite, toute la partie aérienne : feuilles, tiges, les fleurs si la plante est en fleurs, les fruits s’ils sont développés. On coupe relativement bas sur la plante, et ensuite, au sécateur, on va couper en morceaux puis faire sécher et garder dans des sacs.
On va préparer des infusions de ces morceaux, tout simplement. L’infusion est une très bonne manière d’aller chercher les minéraux de la plante. Ça fait des infusions reminéralisantes. On parle souvent de l’ortie, qui est la star des reminéralisantes, mais l’avoine est super intéressante aussi, et tellement abondante un peu partout.
Moi, j’ai appris à ramasser à un stade relativement avancé, la plante est toujours verte, mais elle a fait ses sommités fleuries, voire, elle est montée en graines. Probablement parce que si on coupe trop tôt, on ne pourra pas profiter des fruits laiteux dont je vous ai parlé. Mais si on ne s’intéresse pas aux fruits laiteux et à l’alcoolature à l’américaine, on pourrait récolter la partie aérienne juste avant floraison pour maximiser la teneur en constituants.
Et puis comme d’habitude, l’herboristerie pratique, c’est aussi de ramasser au besoin, même si ce n’est pas le stade optimal. De toute manière, quel que soit le stade, vous aurez toujours une grande richesse en minéraux.
Combien planter pour une famille de 5 ?
Question : je me mets tardivement au jardinage. J’ai trouvé une dame sur Leboncoin qui m’a vendue pas mal de plantes médicinales dans des godets. Mais je n’ai qu’un plant de chaque Combien en faut-il pour une famille de 5 ? Faut-il faire des rangées d’une même espèce ou planter au gré des envies ?
Tout dépend de tes objectifs, de la fréquence des prises, des formes utilisées. Tu ne sauras rien de tout cela avant de démarrer et de faire une première année au jardin. Donc n’essaie pas trop d’analyser le truc. Tu te fixes max 5 à 10 espèces, et max 5 pieds par espèce, et tu te lances.
Au fil de la saison, tu apprendras à connaître ces plantes, comment les utiliser pour ta famille. Et au fil des années, tu vas ajuster. Moi, il m’a fallu bien 4 ou 5 ans pour arriver à me dire de quoi j’avais vraiment besoin pour mes objectifs familiaux.
Tu plantes en fonction des besoins d’ensoleillement de la plante, mais mélange les espèces, au gré de tes envies. Là encore, au fil des années, on crée des zones d’ombres, des zones ensoleillées, des zones où on arrose plus ou moins. Et chaque vivace finira par trouver sa place, se ressemer là où elle a envie. Chaque annuelle se ressèmera aux endroits les plus propices. Observe. Regarde où se développent les plants les plus forts. Prend ton temps.
Voilà à quoi cela peut ressembler chez moi… après quasiment 10 ans d’expérimentation…
Évaporation de l’alcool pour le MHIA
Dernière question : pour le macérat huileux par intermédiaire alcoolique, faut-il systématiquement faire un bain-marie pour évaporer l’alcool.
Alors, pour rappel, le macérat huileux par intermédiaire alcoolique consiste à utiliser un alcool à 96° de consommation (compliqué à trouver en France, je sais, et on ne parle pas d’alcool dénaturé ici) pour légèrement imbiber la plante sèche. On laisse reposer 1 h et on verse l’huile végétale par-dessus. L’alcool a commencé son travail très efficace d’extraction. Et l’huile vient récupérer tout ça. Il y a un transfert qui se fait de l’alcool vers l’huile. Ca donne des macérats huileux d’une concentration exceptionnelle.
Mais il y a de l’alcool dans l’huile. Donc faut le faire évaporer. Dans mes formations, je vous ai donné différentes manières de procéder, depuis le blender pour brasser le macérat, l’aérer et permettre à l’alcool de s’évaporer. Le bain-marie.
Et puis, au fil des années, je laisse tout simplement à température ambiante et ça va s’évaporer tout seul. L’alcool à 96° surnage l’huile, il est plus léger que l’huile. Il reste en surface et va faire comme une tâche sur votre macérat huileux si vous le regardez à la lumière.
Vous le mettez dans un saladier, vous couvrez avec un tissu pour éviter la poussière, et vous verrez que jour après jour, la tâche d’alcool diminue en taille, car l’alcool à très fort titrage s’évapore tout seul. Tout simplement.
Voilà pour ce 5ᵉ questions réponses, j’ai essayé de faire un format un peu plus court et rapide, de couvrir un peu plus de questions que d’habitude. J’espère que ça vous a plu.
Merci d’être là. A très bientôt pour un prochain épisode !
Recette cosmétique à la gemmo ci-dessous. L’offre de lancement sur le nouveau programme en ligne de gemmothérapie (20% de réduction sur le prix public) sera
Bonjour, aujourd’hui je vous parle de la cataire, une plante aromatique que j’adore, que j’ai apprise à bien connaître à mes débuts lorsque je vivais sur le continent nord américain, car elle occupe une grande place en herboristerie américaine. C’est une lamiacée vivace très aromatique, avec une odeur caractéristique et très prenante que j’aurais bien du mal à vous décrire ici.
Certains trouvent l’odeur désagréable. Certains parlent d’une odeur entre la menthe pouliot et la menthe poivrée. On retrouve effectivement certains parfums mentholés, mais il y a d’autres constituants aromatiques qui la rendent assez originale.
Elle est super facile à cultiver au jardin, certains chats en sont complètement dingues, on reparle de tout ça en détail dans une petite minute.
Mais avant de commencer, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité, comme celui-ci, et toujours accessible gratuitement.
Je vous rappelle aussi que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription médicale.
Un peu de botanique
On démarre avec un peu de botanique. La cataire (Nepeta cataria) est une lamiacée vivace très facile à cultiver au jardin, on l’appelle aussi herbe aux chats, menthe aux chats, chataire.
À ma connaissance, vous ne la trouverez pas vraiment dans la nature en France sauf si elle s’est échappée des jardins ici et là. Donc c’est vraiment une plante des jardins. Aux États-Unis, elle est devenue envahissante dans certains états mais pas chez nous.
Au jardin, elle est très simple à cultiver. Par contre, attention de prendre vos précautions. La plante semble avoir un effet aphrodisiaque sur les chats. Pas tous les chats, mais certains en sont dingues, et j’ai pu tester pour vous dans mon jardin. Certains chats s’y roulent dedans, la bave à la gueule, et ils ont l’air complètement drogués, ou du moins très amoureux de la plante.
Un de mes chats mangeait les feuilles et s’occupait de me rabattre mes plants en pots, parfois d’une manière un peu extrême. Je retrouvais souvent des poils un peu partout dans mes plants de cataire.
Donc un conseil : assurez-vous de pouvoir protéger vos plants. Sinon ils seront écrasés, grignotés, donc peut-être mettre un grillage ou autre protection, du moins si vous voulez faire une récolte « propre ».
Les constituants responsables de cet effet sont probablement le népétalactone, un irridoïde, ainsi que l’actinidine, que l’on retrouve aussi dans la racine de valériane, qui rend certains chats fous d’excitations aussi.
Constituants :
- Huiles volatiles (carvacrol, nérol, géraniol, pulégone, thymol, citral, citronellol, beta-caryophyllène, limonène, etc);
- Tanins ;
- Flavonoïdes ;
- Composants amers de type irridoïdes (nepetalactone) ;
- Actinidine (un dérivé de la pyridine).
Qu’est-ce que la cataire ?
La cataire appartient à la famille des menthes (Lamiaceae), elle présente donc les caractéristiques suivantes :
- Une tige carrée ;
- Des feuilles opposées sur la tige. Les feuilles sont bien dentées et relativement poilues lorsqu’on les observe de près. Voir photo ci-dessous ;
- Des fleurs à deux lèvres (bilabiées) donnant naissance à 4 graines (tétrakène, 4 akènes).

Les feuilles sont pétiolées et de forme triangulaire, fortement dentées et affichant un aspect poilu et grisâtre en dessous. Voir photo suivante.

Les fleurs sont petites et blanches, avec des petits points rouges. Les fleurs tubulaires comportent 2 lèvres, la lèvre inférieure étant plus grande que la supérieure. Voir photo suivante. Notez les deux feuilles opposées juste en dessous du groupement floral.
Voici une tige fleurie complète. La plante fleurit abondamment de juin à septembre.

Ci-dessous, mon cher et défunt Pastis, chat borgne d’une gentillesse infinie qui nous a quitté bien trop tôt… Ici attendant probablement mon départ afin de tenter une approche amoureuse sur une magnifique cataire.
Cueillette et séchage
En ce qui concerne la cueillette, ce sont les sommités fleuries que l’on utilise, idéalement. D’un point de vue pratique, je trouve que la feuille est tout à fait utilisable avant ou après la floraison.
En tant que lamiacée aromatique, la cataire tolère mal le séchage. Elle n’est pas aussi fragile que la mélisse, elle arrivera à garder une partie de son parfum pendant quelques mois. Mais au-delà, elle va rapidement perdre de ses propriétés.
Propriétés de la cataire
Je vous propose maintenant de parler des propriétés médicinales de la plante.
Cataire et troubles digestifs
Et on démarre avec les troubles digestifs. La cataire est l’une des meilleures plantes pour calmer les spasmes des muscles lisses du système digestif.
Tout comme les muscles squelettiques, les muscles lisses de l’estomac ou de l’intestin peuvent rentrer dans des états de crampe. Les muscles ont trop travaillé à cause d’un repas trop copieux ou trop riche. Et si un muscle travaille trop, vous savez comment ça finit : on a des crampes ! Parfois, la digestion est tellement déficiente, que même un repas « normal » finit par causer des crampes, car les muscles doivent compenser un manque de sécrétions enzymatiques.
La cataire est antispasmodique, elle relâche ces muscles hypertendus, tout en stimulant la sécrétion de sucs gastriques grâce à sa petite amertume. Ce n’est pas une grande amère, mais elle va faire une petite relance. Et là, je peux vous dire que c’est l’une de mes infusions digestives préférées. Personnellement, j’adore ce goût aromatique tellement particulier. J’adore la combiner avec de la menthe poivrée, avec des graines de fenouil aussi.
Elle est particulièrement efficace pour les maux de ventre des enfants. Une tisane apporte souvent un soulagement rapide. Un macérât huileux de cataire appliqué sur le bas du ventre peut aussi agir de manière externe.
En herboristerie américaine, elle est souvent recommandée pour les coliques des enfants, lorsque l’enfant plie les jambes vers l’abdomen, ou « pédale » d’une manière énergique à cause de la douleur. William Cook(3), médecin Américain des années 1800, nous explique que la cataire est tellement efficace qu’à l’époque, les mères l’emploient dans de trop grandes quantités, ce qui peut créer l’effet inverse : des douleurs provoquées par la quantité de liquide ingérée.
Je la trouve particulièrement efficace lorsque les problèmes de digestion sont causés par le stress passager ou chronique. Ce qui nous amène au point suivant…
Cataire et troubles nerveux
On connait aujourd’hui le lien étroit qui existe entre équilibre et bien-être intestinal, et équilibre nerveux. Dans le passé, on pensait que le signal se déroulait dans une seule direction : du système nerveux central vers le système digestif. Aujourd’hui, on sait que la communication va dans les deux sens, et que lorsque l’intestin va mal, le système nerveux peut ressentir des états de stress, anxiété, dépression.
Il semble que la cataire agisse sur ces deux systèmes à la fois pour les apaiser. On trouve donc des indications pour calmer les personnes stressées, anxieuses, hyperactives, chez l’adulte comme chez l’enfant.
On pourrait faire de beaux mélanges à infusion, très doux, pour calmer les énervés et les hyperactifs, avec de la cataire, de la camomille matricaire, du tilleul, de la lavande. On couvre bien pendant le processus d’infusion, et puis on respire avant de boire. On se fait une petite séance d’aromathérapie juste au-dessus de la tasse.
Reminéralisation
Autre propriété très peu connue pour la cataire, c’est une excellente plante minéralisante. Si je prends 30 grammes de cataire, j’obtiens (Bergner, 1997) :
- 205 mg de Calcium
- 69 mg de Magnésium
- 783 mg de Potassium
- 4,6 mg de Fer
Si vous comparez à l’ortie, notre reine des minéralisantes, on voit que la cataire contient 1/5 du Calcium de l’ortie, donc beaucoup mois mais pas mal tout de même. 1/4 du Magnésium. Mais elle contient plus de Potassium (34% de plus) et 3 fois plus de fer ! Et pourtant, lorsqu’on manque de fer, on a l’habitude de conseiller l’ortie.
C’est peut-être pour ça que Cazin, dans son ouvrage phare de 1868, la recommande pour la chlorose, qui désignait à l’époque une forme d’anémie ferriprive (c’est-à-dire une anémie due à une carence en fer).
Je pense qu’il y a une action duale ici : (1) apport de minéraux grandement biodisponibles et (2) amélioration des fonctions digestives afin de faciliter une meilleure assimilation.
Et pourquoi pas faire un mélange cataire et ortie pour assurer un apport le plus large possible de tous les minéraux.
Aménorrhée et Dysménorrhée
Passons au point suivant. La cataire peut rentrer dans la composition de mélanges antispasmodiques pour soulager les dysménorrhées, c’est-à-dire les règles douloureuses. On pourra faire des mélanges avec la camomille matricaire, l’achillée millefeuille, le basilic par exemple, pour rester dans les aromatiques.
On préparera une infusion bien chaude (tout en restant buvable bien évidemment), on mettra une bonne cuillère à soupe de ce mélange, voir un peu plus en fonction des constitutions.
Effet diaphorétique de la cataire
L’indication suivante est très importante à comprendre, c’est l’utilisation de la cataire pour l’accompagnement des fièvres. Bien sûr, on est ici dans le médical, donc consultez un médecin si vous êtes dans le doute. Pour une situation bénigne, je vous ai fait un épisode sur l’importance des plantes diaphorétiques dans le processus de guérison d’une infection avec fiègre. Je ne sais pas si vous vous rappelez, on vous remettra le lien dans l’article associé à cet épisode.
La fièvre est un processus naturel et nécessaire pour combattre les pathogènes. Si notre système décide de faire monter la température, ce n’est pas pour rien. Et pour bien réguler ce processus, notre corps utilise plusieurs mécanismes de production ou d’évacuation de chaleur.
La peau, au travers de la transpiration, est l’un des organes principaux d’évacuation de la chaleur. Mais les pores de la peau doivent bien s’ouvrir pour faciliter ce processus. La cataire est un excellent diaphorétique : elle facilite l’ouverture des pores de la peau pour une transpiration abondante et efficace.
L’infusion de cataire est une très bonne plante d’accompagnement des fièvres pour les petits comme pour les grands. On peut le combiner à la fleur de sureau et à la menthe poivrée, faire 1/3 de chaque. Ça va faire une infusion très agréable à boire, et qui va voir un peu l’effet d’ouvrir les fenêtres lorsqu’on a trop chaud, qu’on a percé la fièvre et que maintenant, on a besoin de redescendre en température.
Nausées et vomissements
Comme toutes les menthes ou autres lamiacées aromatiques et agréables à boire (comme le calament), la cataire peut soulager les nausées.
Par contre, en ce qui me concerne, je choisis bien plus volontiers la menthe poivrée ou la mélisse, plus agréable à boire, plus légère en goût, avant de passer à la cataire qui a un goût assez prononcé et désagréable pour certains. Moi j’aime bien le goût, mais j’ai déjà vu des grimaces qui m’ont fait dire que ce n’est pas pour tout le monde.
Indications diverses de la cataire
On termine par quelques indications diverses :
- Traditionnellement, la plante a été utilisée pour les maux de têtes et migraines d’origine nerveuse. Personnellement, je la conseille volontiers pour les migraines d’origine digestives, du style lorsque vous vous sentez lourd, trop mangé, trop gras et vous savez que c’est un déclencheur pour vous.
- Lieutaghi(4) nous rappelle que c’est une expectorante voisine du marrube (Marrubium vulgare) en efficacité, et peut être utilisé dans les catarrhes pulmonaires chroniques, la toux spasmodique et la coqueluche (ce dernier confirmé par William Cooke(3)).
- Et pour finir, elle semble assez efficace pour repousser les moustiques et autres insectes.
Précautions pour la cataire
Les précautions d’emploi :
- Vu son action sur les muscles de l’utérus, il vaut mieux l’éviter pendant la grossesse ;
- Matthew Wood(1) recommande de ne pas l’utiliser de manière continue avec les enfants, elle entrainerait un effet quasi-narcotique au long terme d’après lui.
Formes et quantités
En ce qui concerne les formes et les quantités, je trouve que les meilleurs résultats sont obtenus en employant l’infusion de feuilles fraîches, ou la teinture de feuilles fraîches. Ceci est en particulier vrai pour les propriétés calmantes de la plante. Si la plante est sèche, j’estime qu’il manque une dimension aromatique importante, c’est un peu dommage.
Pour les dosages :
- Teinture des feuilles ou sommités fleuries fraîches idéalement : 20 à 60 gouttes une à plusieurs fois par jour selon la personne et la condition ;
- Infusion des feuilles ou sommités fleuries fraîches ou récemment séchées : infusion au besoin. Toujours bien couvrir le récipient pour ne pas perdre les constituants volatils. Cooke(3) recommande de faire bouillir l’eau puis la laisser refroidir avant de verser sur la plante, sous peine de détruire les composants aromatiques et de ne le laisser que les composants amers.
Références
Bergner, « The mineral content of herbal decoctions« , Medical Herbalism 07-31-97 9(2): 6-8
(1) Wood, Matthew, « The Earthwise Herbal: A Complete Guide to Old World Medicinal Plants » , 2008.
(2) Moore, Michael, « Specific Indications for Herbs in General Use », 3ème édition
(3) Cooke, William, « The Physiomedical Dispensatory », 1869
(4) Lieutaghi, Pierre, « Le Livre des Bonnes Herbes » , 3ème édition révisée, 1996
Bonjour, bienvenue dans ce 8ᵉ épisode de ma série « brève des herbes », une série dans laquelle je passe en revue des études scientifiques sur les plantes, études qui ont attiré mon attention ces derniers temps.
Je vous rappelle l’état d’esprit de ces revues. Je ne cherche pas de grandes vérités, mais plutôt de nouvelles idées, de nouvelles stratégies, de nouvelles directions pour notre pratique, que ce soit une pratique des familles ou professionnelle. Idées que nous pourrions par la suite valider dans notre pratique, justement.
Dans cet épisode, je vous propose 2 études. Une sur l’aronia et une sur le géranium du cap. De ces deux plantes, j’ai la chance d’avoir cultivé et utilisé le géranium du cap. On en reparle dans une minute.
Mais avant, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations en ligne sur les plantes médicinales. Nous avons formé plus de 3500 étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut vous produire régulièrement du contenu de grande qualité, et toujours accessible gratuitement.
Je vous rappelle aussi que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription médicale.
Aronia : protecteur des grandes maladies ?
Allez, c’est parti pour nos deux études. La première (1) concerne le fruit de l’aronia noir (Aronia melanocarpa). C’est en fait une revue d’études qui date de 2022 et qui fait le tour des propriétés de ce fruit.
Je connaissais déjà l’aronia, mais lorsque je suis tombé sur cette étude, je me suis dit qu’il présentait un potentiel vraiment intéressant pour notre santé, note longévité. Et par longévité, je n’entends pas de vivre plus longtemps nécessairement, mais de vivre mieux dans le temps qu’il nous reste et de profiter de la vie jusqu’au bout.
Mais avant de vous parler du potentiel, j’aimerais vous parler de la plante, l’arbuste pour être plus précis.
Aronia en tant qu’arbuste décoratif
Il provient d’Amérique du Nord, c’est un excellent arbuste d’ornement au jardin. Il est solide, rustique. Il appartient à la famille des rosacées. Il a l’air d’être productif en ce qui concerne les fruits, qui sont les parties qui nous intéressent. En revanche, il aime les sols frais et pauvres en calcaire, du coup je n’essaie même pas chez moi en Provence, je pense que c’est grillé d’avance vu que, au contraire, j’ai un sol aride et riche en calcaire.
Mais pour de nombreuses régions de France, ça parait tout à fait jouable, et ça a l’air d’être un bel arbuste qui permet de mettre en place des haies fructifères et médicinales.
Propriétés de l’aronia
Mais revenons à la revue. Le fruit d’aronia est très riche en substances antioxydantes et protectrices, des pigments que l’on appelle des anthocyanes, qui sont responsables de la couleur du fruit. Les chercheurs mettent en valeur les propriétés suivantes :
- Antidiabétiques, avec des effets bénéfiques sur les états de résistance à l’insuline accompagnés d’hyperinsulinémie, un état assez caractéristique du syndrome métabolique et du diabète de type 2. Dans les études, on voit une baisse de la glycémie, de l’insulinémie, une meilleure sensibilité cellulaire à l’insuline, donc on va dans la bonne direction pour contrer cette maladie de civilisation. Bien évidemment, les deux piliers principaux de la stratégie resteront les réformes alimentaires et l’activité physique. Mais l’accompagnement avec les plantes est une aide tout à fait efficace.
- Anti tumeur, une propriété principalement démontrée sur des lignées de cellules cancéreuses, donc des études plutôt faites in vitro, aucune étude faite sur humains à ma connaissance et c’est toujours compliqué d’extrapoler car il faut que les constituants atteignent les zones en question. Mais globalement, de bonnes indications qu’il peut réduire la prolifération cellulaire, et on va le positionner surtout en prévention.
- Protecteur cardiovasculaire avec un effet bénéfique sur la lipidémie sanguine – triglycérides, LDL et cholestérol total. On note aussi une diminution de la pression artérielle.
- Protecteur neurologique : protège contre la destruction des neurones, contre les effets de la plaque beta-amyloïde de la maladie d’Alzheimer.
Donc, je ne sais pas si vous voyez, mais globalement, on a quelque chose de puissamment protecteur contre les maladies des civilisations industrialisées : cancers, maladies neurodégénératives, maladies cardiaques, maladies métaboliques. Les quatre grands groupes qui font peur.
Ça fait réfléchir. On voit le potentiel. Oui, je sais, de nombreuses études dans cette revue ont été faites in vitro ou sur animaux. On a tout de même quelques études sur humains. Trop peu. C’est toujours notre problème dans le monde des plantes. Trop peu d’études pour être pris au sérieux. Pas assez d’investissements de nos autorités de santé pour mettre les plantes médicinales en valeur.
Un remède au jardin ?
Je vous laisse réfléchir à tout ça. En ce qui me concerne, j’estime que les données sont fiables. Pour les quantités consommées, on parle souvent de 200 ml de jus des fruits frais par jour, donc ça fait un bon verre.
Lorsqu’on étudie l’extrait sec (2), il est parfois standardisé en anthocyanes, et si mes calculs sont bons, on parle d’un équivalent en fruits secs qui varierait entre la pincée et la poignée par jour (3). Je vous mets toutes les références en fin d’article si vous voulez les consulter.
Du coup, ne pourrait-on pas planter cet arbuste au jardin ? En consommer ses fruits régulièrement ? Les conserver, peut-être à l’état sec pour avoir une provision toute l’année, encore faudrait-il voir l’impact sur la dégradation des anthocyanes ici, mais je pense que si on ne réduit pas le fruit en poudre, qu’on le garde entier à l’abri de la lumière, on devrait pouvoir conserver le plus gros des propriétés jusqu’à la prochaine récolte.
Voilà pour l’aronia. J’espère avoir réveillé le jardinier curieux en vous !
Géranium umcka et sinusite aigüe bactérienne
La seconde étude (4) concerne une petite plante dont je voulais vous parler. Je ne pense pas que vous la connaissiez. Moi, ça fait une bonne douzaine d’années que je l’ai au jardin, en pots pour être exact vu qu’elle ne survivrait pas l’hiver.
C’est un petit géranium qu’on appelle « géranium umcka » ou « umckaloabo » ou encore « géranium du cap ». Pelargonium sidoides. Il est originaire d’Afrique du Sud. On utilise ses racines, et j’avais appris son utilisation lorsque je vivais en Amérique du Nord.
La racine est positionnée comme puissante antiinfectieuse et immunostimulante. De telle manière que dans certains pays comme l’Allemagne, on en fait des préparations très populaires en pharmacie ou en boutique de produit naturel, sous forme de comprimés ou de sirops ou autre.
Est-ce écoresponsable ? Non. Je m’inquiète pour l’état de la ressource en Afrique du Sud, c’est probablement similaire à la situation pour l’harpagophytum.
Au jardin, chez moi en Provence, je n’ai pas eu trop de mal à faire germer les graines que l’on m’avait confiées. Par contre, la plante pousse très lentement, elle craint le froid, j’ai réussi à en garder 4 pots que je rentre chaque hiver. Et pendant l’hiver, à l’intérieur, elles me font un peu la gueule. Elles repartent ensuite au printemps lorsque je les ramène en plein soleil.
Mais revenons à l’étude. Elle a été faite sur des malades souffrant de sinusite aigüe bactérienne. Je ne sais pas si vous vous êtes déjà tapé une sinusite aiguë virale, déjà, ça calme. Mais les versions bactériennes, c’est un degré au-dessus d’un point de vue durée, douleurs et symptômes.
La solution classique ici, vu qu’on est dans le bactérien, c’est bien évidemment l’antibiotique. La question que les chercheurs se sont posés, c’est la suivante : est-ce qu’une préparation à base de géranium du Cap pourrait accélérer la guérison, et si oui, quelle est son efficacité comparée à un antibiotique.
On a donc pris 50 patients adultes souffrant de sinusite bactérienne aiguë. On les a divisés en 2 groupes, un groupe recevant 3 fois 20 mg d’un extrait de géranium du Cap par jour, et un groupe prenant 3 fois 500 mg d’amoxicilline par jour. Le tout pendant 10 jours. L’étude est ce qu’on appelle « open label », c’est-à-dire que les chercheurs et les patients savent ce qu’ils prennent, on n’est pas dans le double aveugle, et ça sera la critique principale de l’étude (rappelez-vous la série spéciale que je vous ai faite sur les études interventionnelles dans laquelle je vous explique tout ceci, je vous remettrai le lien dans l’article associé à cet épisode).
Résultats :
- Tous symptômes confondus, l’extrait de géranium du Cap apporte de meilleurs résultats que l’antibiotique à partir du jour 7 de traitement. Donc il faut quelques jours pour qu’il agisse.
- En particulier, le géranium est plus efficace que l’antibiotique pour réduire l’obstruction nasale, la sensation de douleur et de pression au visage, pour améliorer l’odorat, pour réduire l’œdème ainsi que les sécrétions purulentes.
- A noter, le fait que le géranium diminue la présence de 3 souches bactériennes : Streptococcus pneumoniae, Haemophilus influenzae et Moraxella catarrhalis. L’amoxicilline n’en réduit que deux.

Pourquoi cette étude est-elle intéressante ?
Vous avez sans aucun doute entendu parler de la problématique de la résistance bactérienne aux antibiotiques. Les laboratoires pharmaceutiques n’investissent plus dans la recherche sur les nouvelles molécules aujourd’hui. Car le retour sur investissement est trop mauvais. Pas assez de revenus potentiels (5).
Donc on a intérêt à se bouger les fesses pour trouver de nouvelles approches. On a vu, au fil des études, que les plantes et les molécules naturelles sont parfois redoutablement efficaces contre les bactéries, y compris celles qui sont résistantes aux antibiotiques médicamenteux. On a une synergie de constituant qui vient attaquer ces bactéries d’une manière large et diversifiée, et les bactéries ont beaucoup plus de mal à faire fonctionner leurs mécanismes de contournement, comme les pompe à efflux, l’inactivation enzymatique, etc.
Et on ne parle même pas que l’un remplace l’autre. La puissance du modèle, c’est que si on doit faire face à une grande vague catastrophique de résistance, l’un vienne complémenter l’autre. La plante vient empêcher que la bactérie mette en route tous ces mécanismes de blocage et évacuation de la molécule d’antibiotique, pour qu’enfin elle puisse agir avec toute sa puissance.
Donc quelles sont les plantes que l’on pourrait ressortir en cas d’urgence, en cas de crise sanitaire ? En ce qui me concerne, je rajoute le géranium du cap à ma liste. Et puis si j’arrive à le cultiver en pot chez moi, je pense qu’on doit arriver à le faire pousser ailleurs.
Voilà, c’est tout pour aujourd’hui. Merci de vous intéresser à ces sujets de recherche. Comme je vous le dis souvent, pour pouvoir progresser dans le monde des plantes, il faut savoir combiner science, tradition et expérimentation.
A très bientôt pour un nouvel épisode !
Références
(1) Ren Y, Frank T, Meyer G, Lei J, Grebenc JR, Slaughter R, Gao YG, Kinghorn AD. Potential Benefits of Black Chokeberry (Aronia melanocarpa) Fruits and Their Constituents in Improving Human Health. Molecules. 2022 Nov 13;27(22):7823. doi: 10.3390/molecules27227823. PMID: 36431924; PMCID: PMC9696386.
(2) Ahles S, Stevens YR, Joris PJ, Vauzour D, Adam J, de Groot E, Plat J. The Effect of Long-Term Aroniamelanocarpa Extract Supplementation on Cognitive Performance, Mood, and Vascular Function: A Randomized Controlled Trial in Healthy, Middle-Aged Individuals. Nutrients. 2020 Aug 17;12(8):2475. doi: 10.3390/nu12082475. PMID: 32824483; PMCID: PMC7468716.
NOTE : l’étude ci-dessus ⬆︎ est financée par un laboratoire, j’en suis conscient. Je l’ai simplement utilisée pour avoir une idée du dosage en extrait sec employé dans certaines études.
(3) Taheri, R., Connolly, B., Brand, M., & Bolling, B. (2013). Underutilized chokeberry (Aronia melanocarpa, Aronia arbutifolia, Aronia prunifolia) accessions are rich sources of anthocyanins, flavonoids, hydroxycinnamic acids, and proanthocyanidins.. Journal of agricultural and food chemistry, 61 36, 8581-8 . https://doi.org/10.1021/jf402449q.
(4) Perić A, Gaćeša D, Barać A, Sotirović J, Perić AV. Herbal Drug EPs 7630 versus Amoxicillin in Patients with Uncomplicated Acute Bacterial Rhinosinusitis: A Randomized, Open-Label Study. Ann Otol Rhinol Laryngol. 2020 Oct;129(10):969-976. doi: 10.1177/0003489420918266. Epub 2020 May 26. PMID: 32456442.
(5) Fernandes, P., & Martens, E. (2017). Antibiotics in late clinical development. Biochemical Pharmacology, 133, 152–163. https://doi.org/10.1016/j.bcp.2016.09.025.
J’ai fait la rencontre de la grindelia au Nouveau-Mexique. On m’en avait fait l’éloge pour les problèmes de bronches. « La reine des résineuses »,
Bonjour,
On parle aujourd’hui d’une petite plante que vous allez trouver dans les sous-bois de certaines régions. Elle ne pousse pas chez moi en Provence, mais j’ai la chance de pouvoir la ramasser en Haute-Savoie et dans d’autres zones boisées. J’adore la boire en infusion, j’aime beaucoup son goût. Elle me fait du bien… elle me calme. Et j’espère qu’elle en fera de même pour vous.
Elle s’appelle l’aspérule odorante. On l’utilise beaucoup plus en France que du côté anglophone. Je n’ai pas trouvé grand-chose non plus du côté Allemand, du moins dans les ouvrages de Rudolf Weiss. C’est pour ça que pour faire mon travail, je suis allé puiser principalement du côté des grands classiques Français, et de ma propre expérience, comme toujours.
Avant de commencer, je vous rappelle qu’à l’école AltheaProvence, nous vous proposons de nombreuses formations sur les plantes médicinales et l’herboristerie. Nous avons formé plusieurs milliers d’étudiants depuis 2015. C’est de l’enseignement exclusif, structuré, approfondi, basé sur l’expérience et surtout sur la pratique. C’est en grande partie grâce à l’école que l’on peut régulièrement vous produire du contenu de grande qualité, et toujours accessible gratuitement.
Autre point, je vous rappelle que je ne suis ni médecin, ni pharmacien, ni professionnel de la santé. Je suis là pour partager des informations avec vous. Mais ceci ne remplace aucunement un suivi médical, et n’a pas vocation d’être diagnostic ou prescription ou autre acte médical.
Un peu de botanique
L’aspérule odorante, qu’on appelle aussi gaillet odorant, est une plante vivace de la famille des rubiacées. On la trouve dans une grande partie de la France dans les bois et les forêts de hêtres, ou une combinaison de hêtres et chênes, hêtre et charmes, ou hêtres et conifères.
La plante forme des tapis. Les feuilles sont organisées en verticilles sur une tige quadrangulaire (donc à quatre côtés) non ramifiée. On trouve en général entre 6 et 8 feuilles par verticille. Les feuilles sont rugueuses sur les bords.
Les fleurs sont blanches, à 4 pétales soudés disposés en croix, et apparaissent au sommet de la tige. Les fruits sont hérissés de poils crochus comme les autres gaillets que vous connaissez peut-être, le gaillet gratteron en particulier, très commun dans nos campagnes. Les fruits ont donc cette tendance à s’accrocher à vos habits pour faire un petit bout de route avec vous.
La plante a une petite odeur caractéristique de coumarine, de foin, quand on la froisse. Certains y trouvent une odeur de vanille ou de miel. Cette odeur s’accentue au séchage. C’est cette odeur qui fait qu’on l’utilise beaucoup dans le nord-est de la France, en Allemagne et certains pays de l’est pour aromatiser les boissons alcoolisées. C’est l’ingrédient principal du vin de mai que vous connaissez peut-être.
Comme d’autres plantes de la famille des rubiacées, la racine est de couleur rouge, elle était utilisée comme colorant naturel.
Préservation de la ressource
En ce qui concerne les cueillettes responsables d’aspérule, je vous renvoie vers l’excellent guide de l’AFC (Association française des professionnels de la cueillette de plantes sauvages) qui a publié un livret technique de cueillette sur l’aspérule odorante. Je vous donne un petit résumé, mais allez voir dans le guide qui fait une 50’aine de pages juste pour cette plante, tout y est.
Aujourd’hui, on a deux facteurs qui menacent la plante, vous ne serez pas surpris : le changement climatique et l’industrialisation des forêts.
Les températures augmentent, la sécheresse aussi, ce qui entraîne une réduction de l’aire de répartition du hêtre. Et comme on l’a vu, la hêtraie, c’est là que l’aspérule pousse. Certains cueilleurs ont déjà observé un recul de sa zone de répartition ici en France.
L’exploitation industrielle des forêts est le 2ᵉ facteur problématique. Les coupes, les engins énormes qui passent et qui écrasent tout. La diminution de la zone d’ombre qui en découle. Tous ces facteurs contribuent à rétrécir sa zone.
Aspérule odorante au jardin
Pour contrebalancer la disparition de certaines zones de cueillette, on peut la cultiver. Elle nécessite des températures fraiches, de l’ombre, de l’humidité. Donc autant vous dire que chez moi en Provence, c’est raté. Mais dans d’autres régions, si vous avez une zone fraiche et ombragée du jardin, ça vaut le coup de tenter.
Ce qui semble fonctionner le mieux, c’est de prélever de jeunes plants dans les zones les plus abondantes et les transplanter. Mais on peut aussi tenter la germination de la graine en lui donnant une stratification à froid. Je vous mettrai un lien vers mes guides de germination pour vous expliquer ce terme.
Cueillette et séchage
On cueille en général de mi-mai à mi-juin, en début de floraison lorsqu’on a quelques fleurs ouvertes et les autres en bouton. Certains ramassent avant la floraison, car ils ont noté que l’odeur de coumarine semble plus intense à ce stade.
l’AFC nous explique qu’une coupe à mi-tige permet une meilleure repousse l’année suivante et un maintien du taux de coumarine. Si on coupe au ras du sol, par contre, on provoque un rétrécissement de la population et une baisse du taux de coumarine l’année suivante. La partie la plus couramment cueillie, c’est donc 2 verticilles de feuilles et la sommité fleurie. On laisse les verticilles du bas sur la plante.
En ce qui concerne le séchage, c’est un peu délicat. On veut éviter que la plante ne moisisse au séchage, sinon la coumarine risque de se transformer en dicoumarol qui est toxique avec un effet anticoagulant. C’est commun à toutes les plantes contenant des coumarines en fait, comme le mélilot. Donc on va éviter de l’entasser sur une certaine épaisseur, au contraire, on va bien l’étaler sur les claies de séchage, on va s’assurer que la pièce ne soit pas trop humide, quitte à utiliser un déshumidificateur. Et on va s’assurer qu’elle garde une couleur verte et qu’elle ne tourne pas au marron.
Propriétés de l’aspérule odorante
On va commencer par son action sur le système nerveux. C’est, globalement, une plante relaxante et apaisante, mais vous allez voir que ça devient intéressant lorsqu’on rentre dans les subtilités.
Aide à mieux dormir
Le premier point intéressant nous est donné par Fournier, qui nous dit que c’est une plante « contre l’insomnie des enfants et des vieillards ». Valnet rajoute « insomnie des convalescents ».
On va essayer de déchiffrer ce que nous disent ces références du siècle précédent, car elles renferment en général des clés d’utilisation. Si vous positionnez une plante pour les enfants, les personnes âgées et les convalescents, ça veut dire qu’elle est douce et qu’elle est bien tolérée par tous. Même ceux qui sont épuisés et qui ont parfois un peu de mal à tolérer certaines plantes et à les métaboliser sans faire de petites réactions indésirables.
Donc premier point, c’est une plante douce qui aide à mieux dormir. Mais est-ce qu’on n’aurait pas d’autres clés d’utilisation ?
Neurasthénie
Un terme mentionné chez Valnet, c’est « Neurasthénie ». Un terme qui n’est plus beaucoup utilisé aujourd’hui, mais qui englobe la notion de grande fatigue physique et mentale, d’être usé par la vie, un peu au bout du rouleau, et ceci provoque déprime, manque de motivation, parfois trouble du sommeil.
Pour le sommeil spécifiquement, ça me rappelle ce que dit David Winston, un herboriste américain, qui parle de personnes qui sont tellement fatiguées qu’il n’y a plus assez d’énergie, de force vitale pour démarrer et soutenir le processus de sommeil. Donc, est-ce que l’aspérule odorante ne serait pas une plante qui aide à dormir la personne fatiguée et usée par la vie ou par une longue maladie ?
Et en fait, ça me fait aussi penser à l’avoine. Je vous avais fait un épisode à son sujet, et je vous avais expliqué comment, en phytothérapie américaine, on positionne la teinture des fruits laiteux d’avoine pour un système nerveux dans un état de faiblesse et d’abattement profond. Est-ce qu’on n’est pas, aussi, avec une plante qui peut « nourrir » un système nerveux complètement épuisé et déficient ?
D’ailleurs, chez Cazin, dans son ouvrage de 1868, on voit qu’elle est positionnée comme « légèrement excitante »… peut-être juste assez pour relancer le système nerveux et le ramener à l’équilibre.
Stress, anxiété, déprime
Globalement, on va dire que l’aspérule aide à calmer les états de stress, d’anxiété et de déprime légère.
On revient à Valnet qui liste « mélancolie » et « hystérie » pour la plante. Ne vous attachez pas trop à ces vieux termes qui ne sont plus utilisés aujourd’hui, du moins dans le lexique des termes médicaux. On va juste essayer de voir la texture qu’ils donnent à la plante. Je vais apposer ma propre interprétation ici, donc on s’éloigne peut-être un peu de ce que Valnet avait en tête. Mais je vois une dualité dans cette plante, qui peut à la fois stimuler un état de déficience nerveuse, de manque de réactivité et de motivation, mais aussi calmer un excès, une hyperréactivité face aux stimuli de la vie.
L’aspérule odorante serait donc, peut-être, l’une de ces grandes équilibrantes des nerfs. Disons que c’est comme ça que j’arrive à donner du sens de ce que les anciens ouvrages ont à nous dire.
C’est peut-être l’une de ces plantes qui devient la fondation équilibrante d’un mélange pour les troubles du système nerveux. En tout cas, j’aime beaucoup l’avoir dans mes mélanges à infusions, et vous allez voir, ça fait des préparations délicieuses à boire :
- Aspérule, millepertuis et tulsi pour les cas de déprime saisonnière
- Aspérule, aubépine et mélisse pour les cas d’anxiété avec palpitations cardiaques sans pathologie sous-jacente. D’ailleurs, l’aspérule est indiquée dans les palpitations cardiaques d’origine nerveuse.
- Aspérule, lavande et menthe poivrée pour les migraines d’origine nerveuse, une des indications de l’aspérule d’ailleurs.
- Aspérule, camomille matricaire et marjolaine pour les tensions digestives…
Aspérule odorante et digestion
L’aspérule est positionnée comme une plante digestive. Mais il faut aller creuser et voir ce qu’on entend par ce terme exactement. Soyons précis. Est-ce que c’est une plante qui relance les fonctions digestives d’une manière globale, comme un orchestrateur, comme une gentiane ou une angélique ? Non, je ne crois pas qu’elle soit une grande tonique digestive à action directe.
Elle est classée comme digestive car :
- Elle est antispasmodique des muscles lisses, donc si crampes digestives, elle va soulager.
- Elle calme le système nerveux qui est un tel perturbateur de la digestion. Souvenez-vous que le stress inhibe les fonctions digestives. Donc elle freine le facteur freinateur de la digestion si vous voulez. C’est un effet indirect.
Finalement, ça nous la classe un peu dans la même catégorie que ces autres plantes qui calment simultanément les symptômes d’une digestion difficile (en particulier si spasmodique) et les excès du système nerveux, comme la mélisse ou la camomille matricaire.
Tonique du retour veineux
L’aspérule odorante agit sur le système circulatoire, spécifiquement sur les insuffisances veineuses et lymphatiques. On dit qu’elle et anti-œdémateuse, c’est-à-dire qu’elle aide à résorber les œdèmes qui seraient dus à une faiblesse veineuse ou lymphatique.
Donc, on l’a positionnée dans le passé pour les hémorroïdes, les insuffisances veineuse mineure, les thrombophlébites, les lymphœdèmes. Là encore, on la rapprocherait du mélilot avec sa teneur en coumarine (Bruneton nous dit que la plante sèche en contient environ 1 %).
Plutôt en prise interne ici, et idéalement combinée avec des plantes contenant une diversité de tanins, comme la vigne ou le noisetier ou d’autres.
Plante du foie ?
Passons à un point intéressant. L’aspérule est parfois positionnée comme plante du foie dans la tradition. Et purement basé sur son goût, intuitivement, on ne voit pas trop comment elle pourrait être une dépurative du foie, par exemple comme un pissenlit ou un artichaut ou une fumeterre. Alors certes, elle est très diurétique, donc on pourrait dire que c’est une dépurative rénale, mais côté foie, on a un peu du mal à voir comment elle pourrait agir.
J’ai trouvé l’indice chez Matthew Wood qui dit qu’elle décongestionne le système de drainage autour du foie. D’ailleurs Cazin parle lui aussi d’engorgement du foie. Ce qui nous ramène à sa propriété drainante du système veineux et lymphatique aux endroits où il y a engorgement.
Pourquoi y aurait-il congestion au niveau du foie ? Les causes peuvent être multiples. On va bien sûr écarter les causes pathologiques qui peuvent être de nature insuffisance cardiaque, hépatite, jaunisse, etc. Ça, c’est pour la profession médicale.
Mais y a-t-il des situations de la vie qui provoquent une congestion sans état de pathologie associé ? Oui, par exemple on peut avoir une congestion après un repas un peu trop lourd, ou après une période d’excès, donc on pourrait rajouter une sous-propriété digestive qui est décongestionnante hépatique.
En tout cas, le point important, c’est le suivant : je ne pense pas que ce soit nécessairement une plante dépurative, qui stimule l’activité des hépatocytes, qui augmente la sécrétion biliaire. Elle me parle beaucoup plus en tant que circulatoire et décongestionnante de l’organe.
Calmant des bouffées de chaleur
Nous avons une indication pour les bouffées de chaleur, qui nous est donnée par le docteur Jean-Michel Morel, je cite : « les plantes à coumarines agissent bien sur les bouffées de chaleur, à faible dosage« . Pour le mélilot, il explique que si on dose trop, au contraire, on va créer un effet de congestion et de vasodilatation, ce qui n’est pas désirable dans le cas des bouffées de chaleur, ça va aggraver les symptômes.
Donc si aggravation, Morel dit de baisser les doses pour le mélilot, mais je crois comprendre qu’il parle des plantes à coumarines en général.
Donc on pourrait mettre l’aspérule odorante en faible proportion dans un mélange pour les bouffées de chaleur, pour ne pas trop le doser. Je n’ai personnellement pas d’expérience avec l’aspérule dans le contexte des bouffées de chaleur, mais si vous en avez, n’hésitez pas à nous laisser un commentaire.
Réparation des plaies
En application externe, nous avons une utilisation assez intéressante comme réparatrice des plaies et calmante des brûlures. Jus de la plante fraiche, infusion en compresse, teinture diluée, etc. En faire un macérat huileux ou un onguent comme on ferait avec le gaillet gratteron.
On a d’ailleurs une étude faite sur animaux qui démontre son aspect réparateur sur les brûlures, avec des effets supérieurs lorsqu’on utilise une forme aqueuse par rapport à une forme alcoolique (Kahkeshani 2013).
Formes et quantités
- Infusion de la plante sèche : chez Valnet, 1 cuillère à dessert par tasse d’eau. Infuser 3 à 5 minutes (ne pas faire bouillir), 3 tasses par jour.
- Fournier précise que si on fait infuser plus de 10 minutes, l’amertume ressort aux doses qu’il recommande, c’est-à-dire 30 à 50 g de plante sèche par litre, ce qui est énorme pour les normes d’aujourd’hui.
- Hydrolat : Valnet mentionne 20 à 30 g par jour. Je n’ai jamais vu d’hydrolat d’aspérule ici en France (ou alors, j’ai mal regardé). Mais de toute manière, vu les inquiétudes qu’on au sujet de la ressource, distiller la plante (qui nécessite de fortes quantités) n’est probablement pas judicieux.
- Teinture ou alcoolature : rien de clair dans mes ouvrages de référence en ce qui concerne les dosages. Je dirais de tester dans les 20 à 40 gouttes de 2 à 3 fois par jour.
Précautions
J’en profite pour rappeler que les coumarines ne sont pas anticoagulantes comme on pourrait le lire à certains endroits. Je vais citer le docteur Morel ici :
« Ces principes actifs sont principalement des anti-inflammatoires à tropisme vasculaire, souvent antiagrégants plaquettaires, et stimulant de la protéolyse macrophagique en accélérant le drainage lymphatique. Ils ne sont pas anti-coagulants contrairement au dicoumarol qui en dérive, à l’origine des anticoagulants de synthèse« .
Vous vous souvenez ? Si on fait mal sécher l’aspérule et qu’elle fermente, on va transformer la coumarine en dicoumarol qui est un anticoagulant puissant que l’on retrouve dans les premières versions de la mort aux rats, on tuait les rats par hémorragie. Mais dans l’aspérule ou le mélilot, pas de dicoumarol.
Cela dit, prudence, on évitera à forte dose ou sur le long terme chez la personne :
- Sous anticoagulants ou antiagrégants plaquettaires
- Ayant des troubles de la coagulation ou un risque hémorragique
- Devant subir une intervention chirurgicale
Morel pousse un peu plus loin les précautions en nous disant « Utiliser à faibles doses et peu de temps en raison de risques hémorragiques potentiels« .
Dernier point, la plante pourrait provoquer des maux de tête à fortes doses, peut-être qu’on peut expliquer ceci par le point soulevé par Morel au sujet de la congestion à la tête et vasodilatation.
Voilà qui termine cet épisode sur l’aspérule, j’espère que vous l’avez trouvé utile. S’il vous en reste un peu dans vos placards, plutôt que de la faire macérer dans du vin blanc, je pense que vous pouvez maintenant la tester en tisane et voir si elle vous fait du bien.
Merci pour votre écoute, à très bientôt !
Aspérule odorante : références
Kahkeshani N, Farahanikia B, Mahdaviani P, Abdolghaffari A, Hassanzadeh G, Abdollahi M, Khanavi M. Antioxidant and burn healing potential of Galium odoratum extracts. Res Pharm Sci. 2013 Jul;8(3):197-203. PMID: 24019829; PMCID: PMC3764671.
Bruneton, J. (2016). Pharmacognosie : Phytochimie, plantes médicinales.
Valnet, J. (1986). Phytothérapie : se soigner par les plantes. LGF/Le Livre de Poche.
Morel, J.-M. (2002). Traité pratique de phytothérapie. Éditions Grancher.


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