Les euphorbes furent jadis utilisées pour provoquer des purges drastiques. Aujourd'hui, on en fait une utilisation très restreinte et uniquement en application externe. Je vous explique dans cet article.
Les euphorbes poussent-elles chez vous ?
Il y a de nombreuses espèces d'euphorbes selon la région dans laquelle vous vivez.
Chez moi dans le Vaucluse, il y a plus d’une vingtaine d’espèces, mais j’en utilise deux en particulier.
D'abord l’euphorbe réveille-matin, Euphorbia helioscopia, qui pousse à foison dans les champs ou aux abords des maisons.
J'utilise aussi parfois une grande euphorbe que l’on appelle euphorbe des garrigues, Euphorbia characias avec son fameux œil noir que vous voyez sur la photo ci-dessous. Celle-ci est beaucoup plus forte (caustique) que la réveille matin.
Le point commun de toutes les euphorbes : elles renferment un suc laiteux. Et ce suc est très caustique. C’est pour cela que la plante est considérée comme toxique.
On ne peut pas la prendre en interne car le suc cause d’énormes brulures dans la bouche, la gorge, l’estomac, avec vomissements, diarrhées, convulsions et tout ceci peut mener jusqu’à la mort en fonction de la quantité absorbée.
Aujourd'hui on utilise le suc uniquement en application externe pour certaines situations dont je vous parle plus loin.
Utilisations historiques de l'euphorbe
Voici un petit survol des utilisations historiques de l’euphorbe.
Premièrement, je dois vous parler du concept de dépuration et de purgation. C’est un concept qui a toujours été très présent dans notre évolution et notre histoire.
La dépuration est en fait basé sur une observation très simple – si nos mécanismes d’élimination fonctionnent mal, notre machine ne tourne pas rond. Elle s'encrasse.
Le problème est que dans le passé, on a pris ces concepts un peu trop d’une manière littérale. Il fut un temps où les purges drastiques étaient de rigueur lorsqu’une personne était malade.
C’est un peu le même concept pour la saignée, on essayait de faire sortir les « humeurs néfastes » et on saignait les gens à tout bout de champ dès que quelque chose n’allait pas.
Avec les plantes caustiques, on stimulait brutalement le tube digestif pour que tout ressorte par le bas et par le haut. Je ne vais pas vous faire de dessin, c’était assez explosif !
Et justement, les euphorbes étaient utilisées comme purgatifs et vomitifs, notamment une s’appelle l’épurge, un nom bien choisi, Euphorbia lathyris. Parfois on prenait des graines concassées, parfois c’était l’huile des graines, parfois les feuilles.
Et il ne fallait surtout pas se tromper dans les doses sinon elle pouvait devenir mortelle. On la mélangeait avec du miel, parfois avec du jaune d’œuf, mais le résultat était le même. Ces purges étaient très difficiles à vivre pour la personne qui se retrouvaient affaiblies. Elles ne résolvaient probablement rien, mais on avait l’impression que les mauvaises choses sortaient.
Aujourd’hui, bien évidemment, nous avons banni ceci de nos habitudes et c’est tant mieux ! On parle d’élimination douce au niveau du foie, au niveau des reins, mais provoquer des vomissements et diarrhées explosives, non merci.
En application externe...
On utilisait aussi le suc pour une technique qui s’appelle la rubéfaction.
Imaginez que vous avez une forte inflammation à l’intérieur de votre corps. Prenons une bronchite par exemple avec une forte inflammation et une congestion au niveau des bronches.
La congestion fait partie du processus de guérison bien sûr, elle est là pour apporter des ressources localement à l’endroit malade. Mais parfois l'organe est trop congestionné pour bien fonctionner.
Pour résoudre cette situation, une vieille stratégie consiste à appliquer quelque chose d’irritant sur la peau, en surface, à cet endroit, pour créer une contre-irritation qui va "appeler" le sang à cet endroit, en surface, et décongestionner en profondeur.
Pour rubéfier, il faut une substance rubéfiante. Vous connaissez probablement le cataplasme à la moutarde, qui est relativement doux. Dans le passé on utilisait parfois des frictions de feuilles d’euphorbe ou d’huile de graines d’euphorbe, ce qui était douloureux et assez violent.
Pour d’autre types de douleurs aigües comme la sciatique, le docteur Cazin l’utilisait aussi, à son époque, toujours en application locale. Cazin, c’était un médecin des années 1800 qui pratiquait dans les campagnes, avec les plantes, pour aider ceux qui n’avaient pas accès à la médecine des villes.
Je vous donne une petite phrase de Cazin qui résume bien le risque avec les euphorbes (il parle de l’épurge en particulier) : « l’épurge ne doit pas être employée à l’intérieur qu’avec une extrême prudence ; dans les mains du vulgaire, elle peut devenir un poison violent ».
Utilisations actuelles
Aujourd’hui, on l'utiliser quasi-exclusivement pour brûler les verrues.
Cassez une tige d’euphorbe (j’utilise la réveille-matin), vous allez voir le suc blanc apparaître. Placez ce suc sur la verrue. Attention de ne pas trop en mettre autour sur la peau car cela va brûler.
Il faut être patient et répéter l’opération tous les jours pendant parfois plusieurs semaines jusqu’à ce que la verrue sèche et tombe.
J’ai eu aussi de bons retours de personnes qui utilisent le suc d’euphorbe pour faire disparaitre de petites excroissances de peau qu’on appelle moluscum pendulum et qui vont, au fil des applications, sécher et tomber.
Le suc fonctionne aussi probablement pour les autres types de moluscum.
Une note importante au sujet de la cueillette. Vous remarquerez que si vous récupérez l’euphorbe après une période de pluie, la quantité de suc est très abondante. Mais c’est un suc qui est beaucoup plus dilué et beaucoup moins caustique.
Pour les verrues, ce suc sera donc un peu moins efficace car il est plus dilué.
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lemeur dit
bonjour
comment soigner une réaction allergique externe de la peau à l'euphorbe?merci.Annie
sabine dit
Bonjour Annie
il n'y a pas d'utilisation pour traiter des allergies de peau avec l'euphorbe , seulement pour brûler les verrues, le suc de la plante étant très caustique
annie lemeur dit
merci à vous pour votre travail et approche rafraîchissants...j'ai compris la distinction :"caustique" et "réaction allergique"; merci pour votre disponibilité.annie
Samti Mohamed Hbib dit
Est-elle utile pour la mycose des ongles?
Est ce qu'on l'appliquer sur les ongles malades à la place du vernis médicale
sabine dit
bonjour Samti
non je ne pense pas que l'euphorbe dans ce cas sera utile
Samti Mohamed Hbib dit
Je ne parle pas d'un effet anti fongique mais d'un effet caustique pour l'ongle abîmé?
sabine dit
bonjour Samti
l'euphorbe aura un effet caustique , mais je ne comprends pas la démarche de mettre un produit caustique sur l'ongle pour soigner une mycose ?
Marie-Jeanne Pellerin dit
je découvre régulièrement et avec un grand bonheur vos informations passionnantes et bien documentées. Je connais bien les espèces de plantes étant une botaniste passionnée depuis l'âge de 15 ans titulaire un peu plus tard d'une maitrise de botanique. Votre document comporte une petite erreur, la photo présente une euphorbe que je connais parfaitement, il s'agit de la grande épurge (Euphorbia lathyris) et non d'Euphorbia helioscopia dit réveil matin. Je ne voudrais pas le moins du monde nuire à la qualité de votre travail qui est formidable, juste le rendre encore plus parfait. Merci beaucoup!
Christophe BERNARD dit
Bonjour Marie-Jeanne,
Merci pour votre message et ne vous inquiétez pas, je fais parfois des erreurs, comme tout le monde 🙂
En ce qui concerne mes photos ici en revanche, je suis assez sûr de mon coup car E. lathyris ne pousse pas autour de chez moi (et je parle très localement dans mon coin), en revanche j'ai une abondance d'E. helioscopia, relativement petite par rapport à l'épurge.
Est-ce la dernière photo en bas de l'article qui vous fait penser à l'épurge ? L'épurge a des feuilles opposées...
Marie-Jeanne Pellerin dit
La photo de fleur présentée dans l'article semble bien être une fleur d'Euphorbia helioscopia. Il y a pleins d'Euphorbia helioscopia qui poussent dans la zone bac à sable de mon jardin depuis 40 ans et c'est une espèce que je connais très bien. Je me méfie lorsqu'il faut la "contenir" car l'arrachage à mains nues peut engendrer des cloques tant elle a un latex corrosif lorsqu'il fait très sec, d'où ses propriétés anti-verrues. Mais elle a chez moi des feuilles arrondies et élargies dans leur partie terminale (obovales). D'autre part, ces feuilles sont peu nombreuses et très disséminées le long de la tige et donc ne correspondent pas à la photo présentée pour le feuillage fournissant le latex. J'ai donc pensé trop rapidement sans doute que ce feuillage vert bleu ressemblait plutôt à un jeune plant d'Euphorbia lathyris qui abondent sur la bordure de mon trottoir car elles résistent vaillamment depuis 20 ans aux divers traitements des services communaux. Pour savoir à quelle espèce appartient ce feuillage d'euphorbe, Je vais contacter une amie botaniste afin de lui demander son avis sur la possibilité de déterminer cette espèce, uniquement en partant des feuilles, ce qui est toujours hasardeux….
millot dit
bonjour, super votre vidéo, dans la flore gallica , flore de France, 1600 espèces dans les Euphorbia.
Bova dit
Je vous remercie pour tout les bons conseille