Je vais vous parler d’une plante qui est à la fois un aliment et une plante médicinale. En d’autres termes, elle est aussi bonne dans l’assiette que dans la tasse : le fenouil.

C’est une plante tellement simple, commune, accessible, et tellement utile comme vous pourrez le constater dans cet article.

Avec le fenouil, on est vraiment dans une approche écologique et respectueuse du vivant, on peut la cultiver localement, on utilise tout, on ne gaspille rien.

Un peu de botanique

Le fenouil (Foeniculum vulgare) est une plante de la famille des apiacées, même famille que la carotte, le persil, cumin, coriandre, angélique, etc. De nombreuses médicinales appartiennent à cette famille qui fait des ombelles, c’est pour cela qu’on les appelait les ombellifères dans le passé.

La version sauvage est bisannuelle ou vivace. Chez moi elle pousse dans la garrigue, sur le bord des chemins et des routes, les terrains vagues, les friches agricoles, les vignes, les vergers.

Le cultivé, vous le connaissez peut-être si vous l’avez au jardin, a été sélectionné à partir du fenouil sauvage pour donner une souche plus grosse (la partie « légume »). On l’appelle parfois le fenouil doux, car il est plus doux, moins amer que le sauvage.

Toutes les propriétés dont je vais vous parler sont valables aussi bien pour le fenouil cultivé que pour le sauvage, sachant que le sauvage sera en général plus aromatique, plus fort, et donc plus thérapeutique.

Le fenouil légume

On commence par la souche. C’est la base de la plante. On déracine la plante, on coupe les racines, on coupe les tiges et vous avez votre fenouil.

C’est un excellent légume, très riche en nutriments. Je vais vous donner quelques chiffres ici pour  100 g du légume frais (source – USDA) :

• 90% d’eau, normal, il est très juteux ;
• Un peu plus d’1 g de protéines ;
• 7 g de glucides ;
• 414 mg de potassium ;
• 52 mg de sodium ;
• 50 mg de phosphore ;
• 49 mg de Calcium ;
• 17 mg de magnésium ;
• Un peu de zinc et de fer (0,2 et 0,7 mg respectivement) ;
• 12 mg de vitamine C ;
• De la vitamine A (963 UI) ;
• Quelques autres vitamines et oligoéléments en quantité plus faible.

Pour information, un « bulbe » de fenouil typique du marché pèse dans les 200 à 250 g, donc vous pouvez doubler ces quantités si vous en consommez un entier.

Si vous voulez garder l’intégrité de tous ces minéraux, il est bon de le consommer cru, sous forme de jus par exemple. Vous pouvez le râper par exemple et le rajouter aux salades. Vous pouvez l’émincer puis le faire mariner dans du jus de citron.

Si vous le faites cuire, idéalement il faudrait boire l’eau de cuisson car de nombreux minéraux vont se retrouver dedans. Vous allez aussi perdre une partie de la vitamine C à la chaleur.

C’est un légume qui facilite la digestion d’autres aliments. Vous pouvez par exemple mélanger du fenouil râpé à une salade de haricots rouges ou de lentilles, en particulier si cela vous provoque beaucoup de ballonnements.

Pour en finir avec l’aspect nutritionnel, vous pouvez utiliser les graines de fenouil comme graines germées, ça va rajouter un petit goût anisé à vos salades.

Feuilles et graines

Les feuilles séchées sont excellentes préparées en infusion. Elles donnent une infusion très aromatique avec ce goût parfumé et anisé.

Le gros plus : si vous en avez au jardin, vous compostez peut-être les feuilles pour ne garder que la souche. C’est dommage, tout s’utilise dans le fenouil. Vous pouvez donc prendre les branches et les feuilles, les faire sécher bien à plat sur une grille ou en bouquet la tête en bas, puis vous stockez dans des sacs en papier.

Les graines sont un excellent remède. Le terme botanique exact ici, c’est fruit et pas graine. Mais je vais employer le terme graine, c’est plus simple. C’est la partie traditionnellement utilisée en herboristerie.

Celles que je vous montre sur la vidéo ont perdu leur couleur verte car j’ai oublié de rentrer mon bocal à l’obscurité. En général elles sont vert pale comme celles montrées sur la photo ci-dessous.

Petit rappel au passage : gardez toujours vos plantes sèches à l’abri de la lumière car les UVs du soleil, même en lumière indirecte, vont détruire certains constituants fragiles et donner à vos plantes une couleur terne, marron, grisâtre.

En général, la graine est plus aromatique que la feuille, elle est donc plus médicinale aussi. Mais je vous dirai que cela dépend surtout de la qualité de votre plante séchée. Parfois, la feuille sera plus aromatique que la graine. Tout dépend de votre fournisseur, de la qualité du séchage et de conservation, etc.

Pour faire simple, si votre infusion des feuilles ou des graines n’est pas bien aromatique et anisée, c’est qu’il y a un problème.

Digestif, carminatif, antispasmodique

Le fenouil stimule le processus digestif. Il réduit aussi la quantité de gaz produite par votre système intestinal. Notre flore intestinale produit toujours un peu de gaz, c’est normal, cela fait partie du processus de fermentation des fibres végétales.

Mais chez certaines personnes, les ballonnements sont très pénibles à gérer, probablement dû à un déséquilibre de la flore intestinale. Le fenouil va diminuer ce phénomène.

L’aspect antispasmodique est idéal pour les crampes intestinales, qui arrivent en général lorsqu’on a trop mangé. Les muscles digestifs ont tellement travaillé qu’au bout d’un moment, ils subissent une crampe, un spasme.

À ce moment-là, il faut rechercher les plantes antispasmodiques pour relaxer la situation. Le fenouil arrive donc à la rescousse, une petite infusion des feuilles ou des graines, prise sur la digestion.

Entre parenthèses, je vous explique toutes ces bases en détail dans ma formation sur le système digestif. Dans la formation, je vous explique comment accompagner tous les troubles digestifs que vous allez rencontrer à l’heure actuelle.

Mélange digestif : la graine fait partie des 4 grandes semences chaudes, c’est-à-dire stimulantes, qui font circuler, qui réveillent la digestion. Je vous donne les quatre : anis, carvi, cumin et fenouil. Vous pouvez mélanger les 4 à parts égales et les préparer en infusion, c’est très agréable sur la digestion.

Production de lait

Autre propriété bien connue, il est galactagogue, c’est-à-dire qu’il favorise une meilleure arrivée ou production de lait chez la mère. On trouve déjà cette indication chez Hippocrate, c’est-à-dire avant l’an zéro. Une indication qui remonte donc assez loin.

Le docteur Bodard dans les années 1700 explique qu’il a travaillé avec plusieurs mères qui étaient sur le point, je cite, « d’abandonner leur enfant à un lait étranger ». Je ne sais pas ce que cela veut dire exactement pour être franc, une nourrice pour celles qui pouvaient se le permettre ? Et pour les autres… ?

Bref, Bodard arrive à rétablir la production de lait grâce à une infusion de graines de fenouil accompagnées de réglisse. Cazin dans les années 1800 reprend cette formule avec succès. Et il nous donne au passage une précision assez intéressante.

Cazin nous dit que chez la femme délicate (là encore je cite texto, je n’ai pas vraiment sa définition de femme délicate), à forte dose, le fenouil peut agir comme emménagogue et provoquer le rétablissement des règles, ce qui nuit à la production de lait.

Il explique donc que chez la femme « délicate », on utilise 4 à 10 g des graines par jour en infusion, et chez la femme « robuste », on utilise de 6 à 15 g des graines.

Ce type d’information est toujours très intéressant car on arrive à mieux adapter une plante à un tempérament. Encore faudrait-il définir exactement ce qu’est une personne délicate et une personne robuste, je vous l’accorde, je n’aurai pas le temps de développer ici.

« Excitante » du système

Voici un autre commentaire de Cazin que je trouve très intéressant. Il nous dit que la plante est excitante sur le système d’une manière général.

Et donc selon les dispositions de l’individu, selon ses besoins à l’instant T, le fenouil va stimuler une fonction ou une autre, un organe ou un autre : elle stimule la production de lait, le retour des règles, les sécrétions gastriques.

Elle réchauffe un organe « froid », un organe atone, une fonction déficiente. Cela peut paraître tout simple, mais personnellement je trouve cela fascinant, cette intelligence du vivant au service du vivant.

C’est probablement pour cette raison qu’on la positionne dans certains ouvrages comme expectorante. À ce moment-là, la personne a probablement les poumons fatigués. Il traverse peut-être une fin de bronchite, a besoin de stimulation et le fenouil va avoir cette fonction.

Valnet en parle aussi pour les toux liées à l’asthme et à la coqueluche, à garder en tête.

Coliques des tous petits

Dernière utilisation interne, là encore qui remonte très loin, quelque chose que les mamans et les grands-mères ont toujours connu dans le passé : le fenouil est la plante pour la colique des bébés.

Le fenouil a été la première tisane de nombreux bébés dans le passé. Vous trouverez la recette suivante dans les ouvrages traditionnels : une petite cuillère à café des graines sèches en infusion, laissez infuser 5 minutes, filtrez puis faites absorber à la cuillère plusieurs fois par jour.

Conjonctivites

Et pour finir une petite utilisation externe : pour les problèmes de conjonctivite.

Faites une infusion, filtrez avec un filtre à café (non blanchi) pour qu’il ne reste aucune poussière, faites-en un liquide physiologique (rappelez-vous mes autres vidéos, 9 g de sel par litre, vous ajustez en fonction de votre volume à l’aide d’une balance qui pèse au centigramme près).

Bien dissoudre le sel puis prélever un peu de liquide avec un compte-gouttes et faire couler quelques gouttes dans l’œil plusieurs fois par jour.

Formes et quantités

☀︎ Infusion des graines, en général 1 cuillère à café pour une tasse si les graines sont bien aromatiques. Laissez infuser 5 minutes à couvert pour garder tous les arômes. Filtrez et buvez.

☀︎ Infusion des feuilles, 30 g par litre chez Valnet, une tasse après les repas

☀︎ Teinture des graines, 30 gouttes dans un peu d’eau 3 fois par jour chez Corjon.

Précautions

Attention : dans cette vidéo je ne vous ai pas parlé de l’huile essentielle de fenouil, uniquement des formes traditionnelles, je vous le rappelle.

• Fournier explique qu’à trop forte dose, les graines peuvent provoquer des crises d’épilepsies (doses non spécifiées). Aux doses traditionnelles, en général aucun problème.
• Dubray recommande de ne pas dépasser les 7 g par jour d’une manière prolongée pour rester dans une plage qui ne provoque aucun problème.
• Il peut y avoir un effet photosensibilisant lorsque appliqué en externe, en particulier pour l’huile essentielle. A priori pas de problème par voie interne avec les formes traditionnelles.
• Dubray contre-indique les graines chez la femme enceinte au-delà des 7 g
• Contrindications dans le contexte d’un cancer hormono-dépendant car la graine contient des phytoestrogènes.

Ouvrages et Références mentionnées

Dubray, Michel, « Guide des Contre-indications des Principales Plantes Médicinales« , 2010

Fournier, Paul-Victor, « Dictionnaire des Plantes Médicinales et Vénéneuses de France« , 1947

Valnet, Jean, « La phytothérapie : Se soigner par les plantes » , 1986