Cet article est paru dans le magazine Plantes & Santé n°168
Les Anglais l’appellent «heal all», celle qui guérit tout. Un nom qui vous paraîtra peut être un peu prétentieux. Mais apprenez à la connaître, et vous verrez que cette discrète lamiacée aux fleurs violettes excelle pour soulager les petites coupures et blessures de tous les jours. De plus, elle est largement sous-utilisée au jardin, où elle y a pourtant toute sa place en tant que plante couvre-sol.
La brunelle, un puissant antioxydant
Le jardin médicinal doit avant-tout être utile et pratique au quotidien. La brunelle est la plante idéale à avoir à portée de main car elle calme rapidement l’inflammation des plaies, coupures, griffures ou érythèmes. Elle s’utilise principalement en cataplasme (voir "à l'atelier" ci-dessous). Les parties aériennes fraîches et écrasées fournissent un substrat mucilagineux, adoucissant, désinfectant et astringent, permettant une résolution rapide du problème.
Il en est de même pour les problèmes buccaux. En bain de bouche, la brunelle calme l’inflammation des gencives. Ses propriétés anti-Herpes simplex sont d’ailleurs aujourd’hui bien établies. Prise en infusion ou en gargarisme, elle soulage aussi les maux de gorge. Contrairement à certaines médicinales, son infusion est douce, agréable à boire, et sera donc tolérée par les palais tes plus difficiles.
Grâce à sa teneur en acide rosmarinique (elle en contient 5%, une forte concentration), la brunelle est l’un des antioxydants les plus puissants dans le monde des plantes. Les antioxydants permettent de protéger nos cellules contre le stress oxydatif accentué par la vie moderne (pollution, cigarette, pesticides...), qui entraîne un vieillissement prématuré de nos cellules. Une simple infusion journalière agira comme bouclier protecteur contre les radicaux libres destructeurs.
La brunelle au jardin
La brunelle se trouve rarement en jardinerie. Il faut donc la faire pousser de graines. Celles-ci ont besoin d’une période de stratification à froid. En d’autres termes, c’est le passage du froid qui va permettre à la graine de se réveiller. Plantez-la à l’automne en bac de plantation que vous laisserez dehors, à l’abri des intempéries.
Plus simplement, au printemps, placez les graines dans un peu de sable tamisé très finement et humidifié, puis placez le tout dans un sac en plastique au réfrigérateur et attendez deux semaines. Extrayez les graines du sable et plantez-les en bac en les recouvrant à peine de terre et en tassant bien. Gardez humide jusqu’à germination.
Repiquez les plantules en godet individuel. En parallèle, commencez à travailler un endroit du jardin en exposition mi-ombre mi-soleil avec une terre riche. Si comme moi, vous êtes un adepte du paillage, vous aurez recouvert l’endroit de 30 cm de paillis ou de broyât végétal à l’automne afin d’enrichir la terre sans avoir besoin de la retourner. Positionnez les plants à distance de 20 cm les uns des autres. Lorsque les plantes grandiront, elles se rejoindront pour former un couvre-sol.
Attention, la brunelle ne supporte pas la concurrence du chiendent ou d’autres herbes dites «mauvaises». Assurez-vous donc que la zone qu’elle va coloniser est relativement propre : un désherbage manuel sera obligatoire avant de commencer à planter.
Toute la partie aérienne est médicinale, mais c’est surtout la fleur qui nous intéresse. Afin de maximiser la production sans pour autant diminuer la richesse en constituants, soyez généreux en compost. Placez-en une bonne couche autour de chaque plante : il sera intégré au sol tout en douceur avec les pluies et les arrosages successifs. Ne soyez pas non plus avare en eau : la brunelle apprécie des arrosages fréquents et une terre humide.
Ramasse et séchage
À l'ouest, nous cueillons la fleur fraîche pendant sa floraison et nous la faisons sécher entière afin d’en faire des infusions pour les problèmes de peau (en compresse) ou les problèmes buccaux (gargarisme, bain de bouche).
À l’est, en médecine chinoise, on l’appelle «xia ku cao» et on utilise ses fleurs sèches. On les cueille brunies à l’automne. Les études nous disent que ce séchage «sur pied» permet d’optimiser la quantité de polysaccharides de la plante, qui ont des propriétés adoucissantes, réparatrices et stimulantes du système immunitaire. Des millénaires de tradition, ça a du bon!
À l’atelier : cataplasme de brunelle fraîche
Un cataplasme est tout simplement une préparation de plante assez pâteuse pour être appliquée sur la peau dans un but thérapeutique. L’avantage de la brunelle fraîche est qu’elle est mucilagineuse et pourra donc se travailler en pâte assez facilement. Pour faire ce cataplasme, vous aurez besoin d’un petit pilon.
1. Cueillir une poignée de feuilles et de fleurs de brunelle (ou que les feuilles, selon la période). Les placer dans votre pilon.
2. Pilonner afin de faire une pâte. Si la pâte est trop sèche, ne pas hésiter à rajouter un tout petit peu d’eau chaude afin de bien faire ressortir le jus de la plante. Ne pas la tremper, ou le liquide qui reste au fond du pilon sera perdu.
3. Prendre une grosse pincée de cette pâte et la placer directement sur la peau à l'endroit enflammé (griffures, brûlures et égratignures du quotidien). Recouvrir d’une gaze et envelopper d’une bande pour maintenir en place, ou mieux, placer la pâte et recouvrir de deux ou trois tours de film plastique de cuisine. Pas très écologique, certes, mais très pratique pour les enfants qui auront vite fait d'envoyer balader gaze et bandage.
4. Renouveler l’application une fois que la pâte est sèche, idéalement deux à trois fois par jour. En général, un jour ou deux suffisent à régler le problème.
Efficace contre l'herpès
Si vous avez un herpès buccal (bouton de fièvre) qui commence à démanger juste avant son apparition, écrasez les feuilles dans un pilon et trempez simplement votre doigt dans le liquide vert obtenu. Appliquez sur la zone dès les premières démangeaisons plusieurs fois par jour. Prenez aussi une infusion de brunelle deux à trois fois par jour pour stimuler le système immunitaire.
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Violette dit
bonjour, ou peut t'on trouver du macerat de Brunelle ou alors de la teinture de Brunelle?? dans le pire des cas des semences??
sabine dit
Bonjour Violette
vous pouvez en trouver ici par exemple http://biosimples.com/teintures-meres-c-65.html?zenid=cmid0gh08inp5praqt62gd52u1
autrement pour des graines j'en ai trouvé sur ce site https://www.jardindesauveterre.com/peel/achat/produit_details.php?id=265
Stacey dit
Bonjour 🙂 Est ce que je peux utiliser ajuga reptans comme du la prunella vulgaris? J'ai chercher un peu partout et certain sites dites je peux utiliser comme le prunella vulgaris J'ai regarder dans mon jardin et avec les feuilles.. je suis convaincu c'est de l'ajuga reptans. Toutes mes excuses pour mon Français 🙂
sabine dit
Bonjour Stacey
en ce moment Ajuga reptans est de sortie , (depuis déjà un bon mois) , et derrière sur le même terrain arrive souvent la Brunelle
il va nous falloir faire aussi une fiche sur le bugle , ce dernier est un excellent cicatrisant et anti inflammatoire de par sa présence de phénylpropanoïdes (dont verbascoside et qui ont une action protectrice des cellules endothéliales* contre le stress oxydatif induit par les radicaux libres
*les cellules endothéliales tapissent l'intérieur des vaisseaux sanguins et qui sont en contact direct avec le sang )
et pour la brunelle voir sa fiche complète ici https://www.altheaprovence.com/blog/brunelle-prunella-vulgaris/
Catherine Sauer dit
Bonjour Christophe!
D'abord : un grand merci pour ce blog et vos vidéos - qui augmentent à chaque fois ma gratitude face à tout ce que les plantes nous offrent...
J'ai l'oeil sur la brunelle depuis votre dernière vidéo, aussi j'ai remarqué quelque chose : la brunelle en plaine est très courante, et petite (j'habite à Lausanne en Suisse), et ses feuilles sont minuscules. Les épis restent relativement courts.
Mais je suis allée me balader sur des alpages entre 1600 et 2000 mètres, et là, il semble que la variété soit différente : grandes feuilles, fleurs généreuses (longs épis et fleurs au violet lumineux). Est-ce la même variété avec les mêmes propriétés? La forme est absolument identique à la "petite" mais tout semble plus développé.
J'aimerais bien vous envoyer une photo pour vérifier mais je ne sais comment le faire à partir du formulaire...
Cordialement,
Catherine
Christophe BERNARD dit
Bonjour Catherine,
Pour répondre à cette question, il faudrait d'abord avec une identification botanique claire - parlons-nous de la même plante ? Car de nombreuses lamiacées se ressemblent. Si oui, il arrive souvent que la plante change de forme (plus courte, plus longue, couleur différente) en fonction de son écosystème. Lorsque c'est le cas et que l'on parle effectivement de la même plante, en général on les utilise d'une manière tout à fait interchangeable. Pour l'identification, je n'aurai pas le temps de la faire pour vous, mais vous trouverez des groupes facebook et autres suggestion sur mon site ici :
https://formation-plantes-medicinales.com/autres-liens-utiles/
Kin dit
J'appuie à cent pour cent le commentaire de Daniele. Merci 1000 fois pour votre générosité. Kin
venezia dit
Bonjour Christophe,
je suis ravie de voir la brunelle sous les feux de la rampe. Je l'ai découverte un peu par hasard il y a trois ans environ et depuis, je fais une teinture rose+brunelle que je trouve très cicatrisante et que j'utilise aussi à très faibles doses (1% environ) dans mes produits pour le visage.
depuis que je la connais, je la vois, alors que pendant des années, je n'y avais pas prêté attention!
Laure dit
Bonjour, merci pour cet article, j'en ai plein le jardin et je ne connaissais pas cette utilisation !
Pour ma part le nom latin était évident, la brunelle en nom vernaculaire il me semble bien ne correspond qu'à Prunella vulgaris 😉 (d'ailleurs je n'arrête pas de m'emmeler entre prunelle et brunella :-p)
Gales Dominique dit
Bonjour Christophe et encore merci pour ce partage généreux.
D'accord avec Danièle! Du courage et bon jardinage!
Rubus dit
Bonjour E. Dausmenil,
Ajuga reptans (Bugle rampante) et Prunella vulgaris (Brunelle commune) sont deux plantes de la même famille botanique (Lamiacées) qui pourraient être confondues au premier abord.
Cependant, l'inflorescence d'Ajuga reptans se présente sous la forme d'un épi lâche, alors que celle de Prunella vulgaris se présente sous la forme d'un épi généralement beaucoup plus court.
Par ailleurs, parmi les fleurs de l'épi d'Ajuga reptans se trouvent des bractées aisément observables, ce qui n'est pas le cas pour Prunella vulgaris, comme le montrent d'ailleurs les photos présentées dans l'article.
Vous avez raison au sujet de l'intérêt de l'utilisation des noms latins (à ce propos, une précision : l'usage de la nomenclature binomiale linéenne est de mettre le premier terme correspondant au genre – Ajuga – avec une majuscule, suivi de l'épithète qui désigne l'espèce au sein de ce genre – reptans – en minuscule). L'usage du nom latin peut quelquefois permettre d'éviter certaines ambiguïtés qui pourraient exister avec l'usage des noms vernaculaires, bien que dans le cas précis qui nous intéresse ici l'utilisation du nom usuel « Brunelle » n'aurait normalement pas du entraîner de confusion avec Ajuga reptans (Bugle rampante).
Je rejoins Denise pour souligner la grande générosité de Christophe. Merci Christophe de nous faire profiter de tes connaissances et de ton expérience. Que de temps passé à notre profit !
Bien cordialement,
Klara dit
Bonjour, et pour répondre indirectement au précédent commentaire, merci infiniment du temps que vous passez et du savoir que vous partagez si généreusement avec nous (surtout avec ceux dont je suis qui usent et abusent de votre disponibilité!)
Je vois un contenu en acide rosmarinique, que j'ai souvent vu associé à un risque en cas d'hypothryroïdie notamment (potentielle interaction en se liant à la TSH), du moins en études mais sans qu'on puisse réellement en tirer des conclusions pour l'humain. Avez-vous un avis ou expérience concernant l'usage de ces plantes (dont beaucoup de médicinales très intéressantes, romarin, mélisse, menthes, sauge...) dans ce type de pathologies? Je sais que certains herboristes les décommandent, tandis que d'autres privilégient simplement la prudence...
et prenez bien évidemment votre temps pour répondre, aucune urgence, et excellent journée!
Christophe BERNARD dit
Bonjour Klara,
Excellent point, effectivement les plantes riches en acide rosmarinique sont connues pour inhiber les fonctions thyroïdiennes, du moins elles sont très utilisées dans les cas d'hyperthyroïdie. Par prudence, on les évide en cas d'hypothyroïdie. Je ne sais pas si cela est très ancré dans la pratique et l'expérience par contre, mais par mesure de prudence, on les évite effectivement. Personnellement, je ferais une distinction par contre entre le romarin et la mélisse par exemple. La mélisse est plutôt de nature calmante, le romarin plutôt stimulant, et une stimulation dans un cas d'hypothyroïdie peut être intéressante. De plus le romarin est un puissant antioxydant qui peut être intéressant lorsque hypothyroïdie autoimmune. Bref, je pense qu'il faut mener une réflexion un peu plus fine et ne pas se tenir seulement à la teneur en AR.
danièle dit
désolée de lire ce "commentaire" si discourtois ! j'apprécie tellement votre générosité à nous donner tant de conseils, de recettes et d'informations... N'en tenez pas compte, je vous prie
soyez bien certain que la majorité d'entre nous vous admire pour tout ce que vous faites et ne vous en veut nullement d'oublier le nom latin de temps à autre (les photos éclairent aussi, non ?).
Et, en plus, on vous fait la morale à tort, puisqu'il s'agissait d'une autre plante :--))) quelle ironie !
encore 1000 mercis. Nous vous suivons avec reconnaissance.. Ce blog est irremplaçable !
bonne journée
danièle
Christophe BERNARD dit
Merci Danièle. Bon, je me suis peut être emporté un peu vite, signe que j'ai besoin d'aller faire un petit tour au jardin cet après-midi 🙂
daumesnil dit
bonjour, je crois comprendre que c'est ajuga reptans; s'il vous plaît, usez des noms latins, seul moyen de savoir de quoi l'on parle!
cordialement
E D
Christophe BERNARD dit
Bonjour, non c'est Prunella vulgaris.
Je trouve votre commentaire un peu sec.
J'écris beaucoup, je donne beaucoup, je fais ce que je peux avec des journées de 24h. Je mets les noms latins très souvent, et parfois j'oublie, certes. Mais comme vous pouvez le voir, je réponds à toutes les questions. Je ne pense pas que beaucoup de blogueurs fassent la même chose.