Cueillette des plantes médicinales
Sécurité et éthique
Après plusieurs années de cueillette de plantes médicinales, à arpenter la nature environnante avec mon sac à dos et mon sécateur, je voulais écrire un article à ce sujet.
La cueillette des médicinales sauvages est une expérience unique et exaltante pour celui qui s'intéresse aux plantes. Parfois on marche pendant des heures, loin des bruits de la civilisation, pour trouver enfin la plante tant recherchée. On la trouve parfois dans un champ en friche juste à coté de la voiture. On passe souvent des jours à ne rien trouver. Quel que soit le résultat, nous devons suivre des règles de conduite pour respecter le peu de nature qu'il nous reste.
Cet article reflète l'experience d'un ramasseur amateur, moi-même, et non l'opinion des ramasseurs professionnels.
J'aimerais que cet article soit participatif. N'hésitez donc pas à me faire parvenir vos commentaires, je les integrerai à l'article en mentionnant votre nom si vous le désirez.
Sécurité
- Cueillons seulement les plantes que nous connaissons sans ambiguïté.
- Pour bien connaître une plante, il faut être sorti avec quelqu'un qui la connait et qui nous l'a montrée plusieurs fois dans son environnement.
- Nous pouvons aussi nous servir de livres et de l'internet. Mais attention aux confusions et aux plantes dangereuses qui ressemblent à d'autres inoffensives. La famille des apiacées est par exemple problématique, comprenant la belle angélique et la mortelle cigüe.
- Apportons une trousse de secours dans notre sac à dos.
- Le cueilleur utilise des outils coupants et tranchants. Les buissons sont pleins d'épines. Les accidents peuvent arriver, et mieux vaut avoir compresses, désinfectants, ciseaux, scotch médical - le kit de secours complet.
- Les insectes et serpents sont chez eux, nous les dérangeons souvent. N'oublions pas d'apporter un aspivenin, une piqure d'épinéphrine pour ceux qui sont allergiques, etc.
- Si la marche est longue, expliquons à nos proches où nous nous trouvons.
- La technologie qui nous pollue la vie peut parfois être vitale : un téléphone mobile et un GPS de randonnée sont souvent plus que des gadgets.
Ethique
La nature n'est pas un self service. La nature n'est pas un supermarché. Beaucoup de plantes médicinales sont maintenant en voie d'extinction à cause de la ramasse intempestive. Il faut que cela cesse, et que nous nous mettions à une "cueillette raisonnée" (un terme suggéré par ma collègue Fanny Mesquida, animatrice du populaire forum Les Herboristes).
- Si le lieu de ramasse est public (un parc, une réserve naturelle, etc), assurons-nous que nous avons la permission de ramasser. Les différents parcs nationaux ont souvent des régulations bien spécifiques en ce qui concerne la ramasse de la flore. Ces régulations sont en général documentées sur le site internet du parc en question.
- Si le lieu de ramasse est privé, demandons la permission. Soyons courtois et développons un dialogue avec le propriétaire des lieux. La plupart des gens sont ouverts et même curieux de ce que nous allons faire. Peut-être ne connaissent-ils pas la plante que nous avons repérée, ils pourront nous accompagner et observer.
- Des lois régissent la cueillette des plantes sauvages, nul n'est censé les ignorer. Voir un exemple ici pour la région PACA. Soyons informés au sujet des espèces protégées dans notre département. Les parc régionaux affichent souvent la liste sur leur site internet. Voici un exemple pour le parc régional du Luberon, là où j'habite.
- Ma collègue Juliette Martin suggère d'aller au delà des espèces protégées : si la plante n’est pas extrêmement commune, elle essaie d'observer la population sur plusieurs année de suite, ou au moins de suivre son évolution sur une année entière de croissance, afin de s’assurer quelle n’est pas en danger de disparaitre localement.
- Apprenons à connaître les plantes dangereuses de notre région. Ramassons loin de ces plantes.
- Afin de ne pas confondre les espèces et les lieux de ramasses, utilisons un cahier de cueillette afin d’enregistrer le nom scientifique et vernaculaire de la plante, la date et le lieu de cueillette.
- Cueillons loin des chemins, et ceci pour deux raisons :
- Les plantes sont souvent salies par les chiens et autres animaux (sauvages ou non) qui ont tendance à faire leurs besoins à ces endroit ;
- La plupart des promeneurs ne quittent jamais le chemin. Eux aussi aimeraient profiter de toute la diversité de la flore de notre région. Allons ramasser plus loin, à un endroit où la vue depuis le chemin ne sera pas affectée. Assurons nous que notre ramasse reste invisible.
- Cueillons loin des routes et des lieux pollués. L'idéal serait de créer et maintenir un répertoire des sites de cueillette et en connaître l’historique.
- Evitons de ramasser les plantes à proximité des champs de culture non biologique, elles seront d’office remplies de pesticides et d’engrais.
- Renseignons-nous sur les indications exactes de la plante que nous recherchons. Si les mêmes indications sont fournies par une plante plus commune et plus facile à trouver, choisissons celle-là. Ne dénigrons pas les plantes qui se trouvent en abondance : pissenlit, ortie, achillée millefeuille, bardane, trèfle, etc.
- Nous avons tous tendance à trop ramasser. Des sacs de plantes non-utilisées partiront au compost. Des litres de teinture trop vieilles seront déversés dans l'évier. Evitons ce gâchis. Ramassons peu, et retournons ramasser plus si il y a besoin.
- Ne ramassons que les parties utiles pour notre activité. Nous avons parfois besoin de feuilles, fleurs, écorces, etc. Si nous n'avons besoin que des fleurs, pas besoin de couper les tiges entières.
- Ne ramassons pas plus de 10% des plantes dans un endroit particulier. Ramasser plus pourrait affecter l'équilibre entre cette plante et les autres plantes environnantes.
- Ne saccageons pas la plante. C'est un être vivant. Ramassons une petite portion de la masse aérienne pour qu'elle se remette plus rapidement. Si nous ramassons la masse racinaire, ramassons si possible une portion seulement. Il est possible de creuser et de ramasser une portion des racines de réglisse ou de guimauve par exemple (pour certaines plantes, ceci ne sera pas possible - patience crépue, pissenlit, etc).
- Mon ami Jean Jeaubert, jardinier et passionné de nature, explique qu'il pratique un peu comme quand il taille un arbuste ou un arbre dans son jardin. Il essaie de donner à la plante une forme, un port équilibré, comme s'il entretenait "le jardin de la nature".
- Laissons tranquilles les plants les plus forts et les plus gros. Ce sont eux qui vont propager l'espèce à cet endroit, en produisant plus de graines, plus de stolons ou autre. Ramassons les plants plus jeunes, plus petits.
- Si nous ramassons la plante entière, éparpillons quelques graines afin de propager l'espèce. Une alternative est de faire une division de racine sur place et de replanter une partie de la plante.
- Avant de repartir, regardons tout autour de la zone où nous avons cueilli. Laissons la zone propre. Engageons-nous à participer à la préservation et à la propreté des stations de cueillette.
- Lorsque nous sortons avec d'autres ramasseurs novices ou expérimentés, partageons ces règles d'éthique.
- Si des ramasseurs nous demandent où nous avons trouvé une certaine plante, posons-nous la question suivante : quelle va être la conséquence de ce partage d'information ? Ce ramasseur a-t-il une bonne éthique ? Va-t-il sortir avec 10 autres ramasseurs et saccager l'endroit en question ?
- Si une zone va être rasée car la commune aux alentours s'apprête à construire des bâtiments, ramassons à cet endroit et sauvons au passage quelques plantes afin de les replacer au jardin ou dans un endroit environnant.
Les amérindiens ont une belle leçon à nous donner. Pour chaque morceau de plante qu'ils ramassent, ils laissent une petite offrande. Une pincée de tabac, un cheveu. C'est leur manière de remercier le monde végétal, de reconnaitre que tout est échange et partage. Les plantes nous donnent beaucoup, et nous avons la responsabilité de leur donner un peu de nous. Nous pouvons :
- Donner un peu de notre eau ;
- Enlever les bois morts, nettoyer les abords ;
- Eparpiller quelques graines ;
- Et tout simplement, apprécier ce moment et ce contact, en envoyant une pensée à la plante.
Bonnes habitudes et bon sens
- Avons-nous de quoi stocker les plantes dans notre sac à dos ? Selon la chaleur et la longueur de la marche, les plantes vont-elles commencer à macérer dans le sac ? Envelopper les plantes dans des morceaux de tissus permettent aux plantes de respirer.
- Ne partons pas cueillir un jour où nous sommes pressé. Nous passerons à coté des plantes recherchées, et surtout à coté de l'expérience elle-même, qui requiert un ancrage dans le présent. Prenons notre temps, ouvrons les yeux, sentons les parfums.
- Ne nous jetons pas sur la première plante que nous trouvons. Si l'on prend le temps de bien regarder autour, de marcher et d'explorer la zone environnante, on trouve souvent de plus belles touffes de la même plante, plus saines, plus robustes.
- Sommes-nous à la bonne altitude, dans la bonne zone d'ensoleillement ou d'humidité pour cette plante ? Si la réponse est non, nous reviendrons bredouille.
- Vidons le sac dès notre arrivée à la maison et mettons les plantes à sécher à l'ombre dans une pièce bien aérée, ou teinturons-les immédiatement.
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Catherine Coupille dit
Bonjour Sabine,
Oui oui, Charleval en Provence, j'en suis étonnée...
Merci pour vos réponses,
Catherine
Catherine Coupille dit
Bonjour,
Je suppose que vous êtes en congé, pour l'été?
De toute façon, bel été à tous;
Je cueille en ce moment des fleurs de guimauve
Avec un peu de gène car le plan est sur le bord d'une petite route, et à côté d'un transfo électrique...
Je laisse tomber?
Difficile de résister...
Je suis en train d'implanter un jardin médicinal à Charleval, j'y ai trois plans de guimauve: deux qui viennent de la pépinière de Fanny Eddie, deux qui viennent du pied du bord de route,( j'ai prélevé un éclat de racine au printemps),
Peut-être des commentaires?
Concernant la cueillette: les fleurs: entières?
Les boutons en train d'éclore?
En général, peut-on cueillir les fleurs fanées, par exemple celles de la grande camomille?
Merci pour vos réponses, belle journées,
Catherine
sabine dit
bonjour Catherine
Charleval en Provence ? car si Provence , il me parait étrange que de la guimauve sauvage pousse, mais pourquoi pas ;
- oui les fleurs entières dès qu'elles s'ouvrent
- cueillir les fleurs fanées ne me parait pas judicieux , si elles sont fanées , l'énergie passe dans la maturité des graines
je n'ai pas souvenir que l'on cueille les fleurs fanées de la camomille partenelle, en tout cas je n'ai pas cette information