La scutellaire apaise les nerfs
Cet article est paru dans le magazine Plantes & Santé
S'il y a une plante qui recueille toute l'attention des Américains pour la gestion du stress, c’est bien la scutellaire américaine (Scutellaria lateriflora).
Cette petite lamiacée, proche dans sa composition de sa cousine la scutellaire du Baïkal, a des capacités assez étonnantes pour favoriser une relâche de la tension nerveuse et musculaire. Elle est aussi très facile à cultiver au jardin.
Vous avez dit médicinal ?
Imaginez une journée très stressante à la maison ou au travail. En début de journée, vous parvenez à garder votre calme, mais vous sentez la boule au ventre qui commence à vous tourmenter, les épaules et le cou qui se tendent. En fin de journée, plus rien ne passe, vous réagissez au moindre commentaire, le détail le plus insignifiant vous fait monter dans les tours.
C’est ce que j’appelle l’hyperexcitabilité nerveuse. La scutellaire agit vite et bien sur ce type de situation, et elle se prend à la cuillère à café de teinture dans un demi-verre d’eau, si possible le ventre vide.
Contrairement aux adaptogènes (éleuthérocoque, ginseng, rhodiola, ashwagandha, cordyceps...), elle n’agit pas directement sur la production des hormones de stress au niveau des glandes surrénales. Mais c’est une excellente accompagnatrice des adaptogènes. Ces derniers agissent en fond et ont besoin de plusieurs semaines pour pleinement s’exprimer.
La scutellaire, elle, s’utilise de manière ponctuelle lorsque la crise approche. Prenez-la avant un examen, avant un entretien d’embauche et, d’une manière générale, avant tout événement qui va vous tendre comme une corde à violon.
La teinture de plante fraîche peut tuer dans l’œuf une crise de panique. La plante agit aussi sur les tensions musculaires, en particulier au niveau du cou et des épaules, ainsi que sur les mouvements nerveux et musculaires involontaires et parfois incontrôlables, ce que l’on appelle la chorée.
La scutellaire au jardin
Il faudra démarrer la scutellaire de graines, car on ne la trouve pas en jardinerie. La graine est de taille moyenne et se sème d’une manière très classique : griffez votre terre, semez, tassez bien et maintenez humide jusqu’à germination.
- Une colonisatrice -
La plante s’étend par stolon, un peu comme la monarde. En d’autres termes, la scutellaire, si elle se plaît dans votre jardin, aura tôt fait d’en coloniser une partie.
Vous pouvez donc soit lui réserver une parcelle confinée du jardin, la garder en pot de 10 litres par exemple, en plaçant ce dernier en pleine terre, soit faire comme moi, c’est-à-dire garder un œil sur elle et éliminer les nouvelles pousses qui sortent de la zone que vous lui avez réservée.
La plante apprécie un sol fertile, bien amendé en fumier composté et conservant bien l’humidité. N’oubliez donc pas de la pailler afin d’éviter les évaporations intempestives. Un arrosage régulier est important.
Chez moi, en Provence, elle préfère une exposition mi-ombre mi-soleil. Si vous habitez plus au nord, il se peut qu’elle préfère une exposition ensoleillée.
Elle vous fera de belles petites fleurs bleues pendant les mois de juillet et août. On la cueille lorsque les fleurs commencent à apparaître (voir plus loin). Gardez quelques tiges fleuries afin de récupérer les graines. Ces tiges vont ensuite sécher sur la plante et se faner en début d’automne.
Vu que la plante est vivace, rabattez-là au ras du sol en début d’hiver, et n’hésitez pas à utiliser ces parties sèches pour pailler la plante (coupez-les en morceaux avant).
- Comment la propager -
Il est très facile de la propager. Suivez une tige sèche jusqu’à sa base. Vous y trouverez une petite masse racinaire aussi grosse qu’une noix avec quelques minuscules tiges blanches qui sont prêtes à repartir en préparation pour le printemps prochain.
Détachez cette masse racinaire et placez-là à l’endroit choisi. Ceci vous donnera une nouvelle plante au printemps.
- Ramasse et séchage -
Ramassez les sommités fleuries. Éliminez les tiges principales qui sont fibreuses et pauvres en substances actives, mais gardez les feuilles.
Si vous prévoyez d’utiliser la plante pour des infusions, faites sécher les tiges entières en bouquet la tête en bas ou sur des claies de séchage; puis effeuillez-les et placez-les dans des sacs en papier pour la conservation. Ne les gardez pas plus de quelques mois.
À l’atelier : teinture anti-stress
Je vous propose une teinture efficace pour combattre les tensions nerveuses et musculaires ainsi que les états d’anxiété. Il s’agit d’un mélange associant la scutellaire américaine à la passiflore et à l’aubépine.
- Pour la teinture de scutellaire, il vous faudra de l’alcool pur (lire l’encadré ci-dessous) à 96 °. En effet, la plante est riche en humidité et l’eau de la plante va rapidement diluer l’alcool qui, s’il n’est pas assez fort, perdra son pouvoir d’extraction. Pesez les feuilles et sommités fleuries fraîches, puis placez-les dans un saladier et coupez-les le plus finement possible à l’aide d’un ciseau ou d’un sécateur.
- Placez-les ensuite dans un bocal fermant hermétiquement. Pour 100 g de plante, rajoutez 200 ml d’alcool. Placez un galet propre sur la plante si l’alcool ne la recouvre pas, et rajoutez éventuellement un peu d’alcool. Laissez macérer, inutile de remuer pendant la macération. Après deux semaines, filtrez la teinture et pressez le marc.
- Composez le mélange suivant:
- Une moitié de teinture de scutellaire ;
- Un quart de teinture de passiflore, préparée à partir des feuilles sèches à raison de 500 ml d’alcool à 45 0 pour 100 g de plantes (2 semaines de macération en remuant tous les jours) ;
- Un quart de teinture d’aubépine, préparée à partir des sommités fleuries sèches à raison de 500 ml d’alcool à 45 ° pour 100 g de plantes (2 semaines de macération en remuant tous les jours)
- Prenez une cuillère à café de ce mélange dilué dans un demi-verre d’eau dès que vous sentez un épisode de stress ou d’anxiété arriver plusieurs fois par jour si nécessaire. La teinture de scutellaire seule fait aussi bien l’affaire.
Si vous n’avez pas d’alcool pur, faites sécher la plante puis utilisez-la immédiatement. Suivez la même procédure, mais utilisez 500 ml d’alcool à 45° pour 100 g de plante sèche. Et il faudra remuer tous les jours pendant 2 semaines.
Infusion calmante :
Si, pour une teinture, il est conseillé d’utiliser la plante fraîche, on aura recours à la plante sèche pour une infusion. Dosez-là à raison de 30 g par litre, et donc 6 g pour une tasse de 200 ml. Prenez de 2 à 3 tasses par jour. Attention, la plante sèche ne garde ses propriétés que quelques mois, consommez-la donc assez rapidement.
Se procurer...
L’éthanol à 96° est très compliqué à trouver en France. Voici des pistes pour obtenir ce précieux liquide :
- Aller faire un tour dans les pays frontaliers (Italie, Espagne, Belgique, Suisse). L’alcool pur y est en vente libre (limite: 1 litre par personne).
- Avec un numéro de SIRET vous pouvez acheter directement en distillerie. Notez que ceci implique une déclaration aux douanes. Il faudra spécifier ce que vous faites avec cet alcool.
- Notez bien que l'alcool dénaturé à 90° que vous trouverez en pharmacie est impropre à la consommation.
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Thaïs ROTH-MATTONE dit
Bonjour, je me suis trompée dans ma commande de plants à la pépinière des Carlines qui a 4 sortes de scutellaires et qui sont arrivées en très bon état. Je le note ici car elles sont dures à trouver et là la qualité est au rdv ! J'ai donc chez moi Scutellaria galericulata. Vous me confirmez que je peux l'utiliser pour le stress et l'anxiété ? Je ne trouve pas d'infos sur les différences de constituants, savez vous me dire ou je pourrais en trouver ? Merci infiniment.
sabine dit
Bonjour Thaïs
les deux sont interchangeables, pour connaitre les constituants il peut être intéressant de faire une recherche sur pubmed
Julien G. dit
Bonjour,
Je suis un peu perdu...
Le monde des scutellaires a l'air d'être un beau petit bazar. Il semble difficile de trouver des informations fiables.
Coté identifications, on a souvent droit à un véritable florilège de confusions botaniques. Pourtant, S. lateriflora semble avoir des fleurs bien plus petites que ses cousines asiatiques et européennes, les feuilles ne sont pas vraiment pareilles, le port non plus. Certains semenciers vendent S. laterifolia avec une photo de S. galericulata... J'ai acheté et semé pour en avoir le cœur net mais qu'en ferais-je si ce n'est pas la bonne ? Moi perso, un bout de fromage quand j'ai envie de hamburger, non merci (pourtant, je mange bien plus de fromages que de hamburgers).
Coté usages, S. galericulata semble à peine éveiller une vague curiosité chez Fournier, Valnet et d'autres ne la mentionnent même pas et les plus récent n'en font pas plus grand cas. Comparé à l'intérêt porté par les Américains tant modernes qu'anciens sur S. lateriflora et l'intérêt porté par la MTC sur S. baicalensis, l'européen serait-il vraiment passé à coté de telles vertus si S. galericulata avait des propriétés comparables (à S. lateriflora du moins) ? Ginkgo biloba 2.0 !
Une étude (www.nature.com/articles/s41598-022-17586-1) s'intéresse à la présence des flavones dans 4 scutéllaires et semble démontrer des voies de synthèses bien variables qui expliqueraient les différences d'usages (racines en MTC, feuilles chez les américains). J'ai bien l'impression que ça démontre une fois de plus que l'empirique avait raison. Haaa, ce fameux labo "Nez&Cie"... Non, je n'y crois pas, Dioscoride n'aurait pas loupé ça.
Pour finir, en Belgique, la législation a placé S. lateriflora sur liste rouge avec, apparemment, un risque d'hépato-toxicité dont personne ne sait vraiment quoi. Le seule coupable pointé que j'ai croisé dans mes recherches serait la présence de pyrolizidine "probablement" (faudrait pas se mouiller on plus) dû à des frelatages avec du Teucrium chamaedrys (Germandrée petit chêne) clandestin dans les lots incriminés. Payerait-on les pots cassés de quelques ramasseurs myopes/peu scrupuleux ?
Bref, j'ai remis ma toge blanche, acheté mes graines, aiguisé ma serpe d'or et, un jour, les épaules détendues et l'esprit clair, je déclamerais d'une voix altière; "J'ai semé, j'ai goûté, j'ai tranché !". Avé moi-même.
sabine dit
Bonjour Julien
Tout d'abord merci pour votre trait de plume fort appréciable et qui nous a fait sourire
voici la réponse /réflexion de Christophe
Risque d'hépatotoxicité une vieille histoire, lié au fait que l'on a coupé la scutellaire avec de la germandrée dans le passé, c'est elle qui était hépatotoxique. Ne pas rechercher les infos sur les scutellaires du côté français, c'est purement une plante de phyto américaine, c'est dans les vieux ouvrages là-bas qu'il faut chercher, ainsi qu'en MTC mais c'est très différent car c'est la racine de S. baicalensis, et là on est dans des propriétés différentes. La feuille de baicalensis nous ramène dans les mêmes propriétés que les feuilles de lateriflora, galericulata.
Une fois que l'on a vu les trois, on fait la différence facilement. Lateriflora, plus grande en feuilles et fleurs, plus aérienne, galericulata plus petite, compacte. Les deux s'étendent par stolon, comme une bonne menthe. Baicalensis port en touffe, ne s'étend pas par stolon.
Julien L dit
Bonjour tout le monde,
Je viens éclaircir quelques points avec vous.
La scutellaria lateriflora et la scutellaria baicalensis n’ont pas du tout la même utilité car pour traiter la nervosité et l’anxiété la scutellaria lateriflora est très bien car elle a un effet anxiolytique remarquable et ne crée pas de dépendance car au bout de quelques prise d’affilé l’effet s’amoindrit. la scutellaria baicalensis n’est pas adaptée pour traiter l’anxiété car ses effets anxiolytiques sont beaucoup plus faible que sa cousine américaine, on appelle la scutellaria Lateriflora scutellaire casquée car ses fleurs ont une forme de crane humain et ses effets sur le système cardiovasculaire protègent des AVC. Là baicalensis est antioxydant et bonne pour les cheveux et pour avoir des ongles solides mais pour l’anxiété et le stress ça n’ira pas. Concernant ETHNOPLANTS l’horticulteur français il est excellent je vous conseille de commander chez lui il s’appelle Julien comme moi et ses plantes sont de qualité supérieure. Pour commander des teintures mère de scutellaria lateriflora je tiens à vous préciser que 85% de ce qui est vendu sur internet ne fonctionne pas car les extractions ont été mal réalisées sans doute. ( oui je les ai presque tous essayé )
sabine dit
bonjour Julien
merci pour votre partage, juste au passage il est important aussi de dire que la partie aérienne de S. baïcalensis est utilisable de la même manière que S. lateriflora ou S. galericulata, et qu'il faut bien distinguer entre partie aérienne de S. baïcalensis (influence de phyto américaine) et la racine de S. baïcalensis (influence de MTC).
Fanny dit
Bonjour,
Je suis Naturopathe et je découvre cette scutellaire "américaine" que je connaissais bien peu! Ses effets sur les crises de panique sont passionnants et j'aimerais beaucoup la travailler plus en détails.
Par contre, comme la plante n'est pas listée dans la liste de l'ANSM, est-ce que nous avons le droit en tant que praticien de la conseiller?
Pourquoi est-elle si peu connue? autorisée ? utilisée? Ses effets sont pourtant forts intéressants!
Merci pour votre retour
Fanny
sabine dit
bonjour Fanny
la liste concerne les producteurs vendeurs de plantes , par contre rien ne vous empêche de proposer des plantes qui n'y sont pas (voir les plantes de mtc )
Christine dit
Au Canada, on peut trouver des plants de scutellaire chez Richters, en Ontario. Service de commande postale très efficace et belle qualité de plantes.
REMY dit
On trouve des plants de scutellaire (Scutellaria lateriflora) au conservatoire des plantes médicinales de Milly la forêt (91) : je viens d'en acheter pour en installer au jardin :-).
Céline dit
Bonjour quelles sont les différences entre la scutellaire lateriflora et celle du Baïkal ?
sabine dit
bonjour Céline
voici la réponse de Christophe
pour les parties aériennes, S. baïcalensis est légèrement plus forte que S. lateriflora, donc ici on est dans l'axe stress avec des indications nord américaines. Pour la racine de S. baïcalensis, là on est à la fois dans les indications chinoises de Huang Qin, mais aussi dans les indications occidentales basées sur les études scientifiques. Toujours est-il que la racine de S. baïcalensis est un remède totalement différent des parties aériennes.
Maryse dit
Bonjour,
Je vois que l'on peut obtenir des plants de scutellaire ici, mais je ne sais pas si c'est un site recommandable, comme il n'est pas repris dans la liste des pépinières ...
https://www.ethnoplants.com/fr/content/1-livraison
sabine dit
bonjour Maryse
j'en ai entendu parler mais je n'en sais pas plus , il faut tester je pense
Melanie dit
Bonjour Sabine et Christophe, je suis maman d'un enfant qui présente des symptômes depuis l'âge de 6 ans, il en a 9 aujourd'hui. Je souhaite l'aider sans prise en charge médicamenteuse afin d'améliorer la qualité de ses apprentissages scolaires et son bien-être émotionnel. Quel dosage avec cette plante ou la combinaison d'autres me recommandez vous ? Des lectures à me conseiller ?
Merci infiniment pour le soutien précieux de vos informations.
Mélanie
Melanie dit
J'oubliais, il présente des symptômes de la tourette (tics nerveux)
Merci 🙂
sabine dit
bonjour Mélanie
désolée mais je ne peux pas vous renseigner dans le cadre du site, il faudrait vous faire suivre par un naturopathe, car il faut bâtir un protocole qui englobe toute une hygiène de vie (gestion du stress, alimentation, plantes..)
Dacremont Anaïse dit
Bonjour Sabine, bonjour Christophe, j'ai une question sur la scutellaire... Mes graines proviennent de Kokopelli, vendues sous le nom de "scutellaire casquée - Scutellaria lateriflora)... Or, dans l'article de Christophe, la Scutellaria lateriflora est la "scutellaire américaine" tandis que la scutellaire casquée se nomme donc en latin Scutellaria galericulata (je viens de l'apprendre)... Quelle confusion! Bref, j'ai maintenant un doute... Comment savoir si la scutellaire que j'ai dans mon jardin est bel et bien la Scutellaria lateriflora qui apaise les nerfs? Comment les distinguer? Ont-elles des propriétés similaires? Celle que j'ai dans mon jardin semble avoir bien apaisé pas mal de monde autour de moi ceci dit... Merci pour votre éclairage! Au passage... est-ce grave si j'ai oublié de filtrer ma teinture-mère après 3 semaines, et que je l'ai filtrée après un an? Bel été à vous!
sabine dit
Bonjour Anaïse
Les dénominations vernaculaires ne sont jamais exactes, se fier au nom latin. Scutellaria lateriflora est bien active. Pour moi la plus active est Scutellaria galericulata, mais lateriflora fait un très bon travail déjà. Propriétés similaires oui.
Pour la teinture , regardez si il y a un dépôt au fond du bocal, ensuite goutez-le et sentez le , au pire la potion ne sera pas optimale voire inefficace