La graine de chia provient d’une sauge particulière, le saviez-vous ? Vous pouvez même en avoir au jardin (si vous avez beaucoup de soleil).

Elle se gonfle au contact de l’eau, facilite le transit, et vous fournit des acides gras essentiels et des protéines. Petite mais costaude !

Provenance de la graine

J’ai eu la chance ramasser la graine de chia lorsque j’habitais en Californie du Sud. C’est une graine de sauge, mais pas n’importe laquelle. Elle provient soit de Salvia columbariae, soit de Salvia hispanica. C’est une plante qu’on trouve dans le désert californien : Nevada, Nouveau Mexique, dans l’état de Baja California au Mexique.

La graine est petite, ronde et de couleur noire, et on s’est un peu pris d’amour pour cette petite graine ces dernières années. Très facile à trouver dans le commerce ou dans votre magasin bio.

Mise à jour : 

Des producteurs locaux commencent à apparaître. Voir par exemple :

• Agro Logic France
• Chia de France

Utilisation traditionnelle

La partie que je trouve la plus intéressante, c’est l’utilisation traditionnelle de la graine. Donc je vous propose que l’on passe un moment sur cette partie-là, qu’on essaie de comprendre la sagesse des générations Mexicaines et Amérindiennes. C’est plus important que tout le marketing que vous allez trouver aujourd’hui et qui voudrait nous faire croire que c’est la nouvelle graine miracle.

Tout d’abord, l’utilisation de la graine de chia remonte à très loin. Dans l’Amérique précolombienne (pays d’Amérique centrale, sud du Mexique), on utilisait la graine de chia à la fois comme nourriture et comme remède.

Certains historiens pensent que la graine était aussi importante que le maïs avec de vastes étendues de terres consacrées à la culture de cette sauge. Puis lorsque les Espagnols sont arrivés et ont colonisé ces pays, la production dégringole et sera remplacée par la graine de lin.

Pour ramasser la graine, les ramasseurs utilisent un seau et une sorte de raquette. Ils approchent le seau des sommités sèches qui contiennent les graines et ils vont battre ces sommités vers le seau, ce qui va propulser la graine jusque dans le seau.

Saletés dans l’oeil

La première utilisation traditionnelle : les soins des yeux. J’ai déjà entendu cette utilisation plusieurs fois, racontée par des Amérindiens.

A une époque où l’on passait on passait beaucoup de temps autour d’un feu de bois, soit pour cuisiner, soit l’hiver pour se réchauffer, il arrivait qu’on se retrouve avec des débris, des substances irritantes dans l’œil. Ceci pouvait causer une gêne, parfois même une infection.

Le soir, avant d’aller dormir, on plaçait une graine de chia dans l’œil. Pendant la nuit, les mucilages de la graine se gonflaient de liquide et agissaient un peu comme une éponge. Le lendemain au réveil, on retrouvait la graine dans le coin de l’œil, avec une accumulation de saletés.

C’est l’utilisation qui revient le plus souvent dans les études ethnobotaniques, de loin devant tout autre type d’utilisation.

L’énergie du messager

La deuxième utilisation traditionnelle : comme source d’énergie assez remarquable.

Dans certaines tribus amérindiennes, il y avait un rôle important de coursier ou messager, c’est-à-dire la personne qui parcourait de très longues distances pour délivrer des messages entre tribus.

Ces personnes étaient sélectionnées pour leurs capacités physiques et pour leur endurance bien évidemment. Et lorsque le coursier devait partir pour plusieurs jours de course à pied, on lui faisait porter un sac de graines de chia. Et parfois, c’était la seule nourriture qu’il allait absorber.

Mais ça lui suffisait, car la graine est riche en nutriments : glucides, protéines et acides gras essentiels. C’est donc un super-aliment qu’on peut utiliser aujourd’hui, je dirais que le sportif en particulier peut l’utiliser régulièrement en tant que source nutritionnelle.

Farine de graines de chia

Il y avait aussi une forte tradition culinaire autour de la graine. On pouvait transformer la graine en une farine ou en une huile.

Le plus souvent, on faisait griller les graines puis on en faisait une farine qui s’appelle chianpinolli et qu’on incorporait dans les tortillas, les tamales et autres préparations.

On préparait aussi une boisson avec les graines, on faisait donc une sorte de gel avec les mucilages de la graine et on mélangeait avec du jus de citron et du sucre. Et toujours aujourd’hui, au Mexique, certains préparent toujours cette boisson qu’ils appellent « Agua de Chia » ou « Chia fresca ».

Constituants

La graine est intéressante pour plusieurs raisons :

☀︎ Elle est très riche en mucilages qui vont se gonfler au contact de l’eau et former un gel. On va reparler de ce gel un peu plus bas.

☀︎ Elle est riche en fibres, et cette combinaison fibres et mucilages va la rendre intéressante pour les problèmes de transit.

☀︎ Elle riche en acides gras essentiels, en protéines et en glucides. Donc c’est un aliment assez complet en fait.

Au total, on a dans les 20% de protéines, donc source de protéines végétales importante, 30% d’acides gras et dans les 40% de glucides. Un peu de fer, de zinc, de sélénium, de vitamines B, pas mal de magnésium, de potassium et de phosphore.

D’un point de vue acides gras, nous avons 64% sous forme d’oméga 3 et 19% sous forme d’oméga 6. La graine est donc riche en oméga 3.

Gardons tout de même en tête le fait que notre corps a du mal à convertir ces oméga 3 végétaux en EPA et DHA, les substances qui sont activement anti-inflammatoires à l’intérieur de notre corps. En effet, la science nous dit que la conversion se fait autour des 8 à 10%, rarement plus chez l’individu moyen, donc une conversion peu efficace (1).

☀︎ Les graines sont riches en polyphénols, ce qui est intéressant car cela donne à la graine a un pouvoir antioxydant assez puissant. En tant qu’aliment, la graine nous protège donc contre le fameux stress oxydatif dont vous avez peut-être déjà entendu parler.

Une étude démontre que la graine de chia à un pouvoir antioxydant supérieur au moringa (2), un arbre dont la feuille est considéré comme un antioxydant puissant.

Somme toute, un aliment très dense nutritionnellement, très complet.

Constipation chronique

L’étude des constituants nous aide à comprendre l’effet régulateur de la graine de chia sur les problèmes de constipation chronique.

La graine, grâce à ses mucilages, emprisonne une certaine quantité d’eau, ce qui va apporter de l’humidité aux selles car les mucilages sont pas digérés dans l’intestin grêle. Donc les graines agissent un peu comme une petite éponge.

Elles sont riches en fibres aussi et agissent comme laxatif de lest, elles donnent de la consistance aux selles. Ceci est un effet similaire à la graine de lin ou au psyllium, avec un effet nutritionnel en plus (comme la graine de lin).

Au passage, les mucilages vont nourrir la flore intestinale. On ne digère pas ces substances, mais notre flore intestinale en raffole, et vu que les problèmes de constipation chronique peuvent parfois être dus à un déséquilibre de la flore, ceci est un plus. Mais il faut noter aussi que vu qu’on nourrit la flore, il peut y avoir des petits ballonnements chez la personne sensible.

C’est pour cela qu’il est bon d’augmenter graduellement les doses. On peut commencer par une cuillère à café bien remplie des graines sèches, puis monter jusqu’à la cuillère à soupe 2 fois par jour dans un grand verre d’eau. Voir préparation plus bas.

Pour une stratégie complète pour les problèmes de transit, voir mon programme sur la santé du système digestif ici.

Réduction de la glycémie sanguine ?

Maintenant, je vais vous parler d’utilisations que vous allez trouver ici et là et qui me semblent moyennement intéressantes, voire un peu douteuses. Je voulais vous en parler car on doit faire face à énormément de marketing exagéré aujourd’hui, soit pour faire vendre du produit, soit pour créer le buzz.

La première utilisation que je remets en question, c’est pour faire baisser la glycémie sanguine chez les personnes qui ont des problèmes métaboliques, de type pré-diabète de type 2 ou diabète de type 2.

Les mucilages vont agir comme éponge et vont bloquer l’absorption des glucides si on les prend avant les repas. Donc ça revient un peu à dire qu’on veut manger nos glucides sans l’impact sur la glycémie, plutôt que de faire le ménage dans notre alimentation et réduire la charge glycémique.

Alors oui, on pourrait en faire une utilisation ponctuelle, une dose des graines dans un verre d’eau avant un repas chez des amis par exemple. Mais pour le long terme, c’est une stratégie qui ne tient pas la route.

Réduction du cholestérol ?

Idem pour les problèmes de cholestérol élevé. Tout d’abord, on a beaucoup remis en question aujourd’hui la problématique autour du cholestérol, et on réalise que sauf exception, si le foie fabrique beaucoup de cholestérol, c’est qu’il y a une raison. Il faut essayer de la découvrir. Cela peut être un marqueur de dérèglement, mais ce n’est pas la cause du problème.

Ici la graine de chia va agir en partie au travers de la capture des sels biliaires. Donc là encore, on va prendre la graine avant les repas. Pendant le repas la vésicule va relâcher une forte quantité de bile qui est composée en partie de cholestérol, et les fibres et les mucilages des graines de chia vont bloquer la réabsorption du cholestérol.

Ce n’est pas très fin tout ça car on n’essaie pas de comprendre la situation, on prend juste un marqueur et on essaie de le faire baisser d’une manière artificielle.

Détoxifiant ?

Dernier point, on va vous dire que la graine de chia est un grand détoxifiant, qu’elle récure les intestins, qu’elle fait un grand ménage dans le tube digestif, etc.

Oui, elle est riche en fibres et mucilages, c’est vrai. Mais les carottes râpées, c’est bien aussi. Et le gel de guimauve. Et la feuille de chou. Bon vous voyez ce que je veux dire, rien d’original ni d’exceptionnel ici, la graine de chia est riche en fibres et en mucilages, comme beaucoup d’autres aliments.

Préparations

Vous allez laisser tremper les graines dans de l’eau froide pendant plusieurs heures. Vous pouvez commencer par une cuillère à café et monter jusqu’à la cuillère à soupe. Et dès que vous mettez les graines en contact avec l’eau, vous verrez apparaître une couche de mucilages translucides qui se forme tout autour de la graine, c’est intéressant à observer.

Ensuite vous remuez et vous laissez reposer pendant plusieurs heures. Ensuite, après cette période d’attente, vous allez remuer et boire le tout. Vous pouvez faire un verre matin et soir pour commencer et voir si cela vous aide à réguler votre transit.

Pour l’aspect nutritionnel, regardez les recettes sur internet, vous verrez qu’on peut en faire des smoothies, des desserts dans lesquels on combine les graines avec des pruneaux par exemple pour un effet additionnel sur le transit. Donc on peut faire à la fois médicinal et culinaire avec le chia.

Précautions

• Évitez de prendre les graines près d’une prise de médicaments ou de compléments alimentaires car l’effet éponge va balayer une partie de ces substances dans les selles et empêcher une bonne absorption ;
• Certaines études semblent aussi démontrer un effet anticoagulant (3), donc en théorie il y a une interaction possible avec les médicaments anticoagulants.

Ma conclusion

Au final, voici ce que je retiens personnellement : c’est un aliment très intéressant, une riche source végétale de nutriments essentiels.

C’est une plante que l’on peut cultiver au jardin, en particulier dans le sud bien sûr, il faut beaucoup de soleil. Et il faut en cultiver pas mal pour avoir une bonne petite production de graines. Laissez tomber les 4 pieds de sauge qui se courent après. Pour information, vous pouvez les démarrer à partir des graines que vous achetez en magasin bio.

On en trouve relativement facilement dans le commerce, mais d’un point de vue écologique, c’est problématique. J’aimerais qu’on puisse en cultiver chez nous, ça nous donnerait un aliment très intéressant, à intégrer régulièrement dans une boisson, dans une compote de pommes, dans une soupe afin de maintenir une bonne flore intestinale, afin d’obtenir des protéines végétales et des acides gras essentiels qui sont divers et variés.

Références

(1) Williams CM, Burdge G. Long-chain n-3 PUFA: plant v. marine sources. Proc Nutr Soc. 2006 Feb;65(1):42-50. Review. PubMed PMID: 16441943.

(2) Das, Akan. (2017). Advances in Chia Seed Research. Advances in Biotechnology & Microbiology. 5. 10.19080/AIBM.2017.05.555662.

(3) Vuksan V., Whitham D., Sievenpiper J.L., Jenkins A.L., Rogovik A.L., Bazinet R.P., Vidgen E., Hanna A.: Supplementation of conventional therapy with the novel grain Salba (Salvia hispanica L.) improves major and emerging cardiovascular risk factors in type 2 diabetes: results of a randomized controlled trial. Diabetes Care 2007; 30(11):2804-2810.